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15/06/2022 | FRANCE | N°21/11271

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 1, 15 juin 2022, 21/11271


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 1



ARRET DU 15 JUIN 2022



(n°107/2022, 13 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 21/11271 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CD4CU



Décision déférée à la Cour : Décision du 15 Mars 2021 -Institut National de la Propriété Industrielle - Demande en déchéance - Numéro de référence dossier : DC20-0009





DÉCLARANTE AU RECOURS



Société AC MARCA

BRANDS S.L.

Société de droit espagnol,

Agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège

[Adresse 8]

[Localité 1]

ESPAGNE



Représenté...

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 1

ARRET DU 15 JUIN 2022

(n°107/2022, 13 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 21/11271 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CD4CU

Décision déférée à la Cour : Décision du 15 Mars 2021 -Institut National de la Propriété Industrielle - Demande en déchéance - Numéro de référence dossier : DC20-0009

DÉCLARANTE AU RECOURS

Société AC MARCA BRANDS S.L.

Société de droit espagnol,

Agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège

[Adresse 8]

[Localité 1]

ESPAGNE

Représentée par Me Sylvie KONG THONG de l'AARPI Dominique OLIVIER - Sylvie KONG THONG, avocat au barreau de PARIS, toque : L0069

Assistée de Me Jessica LESCURE de la société FIDAL, avocat au barreau de LYON

EN PRESENCE DE :

MONSIEUR LE DIRECTEUR GÉNÉRAL DE L'INSTITUT NATIONAL DE LA PROPRIÉTÉ INDUSTRIELLE

[Adresse 3]

[Adresse 9]

[Localité 7]

Représenté par Mme [D] [B], chargée de mission, munie d'un pouvoir général

APPELÉES EN CAUSE

S.A.S. HYGIENE ET NATURE

Société au capital de 1 015 392 euros

Immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de DIJON sous le numéro 017 150 103

Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Brad SPITZ de la SELEURL BRAD SPITZ AVOCAT, avocat au barreau de PARIS, toque : C0794

Assistée de Me Maxime BREFORT de la SELEURL BRAD SPITZ AVOCAT, avocat au barreau de PARIS, toque : C0794 substituant Me Me Brad SPITZ

S.A.S.U. AC MARCA IDEAL

Société au capital de 2 008 800 euros

Immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de LYON sous le numéro 971 502 869

Agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège

[Adresse 5]

[Localité 6]

Représentée par Me Sylvie KONG THONG de l'AARPI Dominique OLIVIER - Sylvie KONG THONG, avocat au barreau de PARIS, toque : L0069

Assistée de Me Jessica LESCURE de la société FIDAL, avocat au barreau de LYON

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 19 avril 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Isabelle DOUILLET, présidente, et Mme Françoise BARUTEL, conseillère

Ces magistrates ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Isabelle DOUILLET, présidente de chambre

Mme Françoise BARUTEL, conseillère

Mme Déborah BOHÉE, conseillère.

Greffier, lors des débats : Mme Karine ABELKALON

Le dossier a été communiqué au Ministère public.

ARRÊT :

Contradictoire

par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

signé par Isabelle DOUILLET, Présidente de chambre et par Karine ABELKALON, Greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Vu la décision du 15 mars 2021, par laquelle le directeur général de l'Institut national de la propriété industrielle (INPI) a dit partiellement justifiée la demande en déchéance de la marque française n° 96614247 déposée par la société Hygiène & Nature,

Vu le recours formé le 14 juin 2021 par les sociétés Ac Marca Brands Sl et Ac Marca Ideal (ensemble Marca), et leurs dernières conclusions notifiées par RPVA le 10 février 2022,

Vu les dernières conclusions de la société Hygiène & Nature notifiées par RPVA le 25 février 2022,

Vu les observations écrites du directeur général de l'INPI transmises le 21 février 2022,

Les conseils des parties et la représentante de l'INPI entendues en leurs observations orales reprenant leurs écritures,

SUR CE,

Il est expressément renvoyé à la décision ainsi qu'aux écritures et observations susvisées.

La société de droit espagnol Ac Marca Brands Sl expose qu'elle conçoit, développe et commercialise en France, en Union européenne et dans d'autres pays, des gammes de produits de nettoyants ménagers, soins personnels, colles, produits de bricolage, produits cosmétiques pour la peau ; qu'elle est titulaire et exploitante de plusieurs marques SANYTOL, également exploitées en France par la société Ac Marca Ideal , qui bénéficie d'une licence d'exploitation, régulièrement inscrite auprès du Registre National des Marques à l'INPI.

La société Hygiène & Nature expose qu'elle fait partie du groupe PRODEF, et qu'elle fabrique, conçoit et commercialise des produits d'hygiène et d'entretien liquides en France, à côté de [Localité 10], dans une démarche éco-responsable, notamment sous les marques «ASSAINOL », « LA DROGUERIE D'AMELIE », et « O2 ESSENTIEL ».

La société Hygiène & Nature est titulaire de la marque « ASSAINOL » n° 96 614 247 déposée le 5 mars 1996 et régulièrement renouvelée depuis pour désigner les produits suivants : « Produits chimiques destinés à l'industrie, aux sciences, à la photographie, ainsi qu'à l'agriculture, l'horticulture et la sylviculture. Couleurs, vernis, laques; préservatifs contre la rouille et contre la détérioration du bois; matières tinctoriales; mordants; résines naturelles à l'état brut; métaux en feuilles et en poudre pour peintres, décorateurs, imprimeurs et artistes. Préparations pour blanchir et autres substances pour lessiver; préparations pour nettoyer, polir, dégraisser et abraser; savons. Huiles et graisses industrielles; lubrifiants; produits pour absorber, arroser et lier la poussière. Désinfectants, désodorisants; produits pour la destruction des animaux nuisibles; fongicides, herbicides ».

Prétendant que la marque « ASSAINOL » n'avait pas fait l'objet d'un usage sérieux au

cours des cinq dernières années, les sociétés Marca ont mis en demeure, par courrier recommandé du 3 décembre 2009, la société Hygiène & Nature de communiquer toutes preuves d'usage de la marque « ASSAINOL » pour les produits visés au dépôt.

C'est dans ce contexte que le 7 avril 2020, les sociétés Marca ont présenté une demande en déchéance contre la marque ASSAINOL n°96614247 déposée le 5 mars 1996.

La décision du directeur de l'INPI a retenu que la demande en déchéance est partiellement justifiée et que la société Hygiène & Nature est déclarée déchue partiellement de ses droits sur la marque n° 96614247 à compter du 7 avril 2020 pour les produits suivants : 'Produits chimiques destinés à l'industrie, aux sciences, à la photographie, ainsi qu'à l'agriculture, l'horticulture et la sylviculture. Couleurs, vernis, laques; préservatifs contre la rouille et contre la détérioration du bois; matières tinctoriales; mordants; résines naturelles à l'état brut; métaux en feuilles et en poudre pour peintres, décorateurs, imprimeurs et artistes. Préparations pour blanchir et autres substances pour lessiver; préparations pour polir et abraser; savons. Huiles et graisses industrielles; lubrifiants; produits pour absorber, arroser et lier la poussière. désodorisants; produits pour la destruction des animaux nuisibles, herbicides'.

La cour observe que cette décision n'est pas contestée en ce qu'elle a déclaré la société Hygiène & Nature déchue de ses droits pour les produits suivants :'Produits chimiques destinés à l'industrie, aux sciences, à la photographie, ainsi qu'à l'agriculture, l'horticulture et la sylviculture. Couleurs, vernis, laques; préservatifs contre la rouille et contre la détérioration du bois; matières tinctoriales; mordants; résines naturelles à l'état brut; métaux en feuilles et en poudre pour peintres, décorateurs, imprimeurs et artistes. Préparations pour blanchir et autres substances pour lessiver; savons. Huiles et graisses industrielles; lubrifiants. produits pour la destruction des animaux nuisibles; herbicides'.

La décision est en revanche contestée en ce qui concerne les produits suivants : 'préparations pour nettoyer, dégraisser. Désinfectants ; fongicides ; préparations pour blanchir et autres substances pour lessiver ; préparations pour polir et abraser ; savons ; produits pour absorber, arroser et lier la poussière ; désodorisants'.

Sur l'appréciation de l'usage sérieux

Conformément à l'article L.714-5 du code de la propriété intellectuelle, le titulaire d'une marque peut être déchu de ses droits si, pendant une période ininterrompue de cinq ans, la marque n'a pas fait l'objet d'un usage sérieux en France pour les produits ou services pour lesquels elle est enregistrée et qu'il n'existe pas de justes motifs de non-usage.

L'article L.714-5 du même code précise qu' 'est assimilé à un usage [sérieux] ('.) :

1° L'usage fait avec le consentement du titulaire de la marque ;

(')

3° L'usage de la marque, par le titulaire ou avec son consentement, sous une forme modifiée n'en altérant pas le caractère distinctif, que la marque soit ou non enregistrée au nom du titulaire sous la forme utilisée ;

4° L'apposition de la marque sur des produits ou leur conditionnement, par le titulaire ou avec son consentement, exclusivement en vue de l'exportation.'

En vertu de l'article L.716-3 du code précité, 'L'usage sérieux de la marque commencé ou repris postérieurement à la période de cinq ans mentionnée au premier alinéa de l'article L. 714-5 ne fait pas obstacle à la déchéance si cet usage a débuté ou a repris dans un délai de trois mois précédant la demande de déchéance et après que le titulaire a appris que la demande en déchéance pourrait être présentée.

La déchéance prend effet à la date de la demande ou, sur requête d'une partie, à la date à laquelle est survenu un motif de déchéance. Elle a un effet absolu.'

L'article L.716-3-1 du même code prévoit que la preuve de l'exploitation incombe au titulaire de la marque dont la déchéance est demandée. Elle peut être apportée par tous moyens.

Enfin, l'article R.716-6 1° du même code précise : '(...) Pour les demandes en déchéances fondées sur l'article L.714-5, les pièces produites par le titulaire de la marque doivent établir que la marque contestée a fait l'objet d'un usage sérieux au cours des cinq années précédant la demande en déchéance'.

Il est acquis qu'une marque fait l'objet d'un usage sérieux lorsqu'elle est utilisée conformément à sa fonction essentielle qui est de garantir l'identité d'origine des produits ou des services pour lesquels elle a été enregistrée, aux fins de créer ou de conserver un débouché pour ces produits et services, à l'exclusion d'usages de caractère symbolique ayant pour seul objet le maintien des droits conférés par la marque.

Il convient de prendre en considération, dans l'appréciation du caractère sérieux de l'usage de la marque, l'ensemble des faits et des circonstances propres à établir la réalité de son exploitation commerciale, en particulier les usages considérés comme justifiés dans le secteur économique concerné pour maintenir ou créer des parts de marché au profit des produits ou des services protégés par la marque, la nature de ces produits ou de ces services, les caractéristiques du marché, l'étendue et la fréquence de l'usage de la marque (CJUE,11 mars 2003, Ansul, C 40/01).

Pour examiner le caractère sérieux de l'usage de la marque contestée, il convient de procéder à une appréciation globale en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d'espèce. En effet, l'usage sérieux d'une marque ne peut être démontré par des probabilités ou des présomptions, mais doit reposer sur des éléments concrets et objectifs qui prouvent un usage effectif et suffisant de la marque sur le marché concerné.

Sur la période pertinente

Les sociétés Marca approuvent le point de départ de la période pertinente retenu par l'INPI à savoir le 7 avril 2015, mais contestent le point de départ de la période suspecte en faisant valoir que la société Hygiène et Nature a été informée de leur intention d'intenter une action en déchéance par courrier de mise en demeure du 3 décembre 2019 de sorte que cette date doit être retenue comme point de départ de la période suspecte.

La société Hygiène et Nature soutient également que la période suspecte a démarré le 3 décembre 2019 lorsqu'elle a été informée de l'intention des sociétés Marca d'intenter une action en déchéance, de sorte que la période pertinente se situe selon elle entre le 7 avril 2015 et le 3 décembre 2019.

En l'espèce, la marque contestée a été déposée le 5 mars 1996 et son enregistrement a été publié au BOPI 1996-33. La demande en déchéance a quant à elle été déposée le 7 avril 2020.

La marque contestée ayant été enregistrée depuis plus de cinq ans à la date de dépôt de la demande en déchéance, son titulaire doit prouver l'usage sérieux de sa marque au cours de la période de cinq ans précédant la date de la demande en déchéance soit du 7 avril 2015 au 7 avril 2020 inclus, pour tous les produits et services désignés dans l'enregistrement pour lesquels la déchéance est demandée.

En outre, en application de l'article L.716-3 dernier alinéa du code de la propriété intellectuelle pré-cité, la période suspecte se situe 'dans un délai de trois mois précédant la demande de déchéance et après que le titulaire a appris que la demande en déchéance pourrait être présentée'.

En l'espèce, ainsi que l'a pertinemment retenu le directeur de l'INPI, si le titulaire de la marque contestée a eu connaissance de l'éventualité d'une demande en déchéance formée par le demandeur lors d'un courrier de mise en demeure en date du 3 décembre 2019, il n'en demeure pas moins qu'en application de l'article L. 716-3 susvisé le point de départ de la période suspecte ne peut être antérieur à plus de trois mois de la demande de déchéance, de sorte que l'INPI a retenu à juste titre que le point de départ de la période suspecte est le 7 janvier 2020 soit trois mois avant la demande en déchéance formée le 7 avril 2020.

Sur les éléments de preuve à prendre en considération

Les sociétés Marca font valoir que les pièces tout comme les éléments chiffrés antérieurs au 7 avril 2015 (pièces 1 à 6, 7, 8, 10, 11 et 15) doivent être exclus des débats, seuls ces éléments permettant selon elles de démontrer un usage anecdotique et peu significatif. Elles demandent aussi que soient écartés des débats tous les éléments postérieurs au 3 décembre 2019 (pièces 7, 14 et 15), point de départ de la période suspecte.

La société Hygiène et Nature fait valoir que les éléments relatifs à la période avant le 7 avril 2015 doivent être pris en compte au titre de l'ancienneté de la gamme 'Assainol' dans le cadre d'une appréciation globale. Elle s'oppose aussi à la demande des sociétés Marca d'écarter tous les documents postérieurs au 3 décembre 2019 en arguant que le processus de commercialisation relatif au chiffre d'affaires de 2020 a eu lieu avant la période suspecte.

Le directeur de l'INPI fait valoir que les pièces antérieures au point de départ de la période pertinente, soit le 7 avril 2015, n'ont été prises en compte qu'au titre d'une appréciation globale et uniquement pour constater l'ancienneté dont il faut tenir compte au titre de l'appréciation de l'usage sérieux ; que les actes d'usage pendant la période suspecte ne peuvent être automatiquement exclus, la déchéance n'étant pas encourue si l'usage a été commencé ou repris depuis plus de trois mois avant la demande de déchéance, et que les pièces postérieures au 7 janvier 2020 concernent la refonte de la gamme Assainol qui a commencé bien avant cette date.

Les éléments de preuve fournis par le titulaire de la marque contestée sont notamment, ainsi que relevé dans la décision contestée, les suivants :

- Diverses plaquettes et brochures présentant les produits ASSAINOL LIQUIDE et ASSAINOL SPRAY datées de 2009, 2010, 2013, 2014 et 2017 pour les applications suivantes : 'Désinfecte toutes surfaces et objets / Désodorisant Bactéricide, Fongicide et Virucide', 'réservé à un usage professionnel' portant la mention 'formulé et produit en France' ou 'fabriqué en France' ;

- Huit factures datées de 2015 à 2019 émises par le titulaire de la marque contestée, faisant état de ventes de produits ASSAINOL B 5L à un client situé en Russie ;

- Un bon à tirer d'une étiquette destinée à être apposée sur les produits ASSAINOL LIQUIDE 5L, daté de mai 2015 portant la mention 'formulé et produit en France' ;

- Diverses images des flacons des produits sans date apparente et dont les étiquettes font apparaître l'utilisation du signe ;

- Une brochure datée de janvier 2019 ainsi que 2 brochures sans date apparente présentant 'la nouvelle génération' de désinfectants : 'ASSAINOL DEGRAISSANT DESINFECTANT CUISINE', 'ASSAINOL DEGRAISSANT DESINFECTANT SOL & SURFACES', 'ASSAINOL DETARTRANT DESINFECTANT GEL WC', 'ASSAINOL DETARTRANT DESINFECTANT SALLE DE BAIN', 'ASSAINOL NETTOYANT DESINFECTANT 4 EN 1", ' NETTOYANT DESINFECTANT SOLS & SURFACES ;

- Un email du 18 juin 2019 adressé à l'enseigne Carrefour à la suite d'un rendez-vous de présentation de la nouvelle gamme de produits ainsi qu'un email du 17 octobre 2019 adressé à Système U ;

- Un email du 15 juin 2019 évoquant 'le bon accueil d'Auchan pour Assainol' ainsi qu'un email du 30 septembre 2019 transmettant à l'enseigne Carrefour la présentation de la gamme Assainol qui 'sera disponible à la fin du 1er trimestre 2020" ;

- Un article du journal LSA Commerce & Consommation du 25 novembre 2019 annonçant le lancement de la nouvelle gamme de produits désinfectants ASSAINOL pour le 1er trimestre 2020 et présentant les flacons de produits portant le signe ;

- Un article du journal LSA Commerce & Consommation du 24 mars 2020 présentant le lancement anticipé de la nouvelle gamme de 'nettoyants ménagers ASSAINOL axée sur la désinfection écologique' ainsi que la livraison de 20.000 produits au groupe Casino mi-mars 2020 ;

- Une attestation du commissaire aux comptes du titulaire de la marque contestée certifiant le chiffre d'affaires réalisé pour les produits de la marque ASSAINOL de 2011 à mars 2020;

- Un courrier de l'avocat de la société Ac Marca Brands adressé aux sociétés Hygiène & Nature et Prodef du 19 mars 2020 les mettant en demeure de cesser toute exploitation des produits revêtus de la marque ASSAINOL lui reprochant des actes de contrefaçon de sa marque SANYTOL et des actes de concurrence déloyale.

La cour observe que le directeur de l'INPI a pertinemment retenu que la plupart des éléments de preuve de l'usage sont datés dans la période pertinente.

La cour rappelle que pour examiner le caractère sérieux de l'usage de la marque contestée, il convient de procéder à une appréciation globale en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d'espèce, et notamment l'ancienneté de l'usage.

Le directeur de l'INPI a relevé à juste titre que les pièces antérieures au 7 avril 2015, et notamment des brochures (pièces 1, 3,4, 6 et 10), des références de stock de produits et fiches de produits (pièces 2 et 5), des factures (pièce 7), des photographies de produits et fiches de produits (pièces 8 et 9), une présentation de la société et de ses produits désinfectants (pièce 11), et un historique des chiffres d'affaires de produits (pièce 15), servent à établir l'ancienneté de l'usage, dont il convient de tenir compte dans le cadre d'une appréciation globale du caractère sérieux, de sorte qu'elles ne doivent pas être exclues. La demande des sociétés Marca de ce chef sera donc rejetée.

La cour rappelle en outre que l'article L. 716-3 du code de la propriété intellectuelle précité énonce une période de trois mois précédant la demande de déchéance pendant laquelle, si le titulaire reprend ou commence à exploiter sa marque, il ne pourra pas échapper à la déchéance de ses droits s'il a eu connaissance de l'imminence d'une action en déchéance. La mise en place de cette période dite suspecte a pour seul objet d'empêcher un titulaire de droit de reprendre ou commencer une exploitation de sa marque à la seule fin de faire échec à une action de déchéance qu'il sait être imminente.

Enfin, en application de l'article L. 714-5 la déchéance n'est pas encourue si l'usage de la marque a été commencé ou repris plus de trois mois avant la demande de déchéance.

En l'espèce, ainsi que l'a justement retenu le directeur de l'INPI , les pièces antérieures à la période suspecte relatives aux actes préparatoires de la commercialisation de la nouvelle gamme de produits Assainol, et notamment l'email du 15 juin 2019 (pièce 17) faisant état 'd'un bon accueil d'Auchan pour Assainol', l'email du 30 septembre 2019 (pièce 18) adressé au distributeur Carrefour lui indiquant 'la gamme Assainol sera disponible à la fin du 1er trimestre 2020", l'article du journal professionnel LSA daté du 25 novembre 2019 (pièce 14) mentionnant 'Assainol veut combiner écologie et hygiène....' texte accompagné de trois flacons portant le signe Assainol en couleurs avec un élément figuratif, et la brochure présentant chacun des produits de la nouvelle gamme de nettoyants ménagers Assainol mise à jour en janvier 2019 (pièce 9), démontrent les efforts du titulaire de la marque pour renouveler la gamme de produits et tenter de maintenir ses parts de marché, ces actes préparatoires étant tournés vers l'extérieur en vue d'une exploitation imminente sans lien avec la mise en demeure postérieure du 3 décembre 2019.

Les éléments datés pendant la période suspecte, et notamment l'article du journal LSA du 24 mars 2020 faisant état du lancement et de la livraison de 20 000 produits au groupe Casino mi-mars 2020 et les éléments de chiffre d'affaires de janvier à mars 2020 de l'attestation du commissaire aux comptes (pièce 14-2) viennent confirmer la commercialisation effective de la nouvelle gamme de nettoyants ménagers Assainol dont le lancement a été préparé par des actes extérieurs bien avant la période suspecte, de sorte qu'il n'y a pas lieu de les exclure pour l'appréciation du caractère sérieux de l'usage, pas plus que la pièce 7 relative à des factures qui sont toutes antérieures au point départ de la période suspecte. La demande des sociétés Marca de ce chef sera donc rejetée.

Sur le lieu d'usage

Les sociétés Marca soutiennent que si l'apposition de la marque sur des produits exclusivement en vue de l'exportation est assimilée à un usage sérieux, cette disposition dérogatoire doit être appliquée strictement ; que les factures combinées aux brochures et au bon à tirer ne permettent pas de démontrer une apposition de la marque en France sur les produits ni que les produits ont été produits en France et exportés depuis la France; que les pièces justifiant d'un produit en cours de lancement ne démontrent pas un usage, et que les actes préparatoires internes ne constituent pas un usage sérieux.

La société Hygiène et Nature soutient que les produits livrés en Russie ont été produits en France et exportés depuis la France de sorte qu'elle demande la confirmation de la décision sur ce point, comme en ce qu'elle a retenu que les pièces relatives à la nouvelle gamme de produits 'Assainol' ne sont pas de simples actes préparatoires mais bien des preuves d'une exploitation imminente qui doivent être pris en considération.

La cour rappelle qu'en application de l'article L.714-5 4° du code de la propriété intellectuelle, est assimilée à un usage sérieux, l'apposition de la marque sur des produits ou leur conditionnement, par le titulaire ou avec son consentement, exclusivement en vue de l'exportation.

En l'espèce, les factures de 2015 à 2019 (pièce 7) démontrent la vente de produits "ASSAINOL LIQUIDE B 5L " à destination de la Russie pendant la période pertinente.

Ainsi que l'a retenu l'INPI, ces factures, combinées aux brochures présentant les produits sur lesquels le signe ASSAINOL est apposé, au bon à tirer daté de 2015 d'une étiquette destinée à être apposée sur les flacons 5L, sur laquelle figure le signe ASSAINOL ainsi que la mention " Formulé et produit en France ", démontrent que la marque Assainol dont est titulaire la société Hygiène et Nature, qui est implantée en France, a été apposée en France sur les produits vendus depuis la France à destination de la Russie. Ces éléments doivent donc être pris en compte comme preuve d'usage.

En tout état de cause, et ainsi que l'a relevé le directeur de l'INPI, les emails des 15 juin 2019 et 30 septembre 2019 ainsi que l'article du journal LSA du 25 novembre 2019 se rapportent indéniablement à un usage en France du signe ASSAINOL pour une nouvelle gamme de produits désinfectants. Le moyen opposé de ce chef par les sociétés Marca sera donc rejeté.

Sur l'usage à titre de marque

Les sociétés Marca soutiennent que le terme Assainol figure dans la gamme DEO dédiée à la désinfection ; qu'il est utilisé de manière descriptive comme un qualificatif du produit au même titre que 'Citronnelle' ou 'bactéricide', le terme Assainol faisant référence au terme 'assainir', le signe DEO étant seul utilisé à titre de marque.

La société Hygiène & Nature rétorque que le signe Assainol ne s'apparente pas à une fonction ou description du produit, et qu'il est utilisé dans les publicités pour garantir l'origine des désinfectants.

Le directeur de l'INPI considère que les pièces transmises font état d'un usage à titre de marque ; que le signe semi-figuratif 'Assainol' vaut usage de la marque verbale Assainol, et que la présence du signe Déo, utilisé pour rassembler divers produits portant des marques distinctes dont la marque Assainol, n'est pas de nature à exclure que le signe Assainol soit bien perçu comme une marque permettant de distinguer l'origine d'un produit.

La cour rappelle qu'une marque fait l'objet d'un usage sérieux lorsqu'elle est utilisée conformément à sa fonction essentielle qui est de garantir l'identité d'origine des produits ou des services pour lesquels elle a été enregistrée.

En outre, la Cour de justice de l'Union européenne a dit pour droit dans son arrêt Rintisch du 25 octobre 2012 que le titulaire d'une marque enregistrée peut, aux fins d'en établir l'usage, se prévaloir de son utilisation dans une forme qui diffère de celle sous laquelle cette marque a été enregistrée sans que les différences entre ces deux formes altèrent le caractère distinctif de cette marque, et ce nonobstant le fait que cette forme différente est elle-même enregistrée en tant que marque.

En l'espèce, c'est à juste titre que l'INPI a estimé que l'usage du signe complexe 'Assainol' valait usage de la marque verbale litigieuse dès lors que la présence de couleurs et l'ajout d'éléments figuratifs susceptibles de représenter un toit ainsi qu'une feuille verte sur la lettre I n'altéraient pas le caractère distinctif de la marque verbale ASSAINOL.

C'est également pertinemment que le directeur de l'INPI a considéré qu'il ressortait des brochures présentant les produits ASSAINOL LIQUIDE, ASSAINOL SPRAY et ASSAINOL DOSES que la dénomination DEO est utilisée pour rassembler sous ce nom un panel de produits portant eux-mêmes des marques distinctes, dont la marque ASSAINOL, et qu'il est fréquent que différents produits soient commercialisés sous une même marque ombrelle, la marque contestée étant bien utilisée en tant que marque pour identifier l'origine commerciale des produits sur lesquels elle est apposée. Les moyens opposés par les sociétés Marca de ce chef seront donc rejetés.

Sur l'importance de l'usage

Les sociétés Marca soutiennent qu'après exclusion de toutes les pièces qui ne sont pas dans le période pertinente et de celles qui se trouvent dans la période suspecte, la société Hygiène & Nature ne peut se prévaloir que de cinq factures représentant un chiffre d'affaires de 30 000 euros sur quatre ans et principalement en Russie ; qu'une telle exploitation n'est pas sérieuse et ce d'autant que le marché des produits d'hygiène et d'entretien est estimé à près de 5 milliards d'euros pour les années 2015 à 2017, et qu'il a été en augmentation de 7% entre 2015 et 2018.

La société Hygiène et Nature sollicite la confirmation de la décision de l'INPI qui a retenu que les pièces produites démontraient un usage sérieux pour les 'préparations pour nettoyer, dégraisser. Désinfectants ; fongicides'.

La société Hygiène & Nature soutient en outre que les 'préparations pour polir et abraser ; produits pour absorber, arroser et lier la poussière ; savons; désodorisants' relèvent de la catégorie générale des'préparations pour nettoyer, dégraisser. Désinfectants ; fongicides' ; que ces produits ayant la même nature et la même fonction sont donc similaires ; que lorsque la marque vise une catégorie précise de produits ou services il est suffisant d'exiger une preuve d'exploitation sérieuse pour une partie des ces produits ou services relevant de cette catégorie homogène ; que pour déterminer si des produits ou services appartiennent à une catégorie homogène la destination des produits est le critère pertinent ; qu'en l'espèce les produits en cause visent à nettoyer des surfaces et ne peuvent être considérés comme différents.

Elle sollicite en conséquence l'infirmation de la décision qu'il l'a déchue de ses droits sur la marque litigieuse pour les 'préparations pour polir et abraser ; produits pour absorber, arroser et lier la poussière ; savons; désodorisants'.

Le directeur de l'INPI soutient que tous les éléments produits combinés et pris dans leur ensemble établissent un usage sérieux pour les 'préparations pour nettoyer, dégraisser. Désinfectants ; fongicides'. Sur les autres produits objets de la contestation, l'INPI rappelle qu'un usage pour des produits et services similaires ne permet pas à la marque d'échapper à la déchéance, et s'en remet à l'appréciation de la cour sur ce point.

La cour rappelle que l'usage de la marque peut être minime, à condition qu'il ne soit ni sporadique ni symbolique car destiné au seul maintien des droits sur la marque, et que le caractère sérieux doit être apprécié au regard du secteur économique en cause.

En l'espèce, ainsi que l'a pertinemment relevé le directeur de l'INPI, les factures de 2015 à 2019 ainsi que l'attestation du commissaire aux comptes montrent l'usage du signe ASSAINOL apposé sur des produits exportés en Russie depuis la France pour un chiffre d'affaires H.T d'un peu plus de 36.000 euros sur 5 ans.

Si cet usage peut paraître faible compte tenu de la nature des produits concernés, ce montant peu élevé de chiffre d'affaires est cependant compensé par des preuves d'une commercialisation constante et régulière sur la période de référence ainsi qu'en attestent les factures datées du 14 janvier 2015, du 18 mars 2015, du 29 septembre 2015, du 31 janvier 2017, du 26 juin 2017, du 20 juin 2018, du 13 mai 2019 et du 13 novembre 2019 relatives à la vente de produits sous le signe ASSAINOL.

En outre, l'attestation du commissaire aux comptes faisant état du chiffre d'affaires de 2011 à 2019 ainsi que les brochures antérieures datées de mars 2010, de 2013 et 2014 présentant les produits de désinfection ASSAINOL LIQUIDE et ASSAINOL SPRAY démontrent que la commercialisation de ces produits sous le signe ASSAINOL était déjà effective depuis 2010.

Enfin, comme il a été dit, les pièces relatives aux actes préparatoires de la commercialisation de la nouvelle gamme de produits portant le signe ASSAINOL antérieurement au 7 janvier 2020 (emails des 15 juin et 30 septembre 2019, article LSA du 25 novembre 2019, brochure mise à jour en janvier 2019) montrent les efforts du titulaire de la marque contestée pour renouveler la gamme de produits commercialisée sous le signe ASSAINOL et maintenir des parts de marché par une refonte et un nouveau positionnement de la gamme ASSAINOL dont le lancement est annoncé en septembre et novembre 2019 pour le 1er trimestre 2020.

L'article du journal LSA du 24 mars 2020, la livraison de 20.000 produits au groupe Casino mi-mars 2020 ainsi que les éléments chiffrés de l'attestation du commissaire aux comptes montrant un chiffre d'affaires de 40.000 euros entre janvier et mars 2020 viennent confirmer la commercialisation effective de la nouvelle gamme de nettoyants ménagers ASSAINOL au 1er trimestre 2020.

Le directeur de l'INPI a donc justement considéré que ces éléments combinés et pris dans leur ensemble permettent d'établir que l'usage du signe ASSAINOL ne constitue pas un usage de caractère symbolique ayant pour seul objet le maintien des droits conférés par la marque mais répond bien à une réelle justification commerciale permettant de créer ou de conserver un débouché pour ces produits et services.

La cour rappelle en outre que la preuve de l'usage sérieux doit porter sur chacun des produits et services visés par la marque contesté.

La notion d' 'usage sérieux' est une notion autonome du droit de l'Union (arrêt du 11 mars 2003, Ansul, C-40/01 points 25 à 31).

La CJUE, dans son arrêt C714-18 du 16 juillet 2020, a rappelé (considérant 29) que les dispositions de l'article 42 du règlement n° 207/2009 permettant de réputer la marque antérieure enregistrée pour la seule partie des produits et services pour laquelle la preuve de l'usage sérieux de la marque a été établie, d'une part, ne peuvent pas être interprétées de manière à aboutir à une limitation injustifiée de l'étendue de la protection de la marque antérieure, en particulier dans l'hypothèse où les produits ou les services pour lesquels cette marque a été enregistrée constituent une catégorie suffisamment circonscrite et, d'autre part, doivent être conciliées avec l'intérêt légitime dudit titulaire à pouvoir, à l'avenir, étendre sa gamme de produits ou de services, dans la limite des termes visant les produits ou services pour lesquels la marque a été enregistrée, en bénéficiant de la protection que l'enregistrement de ladite marque lui confère.

Dans cet arrêt la CJUE a précisé (considérant 42) que le consommateur désireux d'acquérir un produit ou un service relevant d'une catégorie ayant été définie de façon particulièrement précise et circonscrite, mais à l'intérieur de laquelle il n'est pas possible d'opérer des divisions significatives, associera à la marque antérieure l'ensemble des produits ou des services appartenant à cette catégorie, de telle sorte que cette marque remplira sa fonction essentielle de garantir l'origine pour ces produits ou services. Dans ces circonstances, il est suffisant d'exiger du titulaire de la marque antérieure d'apporter la preuve de l'usage sérieux de cette marque pour une partie des produits ou des services relevant de cette catégorie homogène.

Elle a ajouté (considérant 43) qu'en ce qui concerne des produits ou des services rassemblés au sein d'une catégorie large, susceptible d'être subdivisée en plusieurs sous-catégories autonomes, il est nécessaire d'exiger du titulaire de la marque antérieure d'apporter la preuve de l'usage sérieux de cette marque pour chacune de ces sous-catégories autonomes.

Elle a précisé (considérant 49 et 50) qu'en ce qui concerne le ou les critères pertinents à appliquer aux fins de l'identification d'une sous-catégorie cohérente de produits ou de services susceptible d'être envisagée de manière autonome, le critère de la finalité et de la destination des produits ou des services en cause constitue un critère essentiel aux fins de la définition d'une sous-catégorie autonome de produits, et que ce critère doit être appliqué d'une manière cohérente et concrète.

En l'espèce, ainsi que l'a dit le directeur de l'INPI, il ressort des pièces susvisées que le signe ASSAINOL est utilisé pour désigner des désinfectants toutes surfaces et objets, des dégraissants et désinfectants pour cuisine, sol et surfaces, des détartrants désinfectants gel wc et salle de bain, des nettoyants désinfectants 4 en 1,de sorte que l'usage sérieux de la marque contestée a été suffisamment démontré pour les 'préparations pour nettoyer, dégraisser. Désinfectants ; fongicides'.

Les 'Préparations pour blanchir et autres substances pour lessiver ; préparations pour polir et abraser ; savons ; produits pour absorber, arroser et lier la poussière ' qui visent à nettoyer des surfaces ou à préparer une surface avant son nettoyage, ont par conséquent la même finalité et la même destination que les 'préparations pour nettoyer, dégraisser; désinfectants'. Elles ne constituent donc pas pour le consommateur visé une catégorie autonome, de sorte que les preuves produites par la société Hygiène & Nature valent usage sérieux pour les 'Préparations pour blanchir et autres substances pour lessiver; préparations pour polir, et abraser; savons ; produits pour absorber, arroser et lier la poussière '. Il s'ensuit que la société Hygiène & Nature ne sera pas déchue de ses droits sur la marque litigieuse pour les 'Préparations pour blanchir et autres substances pour lessiver; préparations pour polir, et abraser ; savons ; produits pour absorber, arroser et lier la poussière' . La décision entreprise sera donc réformée sur ce point.

En revanche, contrairement à ce que soutient la société Hygiène & Nature, les éléments de preuve rapportés ne permettent pas de démontrer l'usage sérieux de la marque à l'égard des 'désodorisants' qui n'a pas la même finalité (enlever des mauvaises odeurs, parfumer) ni la même destination (dans l'air) que les produits pour lesquels la preuve de l'usage sérieux a été rapportée. La décision entreprise sera confirmée sur ce point.

Date d'effet de la déchéance partielle

Les sociétés Marca font valoir que la marque Assainol n'a jamais été exploitée sérieusement depuis sa date de publication le 12 avril 1996 de sorte que la date de déchéance des droits sur la marque doit être fixée au 12 avril 1996.

La société Hygiène et Nature sollicite la confirmation de la décision de l'INPI qui a retenu que la déchéance partielle devait être prononcée à compter du 7 avril 2020, date à laquelle l'INPI a été saisi de la demande de déchéance.

L'INPI rappelle qu'une période ininterrompue de cinq ans doit s'écouler avant que le titulaire n'encourt la déchéance, et qu'à défaut d'une requête expresse la déchéance prend effet à la date de la demande c'est en dire en l'espèce le 7 avril 2020.

La cour rappelle qu'en application de l'article L.716-3 dernier alinéa du code de la propriété intellectuelle, la déchéance prend effet à la date de la demande ou, sur requête d'une partie, à la date à laquelle est survenu un motif de déchéance.

En l'espèce, ainsi que l'a pertinemment dit le directeur de l'INPI, à défaut d'une requête expresse au sens du texte précité, il convient de fixer la date d'effet de la déchéance partielle au 7 avril 2020, date à laquelle a été formée la demande de déchéance devant l'INPI.

Il résulte des développements qui précèdent qu'il y a lieu de confirmer la décision du directeur général de l'Institut national de la propriété industrielle du 15 mars 2021 portant déchéance partielle des droits de société Hygiène & Nature sur la marque française n°96614247 sauf en ce qu'elle l'a déclarée déchue de ses droits pour 'Préparations pour blanchir et autres substances pour lessiver; préparations pour polir, et abraser ; savons ; produits pour absorber, arroser et lier la poussière'.

La procédure de recours contre une décision du directeur général de l'INPI ne donne pas lieu à condamnation aux dépens et à l'application de l'article 699 du code de procédure civile.

Les sociétés Marca, parties perdantes, verront rejeter leur demande présentée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

L'équité commande de faire partiellement droit à la demande formée par la société Hygiène & Nature sur le même fondement, et de condamner les sociétés Marca à lui payer à ce titre la somme globale de 6 000 euros.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

Confirme la décision du directeur général de l'Institut national de la propriété industrielle du 15 mars 2021 portant déchéance partielle des droits de la société Hygiène & Nature sur la marque française n°96614247 sauf en ce qu'elle l'a déclarée déchue de ses droits pour 'Préparations pour blanchir et autres substances pour lessiver; préparations pour polir, et abraser ; savons ; produits pour absorber, arroser et lier la poussière' ;

Condamne les sociétés Marca Brands et Marca Ideal à payer à la société Hygiène & Nature la somme globale de 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Dit que le présent arrêt sera notifié par le greffe aux parties et au directeur général de l'Institut national de la propriété industrielle, par lettre recommandée avec accusé de réception.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 1
Numéro d'arrêt : 21/11271
Date de la décision : 15/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-15;21.11271 ?
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