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16/06/2022 | FRANCE | N°16/26001

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 11, 16 juin 2022, 16/26001


Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 11



ARRET DU 16 JUIN 2022



(n° /2022, pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 16/26001

N° Portalis 35L7-V-B7A-B2JMT



Décision déférée à la Cour : Jugement du 04 novembre 2016 -Tribunal de grande instance de PARIS - RG n° 15/03671



APPELANT



Monsieur [I] [H]

[Adresse 5]

[Localité 4]

né l

e [Date naissance 1] 1977 à [Localité 8] (40)

représenté par Me Caroline HATET-SAUVAL de la SCP NABOUDET - HATET, avocat au barreau de PARIS, toque : L0046

ayant pour avocat plaidant Me R...

Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 11

ARRET DU 16 JUIN 2022

(n° /2022, pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 16/26001

N° Portalis 35L7-V-B7A-B2JMT

Décision déférée à la Cour : Jugement du 04 novembre 2016 -Tribunal de grande instance de PARIS - RG n° 15/03671

APPELANT

Monsieur [I] [H]

[Adresse 5]

[Localité 4]

né le [Date naissance 1] 1977 à [Localité 8] (40)

représenté par Me Caroline HATET-SAUVAL de la SCP NABOUDET - HATET, avocat au barreau de PARIS, toque : L0046

ayant pour avocat plaidant Me Rémy LE BONNOIS, avocat au barreau de PARIS

INTIMEES

CAISSE DE PREVOYANCE ET DE RETRAITE DU PERSONNEL DE LA SNCF

[Adresse 3]

[Localité 2]

n'a pas constitué avocat

SA MATMUT

[Adresse 6]

[Localité 7]

représentée par Me Camille PICARD de la SELARL AKAOUI DEPOIX PICARD, avocat au barreau de PARIS, toque : C673

assistée par Me Marine DEPOIX, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 24 Février 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Mme Françoise GILLY-ESCOFFIER, présidente de chambre, et Mme Nina TOUATI, présidente de chambre assesseur chargée du rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Françoise GILLY-ESCOFFIER, présidente de chambre

Mme Nina TOUATI, présidente de chambre

Mme Sophie BARDIAU, conseillère

Greffier lors des débats : Mme Roxanne THERASSE

ARRÊT :

- Réputé contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Françoise GILLY-ESCOFFIER, présidente de chambre et par Roxanne THERASSE, greffière, présente lors de la mise à disposition à laquelle la minute a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE

Le 3 avril 2009, alors qu'il circulait en motocyclette à [Localité 9], M. [I] [H] a été victime d'un accident de la circulation dans lequel était impliqué un véhicule conduit par M. [J] [Y], assuré auprès de la société Mutuelle assurance des travailleurs mutualistes (la société MATMUT).

Par jugement du 17 mai 2010, la 14ème chambre correctionnelle du tribunal de grande instance de Paris, a déclaré M. [Y] coupable de blessures involontaires, l'a déclaré responsable à concurrence des deux tiers des conséquences dommageables de l'accident et l'a condamné au paiement d'une provision de 4 000 euros.

M. [H] a interjeté appel de cette décision.

Par arrêt du 18 janvier 2011, la cour d'appel de Paris a réformé partiellement le jugement, en déclarant M. [Y] entièrement responsable du préjudice subi par M. [H] et a confirmé le jugement en ses autres dispositions.

Par ordonnance en date du 4 avril 2011, le juge des référés a désigné en qualité d'expert le Docteur [D], qui s'est adjoint comme sapiteur le Professeur [L] [U], stomatologiste, et a clos son rapport le 20 juin 2014.

Par jugement en date du 4 novembre 2016, le tribunal de grande instance de Paris a :

- condamné la société MATMUT à payer à M. [H] la somme de 218 488,41 euros à titre de réparation de son préjudice corporel, en deniers ou quittances, provisions non déduites, en réparation des préjudices suivants :

- dépenses de santé actuelles : 15 771 euros

- frais divers : 7 617,50 euros

- perte de gains professionnels actuels : 3 491,47 euros

- assistance par tierce personne : 8 995,99 euros

- incidence professionnelle : 35 000 euros

- déficit fonctionnel temporaire : 18 012,45 euros

- souffrances endurées : 25 000 euros

- préjudice esthétique temporaire : 4 000 euros

- déficit fonctionnel permanent : 97 600 euros

- préjudice esthétique permanent : 3 000 euros,

- dit que cette somme portera intérêts au taux légal à compter du prononcé de la décision,

- rejeté les demandes au titre des pertes de gains professionnels futurs, des dépenses de santé futures et du préjudice d'agrément,

- condamné la société MATMUT aux dépens, qui seront recouvrés le cas échéant conformément aux dispositions de la loi juillet de 1991 relative à l'aide juridique,

- condamné la société MATMUT à régler à M. [H] la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonné l'exécution provisoire du jugement à concurrence de 2/3 de l'indemnité allouée et en totalité en ce qui concerne les frais irrépétibles et les dépens,

- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

Par déclaration du 2 décembre 2016, M. [H] a interjeté appel de ce jugement.

Par arrêt en date du 10 décembre 2018, la cour d'appel de ce siège a :

confirmé le jugement du tribunal de grande instance de Paris en date du 4 novembre 2016 en ce qu'il a :

- condamné la société MATMUT à payer à M. [H] les sommes suivantes à titre de réparation de son préjudice corporel, en deniers ou quittances, provisions non déduites:

- frais divers : 7 617,50 euros

- incidence professionnelle : 35 000 euros

- préjudice esthétique temporaire : 4 000 euros

- déficit fonctionnel permanent : 97 600 euros

- préjudice esthétique permanent : 3 000 euros,

- dit que ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter du prononcé de la décision,

- condamné la société MATMUT aux dépens, qui seront recouvrés le cas échéant conformément aux dispositions de la loi juillet de 1991 relative à l'aide juridique,

- condamné la société MATMUT à régler à M. [H] la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonné l'exécution provisoire du jugement à concurrence de 2/3 de l'indemnité allouée et en totalité en ce qui concerne les frais irrépétibles et les dépens,

infirmé le jugement pour le surplus,

et statuant à nouveau,

condamné la société MATMUT à payer à M. [H] les sommes suivantes à titre de réparation du préjudice corporel causé par l'accident du 3 avril 2009, provisions et sommes versées en exécution provisoire du jugement non déduites, avec intérêts au taux légal à compter du jugement:

- assistance par tierce personne : 9 536 euros

- perte de gains professionnels : 3 502,27 euros

- déficit fonctionnel temporaire : 20 075,85 euros

- préjudice d'agrément : 4 000 euros

avant dire droit sur la liquidation définitive des postes dépenses de santé actuelles et futures, ordonné un complément d'expertise médicale et désigné pour y procéder le Professeur [L] [U],

condamné la société MATMUT à payer à M. [H] la somme de 15 771 euros à titre de provision à valoir sur le poste des dépenses de santé actuelles,

condamné la société MATMUT à payer à M. [H] la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,

rejeté toutes demandes autres,

condamné la société MATMUT aux dépens d'appel exposés jusqu'à ce jour,

dit qu'il pourra être fait application de l'article 699 du code de procédure civile,

déclaré le présent arrêt commun à la Caisse de prévoyance et de retraite du personnel de la SNCF (la CPRPSNCF).

Le Docteur [X], désigné en remplacement du Professeur [U], a établi son rapport le 29 septembre 2020.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Vu les conclusions de M. [H], notifiées le 5 janvier 2022, aux termes desquelles il demande à la cour de :

Vu la loi du 5 juillet 1985,

- infirmer le jugement du chef des frais de santé actuels et futurs,

statuant à nouveau,

- condamner la société MATMUT à payer à M. [H] les sommes suivantes :

- frais de santé actuels et futurs : 72 418, 25 euros,

y ajoutant :

- condamner la société MATMUT à payer M. [H] les sommes suivantes :

- préjudices extra-patrimoniaux : 2 000 euros

- article 700 du code de procédure civile : 5 000 euros

- ainsi que les entiers dépens de l'instance par application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,

- rendre l'arrêt à intervenir commun à la CPRPSNCF.

Vu les conclusions de la société MATMUT, notifiées le 4 février 2022, aux termes desquelles elle demande à la cour de :

- déclarer l'offre de la société MATMUT satisfactoire,

- déduire la provision versée à hauteur de 15 771 euros au titre des dépenses de santé actuelles,

- débouter M. [H] de toute autre demande.

La CPRPSNCF à laquelle la déclaration d'appel a été signifiée à personne habilitée par acte d'huissier du 23 février 2017 n'a pas constitué avocat mais a adressé à la cour par lettre du 4 mai 2017 le décompte définitif de ses débours.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Par son précédent arrêt du 10 décembre 2018, la cour a confirmé le jugement déféré s'agissant de l'indemnisation des postes du préjudice corporel de M. [H] liés aux frais divers, à l'incidence professionnelle, aux souffrances endurées, au préjudice esthétique temporaire, au déficit fonctionnel permanent et au préjudice esthétique permanent et infirmé cette décision pour le surplus.

La demande de M. [H] tendant à voir infirmer le jugement du chef des frais de santé actuels et futurs est donc devenue sans objet.

Seuls demeurent en discussion, s'agissant des dommages initiaux, l'indemnisation des postes du préjudice corporel de M. [H] liés aux dépenses de santé actuelles et futures pour lesquels la cour a, par son précédent arrêt du 10 décembre 2018, ordonné avant dire droit un complément d'expertise qui a été réalisée par le Docteur [X], stomatologiste.

M. [H] invoque en outre une aggravation de son état dentaire dont il sollicite l'indemnisation.

Sur les dépenses de santé actuelles

Il résulte du décompte définitif de créance de la CPRPSNCF en date du 4 mai 2017 et du relevé de prestations qui y est annexé que cet organisme social a pris en charge à la suite de l'accident du 3 avril 2009 et jusqu'à la date de consolidation initialement fixée au 31 août 2012 des frais d'hospitalisation, médicaux et pharmaceutiques d'un montant total de 63 145,32 euros, incluant la somme de 204,53 euros au titre de frais d'orthodontie dento-faciale et celle de 943,13 euros au titre de «soins conservateurs par dentiste».

M. [H] réclame au titre des frais dentaires demeurés à sa charge une somme de 22 480 euros se décomposant comme suit :

- traitement orthodontique des dents 13, 12, 21, 43, 42, 31 et 32 : 3 100 euros

- vis de traction orthodontiques : 300 euros

- greffe osseuse mandibulaire et symphisaire et pose de gouttière : 1 900 euros

- pose de cinq implants (14, 11, 13, 12 et 21) : 5 000 euros

- restauration prothétique : 4 700 euros

- frais de pose de greffon iliaque : 3 400 euros

- pose de faux moignons et de couronnes céramo-métalliques : 4 080 euros.

Il fait valoir que le Docteur [X] a confirmé la réalisation de ces traitements et leurs montants et précisé que «le montant des honoraires demandés par les différents praticiens (traitement orthodontique, traitement implantaire avec greffe et traitement prothétique) se situe dans la moyenne habituelle et est donc acceptable».

La société MATMUT, tout en indiquant dans le corps de ses conclusions «dépenses de santé actuelles (...) sur justificatifs» et en relevant que si des frais sont restés à la charge de M. [H] après intervention des organismes sociaux, il lui appartient de produire les justificatifs correspondants, indique ensuite que les postes de dépenses retenus par le tribunal dans son jugement du 4 mai 2016 pour un montant de 15 771 euros, réglés au titre de l'exécution provisoire, sont dus et évalue à 7 180 euros la somme restant due au titre du traitement orthodontique et de la pose des faux moignons, étant observé que le montant total des frais dentaires admis représente une somme de 22 851 euros (15 771 + 7 180 euros) supérieure à l'indemnité réclamée par M. [H].

Elle demande enfin à la cour dans le dispositif de ses conclusions de déclarer son offre satisfactoire sans en préciser le montant et de déduire la provision versée à hauteur de 15 771 euros au titre des dépenses de santés actuelles.

Ces conclusions n'étant ni claires ni précises, il convient de les interpréter comme ne comportant aucune offre d'indemnité au titre des dépenses de santés actuelles faute de justification par M. [H] de frais demeurés sa charge après imputation des prestations servies par les organismes sociaux.

Sur ce, l'expert, le Docteur [X], indique dans son rapport du 29 septembre 2020 que M. [H] a présenté à la suite de l'accident du 3 avril 2009, sur le plan stomatologique et maxillo-facial, des plaies du menton ainsi que du nez avec perte de substance, une plaie transfixiante de la lèvre inférieure droite, la perte complète des dents 11 et 14, une importante subluxation des dents 13, 12 et 21 ayant abouti à leur perte, une fracture coronaire amélo-dentinaire de la dent 22, une subluxation des dents 43, 42, 41, 31, 32 et 33 ayant nécessité leur dévitalisation et un traitement radiculaire, des fractures mutifocales de la mandibule (fracture parasymphisaire droite, fracture condylienne droite et fracture sous condylienne et condylienne du côté gauche).

L'expert qui rappelle que les dents traumatisées à l'arcade maxillaire et à l'arcade mandibulaire étaient antérieurement saines, relève que M. [H] a subi le 4 avril 2009 une intervention chirurgicale sur le plan maxillo-facial.

Il indique qu'il a bénéficié d'un traitement orthodontique pour corriger les troubles de l'occlusion et l'articulé dentaire, avec pose initiale sous anesthésie générale en ambulatoire de quatre vis d'ancrage et de traction par le Docteur [M] pour un montant de 300 euros.

Il convient de relever que la facture correspondante en date du 27 juillet 2009 (pièce n°3) est versée aux débats et fait état de l'absence de prise en charge de ces actes par la sécurité sociale.

Le Docteur [X] indique ensuite que le Docteur [O], dentiste spécialisé en orthodontie a établi un devis en date du 19 mars 2010 pour un traitement orthodontique d'un montant total de 3 100 euros d'une durée prévisible de 18 mois et relève ensuite que les honoraires facturés se sont élevés finalement à la somme de 4 341,12 euros, ce que confirme l'examen de la facture établie le 17 juillet 2012 par la SCP des Docteurs [O] et [K] (pièce n° 16).

L'expert judiciaire expose que le Docteur [M] a établi en date du 15 février 2010 un devis prothétique d'un montant total de 9 700 euros prévoyant la pose de cinq implants pour un coût unitaire de 1 000 euros, la mise en fonction de ces implants pour la somme totale de 200 euros et la pose de cinq piliers et de cinq couronnes pour un montant unitaire de 900 euros et qu'il a établi le 15 février 2010 un devis complémentaire d'un montant de 3 400 euros pour la pose d'un greffon iliaque.

Il décrit ensuite les soins qui ont été effectivement réalisés et qui ne correspondent pas totalement au devis initial du 15 février 2010, à savoir :

- une intervention chirurgicale avec hospitalisation du 27 au 28 avril 2011 réalisée par le Docteur [M] qui a effectué une ostéotomie verticale de crête dans le secteur 22 à 15, des greffes d'apposition avec prélèvements ramiques mis en place dans le secteur incisivo-canin droit et en regard de la dent 21 après extraction des quatre dents de sagesse, l'extraction des dents 13, 12 et 21 qui étaient ankylosées (montant des honoraires : 3 400 euros)

- des travaux dentaires sur les dents 43, 42, 41, 31 et 32 qui ont été dépulpées et ont fait l'objet d'un traitement radiculaire sans indication relative à leur coût,

- la pose le 23 novembre 2011 par le Docteur [M] de quatre implants (au lieu des cinq initialement prévus) en position 13, 12, 11 et 21 sous anesthésie générale, l'expert précisant que la dent 14 n'a pas été remplacée faute de place,

- la pose par le Docteur [B], dentiste, de quatre faux moignons et de quatre couronnes céramo-métalliques le 30 août 2012 sur les quatre implants en position 13, 12, 11 et 21 pour la somme de 4 080 euros.

Sont versés aux débats :

- la facture d'un montant de 3 400 euros correspondant à l'intervention chirurgicale réalisée par le Docteur [M] le 27 avril 2011,

- le second devis établi par ce praticien concernant la pose de quatre implants maxillaires avec expansion osseuse crestale pour un montant total de 5 850 euros incluant les frais de salle d'opération, les frais de séjour, la pose et la fourniture des implants et des biomatériaux, les frais d'anesthésie ainsi que la facture du même montant en date du 23 novembre 2011 (pièce n° 14),

- une note du Docteur [B] attestant avoir reçu de M. [H] la somme de 4 080 euros pour des soins effectués le 21 juin 2012, incluant la pose de quatre piliers Procéra d'un montant de 600 euros chacun et de quatre couronnes céramo-métalliques sur implants d'un montant unitaire de 420 euros ; il est précisé qu'il s'agit de soins hors nomenclature et non codifiés par la sécurité sociale.

Le Docteur [X] a conclu que les soins dentaires et travaux prothétiques réalisés étaient justifiés au titre de la réparation des conséquences dommageables de l'accident du 3 avril 2009.

Il résulte de ce qui précède que les frais liés au traitement orthodontique, au traitement implantaire avec greffe et au traitement prothétique rendus nécessaires par l'accident du 3 avril 2009 s'élèvent à la somme de 17 971,12 euros se décomposant comme suit :

- pose initiale sous anesthésie générale de quatre vis d'ancrage et de traction : 300 euros (non prise en charge par la CPRPSNCF au vu du relevé des prestations)

- traitement orthodontique : 4 341,12 euros dont 204,53 euros pris en charge par la CPRPSNCF selon le décompte de créance du 4 mai 2017 et 4 136,59 euros demeurés à la charge de M. [H],

- intervention chirurgicale pour ostéotomie verticale de crête dans le secteur 22 à 15, greffes osseuses, extraction des quatre dents de sagesse, extraction des dents 13, 12 et 21 ankylosées : 3 400 euros (non prise en charge par la CPRPSNCF au vu du relevé des prestations)

- pose de quatre implants maxillaires avec expansion osseuse crestale : 5 850 euros (non prise en charge par la CPRPSNCF au vu du relevé des prestations)

- pose de quatre faux moignons, encore appelés piliers et de quatre couronnes céramo-métalliques sur les quatre implants en position 13, 12, 11 et 21 : 4 080 euros (non prise en charge par la CPRPSNCF au vu du relevé des prestations).

A ces frais s'ajoutent les travaux liés à la dévitalisation des dents 43, 42, 41, 31 et 32 et au traitement radiculaire qui n'ont pas été chiffrés par l'expert [X] mais pour lesquels il n'est pas justifié d'un reste à charge, le relevé des prestations en mature servies par la CPRPSNCF faisant état de «soins conservateurs par dentiste» pour un montant de 943,13 euros.

Les frais dentaires demeurés à la charge de M. [H] représentent ainsi une somme de 17 766,59 euros (300 euros + 4 136,59 euros + 3 400 euros + 5 850 euros + 4 080 euros), provision non déduite.

Sur les dépenses de santé actuelles liées à l'aggravation

Le Docteur [X] a relevé dans son rapport que M. [H] avait indiqué avoir présenté des accidents infectieux en regard des implants maxillaires en position 12 et 13 (incisive latérale supérieure droite et un canine supérieure droite).

A l'examen d'une radiographie panoramique récente, le Docteur [X] a constaté qu'il existait une importante alvéolyse en regard des implants en position 12 et 13 et conclu qu'ils ne pourraient pas être conservés.

Il a procédé à deux évaluations des travaux dentaires nécessaires, dont l'une, établie après réception de devis du Docteur [M], est décrite dans une note de synthèse (pièce n° 1) sur laquelle se fonde M. [H] pour chiffrer ses prétentions.

Le Docteur [X] indique qu'au vu des éléments cliniques, il convient de prévoir au titre de l'aggravation sur le plan dentaire en se référant compte tenu de l'imprécision des devis du Docteur [M] aux prix moyens généralement pratiqués en région parisienne pour des soins dentaires respectant les règles de l'art et les données actuelles de la science :

- la dépose des implants en position 12 et 13 pour la somme totale de 400 euros,

- une prothèse amovible provisoire pour la somme de 230 euros,

- une greffe osseuse pour la somme de 1 000 euros,

- une greffe épithéliale pour la somme de 500 euros ,

- la pose de deux implants en position 12 et 13 pour la somme unitaire de 1 100 euros,

- la pose de faux moignons en position 12 et 13 pour la somme unitaire de 500 euros,

- deux prothèses provisoires implanto-portées pour la somme unitaire de 100 euros

- la pose de deux couronnes céramo-métalliques sur les implants 12 et 13 pour une somme unitaire de 420 euros,

Soit un total de 6 370 euros (400 euros + 230 euros + 1 000 euros + 500 euros + 2 200 euros + 1 000 euros + 200 euros + 840 euros).

M. [H], qui se fonde sur cette évaluation, sollicite la condamnation de la société MATMUT au paiement de la somme de 6 370 euros, cette dernière indiquant dans ses conclusions d'appel accepter de régler la somme demandée.

Il convient dans ces conditions, ajoutant au jugement déféré d'allouer à M. [H] la somme de 6 370 euros au titre des frais implantaires et prothétiques liés au remplacement des deux implants en position 12 et 13.

Sur les dépenses de santé actuelles liées à l'aggravation (liées au renouvellement prothétique)

Exposant que le Docteur [X] a conclu que le renouvellement prothétique était à prévoir tous les 15 ans environ au cours de l'existence sur justificatifs, pour des raisons esthétiques ou fonctionnelles, M. [H] réclame, en infirmation du jugement, une indemnité d'un montant 71 418,25 euros au titre des frais de renouvellement des implants et prothèses se décomposant comme suit :

- 16 030,65 euros au titre des frais de renouvellement des deux implants en position 12 et 13 sur la base d'un coût unitaire global de 6 370 euros capitalisé en fonction de l'euro de rente viagère prévu par le barème de la Gazette du palais 2020 pour un homme âgé de 45 ans en 2022,

- 28 537,60 euros au titre des frais de renouvellement des trois implants en position 14, 11 et 21 sur la base d'un coût unitaire global de 9 555 euros capitalisé en fonction de l'euro de rente viagère prévu par le barème de la Gazette du palais 2020 pour un homme âgé de 35 ans en 2012.

La société MATMUT conclut au rejet de cette demande et fait valoir que le préjudice invoqué n'est pas certain, l'expert ayant retenu que le renouvellement prothétique pourrait avoir lieu pour des raisons esthétiques ou fonctionnelles, sur justificatifs.

Sur ce, il convient de relever en premier lieu que l'avis de l'expert concernant le renouvellement prothétique tous les 15 ans ne porte que sur les prothèses dentaires constituées des couronnes métallo-céramiques et non sur les implants et faux moignons.

Par ailleurs, il résulte du rapport d'expertise que seuls quatre couronnes implanto-portées ont été posée en position 13, 12, 11 et 21 et non cinq comme indiqué par M. [H], l'expert ayant précisé que la dent 14 n'avait pas été remplacée faute de place.

Ceci étant rappelé, même si le Docteur [X] indique que le renouvellement prothétique est à prévoir tous les 15 ans environ au cours de l'existence sur justificatifs, pour des raisons esthétiques ou fonctionnelles, il convient de retenir comme étant d'ores et déjà acquis le principe d'un renouvellement des prothèses dentaires dont la durée de vie est limitée dans le temps et de retenir une périodicité de renouvellement tous les 15 ans, également retenue par le Docteur [G], médecin conseil de M. [H] (pièce n° 5).

Il convient de chiffrer les frais de renouvellement prothétique sur la base d'un coût unitaire de 100 euros pour les prothèses provisoires et de 420 euros pour les prothèses définitives conformément à l'évaluation retenue par le Docteur [X] pour les travaux prothétiques en aggravation.

Il convient de distinguer le renouvellement des couronnes sur implants en position 12 et 13 qui doivent faire l'objet, pour les motifs qui précèdent, d'un remplacement d'ores et déjà indemnisé au titre des dépenses de santé liées à l'aggravation et devront faire l'objet d'un premier renouvellement 15 ans après la date de la liquidation, soit le 9 juin 2037 et celui des couronnes sur implants en position 11 et 21 qui ont été posées le 30 août 2012, dont le coût initial a été indemnisé au titre des dépenses de santé actuelles et qui devront être renouvelées pour la première fois le 30 août 2027.

Il sera fait application du barème de capitalisation de la Gazette du palais 2020 qui est le plus approprié comme reposant sur les données démographiques, économiques et monétaires les plus pertinentes.

Par ailleurs les prothèses implanto-portées posées en août 2012 n'ayant pas été prises en charge par la CPRPSNCF, organisme de sécurité sociale de M. [H], ainsi qu'il résulte du relevé des prestations, il convient de retenir que ces frais futurs seront à la charge de ce dernier.

Au vu de ces éléments, les frais futurs de renouvellement prothétique à la charge de M. [H] s'établissent de la manière suivante :

- pour les prothèses implanto-portées en position 12 et 13

dépense annuelle : (520 euros x 2) / 15 = 69,33 euros

frais de renouvellement : 69,33 euros x 23,346 (euro de rente viagère pour un homme âgé de 59 ans à la date du premier renouvellement le 9 juin 2037) = 1 618,50 euros

- pour les prothèses implanto-portées en position 11 et 21

dépense annuelle : (520 euros x 2) / 15 = 69,33 euros

frais de renouvellement : 69,33 euros x 30,896 (euro de rente viagère pour un homme âgé de 50 ans à la date du premier renouvellement le 30 août 2027) = 2 142,02 euros

Total = 3 760,52 euros.

Sur les souffrances endurées liées à l'aggravation

M. [H] réclame une indemnité de 2 000 euros au titre des souffrances endurées prévisibles liées aux nouveaux travaux prothétiques à prévoir et évaluées à 1,5/7 par le Docteur [X].

La société MATMUT propose d'indemniser ce poste de préjudice à hauteur de la somme de 1 600 euros.

Sur ce, le Docteur [X] a évalué à 1,5/7 les souffrances liées à la réalisation des nouveaux travaux prothétiques et implantaires à prévoir en position 12 et 13.

Eu égard à la nature des travaux dentaires nécessaires incluant la dépose des deux implants, la réalisation d'une greffe osseuse , d'une greffe épithéliale, la pose de nouveaux implants, de faux moignons et deux couronnes céramo-métalliques sur implants, il convient d'évaluer les souffrances endurées à la somme réclamée de 2 000 euros.

Sur les demandes annexes

Il n'ya pas lieu de déclarer le présent arrêt commun à la CPRPSNCF qui est en la cause.

La société MATMUT qui succombe partiellement dans ses prétentions et qui est tenue à indemnisation supportera la charge des dépens d'appel exposés depuis l'arrêt du 10 décembre 2018, y compris les frais du complément d'expertise, avec application de l'article 699 du code de procédure civile.

L'équité commande d'allouer à M. [H] en application de l'article 700 du code de procédure civile une indemnité de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés devant la cour depuis l'arrêt du 10 décembre 2018.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire et par mise à disposition au greffe,

Vu l'arrêt du 10 décembre 2018,

Condamne la société Mutuelle assurance des travailleurs à payer à M. [I] [H] en réparation du dommage initial consécutif à l'accident du 3 avril 2009 les sommes suivantes, provisions non déduites, au titre des postes de préjudice ci-après :

- dépenses de santé actuelles : 17 766,59 euros

- dépenses de santé futures : 3 760,52 euros

Condamne la société Mutuelle assurance des travailleurs à payer à M. [I] [H] en réparation du dommage aggravé les sommes suivantes, provisions non déduites, au titre des postes de préjudice ci-après :

- les frais dentaires liés à l'aggravation : dépenses de santé actuelles : 6 370 euros

- souffrances endurées : 2 000 euros,

Condamne la société Mutuelle assurance des travailleurs à payer à M. [I] [H], en application de l'article 700 du code de procédure civile, une indemnité de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés devant la cour depuis l'arrêt du 10 décembre 2018,

Condamne la société Mutuelle assurance des travailleurs aux dépens d'appel exposés depuis l'arrêt du 10 décembre 2018, y compris les frais du complément d'expertise, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 11
Numéro d'arrêt : 16/26001
Date de la décision : 16/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-16;16.26001 ?
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