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02/06/2022 | FRANCE | N°21/08928

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 2, 02 juin 2022, 21/08928


Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 2



ARRET DU 02 JUIN 2022



(n° , 9 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/08928 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CDUVG



Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 26 Mars 2021 -Président du TJ de PARIS - RG n° 21/51567





APPELANTE



S.A.S.U. NIRO 2010, agissant poursuites et diligences en la personne

de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège



[Adresse 3]

[Localité 2]



Représentée et assistée par Me Elyas AZMI, avocat au barreau de PARIS, toque :...

Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 2

ARRET DU 02 JUIN 2022

(n° , 9 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/08928 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CDUVG

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 26 Mars 2021 -Président du TJ de PARIS - RG n° 21/51567

APPELANTE

S.A.S.U. NIRO 2010, agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représentée et assistée par Me Elyas AZMI, avocat au barreau de PARIS, toque : G0476

INTIMÉ

Etablissement ASSISTANCE PUBLIQUE - HÔPITAUX DE PARIS (AP-HP), prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représenté et assisté par Me Benjamin VIDAL substituant Me Morgane BLOTIN de la SELARL CENTAURE AVOCATS, avocats au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 6 avril 2022, en audience publique, les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Michèle CHOPIN, Conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre

Thomas RONDEAU, Conseiller,

Michèle CHOPIN, Conseillère,

Qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Saveria MAUREL

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Thomas RONDEAU, Conseiller pour la Présidente empêchée, et par Saveria MAUREL, Greffier, présente lors de la mise à disposition.

*****

EXPOSE DU LITIGE

Par acte du 31 janvier 2011, l'établissement public de santé l'Assistance publique Hôpitaux de Paris, ci après l'APHP, a loué à la société Bcp tak un local commercial situé [Adresse 3]).

Le droit au bail ayant été cédé à la société Niro 2010, celle-ci s'est vu consentir un bail commercial à effet au 1er mars 2019 pour une durée de neuf années, moyennant un loyer annuel de 15.000 euros hors charges et hors taxes, payable à terme échu à une fréquence mensuelle.

Des loyers sont demeurés impayés.

Par exploit du 12 août 2020, l'APHP a fait délivrer à la société Niro 2010 un commandement de payer visant la clause résolutoire pour une somme de 15.212 euros en principal, au titre de l'arriéré locatif arrêté au 5 août 2020.

Par exploit du 4 janvier 2021, l'APHP a fait assigner la société Niro 2010 devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Paris aux fins de voir :

- constater l'acquisition de la clause résolutoire insérée au bail au 12 octobre 2020 ;

- ordonner l'expulsion de la société Niro 2010 et celle de tous occupants de son chef des lieux loués avec le concours de la force publique si besoin, sous astreinte de 300 euros par jour de retard à défaut d'exécution spontanée dans les 48 heures à compter de la signification de l'ordonnance à intervenir ;

- ordonner le transport et la séquestration du mobilier trouvé dans les lieux dans tel garde-meubles qu'il plaira au bailleur aux frais, risques et péril de la partie expulsée ;

- condamner la société Niro 2010 à payer à l'établissement public de santé l'Assistance publique Hôpitaux de Paris la somme provisionnelle de 17.992 euros au titre de l'arriéré locatif arrêté au 4 décembre 2020 (mois de novembre 2020 inclus), avec intérêts au taux légal à compter de la délivrance du commandement ;

- subsidiairement, en cas d'octroi de délais de paiement, prévoir la déchéance du terme à défaut du paiement d'un terme exigible ;

- condamner la société Niro 2010 au paiement d'une indemnité d'occupation provisionnelle égale au double du montant du loyer augmenté des charges, jusqu'à la libération des locaux qui se matérialisera par la remise des clés ou l'expulsion du défendeur ;

- condamner la société Niro 2010 au paiement d'une somme de 2.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens, en ce compris le coût du commandement.

Par ordonnance réputée contradictoire du 26 mars 2021, le juge des référés du tribunal judiciaire de Paris, a :

- constaté l'acquisition de la clause résolutoire insérée au bail à la date du 12 septembre 2020 ;

- ordonné, à défaut de restitution volontaire des lieux dans les quinze jours de la signification de la présente ordonnance, l'expulsion de la société Niro 2010 et de tout occupant de son chef des lieux situés [Adresse 3]) avec le concours en tant que de besoin, de la force publique et d'un serrurier ;

- dit n'y avoir lieu au prononcé d'une astreinte ;

- dit, en cas de besoin, que les meubles se trouvant sur les lieux seront remis aux frais de la personne expulsée dans un lieu désigné par elle et qu'à défaut, ils seront laissés sur place ou entreposés en un autre lieu approprié et décrits avec précision par l'huissier chargé de l'exécution, avec sommation à la personne expulsée d'avoir à les retirer dans un délai de quatre semaines à l'expiration duquel il sera procédé à leur mise en vente aux enchères publiques, sur autorisation du juge de l'exécution, ce conformément à ce que prévoient les dispositions du code des procédures civiles d'exécution sur ce point ;

- fixé à titre provisionnel l'indemnité d'occupation due par la société Niro 2010, à compter du 13 septembre 2020 et jusqu'à libération effective des lieux par la remise des clés, à une somme égale au montant du loyer contractuel, outre les taxes, charges et accessoires ;

- condamné par provision la société Niro 2010 à payer à l'établissement public de santé l'Assistance publique Hôpitaux de Paris la somme de 13.822 euros au titre des loyers, charges et accessoires arrêtés au 11 juillet 2020, avec intérêts au taux légal à compter du 12 août 2020

- condamné par provision la société Niro 2010 à payer à l'établissement public de santé l'Assistance publique Hôpitaux de Paris la somme de 4.170 euros au titre des indemnités d'occupation échues au 4 décembre 2020, avec intérêts au taux légal à compter du 4 janvier 2021 ;

- rejeté le surplus des demandes provisionnelles ;

- condamné la société Niro 2010 aux entiers dépens, en ce compris le coût du commandement ;

- condamné la société Niro 2010 à payer à l'établissement public de santé l'Assistance publique Hôpitaux de Paris la somme de 1.000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- rejeté toutes les autres demandes des parties ;

- rappelé que la présente décision est exécutoire à titre provisoire.

Par déclaration du 07 mai 2021, la société Niro 2010 a relevé appel de cette décision en toutes ses dispositions.

Dans ses dernières conclusions remises le 4 avril 2022, la société Niro 2010 demande à la cour de :

- dire et juger son appel régulier ;

- dire et juger celle-ci recevable en toutes ses demandes, fins et conclusions ;

- infirmer le jugement rendu le 26 mars 2021 par le tribunal judiciaire de Paris en ce qu'il a :

' constaté l'acquisition de la clause résolutoire insérée au bail à la date du 12 septembre 2020,

' ordonné, à défaut de restitution volontaire des lieux dans les quinze jours de la signification de la présente ordonnance, l'expulsion de la société Niro 2010 et de tout occupant de son chef des lieux situés [Adresse 3]) avec le concours en tant que de besoin, de la force publique et d'un serrurier,

' dit, en cas de besoin, que les meubles se trouvant sur les lieux seront remis aux frais de la personne expulsée dans un lieu désigné par elle et qu'à défaut, ils seront laissés sur place ou entreposés en un autre lieu approprié et décrits avec précision par l'huissier chargé de l'exécution, avec sommation à la personne expulsée d'avoir à les retirer dans un délai de quatre semaines à l'expiration duquel il sera procédé à leur mise en vente aux enchères publiques, sur autorisation du juge de l'exécution, ce conformément à ce que prévoient les dispositions du code des procédures civiles d'exécution sur ce point,

' fixé à titre provisionnel l'indemnité d'occupation due par la société Niro 2010, à compter du 13 septembre 2020 et jusqu'à libération effective des lieux par la remise des clés, à une somme égale au montant du loyer contractuel, outre les taxes, charges et accessoires,

' condamné par provision la société Niro 2010 à payer à l'établissement public de santé l'Assistance publique Hôpitaux de Paris la somme de 13.822 euros au titre des loyers, charges et accessoires arrêtés au 11 juillet 2020, avec intérêts au taux légal à compter du 12 août 2020,

' condamné par provision la société Niro 2010 à payer à l'établissement public de santé l'Assistance publique Hôpitaux de Paris la somme de 4.170 euros au titre des indemnités d'occupation échues au 4 décembre 2020, avec intérêts au taux légal à compter du 4 janvier 2021,

' condamné la société Niro 2010 aux entiers dépens, en ce compris le coût du commandement,

' condamné la société Niro 2010 à payer à l'établissement public de santé l'Assistance publique Hôpitaux de Paris la somme de 1.000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

' rappelé que la présente décision est exécutoire à titre provisoire,

In limine litis,

- constater l'existence d'une contestation sérieuse ;

En conséquence,

- dire et juger n'y avoir lieu à référé et renvoyer l'affaire devant les juges du fond ;

A défaut, statuant à nouveau,

A titre principal,

- constater l'absence de mise en demeure adressée par l'établissement public de santé l'Assistance publique Hôpitaux de [Localité 2] à celle-ci ;

- dire et juger que l'établissement public de santé l'Assistance publique Hôpitaux de [Localité 2] est de mauvaise foi ;

- dire et juger que la clause résolutoire ne dispense pas de manière expresse et non équivoque de l'envoi d'une mise en demeure au locataire avant tout commandement de payer ;

En conséquence,

- dire et juger que le commandement de payer du 12 août 2020 est nul ;

- dire et juger que l'ordonnance du 26 mars 2021 est dépourvue de base légale et donc sans effet

A titre subsidiaire,

- dire et juger qu'elle est de bonne foi ;

En conséquence,

- suspendre les effets de la clause résolutoire et ainsi l'expulsion de celle-ci ;

- accorder un délai de paiement le plus large possible ;

En tout état de cause,

- condamner l'établissement public de santé l'Assistance publique Hôpitaux de [Localité 2] à porter et payer aux concluants la somme de 2.500 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner l'établissement public de santé l'Assistance publique Hôpitaux de Paris en tous les dépens , dire que ceux d'appel pourront être recouvrés directement par Me Elyas Azmi, avocat aux offres de droit, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

La société Niro 2010 soutient en substance que :

- elle n'a pas pu constituer avocat à temps en première instance et n'a eu aucune réponse à sa demande de réouverture des débats ;

- la signification du commandement de payer est contestable en ce que la société Niro 2010 était au moment de sa délivrance fermée pour congés annuels ;

- les demandes de l'établissement public de santé l'Assistance publique Hôpitaux de [Localité 2] sont contestables, des loyers réglés n'ayant pas été pris en compte ;

- le décompte joint au commandement de payer est manifestement erroné ;

- aucune mise en demeure préalable n'a été signifiée préalablement à tout commandement de payer;

- des délais seront accordés en raison de difficultés de paiement survenus en raison de la crise sanitaire.

Dans ses dernières conclusions remises et notifiées le 21 mars 2022, l'établissement public de santé l'Assistance publique Hôpitaux de [Localité 2] demande à la cour de :

In limine litis,

- écarter le moyen relatif à l'existence d'une contestation sérieuse comme non repris dans le dispositif des conclusions de l'appelant ;

Si par extraordinaire la Cour venait à examiner ce moyen,

- constater la carence dans l'administration de la preuve et la caractérisation d'une contestation sérieuse ;

- rejeter le moyen relatif à l'existence d'une contestation sérieuse ;

Statuant à nouveau,

- confirmer en toutes ses dispositions l'ordonnance dont appel ;

- constater le défaut de paiement des loyers ;

- juger qu'aucune mise en demeure préalable au commandement de quitter n'est exigée en matière de baux commerciaux ;

- valider le commandement de payer signifié le 12 août 2020 ;

- constater l'acquisition de la clause résolutoire stipulée au contrat de bail commercial dont bénéficie la société Niro 2010 ;

- rejeter l'ensemble des demandes de la société Niro 2010 ;

En conséquence,

- dire que la société Niro 2010 est occupante sans droit ni titre depuis le 12 octobre 2020 (date d'acquisition de la clause résolutoire) ;

- ordonner l'expulsion des lieux loués de l'appelante ainsi que celle de tous occupants de son chef, avec si besoin l'assistance d'un serrurier et de la force publique ;

- dire, que faute pour la société Niro 2010 de quitter les lieux dans un délai de 48 heures à compter de la signification de l'arrêt à intervenir, il sera procédé à son expulsion et à celle de tous occupants de son chef, conformément aux dispositions du code des procédures civiles d'exécution, et ce avec l'assistance de la force publique et d'un serrurier s'il y a lieu, à peine d'astreinte comminatoire de 300 euros par jour de retard à compter de la signification de la décision à intervenir et jusqu'à parfait délaissement ;

- ordonner la séquestration des meubles et objets mobiliers garnissant les lieux, dans telle resserre ou garde-meuble qu'il plaira à la requérante de désigner et ce aux risques et périls de l'appelante ;

- dire et juger qu'elle conservera le montant du dépôt de garantie ;

Si par extraordinaire, la Cour de céans accordait à l'appelante des délais de paiement,

- juger qu'à défaut de paiement à la date fixée par l'arrêt d'un seul terme exigible au titre de la créance arriérée, comme à défaut de paiement d'un seul terme des redevances et charges courantes, l'intégralité de la dette deviendrait exigible, la clause résolutoire serait acquise et l'expulsion pourrait être poursuivie ;

- condamner la société Niro 2010 à lui payer :

' la somme de 24.478,19 euros au titre des loyers, charges et indemnités d'occupation arrêtées au 16 décembre avec intérêts au taux légal à compter du commandement de payer du 12 août 2020,

' une indemnité d'occupation à deux fois le montant journalier du dernier loyer exigible actuel en vertu du bail, outre tous accessoires du loyer, jusqu'à la libération effective des lieux,

' la somme de 2.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens comprenant notamment les frais du commandement de payer d'un montant de 190, 96 euros.

L'établissement public de santé l'Assistance publique Hôpitaux de [Localité 2] soutient en substance que :

- il n'existe aucune contestation sérieuse ;

- au surplus, ce moyen n'est pas repris dans le dispositif des conclusions ;

- la clause résolutoire est acquise de plein droit ;

- il ne saurait être accordé aucun délai de paiement.

SUR CE, LA COUR

Sur la saisine de la cour

L'article 954 du code de procédure civile dispose que :

" Les conclusions d'appel contiennent, en en-tête, les indications prévues à l'article 961. Elles doivent formuler expressément les prétentions des parties et les moyens de fait et de droit sur lesquels chacune de ces prétentions est fondée avec indication pour chaque prétention des pièces invoquées et de leur numérotation. Un bordereau récapitulatif des pièces est annexé.

Les conclusions comprennent distinctement un exposé des faits et de la procédure, l'énoncé des chefs de jugement critiqués, une discussion des prétentions et des moyens ainsi qu'un dispositif récapitulant les prétentions. Si, dans la discussion, des moyens nouveaux par rapport aux précédentes écritures sont invoqués au soutien des prétentions, ils sont présentés de manière formellement distincte.

La cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.

Les parties doivent reprendre, dans leurs dernières écritures, les prétentions et moyens précédemment présentés ou invoqués dans leurs conclusions antérieures. A défaut, elles sont réputées les avoir abandonnés et la cour ne statue que sur les dernières conclusions déposées.

La partie qui conclut à l'infirmation du jugement doit expressément énoncer les moyens qu'elle invoque sans pouvoir procéder par voie de référence à ses conclusions de première instance."

Force est de constater que les premières écritures de la société Niro 2010 comportent dans leur dispositif une demande d'infirmation et développent, au sein de la discussion, la question de l'existence d'une contestation sérieuse susceptible de s'opposer aux demandes de l'APHP.

Cependant, si la demande d'infirmation constitue bien une prétention de la société Niro 2010, l'existence d'une contestation sérieuse doit être considérée comme un moyen développé à l'appui de la demande d'infirmation de la décision rendue si bien qu'elle n'a pas à figurer in extenso dans le dispositif des écritures, étant précisé surabondamment que les dernières écritures de l'appelante comportent à la fois une demande d'infirmation de la décision rendue et une demande tendant à voir constater l'existence d'une contestation sérieuse et à voir dire et juger qu'il n'ya pas lieu à référé.

L'intimée soutient donc à tort que la cour ne serait pas saisie du moyen relatif à l'existence d'une contestation sérieuse susceptible de s'opposer aux demandes du bailleur.

Sur le fond du référé

L'article L.145-41 du code de commerce dispose que toute clause insérée dans le bail commercial prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu'un mois après un commandement de payer demeuré infructueux. Le commandement doit, à peine de nullité, mentionner ce délai.

L'expulsion d'un locataire commercial devenu occupant sans droit ni titre en vertu du jeu d'une clause résolutoire de plein droit peut être demandée au juge des référés du tribunal judiciaire en application des dispositions de l'article 835 du code de procédure civile, dès lors que le maintien dans les lieux de cet occupant constitue un trouble manifestement illicite ou qu'à tout le moins l'obligation de libérer les lieux correspond dans cette hypothèse à une obligation non sérieusement contestable.

Un commandement de payer visant la clause résolutoire délivré pour une somme supérieure à la dette véritable reste valable pour la partie des sommes réclamées effectivement due. Il n'appartient pas à la cour, statuant comme juge des référés, de prononcer la nullité d'un commandement de payer, sachant qu'il n'entre pas dans les pouvoirs du magistrat des référés de prononcer une telle nullité ; le juge des référés ne peut que déterminer si les éventuelles irrégularités, invoquées à l'encontre du commandement, sont susceptibles de constituer un moyen de contestation sérieuse l'empêchant de constater la résolution du bail.

En outre, aux termes des dispositions de l'article 835 alinéa 2 du code de procédure civile, le président du tribunal peut, dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, allouer une provision au créancier.

En l'espèce, s'agissant de l'acquisition de la clause résolutoire, il y a lieu d'indiquer :

- qu'un commandement de payer a été délivré par acte d'huissier de justice du 12 août 2020, visant la clause résolutoire insérée au contrat, et réclamant la somme de 15.212 euros au titre de l'arriéré ;

- qu'il est constant que cette somme n'a pas été réglée dans le délai d'un mois à compter de la signification ;

- que le commandement était bien accompagné, ainsi que le précise l'acte, d'un bordereau de situation faisant état de cette somme ;

-que ledit commandement a été délivré selon les dispositions de l'article 659 du code de procédure civile, l'acte mentionnant "aucun représentant légal. Restau fermé (...) Nom sur la boîte aux lettres" ;

- que ce commandement, délivré en effet en période estivale et de congés, laissait toutefois un délai d'un mois, expirant donc au 12 septembre 2020 à la locataire pour s'acquitter de la dette,

- que celle-ci argue de ce que la bailleresse ne lui a adressé aucune mise en demeure préalable mais que toutefois ce moyen est inopérant puisque ni les dispositions de l'article L145-41 du code de commerce ni le bail ne prévoient une telle formalité ;

- qu'il ne peut pas non plus être fait reproche à la bailleresse d'avoir "laissé courir" la dette locative pendant une année avant de réagir ;

- que, sur les sommes dues, un commandement de payer visant la clause résolutoire délivré pour une somme supérieure à la dette véritable reste valable pour la partie des sommes réclamées effectivement due ;

- que sur ce point, si la société Niro 2010 établit avoir réglé les loyers de juin 2019, janvier, juin, juillet 2020, force est de constater que le solde de 9.730 euros n'a fait l'objet d'aucun règlement et qu'ainsi, le commandement de payer reste bien valable pour cette somme incontestablement due qui n'a été acquittée dans le délai requis.

Dans ces conditions, il y a lieu de confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a constaté l'acquisition de la clause résolutoire au 12 septembre 2020, avec toutes conséquences de droit.

Sur le montant de la provision allouée, l'APHP expose que la société Niro 2010 devrait selon un décompte actualisé la somme de 24.474 euros au titre des loyers et charges dus mais toutefois, elle demande la confirmation de l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions, de sorte que la cour ne peut que confirmer cette décision, sans examiner la demande de provision complémentaire ni celle tendant au prononcé d'une astreinte que le premier juge avait rejetée.

Sur la demande de la société Niro 2010 tendant à se voir octroyer des délais de paiement, celle ci invoque la survenance de la crise sanitaire mais toutefois, il convient d'observer que :

- les premiers incidents de paiement sont en date de l'été 2019, soit avant la crise sanitaire,

- aucun élément comptable ni financier n'est produit, tandis que la société Niro 2010 ne justifie pas de l'impact de la crise sanitaire sur son activité ni de ses ressources pour faire face au règlement de sa dette ou respecter un échéancier,

- il ressort au contraire du décompte produit par l'APHP et des titres de recettes correspondants que la société Niro 2010 a cessé tout règlement depuis la délivrance du commandement.

La demande de la société Niro 2010 tendant à se voir octroyer des délais de paiement sera rejetée.

Enfin, il y a lieu de confirmer la décision du premier juge sur les dépens et frais irrépétibles de première instance, de condamner l'appelante au titre des dépens d'appel et d'indemniser l'intimée pour les frais exposés à hauteur d'appel en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Statuant dans les limites de l'appel,

Confirme la décision entreprise ;

Y ajoutant,

Rejette toutes les autres demandes,

Condamne la société Niro 2010 à payer à l'établissement de santé Assistance Publique- Hopitaux de Paris à payer à la somme de 1.000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société Niro 2010 aux dépens d'appel.

LE GREFFIER POUR LA PRESIDENTE EMPÊCHÉE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 2
Numéro d'arrêt : 21/08928
Date de la décision : 02/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-02;21.08928 ?
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