La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

09/06/2022 | FRANCE | N°22/028467

France | France, Cour d'appel de Paris, B1, 09 juin 2022, 22/028467


Copies exécutoires
délivrées aux parties le :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 1 - Chambre 10

ARRÊT DU 09 JUIN 2022

(no , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général :
No RG 22/02846 - No Portalis 35L7-V-B7G-CFGIY

Décision déférée à la cour :
ordonnance du 20 janvier 2022-cour d'appel de PARIS-RG no 20/018531

DEMANDERESSE AU DÉFÉRÉ

S.A. ORANGE
[Adresse 1]
[Localité 5]

Représentée par Me Martial JEAN de la SELARL NABONNE-BEMMER-JEAN, avocat

au barreau d'ESSONNE

DÉFENDERESSE AU DÉFÉRÉ

Madame [O] [U] épouse [L]
[Adresse 3]
[Localité 4]

Représentée par Me Isabelle DE BOURBON-BUSSE...

Copies exécutoires
délivrées aux parties le :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 1 - Chambre 10

ARRÊT DU 09 JUIN 2022

(no , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général :
No RG 22/02846 - No Portalis 35L7-V-B7G-CFGIY

Décision déférée à la cour :
ordonnance du 20 janvier 2022-cour d'appel de PARIS-RG no 20/018531

DEMANDERESSE AU DÉFÉRÉ

S.A. ORANGE
[Adresse 1]
[Localité 5]

Représentée par Me Martial JEAN de la SELARL NABONNE-BEMMER-JEAN, avocat au barreau d'ESSONNE

DÉFENDERESSE AU DÉFÉRÉ

Madame [O] [U] épouse [L]
[Adresse 3]
[Localité 4]

Représentée par Me Isabelle DE BOURBON-BUSSET DE BOISANGER de la SELARL BOURBON- BUSSET - BOISANGER, avocat au barreau de FONTAINEBLEAU

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 905 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 13 mai 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Raphaël TRARIEUX, conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Monsieur Raphaël TRARIEUX, conseiller faisant fonction de président
Madame Catherine LEFORT, conseiller
Madame Fabienne TROUILLER, conseiller

GREFFIER lors des débats : Monsieur Grégoire GROSPELLIER

ARRÊT
-contradictoire
-par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
-signé par Monsieur Raphaël TRARIEUX, conseiller faisant fonction de président et par Monsieur Grégoire GROSPELLIER, greffier, présent lors de la mise à disposition.

La société Orange est appelante, selon déclaration du 17 décembre 2020, et suivant une autre déclaration d'appel du 15 septembre 2021, d'un jugement rendu par le juge de l'exécution de Fontainebleau le 1er décembre 2020 ayant liquidé une astreinte instituée à son encontre par un jugement daté du 11 juin 2019 à hauteur de 17700 euros, et condamné l'intéressée à payer à Mme [L] la somme de 100 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive et 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Les deux instances ont été jointes le 6 janvier 2022.

Suivant ordonnance en date du 20 janvier 2022, le président de la chambre 1-10 de cette Cour a déclaré recevables les conclusions au fond notifiées par Mme [L] le 3 août 2021 et également ses conclusions d'incident ; la caducité de la déclaration d'appel de la société Orange du 17 décembre 2020 a été prononcée ; enfin ce magistrat s'est déclaré incompétent pour statuer sur la recevabilité du second appel.

Le 3 février 2022 la société Orange a formé un déféré à l'encontre de cette ordonnance. A l'appui de son recours, elle a exposé :

- que s'agissant du second appel, des conclusions avaient été adressées au conseiller de la mise en état alors que si en matière d'appels formé contre des décisions du juge de l'exécution la procédure à bref délai devait être appliquée, aucun avis de fixation à bref délai ne lui avait été remis ;
- que le président de la chambre avait excédé ses pouvoirs en statuant sur le second incident ;
- que s'agissant de la déclaration d'appel du 17 décembre 2020, l'absence de désignation de l'intimé ne la rendait pas irrégulière, alors qu'une régularisation pouvait intervenir, par la déclaration d'appel du 15 septembre 2021 ;
- que le greffe n'avait pas le pouvoir de rejeter une constitution, étant rappelé que celle-ci était tout d'abord notifiée entre avocats puis remise au greffe ;
- que seule la notification entre avocats par l'intimé était opposable à l'appelant, les conclusions devant être notifiées ensuite ;
- qu'en tout état de cause, la notification d'une déclaration d'appel à un conseil même irrégulièrement constitué n'était pas sanctionnée par la caducité de la déclaration d'appel ;
- que la notification des conclusions d'appel du 18 janvier 2021 était donc régulière, l'intimé devant répliquer au plus tard le 18 février 2021, et que l'intéressée ne s'étant exécutée que le 3 août 2021, soit hors délais, ses écritures étaient irrecevables.

La société Orange a demandé à la Cour d'infirmer l'ordonnance, de dire n'y avoir lieu à prononcer la caducité de la déclaration d'appel du 17 décembre 2020, et de déclarer irrecevables les conclusions adverses ; enfin elle a réclamé la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Mme [L], selon conclusions notifiées le 5 mai 2022, a exposé :

- que sa constitution en date du 12 janvier 2021 avait été rejetée par le greffe ;
- que la société Orange ne lui avait pas signifié sa déclaration d'appel, en contravention avec les dispositions de l'article 905-1 du code de procédure civile ;
- qu'elle ne lui avait pas non plus signifié ses conclusions d'appelante à partie ;
- que son appel était dès lors caduc ;
- qu'elle avait pu finalement constituer avocat le 6 juillet 2021, la société Orange lui signifiant alors ses conclusions le 9 juillet suivant ;
- que ses conclusions d'incident avaient tout d'abord été déposées devant le conseiller de la mise en état de la chambre 5-11 de cette Cour à qui l'affaire avait été au départ distribuée ;
- qu'ensuite le dossier avait été transmis à la présente chambre et orienté en procédure à bref délai s'agissant d'un appel d'une décision du juge de l'exécution ;

- que la notification des conclusions de la société Orange au conseil de Mme [L] le 18 janvier 2021 était irrégulière vu que Maître de Bourbon-Busset n'était alors pas constituée ;
- que ladite notification ne faisait donc pas courir le délai d'un mois imparti à l'intimée pour répondre ;
- que l'omission de la mention de l'intimée dans la première déclaration d'appel n'était pas le fruit d'une difficulté informatique, mais était bel et bien imputable au conseil de la société Orange ;
- que cette première déclaration d'appel était nulle ;
- que suite à la deuxième déclaration d'appel, celle du du 15 septembre 2021, bien que n'ayant pas reçu d'avis de fixation à bref délai, la société Orange avait conclu au fond le 12 octobre 2021, et Mme [L] avait répondu le 24 septembre 2021 sur l'incident et le 10 novembre 2021 soit dans les délais ;
- que les conclusions d'appelant du 9 juillet 2021 avaient été signifiées bien plus d'un mois après l'orientation du dossier devant le conseiller de la mise en état, le 18 mars 2021 ;
- qu'elle s'en rapportait à justice sur le point de savoir si en matière de procédure à bref délai, le président de la chambre avait le pouvoir de statuer sur l'irrecevabilité de l'appel ou si la demande y relative devait être présentée devant la Cour ;
- que sur ce point, le jugement ayant été notifié le 3 décembre 2020 à la société Orange en lettre recommandée avec demande d'avis de réception, la seconde déclaration d'appel du 15 septembre 2021 avait été formée hors délais.

Mme [L] a demandé à la Cour de confirmer l'ordonnance du 20 janvier 2022, et dans le cas contraire, de prononcer l'irrecevabilité de la déclaration d'appel du 15 septembre 2021. Elle a conclu au rejet des demandes de la société Orange et à sa condamnation au paiement de la somme de 5 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

MOTIFS

Selon les dispositions de l'article 901 du code de procédure civile en sa version alors applicable, la déclaration d'appel est faite par acte contenant, outre les mentions prescrites par l'article 57, et à peine de nullité :

1o La constitution de l'avocat de l'appelant ;

2o L'indication de la décision attaquée ;

3o L'indication de la cour devant laquelle l'appel est porté ;

4o Les chefs du jugement expressément critiqués auxquels l'appel est limité, sauf si l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible.

Elle est signée par l'avocat constitué. Elle est accompagnée d'une copie de la décision. Elle est remise au greffe et vaut demande d'inscription au rôle.

L'article 57 dudit code prévoit que lorsqu'elle est formée par le demandeur, la requête saisit la juridiction sans que son adversaire en ait été préalablement informé. Lorsqu'elle est remise ou adressée conjointement par les parties, elle soumet au juge leurs prétentions respectives, les points sur lesquels elles sont en désaccord ainsi que leurs moyens respectifs.

Elle contient, outre les mentions énoncées à l'article 54, également à peine de nullité :
-lorsqu'elle est formée par une seule partie, l'indication des nom, prénoms et domicile de la personne contre laquelle la demande est formée ou s'il s'agit d'une personne morale, de sa dénomination et de son siège social ;

-dans tous les cas, l'indication des pièces sur lesquelles la demande est fondée.

Elle est datée et signée.

Et l'article 54 en sa version alors applicable prévoit que la demande initiale est formée par assignation ou par requête remise ou adressée au greffe de la juridiction. La requête peut être formée conjointement par les parties.

Lorsqu'elle est formée par voie électronique, la demande comporte également, à peine de nullité, les adresse électronique et numéro de téléphone mobile du demandeur lorsqu'il consent à la dématérialisation ou de son avocat. Elle peut comporter l'adresse électronique et le numéro de téléphone du défendeur.

A peine de nullité, la demande initiale mentionne :

1o L'indication de la juridiction devant laquelle la demande est portée ;

2o L'objet de la demande ;

3o a) Pour les personnes physiques, les nom, prénoms, profession, domicile, nationalité, date et lieu de naissance de chacun des demandeurs ;

b) Pour les personnes morales, leur forme, leur dénomination, leur siège social et l'organe qui les représente légalement ;

4o Le cas échéant, les mentions relatives à la désignation des immeubles exigées pour la publication au fichier immobilier ;

5o Lorsqu'elle doit être précédée d'une tentative de conciliation, de médiation ou de procédure participative, les diligences entreprises en vue d'une résolution amiable du litige ou la justification de la dispense d'une telle tentative ;

6o L'indication des modalités de comparution devant la juridiction et la précision que, faute pour le défendeur de comparaître, il s'expose à ce qu'un jugement soit rendu contre lui sur les seuls éléments fournis par son adversaire.

Contrairement à ce que soutient l'appelante, la mention de l'identité complète de l'intimée devait donc figurer dans la déclaration d'appel.

Dans la déclaration d'appel du 17 décembre 2020 le nom de Mme [L] n'était pas mentionné ; par contre une annexe à ce document précisait bien que la demande était formée à l'encontre de "[O] [U] épouse [L], née le [Date naissance 2]/1962 à [Localité 6], de nationalité française, domiciliée [Adresse 3] exerçant la profession de Collaboratrice administrative et juridique".

L'article 8 du décret du 20 mai 2020 précise que : le message de données relatif à une déclaration d'appel provoque un avis de réception par les services du greffe, auquel est joint un fichier récapitulatif reprenant les données du message. Ce récapitulatif accompagné, le cas échéant, de la pièce jointe établie sous forme de copie numérique annexée à ce message et qui fait corps avec lui tient lieu de déclaration d'appel, de même que leur édition par l'avocat tient lieu d'exemplaire de cette déclaration lorsqu'elle doit être produite sous un format papier.

Dès lors, il faut considérer que la déclaration d'appel du 17 décembre 2020, annexe comprise, laquelle faisait corps avec ladite déclaration d'appel, était complète et comportait bien l'indication du nom ainsi que des coordonnées de l'intimée, Mme [L]. Par ailleurs, la nullité de ladite déclaration d'appel n'a jamais été prononcée. Dans ces conditions, la constitution de l'avocat de Mme [L] en date du 12 janvier 2021 était régulière et n'aurait pas dû être rejetée. En tout état de cause le conseil de l'appelant était dûment informé de l'intervention d'un avocat au soutien des intérêts de Mme [L].

Les premières conclusions d'appelante notifiées à Maître Bourbon Busset le 18 janvier 2021, soit dans le mois de la déclaration d'appel, sont donc régulières, et si l'avis de fixation du greffe en date du 26 janvier 2021 leur est postérieur, la société Orange n'était pas tenue de signifier sa déclaration d'appel à la partie adverse, comme il est dit à l'article 905-1 alinéa 1 du code de procédure civile ; elle n'avait pas non plus à notifier une nouvelle fois ses conclusions à l'intimée.

L'appelante ayant conclu dans les délais à elle impartis, la première déclaration d'appel n'est pas caduque et l'ordonnance frappée du déféré sera infirmée en ce sens.

S'agissant des conclusions de l'intimée : quand bien même l'appelante avait elle conclu avant l'envoi de l'avis de fixation par le greffe, ses conclusions faisaient courir le délai d'un mois imparti à la partie adverse pour déposer ses propres conclusions, comme prévu à l'article 905-2 alinéa 2 du code de procédure civile. En effet, ce texte n'édicte aucune distinction selon que l'appelant a conclu après ou avant l'avis de fixation délivré par le greffe. Mme [L] devait donc normalement déposer ses conclusions d'intimée au plus tard le 18 février 2021. Ses conclusions d'incident sont datées du 13 juillet 2021 et ses conclusions au fond du 3 août 2021, elles sont donc théoriquement hors délais. Toutefois, il résulte de ce qui précède que la première constitution de Mme [L], celle du 12 janvier 2021, ayant été rejetée par le greffe, elle n'avait pas accès au dossier via le RPVA et ne pouvait donc pas matériellement conclure. Ce n'est que le 6 juillet 2021, date de sa seconde constitution, qu'elle a été en mesure de le faire. Or la société Orange avait redéposé ses conclusions le 9 juillet 2021 via le RPVA et Mme [L], alors régulièrement constituée, a été destinataire de ces conclusions à cette date et pouvait enfin y répondre. Il faut donc considérer qu'elle disposait d'un délai d'un mois à compter du 9 juillet 2021 pour conclure en réponse.Ses conclusions d'incident sont datées du 13 juillet 2021 et ses conclusions au fond du 3 août 2021 ; elles ont été notifiées moins d'un mois après le 9 juillet 2021 et sont dès lors recevables. L'ordonnance est confirmée de ce chef.

S'agissant de la compétence du président de la chambre pour statuer sur la recevabilité du second appel : dès lors que la première déclaration d'appel a été régularisée dans les délais et n'est pas caduque, la question de la recevabilité du second appel est dépourvue d'intérêt. Il n'y a pas lieu de statuer sur ce point.

L'équité ne commande pas de faire application de l'article 700 du code de procédure civile au bénéfice de la société Orange ou de Mme [L].

Mme [L] sera condamnée aux dépens de déféré.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Statuant dans les limites du déféré,

- INFIRME l'ordonnance en date du 20 janvier 2022 en ce qu'elle prononcé la caducité de la déclaration d'appel de la société Orange du 17 décembre 2020 ;

et statuant à nouveau :

- DIT que la déclaration d'appel du 17 décembre 2020 n'est pas caduque ;

- CONFIRME l'ordonnance en ce qu'elle a déclaré recevables les conclusions d'incident de Mme [L] en date du 13 juillet 2021 ainsi que ses conclusions au fond en date du 3 août 2021 ;

- CONSTATE que le moyen tiré de l'irrecevabilité du second appel est sans objet ;

- REJETTE les demandes de la société Orange et de Mme [L] en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- CONDAMNE Mme [O] [L] aux dépens de déféré.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : B1
Numéro d'arrêt : 22/028467
Date de la décision : 09/06/2022
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 20 janvier 2022


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2022-06-09;22.028467 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award