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09/06/2022 | FRANCE | N°21/139587

France | France, Cour d'appel de Paris, B1, 09 juin 2022, 21/139587


Copies exécutoires
délivrées aux parties le :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 1 - Chambre 10

ARRÊT DU 09 JUIN 2022

(no , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général :
No RG 21/13958 - No Portalis 35L7-V-B7F-CEEEN

Décision déférée à la cour :
jugement du 24 juin 2021-juge de l'exécution de PARIS-RG no 21/80569

APPELANTE

S.N.C. KARA II
[Adresse 4]
[Localité 3]

Représentée par Me Caroline HATET-SAUVAL de la SCP NABOUDET - HATET, avocat au barrea

u de PARIS, toque : L0046
Ayant pour avocat plaidant Me Eric FORESTIER, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉE

SYNDICAT DES COPROPRIÉTAIRES DU...

Copies exécutoires
délivrées aux parties le :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 1 - Chambre 10

ARRÊT DU 09 JUIN 2022

(no , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général :
No RG 21/13958 - No Portalis 35L7-V-B7F-CEEEN

Décision déférée à la cour :
jugement du 24 juin 2021-juge de l'exécution de PARIS-RG no 21/80569

APPELANTE

S.N.C. KARA II
[Adresse 4]
[Localité 3]

Représentée par Me Caroline HATET-SAUVAL de la SCP NABOUDET - HATET, avocat au barreau de PARIS, toque : L0046
Ayant pour avocat plaidant Me Eric FORESTIER, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉE

SYNDICAT DES COPROPRIÉTAIRES DU [Adresse 2] représenté par son syndic la SARL MCI CONSULTING dont le siège social est sis [Adresse 1] et agissant poursuites et diligences en la personne de sa gérante en exercice domiciliée en cette qualité audit siège

Représentée par Me Marie-Hélène DUJARDIN, avocat au barreau de PARIS, toque : D2153
Ayant pour avocat plaidant Me Pierre-Edouard LAGRAULET, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 11 mai 2022, en audience publique, devant la cour composée de :
Madame Bénédicte PRUVOST, président de chambre
Madame Catherine LEFORT, conseiller
Monsieur Raphaël TRARIEUX, conseiller

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Madame Bénédicte PRUVOST, président de chambre, dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.

GREFFIER lors des débats : Monsieur Grégoire GROSPELLIER

ARRÊT
-contradictoire
-par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
-signé par Madame Bénédicte PRUVOST, président de chambre et par Monsieur Grégoire GROSPELLIER, greffier présent lors de la mise à disposition.

Par jugement du 22 mars 2018, le tribunal de grande instance de Paris, à la demande de la société civile immobilière Kara II (ci-après dénommée la société Kara II), a condamné le syndicat des copropriétaires du [Adresse 2] (ci-après le syndicat des copropriétaires), représenté par son syndic la société MCI Consulting, à remplacer les fenêtres à deux ventaux ouvrants, installées sur la façade sur cour de l'immeuble, par des jours ou fenêtres à verre dormant, opaque ou translucide dans un délai de six mois à compter de la signification de sa décision et, passé ce délai, sous astreinte provisoire de 100 euros par jour de retard et pour une durée de 6 mois.

Le jugement a été signifié le 11 avril 2018.

Par jugement du 8 juillet 2019, le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Paris a liquidé l'astreinte provisoire à la somme de 6.100 euros et assorti la condamnation résultant du jugement du 22 mars 2018 d'une nouvelle astreinte provisoire fixée à 150 euros par jour de retard, commençant à courir à l'issue d'un délai de six mois suivant sa notification.

Selon acte d'huissier du 18 juillet 2019, le syndicat des copropriétaires a acquiescé au jugement du 8 juillet précédent.

Par jugement du 24 juin 2021, le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Paris a :
– rejeté la demande de liquidation d'astreinte ;
– rejeté la demande de fixation d'une nouvelle astreinte ;
– rejeté la demande de dommages-intérêts ;
– condamné la société Kara II à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 2500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
– condamné la société Kara II aux dépens.

Pour statuer ainsi, le juge de l'exécution a retenu que la demande tendant à la liquidation de l'astreinte ne pouvait être accueillie, le jugement du 8 juillet 2019, qui la fixait, n'ayant été produit par aucune des parties et qu'il y avait lieu de rejeter la demande de fixation d'une nouvelle astreinte, le défendeur ayant satisfait de manière acceptable à l'injonction judiciaire du jugement du 22 mars 2018.

Selon déclaration du 19 juillet 2021, la société Kara II a interjeté appel de cette décision.

Selon décision du 31 mars 2022, à la demande des parties faisant valoir la mise en oeuvre d'une tentative de conciliation, la date de l'ordonnance de clôture a été reportée au 11 mai 2022, jour de l'audience de plaidoirie.

Par dernières conclusions du 10 mai 2022, la société Kara II demande à la cour de :
– la déclarer recevable et bien fondée en l'intégralité de ses demandes, fins et prétentions ;
– infirmer le jugement dont appel ;
et statuant à nouveau,
– liquider l'astreinte prononcée par jugement du 8 juillet 2019 à la somme de 95.700 euros pour la période comprise entre les 18 janvier 2020 et 18 octobre 2021 ;
– fixer une nouvelle astreinte de 500 euros par jour de retard à compter de la signification du jugement à intervenir ;
– débouter le syndicat des copropriétaires de sa demande de condamnation pour procédure abusive ;
– condamner le syndicat des copropriétaires lui verser la somme de 3.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
– condamner le syndicat des copropriétaires aux entiers dépens.

L'appelante fait valoir que :
– l'astreinte provisoire est une mesure dissuasive et comminatoire, fonction de la résistance du débiteur, qui s'apprécie au regard des circonstances qui ont accompagné l'inexécution ; le syndicat des copropriétaires a fait preuve de mauvaise volonté en ce qu'il n'a jamais notifié qu'il avait procédé au remplacement des fenêtres et n'a rapporté la preuve des diligences qu'il aurait accomplies qu'après avoir été assigné devant le juge de l'exécution ;
– le syndicat des copropriétaires ne démontre pas avoir procédé, selon les conditions posées par le jugement du 22 mars 2018, au remplacement des fenêtres litigieuses, le retrait des poignées des fenêtres et l'apposition de films adhésifs sur les vitres ne pouvant constituer une solution pérenne et définitive et être assimilés à une exécution de l'injonction judiciaire.

Par dernières conclusions du 5 mai 2022, le syndicat des copropriétaires demande à la cour de :
- le déclarer recevable en ses conclusions ;
- confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, y compris celle ayant condamné la société Kara II au paiement d'une somme de 2500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
à titre principal,
- débouter la société Kara II de l'ensemble de ses demandes d'infirmation du jugement ;
- débouter la société Kara II de toutes ses demandes indemnitaires et relatives aux dépens ;
à titre subsidiaire, « et à toutes fins très éventuelles visant à l'exhaustivité, »
- en cas d'infirmation, faire application du principe de proportionnalité, et réduire toute éventuelle astreinte à 1 euro symbolique ;
Et y ajoutant,
– condamner la société Kara II à lui payer la somme de 5.000 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive ;
– condamner la société Kara II à 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
– condamner la société Kara II aux entiers dépens de première instance et d'appel, recouvrés par Me Marie-Hélène Dujardin, avocate, en vertu de l'article 699 du code de procédure civile.

L'intimé soutient que :
– il a fait preuve de bonne foi dans l'accomplissement des diligences entreprises pour se conformer à l'injonction formulée par le jugement du 22 mars 2018 ; ces diligences ont été établies par plusieurs constats d'huissier, à l'appui desquels le juge de l'exécution a pu constater que les fenêtres litigieuses répondaient désormais aux exigences posées par la loi ; qu'ainsi, la société Kara II, qu'il n'était pas tenu de tenir informée de l'avancée des travaux, ne saurait affirmer qu'il n'a pas satisfait de manière acceptable à l'injonction judiciaire ;
– la demande de liquidation de l'astreinte, quel qu'en soit le montant, est infondée ; à titre subsidiaire, il y aurait lieu, compte tenu de la situation matérielle respective des parties, de faire application du principe de proportionnalité et de réduire toute éventuelle condamnation à 1 euro symbolique ;
– l'ensemble des copropriétaires subit un préjudice financier et moral du fait que la société Kara II persiste à poursuivre – en plus de quatre autres procédures – une procédure abusive et tardive tendant à obtenir la liquidation d'une astreinte d'un montant disproportionné et destinée à financer une opération mobilière importante s'inscrivant dans le cadre de son activité commerciale.

L'ordonnance de clôture a été prononcée en définitive à l'audience de plaidoirie du 11 mai 2022. A l'audience, la cour a autorisé le syndicat des copropriétaires à déposer une note en délibéré en réplique aux dernières conclusions déposées la veille de l'audience par l'appelante et cette dernière à produire son extrait Kbis actualisé.

Le 12 mai 2022, le syndicat des copropriétaires a déposé une note en délibéré sous forme de conclusions comportant quelques lignes supplémentaires par rapport à celles du 5 mai 2022, en réponse aux conclusions de la société Kara II et par lesquelles il soutient que les derniers travaux de changement des verres de deux fenêtres en verre dormant (pièces no2 à 5 et 10) ne constituent pas une exécution tardive de l'injonction judiciaire, mais tendent seulement à renforcer l'exécution déjà déclarée satisfactoire par le premier juge au vu de sa pièce no4, soit le procès-verbal de constat d'huissier du 22 octobre 2019.

A la demande de la cour, en cours de délibéré, la société Kara II a justifié de sa forme sociale par la production d'un extrait Kbis, dont il ressort qu'elle a, depuis le 31 mars 2017, la forme sociale de société en nom collectif.

MOTIFS

Sur la demande de liquidation de l'astreinte prononcée par le jugement du 8 juillet 2019

Aux termes de l'article L. 131-4 du code des procédures civiles d'exécution, la liquidation de l'astreinte tient compte du comportement de celui à qui l'injonction a été adressée et des difficultés qu'il a rencontrées pour l'exécuter.

Pour ce qui concerne les obligations de faire, il appartient au débiteur, assigné en liquidation, de prouver qu'il a exécuté ladite obligation.

Par acte du 18 juillet 2019, le syndicat des copropriétaires a déclaré acquiescer sans réserve au jugement du juge de l'exécution du 8 juillet précédent, « et donc l'exécuter dans les meilleurs délais ».

Néanmoins, il y a lieu de rappeler que ledit jugement prévoyait que la nouvelle astreinte courrait à l'issue d'un délai de six mois suivant sa notification. Par conséquent, la cour ne peut procéder à la liquidation de la nouvelle astreinte fixée par le jugement du 8 juillet 2019, dont seule la cour est présentement saisie, qu'à compter de la notification du jugement du 8 juillet 2019. L'acquiescement fait par le syndicat des copropriétaires le 18 juillet 2019 ne vaut pas notification et n'a pas fait courir le délai d'astreinte. Et il n'est pas justifié aux débats de la notification de ce jugement.

La demande de liquidation de l'astreinte de la nouvelle astreinte prononcée par le jugement du 8 juillet 2019 doit par conséquent être rejetée, de sorte que le jugement entrepris sera confirmé, pour d'autres motifs que ceux adoptés par le premier juge, en ce qu'il a rejeté la demande de liquidation de l'astreinte.

Sur la fixation d'une nouvelle astreinte

Il résulte des procès-verbaux de constat d'huissier des 17 juillet 2019, 22 octobre 2019 et 21 janvier 2020, que les fenêtres à deux vantaux litigieuses avaient été condamnées par le retrait de leur système d'ouverture et que deux d'entre elles avaient été munies d'un film opacifiant et la troisième de verre dépoli, faisant obstacle à toute vue sur la cour depuis l'intérieur.

Cependant, contrairement à ce qu'avait dit le premier juge, cette exécution ne pouvait pas être considérée comme absolument pérenne, du moins pour deux des fenêtres, un film opacifiant posé sur les vitres étant amovible le cas échéant. Elle restait donc à parfaire. Mais le film opacifiant a été désormais remplacé par du verre dépoli, ainsi qu'il résulte de la production de la facture de travaux « de remplacement des verres existants » du 12 novembre 2021 et des photographies versées aux débats en pièce no10 de l'intimé, de sorte que toutes les fenêtres litigieuses sont désormais munies de verre dépoli. Par ailleurs, ces photographies et les procès-verbaux de constat d'huissier des 22 octobre 2019 et 21 janvier 2020 mettent en évidence que les poignées de fenêtre ne peuvent plus être reposées, les crémones ayant été complètement retirées et une finition apposée à leur ancien emplacement.

Il résulte de ce qui précède que, l'ordre judiciaire étant désormais exécuté, il n'y a pas lieu de fixer une nouvelle astreinte. Le jugement entrepris sera donc confirmé de ce chef également.

Sur la demande en dommages-intérêts pour procédure abusive

Le droit d'exercer une action en justice ou une voie de recours ne dégénère en abus que s'il révèle de la part de son auteur une intention maligne, une erreur grossière ou une légèreté blâmable dans l'appréciation de ses droits qui ne saurait résulter du seul rejet de ses prétentions.

Faute pour l'intimé d'établir un tel abus, il y a lieu de confirmer le jugement du juge de l'exécution en ce qu'il a rejeté sa demande en dommages-intérêts pour procédure abusive.

Sur les demandes accessoires

L'issue du litige justifie la condamnation de l'appelante à payer à l'intimé une indemnité de 3000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

L'appelante, qui succombe en son appel, sera condamnée aux dépens d'appel, qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Et y ajoutant,

Condamne la SNC Kara II à payer au syndicat des copropriétaires du [Adresse 2] la somme de 3000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la SNC Kara II aux dépens d'appel, qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : B1
Numéro d'arrêt : 21/139587
Date de la décision : 09/06/2022
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2022-06-09;21.139587 ?
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