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10/06/2022 | FRANCE | N°18/07715

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 12, 10 juin 2022, 18/07715


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 12



ARRÊT DU 10 Juin 2022



(n° , 4 pages)





Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 18/07715 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B543U



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 14 Mai 2018 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de PARIS RG n° 17/03665





APPELANTE

Société [3]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représentée pa

r Me Grégory KUZMA, avocat au barreau de LYON, toque : 1309



INTIMEE

CPAM 59 - NORD

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

dispensée de comparaître à l'audience





COMPOSITION DE LA COUR :



En ap...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 12

ARRÊT DU 10 Juin 2022

(n° , 4 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 18/07715 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B543U

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 14 Mai 2018 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de PARIS RG n° 17/03665

APPELANTE

Société [3]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représentée par Me Grégory KUZMA, avocat au barreau de LYON, toque : 1309

INTIMEE

CPAM 59 - NORD

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

dispensée de comparaître à l'audience

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 07 Avril 2022, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Pascal PEDRON, Président de chambre, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

M. Pascal PEDRON, Président de chambre

Mme Sophie BRINET, Présidente de chambre

M. Raoul CARBONARO, Président de chambre

Greffier : Madame Claire BECCAVIN, lors des débats

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé

par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

-signé par Monsieur Pascal PEDRON, Président de chambre, et par Madame Joanna FABBY, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La cour statue sur l'appel interjeté par la société [3] (la société) d'un jugement rendu le 14 mai 2018 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Paris dans un litige l'opposant à la CPAM de Lille-Douai (la caisse).

FAITS, PROCEDURE, PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Les faits de la cause ayant été correctement rapportés par le tribunal dans son jugement au contenu duquel la cour entend se référer pour un plus ample exposé, il suffit de rappeler que la caisse a le 30 mars 2017 pris en charge au titre de la législation professionnelle, après avis favorable d'un CRRMP saisi au titre d'une pathologie non désignée dans un tableau, la maladie « burn out » déclarée le 22 avril 2016 par Mme [H], salariée de la société, au vu d'un certificat médical initial du 21 mars 2016 ; qu'après vaine saisine de la commission de recours amiable en inopposabilité, la société a porté le litige devant le tribunal des affaires de sécurité sociale de Paris, lequel par jugement mixte du 14 mai 2018 a :

-débouté la société de ses moyens d'inopposabilité relatifs à la régularité de la saisine du CRRMP de la région [Localité 4]-Nord-Pas de Calais-Picardie et à la régularité de l'instruction préalable à la décision de prise en charge de la maladie déclarée,

-désigné le CRRMP d'Ile de France afin de recueillir son avis sur l'origine professionnelle de la maladie déclarée le 22 avril 2016 par Mme [H],

-sursit à statuer sur le surplus des demandes.

La société a le 15 juin 2018 interjeté appel de ce jugement qui lui avait été notifié le 04 juin 2018 ; cet appel a été enregistré sous le n°RG 18/07715. La société a le 24 février 2021 procédé à une déclaration d'appel rectificative, laquelle a été enregistrée sous le n°RG 21/02800. L'instance enrôlée sous ce dernier numéro a été le 16 décembre 2021 jointe par mention au dossier à celle suivie sous le n°RG 18/07715.

Par ses conclusions écrites déposées et développées oralement à l'audience par son conseil, la société demande à la cour, par voie d'infirmation du jugement déféré, de :

-juger que la caisse a violé le principe du contradictoire en n'offrant pas à l'employeur le moyen d'obtenir l'avis du médecin du travail avant saisine du CRRMP,

-juger inopposable à son égard la décision de prise en charge du 30 mars 2017,

-condamner la caisse aux dépens,

-en cas de confirmation du jugement en ce qu'il l'a déboutée de ses moyens d'inopposabilité, renvoyer l'affaire devant le tribunal judiciaire de Paris sur la question de l'exposition aux risques et du lien causal, objet du sursis à statuer.

La société fait valoir pour l'essentiel que :

-il appartient à la caisse d'effectuer les démarches nécessaires en vue de la désignation d'un praticien par la victime ou ses ayants droit, la caisse devant nécessairement informer l'employeur des modalités pratiques et des mesures qu'il doit engager pour obtenir la communication du dossier du médecin du travail ; or la caisse ne lui a à aucun moment expliqué les mesures à mettre en 'uvre pour obtenir la communication du rapport du médecin du travail.

-dans le cadre de la saisine du CRRMP, il n'est pas contesté qu'elle a sollicité l'ensemble des pièces du dossier, qui lui ont d'ailleurs été communiquées, en l'absence cependant de l'avis du médecin du travail, pourtant en l'espèce essentiel pour éclairer sur le lien entre la maladie et l'activité professionnelle de la salariée.

-le principe du contradictoire n'a pas été respecté puisqu'elle n'a pas pu avoir accès au rapport du médecin du travail.

Par ses conclusions écrites, la caisse, qui a sollicité par courrier du 28 mars 2022 d'être dispensée de se présenter à l'audience, dispense à laquelle la société ne s'est pas opposée et qui a été accordée en application de l'article 946 du code de procédure civile, demande à la cour de constater qu'elle a respecté le principe du contradictoire et de renvoyer le dossier devant le tribunal judiciaire de Paris, faisant valoir en substance que :

-elle a bien effectué les démarches visées au 5° de l'article D 461-29 du code de la sécurité sociale en sollicitant de Mme [H] par courrier du 28 octobre 2016 les coordonnées du praticien qu'elle entendait désigner ;

-cette dernière n'a pas donné suite à cette sollicitation et elle s'est donc retrouvée dans l'impossibilité matérielle de transmettre l'avis motivé du médecin du travail en l'absence de désignation du praticien visé à l'article D 461-29.

SUR CE, LA COUR

Lorsque la caisse décide de saisir un CRRMP, elle doit en informer la victime ainsi que l'employeur, et ce avant la transmission du dossier au CRRMP;

Selon l'article D. 461-29 du code de la sécurité sociale applicable, dans sa rédaction antérieure au décret n°2016-756 du 7 juin 2016, en cas de saisine par la caisse primaire d'assurance maladie d'un CRRMP en application de l'article L. 461-1, alinéa 5 du code de la sécurité sociale, lorsque l'employeur demande la communication de l'avis motivé du médecin du travail visé au 2° de l'article D. 461-29, il appartient à la caisse d'effectuer les démarches nécessaires en vue de la désignation d'un praticien par la victime ou ses ayants droit.

En l'espèce, la caisse a informé la société le 28 octobre 2016 de la transmission du dossier de Mme [H] au CRRMP (pièce n°13 de la société), précisant notamment à son courrier : « (...) Avant cette transmission, vous avez la possibilité de venir consulter les pièces constitutives du dossier jusqu'au 17/11/2016. Pendant cette période, vous pouvez également formuler des observations qui seront annexées au dossier.

Cependant, l'avis motivé du médecin du travail et le rapport établi par le service médical, ne vous seront communicables que par l'intermédiaire d'un praticien désigné à cet effet par la victime (ou ses ayants droit).

Ce praticien ne peut faire état du contenu de ces documents, avec l'accord de votre salarié(e) ou de ses ayants droit, que dans le respect des règles de déontologie.

Après réception de l'avis du CRRMP qui s'impose à la caisse, une notification de la décision prise vous sera adressée. »

Par courrier du même jour, la caisse a également informé la victime de la transmission du dossier au CRRMP (pièce n°10 de la caisse), y indiquant notamment « (') Avant cette transmission, vous avez la possibilité de venir consulter les pièces constitutives du dossier jusqu'au 17/11/2016. Pendant cette période, vous pouvez également formuler des observations qui seront annexées au dossier. L'employeur, peut demander à consulter les pièces du dossier.

Toutefois, je ne pourrai lui transmettre ces pièces que par l'intermédiaire d'un médecin que vous m'aurez désigné à ce effet.

Aussi, il vous appartient de me communiquer les coordonnées de ce praticien dès réception de ce courrier (...) »

L'avis motivé du médecin du travail figurait au dossier constitué par la caisse transmis au CRRMP (pièce n°15 de la société).

Il est constant que la société a sollicité de la caisse l'ensemble des pièces du dossier et que l'avis du médecin du travail ne lui a pas été communiqué, de quelque façon que ce soit.

Le 30 mars 2017, la caisse a pris en charge au titre de la législation professionnelle, après avis favorable du CRRMP, la maladie déclarée le 22 avril 2016 par Mme [H].

En défense à l'action en inopposabilité de la société, la caisse ne conteste pas à ses écritures qu'elle était tenue d'effectuer les démarches visées au 5° de l'article D 461-29 du code de la sécurité sociale, mais avance simplement avoir effectué lesdites démarches en désignation du praticien, se prévalant à cet effet des termes de son courrier à la victime du 28 octobre 2016 (sa pièce n°10).

Cependant, les démarches visées au 5° de l'article D 461-29 du code de la sécurité sociale nécessitaient que la caisse demande à la victime de désigner un praticien pour consulter l'avis médical du médecin du travail, sans pouvoir se retrancher derrière la demande qu'elle avait formulée à l'occasion de la notification de la saisine du comité dans son courrier de portée informative, adressé le 28 octobre 2016 à la victime, lequel n'avait en l'espèce aucun caractère impératif.

La caisse n'a donc pas effectué les démarches nécessaires en vue de la désignation d'un praticien par la victime ou ses ayants droit au sens de l'article D. 461-29 susvisé.

La caisse ayant manqué aux obligations lui incombant, la décision de prise en charge de la maladie professionnelle, rendue sur avis du CRRMP après consultation notamment de l'avis du médecin du travail, doit être déclarée inopposable à l'employeur.

PAR CES MOTIFS :

LA COUR,

DECLARE l'appel recevable ;

INFIRME le jugement déféré ;

ET statuant à nouveau :

DÉCLARE inopposable à la société [3] la décision de prise en charge au titre de la législation professionnelle de la maladie déclarée le 22 avril 2016 par Mme [H];

CONDAMNE la CPAM de Lille-Douai aux dépens d'appel.

La greffière,Le président.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 12
Numéro d'arrêt : 18/07715
Date de la décision : 10/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-10;18.07715 ?
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