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09/06/2022 | FRANCE | N°21/166417

France | France, Cour d'appel de Paris, B1, 09 juin 2022, 21/166417


Copies exécutoires
délivrées aux parties le :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 1 - Chambre 10

ARRÊT DU 09 JUIN 2022

(no , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général :
No RG 21/16641 - No Portalis 35L7-V-B7F-CELOZ

Décision déférée à la cour :
jugement du 08 juillet 2021-juge de l'exécution de PARIS- RG no 21/80753

APPELANTE

Madame [N] [K] épouse [M]
[Adresse 3]
[Localité 7]

Représentée par Me Elise ORTOLLAND de la SEP ORTOLLAND, avocat au bar

reau de PARIS, toque : R231
Ayant pour avocat plaidant Me Soufiane BOUBAKER, avocat au barreau de GRASSE

INTIMÉE

S.A. SOCIETE ANONYME DE LA...

Copies exécutoires
délivrées aux parties le :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 1 - Chambre 10

ARRÊT DU 09 JUIN 2022

(no , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général :
No RG 21/16641 - No Portalis 35L7-V-B7F-CELOZ

Décision déférée à la cour :
jugement du 08 juillet 2021-juge de l'exécution de PARIS- RG no 21/80753

APPELANTE

Madame [N] [K] épouse [M]
[Adresse 3]
[Localité 7]

Représentée par Me Elise ORTOLLAND de la SEP ORTOLLAND, avocat au barreau de PARIS, toque : R231
Ayant pour avocat plaidant Me Soufiane BOUBAKER, avocat au barreau de GRASSE

INTIMÉE

S.A. SOCIETE ANONYME DE LA VILLA GAL
[Adresse 5]
[Localité 6]

Représentée par Me Stéphane BONIFASSI, avocat au barreau de PARIS, toque : A619

INTERVENANTE

S.A.R.L. [F] ESTATES MANAGEMENT
[Adresse 2]
[Localité 1]

Représentée par Me Charles-Hubert OLIVIER de la SCP LAGOURGUE et OLIVIER, avocat au barreau de PARIS, toque : L0029
Ayant pour avocat plaidant Me Romain OLIVARES, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 11 mai 2022, en audience publique, devant la cour composée de :
Madame Bénédicte PRUVOST, président de chambre
Madame Catherine LEFORT, conseiller
Monsieur Raphaël TRARIEUX, conseiller

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Monsieur Raphaël TRARIEUX, conseiller, dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.

GREFFIER lors des débats : Monsieur Grégoire GROSPELLIER

ARRÊT
-contradictoire
-par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
-signé par Bénédicte PRUVOST, président de chambre et par Grégoire GROSPELLIER, greffier présent lors de la mise à disposition.

*****
Selon ordonnance sur requête en date du 6 février 2017, le juge de l'exécution du Tribunal judiciaire de Paris a autorisé Mme [M] à prendre une inscription d'hypothèque judiciaire provisoire portant sur un bien appartenant à la SA de la Villa Gal et sis à [Localité 9] (Alpes maritimes), [Adresse 4], pour sûreté de la somme de 280 000 euros. Cette inscription a été publiée le 4 avril 2017 auprès du service de la publicité foncière de [Localité 8] 4, et dénoncée à la SA de la Villa Gal le 7 avril 2017.

La SA de la Villa Gal ayant contesté cette mesure devant le juge de l'exécution de Paris, celui-ci a suivant jugement daté du 8 juillet 2021 ordonné la mainlevée de l'inscription d'hypothèque judiciaire provisoire, et rejeté les demandes en application de l'article 700 du code de procédure civile, Mme [M] étant condamnée aux dépens. Pour statuer ainsi, le juge de l'exécution a relevé que si Mme [M] prétendait avoir prêté à la SA de la Villa Gal les sommes de 100 000 euros et 180 000 euros qui avaient transité par le compte de la société [F] Estates management, car la SA de la Villa Gal ne disposait pas de compte bancaire, une expertise ordonnée par le juge du fond avait indiqué qu'il n'en était rien, alors même que si Mme [M] présentait des avis de virement depuis son compte ouvert en les livres de la société [F] Estates management vers celui de la SA de la Villa Gal, elle ne démontrait pas en quoi elle aurait été créancière de celle-ci.

Par déclaration en date du 17 septembre 2021, Mme [M] a relevé appel de ce jugement. Par acte en date du 24 mars 2022, elle a assigné la société [F] Estates management en intervention forcée devant la Cour.

En ses conclusions notifiées le 4 février 2022, Mme [M] a exposé :
- qu'elle avait prêté à la SA de la Villa Gal les sommes de 100 000 euros et 180 000 euros les 15 septembre 2014 et 17 septembre 2015 ;
- que la SA de la Villa Gal ne détenant pas de compte bancaire en France, c'était celui de la société [F] Estates management, qui durant 10 années avait servi de banque à la SA de la Villa Gal, qui avait reçu les fonds prêtés, les sommes étant créditées depuis le compte ouvert par Mme [M] dans les livres de la société [F] Estates management vers celui de la SA de la Villa Gal ;
- que le Tribunal de commerce de Paris était actuellement saisi d'une action au fond intentée par ses soins et avait ordonné, par jugement du 8 novembre 2018, un sursis à statuer dans l'attente du rapport d'expertise qui avait été ordonné par le Tribunal de commerce de Nice par décision du 30 octobre 2017 ;
- que le rapport d'expertise sur lequel le juge de l'exécution s'était fondé ne lui était pas opposable, puisqu'elle n'y était pas partie ;
- que contrairement à ce qu'avait estimé le premier juge, elle rapportait bien la preuve du versement des sommes en cause sur le compte de la société [F] Estates management ;
- qu'il existait un péril sur le recouvrement de sa créance, dans la mesure où la SA de la Villa Gal était détenue par des personnes morales ayant leur siège hors de France, la majorité de ses dirigeants étant étrangers, jusqu'à ce qu'un jugement rendu par le Tribunal d'instance de Menton mette en évidence un montage juridique discutable, au titre d'un bail frauduleux, après quoi la SA de la Villa Gal s'était empressée de remplacer ses dirigeants arméniens par des dirigeants français ;
- que tout avait été fait pour disssimuler l'identité du bénéficiaire économique de la villa ;
- que l'immeuble sur lequel avait été prise l'inscription d'hypothèque judiciaire provisoire litigieuse était grevé de diverses sûretés ;
- que plusieurs des associés de la SA de la Villa Gal avaient été placés en liquidation judiciaire ;
- que la SA de la Villa Gal avait finalement vendu l'immeuble susvisé, le 14 septembre 2018.

Mme [M] a demandé à la Cour de :
- infirmer le jugement en toutes ses dispositions ;
- confirmer l'ordonnance sur requête du 6 février 2017 ;
- rejeter la demande de mainlevée de l'inscription d'hypothèque judiciaire provisoire litigieuse ;
- condamner la SA de la Villa Gal au paiement de la somme de 5 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par ses conclusions notifiées le 12 avril 2022, la SA de la Villa Gal a soutenu :
- que la société [F] Estates management était un agent immobilier chargé de l'administration de la villa Rose ;
- que des conflits étaient apparus entre les associés de la SA de la Villa Gal et M. [F], à la suite de quoi, en 2016, il avait été mis fin au mandat confié à la société [F] Estates management ;
- que selon jugement du 21 juin 2017, le Tribunal de commerce de Nice avait jugé que ce mandat d'administration avait bien été révoqué et qu'une grande confusion existait dans les comptes, ce jugement étant confirmé par un arrêt de la Cour d'appel d'Aix en date du 21 février 2019 ;
- que de plus, la société [F] Estates management avait été condamnée à restituer à la SA de la Villa Gal divers documents comptables ;
- que l'expertise qui avait été ordonnée n'avait pas pu aboutir, faute par la société [F] Estates management de consigner les frais y afférents, et de communiquer les documents adéquats ;
- que Mme [M] avait bénéficié d'un bail frauduleux portant sur la villa, avec la complicité de M. [F], moyennant le paiement d'un loyer d'un montant dérisoire, ledit bail étant annulé par le jugement du Tribunal d'instance de Menton susvisé, qui avait été confirmé par un arrêt de la Cour d'appel d'Aix du 22 octobre 2020 de de chef ;
- que Mme [M] avait été finalement expulsée, alors même qu'elle n'avait pas réellement résidé dans l'immeuble qu'elle avait sous-loué à M. [L] ;
- que l'arrêt susvisé avait rejeté la demande de restitution des loyers formée par la SA de la Villa Gal, dans la mesure où Mme [M] ne rapportait pas la preuve du règlement desdits loyers à la SA de la Villa Gal ou à la société [F] Estates management, ni de quelconques sommes ;
- qu'il existait une collusion frauduleuse entre Mme [M], la société [F] Estates management et M. [F] ;
- que Mme [M] ne démontrait pas que les fonds prétendument prêtés à la SA de la Villa Gal avaient été effectivement utilisés par celle-ci ;
- qu'elle n'établissait donc pas l'existence d'une créance apparemment fondée en son principe ;
- qu'il n'existait aucun péril sur le recouvrement de sa prétendue créance.

La SA de la Villa Gal a demandé à la Cour de :
- déclarer irrecevable l'intervention forcée de la société [F] Estates management, au visa de l'article 555 du code de procédure civile ;
- confirmer le jugement en ce qu'il avait ordonné la mainlevée de l'inscription d'hypothèque judiciaire provisoire, tout en précisant ses références cadastrales ;
- ordonner la publication de l'arrêt à intervenir au service de la publicité foncière de [Localité 8] 1 ;
- ordonner la mainlevée du séquestre judiciaire pris entre les mains de Maître [T] le 14 septembre 2018 (soit le jour de la vente du bien) ;
- condamner l'appelante au paiement de la somme de 10 000 euros euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par ses conclusions notifiées le 25 avril 2022, la société [F] Estates management a exposé :
- que le mandat de gestion de l'immeuble conféré à elle-même avait été brutalement révoqué, ainsi que les fonctions de M. [F] en tant que mandataire social ;
- que la présentation des faits par la SA de la Villa Gal était inexacte ;
- que la mission de l'expert mandaté par le Tribunal de commerce de Nice n'avait vocation qu'à faire les comptes entre les parties au titre du mandat de gestion de l'immeuble ;
- que la SA de la Villa Gal tentait de jeter le discrédit sur Mme [M], la société [F] Estates management, ainsi que sur M. [F] ;
- que s'agissant de la créance, Mme [M] et la SA de la Villa Gal étaient liées par deux conventions de prêt ;
- que Mme [M] avait bien versé les fonds prêtés entre les mains de la société [F] Estates management qui avait ainsi collecté les fonds ;
- que si la SA de la Villa Gal soulevait l'irrecevabilité de son intervention forcée devant la Cour, elle régularisait une intervention volontaire, en application de l'article 554 du code de procédure civile.

La société [F] Estates management a en conséquence demandé à la Cour de :
- déclarer recevable son intervention volontaire ;
- juger que la SA de la Villa Gal ne démontre pas avoir exécuté son obligation de remboursement ;
- infirmer le jugement du 8 juillet 2021 en toutes ses dispositions.

MOTIFS

Selon les dispositions de l'article 554 du code de procédure civile, peuvent intervenir en cause d'appel, dès lors qu'elles y ont intérêt, les personnes qui n'ont été ni parties ni représentées en première instance ou qui y ont figuré en une autre qualité. L'article 555 du même code prévoit que ces mêmes personnes peuvent être appelées devant la cour, même aux fins de condamnation, quand l'évolution du litige implique leur mise en cause.

En l'espèce, Mme [M] ne démontre ni même ne soutient qu'une évolution du litige serait survenue depuis l'instance devant le juge de l'exécution, laquelle rendrait nécessaire la mise en cause de la société [F] Estates Management par voie d'intervention forcée. Celle-ci sera dès lors déclarée irrecevable. En revanche, l'intervention volontaire de l'intéressée à l'instance devant la Cour sera déclarée recevable ; en effet des liens étroits existaient entre la SA de la Villa Gal et la société [F] Estates Management, ainsi qu'il sera démontré ci-après, puisqu'il est soutenu que la SA de la Villa Gal ne détenant pas de compte bancaire en France, durant 10 années la société [F] Estates Management lui avait servi de banque, alors que Mme [M], pour sa part, prétend à l'appui de sa demande de mise en place d'une mesure conservatoire que c'est elle qui avait reçu les fonds prêtés.

L'article R 512-1 du Code des procédures civiles d'exécution énonce que si les conditions prévues pour pratiquer une saisie conservatoire, à savoir l'existence d'une créance paraissant fondée en son principe et des circonstances susceptibles d'en menacer le recouvrement, ne sont pas réunies, la mainlevée de la mesure conservatoire peut être ordonnée à tout moment. Il appartient au créancier de prouver que ces conditions sont remplies.

S'agissant de la créance apparemment fondée en son principe, il résulte des pièces produites que selon acte sous seing privé daté du 15 septembre 2014, intitulé "contrat de prêt SA Villa Gal no 1", signé de Mme [M] et de la SA de la Villa Gal, il a été convenu que l'appelante prêtait à celle-ci la somme de 100 000 euros en vue d'une avance financière destinée à faire face aux charges courantes de la société ; ce prêt était consenti pour une durée de six mois à compter du 1er octobre 2014 et était remboursable en totalité le 31 mars 2015. Un acte sous seing privé intitulé "avenant contrat de prêt SA Villa Gal no 1", daté du 31 mars 2015, signé de Mme [M] et de la SA de la Villa Gal, a stipulé que compte tenu des difficultés rencontrées par l'emprunteur, d'un commun accord entre les deux parties la date de remboursement était modifiée et l'échéance se renouvellerait automatiquement tous les six mois par tacite reconduction pour une durée maximale de dix ans. Un avenant no 2 daté du 21 décembre 2015 a fixé la date limite de remboursement au 30 septembre 2016.

D'autre part, selon acte sous seing privé daté du 17 septembre 2015, intitulé "contrat de prêt SA Villa Gal no 2", signé de Mme [M] et de la SA de la Villa Gal, il a été convenu que l'appelante prêtait à cette dernière la somme de 180 000 euros en vue d'une avance financière destinée à faire face aux charges courantes de la société ; ce prêt était consenti pour une durée de six mois avec renouvellement automatique tous les six mois, et était remboursable en totalité au plus tard le 16 septembre 2025. Un acte sous seing privé intitulé "avenant contrat de prêt SA Villa Gal no 2", daté du 21 décembre 2015, signé de Mme [M] et de la SA de la Villa Gal, a stipulé que la date de remboursement était fixée au 30 septembre 2016 au plus tard.

S'agissant de la preuve du versement des deux capitaux prêtés à la SA de la Villa Gal, ont été produits :
- une capture écran du compte de Mme [M] no 0201558410000000, laissant apparaître un débit de 100 000 euros le 20 octobre 2014 ; ce versement correspond, en son montant, à celui du premier prêt et est intervenu un peu plus d'un mois après la conclusion de ce dernier (15 septembre 2014) ;
- un relevé de compte de la société [F] Estates Management laissant apparaître un versement de ce montant au 20 octobre 2014 ; il est donc établi que Mme [M] a libéré entre les mains de la société [F] Estates Management le capital afférent au premier prêt ;
- une capture écran du compte de Mme [M] no 0201558410000000 laissant apparaître un débit de 80 000 euros le 17 septembre 2015 ; ce versement est intervenu le jour de la conclusion du deuxième prêt ;
- un relevé de compte de la société [F] Estates Management laissant apparaître un versement de 180 000 euros au 17 septembre 2015 ; cette somme correspond exactement au montant dudit prêt ;
- une attestation de la société [F] Estates Management en date du 31 octobre 2018, selon laquelle ces sommes ont été recréditées sur le compte de la SA de la Villa Gal ;
- les comptes de la SA de la Villa Gal sur l'exercice 2014 laissant apparaître, au passif, des emprunts sans qu'il ne soit possible de déterminer si ceux objet du litige y étaient inclus ou non.

Mme [M] diligentant actuellement une action au fond à l'encontre de la SA de la Villa Gal par acte en date du 4 août 2017, devant le Tribunal de commerce de Paris, ce dernier a suivant jugement daté du 8 novembre 2018 prononcé un sursis à statuer dans l'attente du dépôt du rapport de l'expertise qui avait été ordonnée par le Tribunal de commerce de Nice par décision en date du 30 octobre 2017. Si l'expert, M. [X], a dans son compte-rendu d'accedit du 26 septembre 2018 refusé de se positionner sur la question de savoir si Mme [M] avait octroyé des prêts à la SA de la Villa Gal ou non, ce n'est que pour la seule raison que ladite question ne faisait pas partie de sa mission. Le jugement susvisé a d'ailleurs été rendu dans une instance où la SA de la Villa Gal n'avait pas la qualité de partie. Il ne peut donc être tiré argument de ce compte-rendu, et encore moins du rapport d'expertise qui du reste a été déposé en l'état, faute par la société [F] Estates Management d'avoir consignéles frais d'expertise.

Même s'il n'est pas produit de pièces comptables justifiant du reversement des fonds par la société [F] Estates Management à la SA de la Villa Gal, Mme [M] apporte donc un certain nombre d'éléments tendant à prouver qu'elle a prêté à la SA de la Villa Gal les sommes de 100 000 euros et 180 000 euros, étant rappelé que le litige relatif au bail conclu entre elles le 15 décembre 2015, qui a été annulé par un jugement rendu par le Tribunal d'instance de Menton le 9 mai 2017, qui sera confirmé pour l'essentiel par un arrêt de la Cour d'appel d'Aix en date du 22 octobre 2020, est étranger aux prêts en cause. Il ne suffit donc pas à infirmer la thèse selon laquelle les sommes prêtées par Mme [M] à la SA de la Villa Gal avaient transité par le compte de la société [F] Estates Management.
Mme [M] peut dès lors invoquer un principe de créance apparemment fondé.

S'agissant du péril sur le recouvrement de sa créance, il convient de déterminer si les craintes que l'appelante entretient à ce sujet sont légitimes, sans qu'il soit besoin de démontrer que la SA de la Villa Gal se trouve nécessairement en cessation des paiements ou dans une situation financière irrémédiablement compromise.

Le seul fait que les associés de celle-ci soient, à l'origine, de nationalité arménienne ou britannique ne saurait être considéré, en lui-même, comme une preuve de l'existence d'un péril.

En revanche, la SA de la Villa Gal a d'autres dettes à régler puisque l'administration fiscale lui a réclamé la somme de 18 763 euros au titre d'impositions impayées, alors que le Pôle emploi lui a délivré un commandement à fin de saisie-vente le 15 décembre 2016 (pour la somme de 10 961,14 euros), tandis que l'URSSAF lui réclame le paiement d'un arriéré de cotisations important et lui a même délivré une assignation à fin de placement en redressement judiciaire ou subsidiairement en liquidation judiciaire ; l'organisme Novalis Retraite Arcco a également délivré à la SA de la Villa Gal un commandement à fin de saisie-vente le 4 décembre 2015 pour avoir paiement de la somme de 3 135,72 euros ; la MSA exige le paiement de la somme de 24 683,20 euros. Un avis à tiers détenteur a été délivré à la SA de la Villa Gal le 18 février 2016 pour la somme de 33 916 euros puis le 3 mars 2015 pour celle de 15 434 euros. La Trésorerie de [Localité 9] dispose d'une créance à l'encontre de la SA de la Villa Gal de 31 201 euros. Enfin, la banque UBS a, le 14 décembre 2012, résilié la convention de compte qu'elle avait conclue avec elle. L'intéressée a donc accumulé des dettes auxquelles elle est incapable de faire face. Et l'immeuble sis à [Localité 9] (Alpes maritimes), [Adresse 4], sur lequel porte l'inscription d'hypothèque judiciaire provisoire querellée, était son seul et unique bien et celui-ci étant vendu, la créancière ne pourra plus régulariser de nouvelles inscriptions.

Dans ces conditions, Mme [M] invoque à juste titre des circonstances susceptibles de menacer le recouvrement de sa créance.

Le jugement sera infirmé en toutes ses dispositions et la SA de la Villa Gal déboutée de ses prétentions.

En équité, la demande de Mme [M] en application de l'article 700 du code de procédure civile sera rejetée.

La SA de la Villa Gal sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Statuant dans les limites de l'appel,

- DECLARE irrecevable l'intervention forcée de la société [F] Estates Management en cause d'appel ;

- DECLARE recevable son intervention volontaire à l'instance d'appel ;

- INFIRME le jugement en date du 8 juillet 2021 en l'ensemble de ses dispositions ;

et statuant à nouveau :

- DIT n'y avoir lieu à rétractation de l'ordonnance sur requête du 6 février 2017 ;

- DEBOUTE la SA de la Villa Gal de ses prétentions ;

- REJETTE la demande de Mme [N] [M] en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- CONDAMNE la SA de la Villa Gal aux dépens de première instance et d'appel, qui seront recouvrés par Maître Ortolland conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : B1
Numéro d'arrêt : 21/166417
Date de la décision : 09/06/2022
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2022-06-09;21.166417 ?
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