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25/05/2022 | FRANCE | N°21/19017

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 2, 25 mai 2022, 21/19017


Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 2



ARRET DU 25 MAI 2022



(n° , 2 pages)





Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/19017 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CES3M



Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 18 Juin 2021 -Président du TJ de Paris - RG n°1220002545





APPELANTS



M. [J] [P]



[Adresse 8]

[Adresse 8]

[Loca

lité 6]



Représenté par Me Sophie GILI BOULLANT, avocat au barreau de PARIS, toque : E0818



(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/036411 du 18/10/2021 accordée par le bureau d'aid...

Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 2

ARRET DU 25 MAI 2022

(n° , 2 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/19017 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CES3M

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 18 Juin 2021 -Président du TJ de Paris - RG n°1220002545

APPELANTS

M. [J] [P]

[Adresse 8]

[Adresse 8]

[Localité 6]

Représenté par Me Sophie GILI BOULLANT, avocat au barreau de PARIS, toque : E0818

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/036411 du 18/10/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PARIS)

ASSOCIATION TUTÉLAIRE DE LA FÉDÉRATION PROTESTANTE DES OEUVRES (ATFPO) PARIS EST, prise en la personne de son Président et en qualité de curateur renforcé de Monsieur [J] [P]

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentée par Me Sophie GILI BOULLANT, avocat au barreau de PARIS, toque : E0818

INTIMEES

S.C.I. SAUVEUR EM prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

Chez ABC LIV

[Adresse 2]

[Localité 5]

S.A.S. NEXITY LAMY, ès qualités de mandataire de la S.C.I. SAUVEUR EM, domiciliée en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 7]

Représentées par Me Vincent GUILLOT-TRILLER, avocat au barreau de PARIS

Assistées de Me Thibault SANCHEZ, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 07 Avril 2022, en audience publique, devant la cour composée de :

Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre

Thomas RONDEAU, Conseiller chargé du rapport,

Michèle CHOPIN, Conseillère

Qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Saveria MAUREL

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre et par Saveria MAUREL, Greffier, présent lors de la mise à disposition.

*****

EXPOSÉ DU LITIGE

Par acte sous seing privé du 11 juillet 2002, la société Sauveur EM a consenti à M. [P] un bail à usage d'habitation portant sur un appartement, situé [Adresse 8].

M. [P] bénéficie d'une mesure de curatelle dite renforcée, confiée à l'association tutélaire ATFPO Paris Est.

Par acte du 21 janvier 2020, le bailleur a fait délivrer au locataire un congé pour vente, à effet du 31 juillet 2020.

Le locataire n'a pas exercé son droit de préemption et s'est maintenu dans les lieux.

Par acte du 20 octobre 2021, la société Sauveur EM, ayant pour mandataire la société Nexity Lamy, a fait assigner M. [P] et l'Association ATFPO Paris Est devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Paris statuant en référé, en validation du congé.

Les défendeurs ont en substance contesté la validité du congé et le décompte présenté par le propriétaire.

Par ordonnance contradictoire du 18 juin 2021, le magistrat saisi a :

- renvoyé les parties à se pourvoir au fond ainsi qu'elles aviseront, mais dès à présent ;

Vu l'urgence,

- déclaré la société Sauveur EM recevable en son action ;

- annulé le congé pour vente délivré le 21 janvier 2020 par la société Sauveur EM à M. [P] ;

- prononcé la résiliation du bail conclu entre les parties aux torts de M. [P], à compter de ce jour ;

- constaté que M. [P] est désormais occupant sans droit ni titre du logement situé [Adresse 8] ; à défaut de libération volontaire, autorisé l'expulsion de M. [P] ainsi que celle de tous occupants de son chef, avec l'éventuel1e assistance de la force publique et d'un serrurier ;

- dit que l'expulsion ne pourra intervenir qu'à l'issue d'un délai de quatre mois après le commandement d'avoir à libérer les lieux qui sera délivré ;

- fixé le montant de l'indemnité mensuelle d'occupation provisionnelle à un montant de 643,80 euros, charges en sus, jusqu'à la libération complète des lieux, et condamné à titre provisionnel M. [P] à en acquitter le paiement intégral ;

- condamné M. [P] à verser à la société Sauveur EM la somme de 490,02 euros, représentant l'arriéré locatif au mois de mai 2021 inclus, rétabli par compensation ;

- rejeté le surplus et toutes autres demandes des parties.

Le premier juge a notamment retenu que M. [P], âgé de 68 ans et dont les ressources annuelles sont inférieures au plafond prévu, devait se voir proposer, en application de l'article 15 III de la loi du 6 juillet 1989, un logement approprié, ce qui n'a pas été fait et commande l'annulation du congé. Il a en revanche prononcé la résiliation du bail pour manquement du locataire à ses obligations.

Par déclaration du 29 octobre 2021, M. [P] et l'Association ATFPO Paris Est ont relevé appel de cette décision.

Dans leurs conclusions remises le 7 février 2022, auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé des prétentions et moyens, M. [P] et l'Association Atfpo Paris Est demandent à la cour, au visa de l'article 122 du code de procédure civile, les articles 484, 834 et 835 564 et suivants du même code, de la loi du 6 juillet 1989, notamment l'article 6, l'article 21, 23, 24, des articles 1302, 1347 et 1724 du code civil, de l'article L. 412-3 du code des procédures d'exécution, de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, de :

- les juger recevables, et bien fondés en leur appel ;

- infirmer l'ordonnance de référé du 18 juin 2021 rendue par le juge des contentieux de la protection près le tribunal judiciaire de Paris ;

Statuant à nouveau,

- faire droit aux fins de non-recevoir qu'ils ont soulevées;

- déclarer la société Sauveur EM irrecevable en son action ;

- dire par conséquent n'y avoir lieu à : résiliation du bail, condamnation et expulsion de M. [P] ;

En tout état de cause,

- faire droit à la fin de non recevoir relative à la résiliation ;

- dire par conséquent n'y avoir lieu à : résiliation du bail, condamnation et expulsion de M. [P] ;

- dire que le loyer, et subsidiairement l'indemnité d'occupation, ne saurait être supérieur à la somme de 643,80 euros ;

En tout état de cause,

- condamner la société Sauveur EM à leur régler les sommes provisionnelles suivantes, à parfaire :

680,94 euros à parfaire au titre de l'indu ;

2.542,50 euros à parfaire au titre du remboursement de charges ;

938 euros diminution de loyer durant travaux ;

total 4161,44 euros ;

- dire ses contestations opposées comme sérieuses ;

Par conséquent,

- dire qu'il n'y a lieu à condamnation de M. [P] ;

- débouter la société Sauveur EM de toutes ses demandes fins et conclusions, y compris en leur appel incident et confirmer la nullité du congé ;

- ordonner à la société Sauveur EM de procéder à la rectification des avis et quittances, et ce depuis le 30 mars 2018 et de les leur communiquer ;

- ordonner en tant que besoin compensation entre les créances réciproques ;

Très subsidiairement,

- les autoriser à régler la créance retenue par mensualité de 50 euros jusqu'à parfait paiement ;

À titre très infiniment subsidiaire,

- juger qu'il pourra bénéficier des plus larges délais pour quitter les lieux ;

En tout état de cause,

- condamner la société Sauveur EM à régler la somme de 3.000 euros à Me [V] [Y] au titre de l'article 37 de la loi sur l'aide juridictionnelle ;

- condamner la société Sauveur EM aux dépens d'appel et de première instance et subsidiairement les laisser à la charge de l'Etat.

M. [P] et l'Association Atfpo Paris Est font état des éléments suivants :

- la SCI Sauveur EM ne communique toujours pas de fiche de propriété à jour, de sorte que, sauf communication d'une fiche de propriété actualisée, la cour infirmera la décision et constatera l'irrecevabilité de l'action pour défaut de qualité, aucune condamnation et expulsion de Monsieur [J] [P] ne pouvant dès lors être prononcées ;

- le juge des référés n'a pas le pouvoir de se prononcer sur une demande de résiliation, s'agissant d'une demande au fond, et ce quels qu'en soient les motifs ;

- s'agissant de la validité du congé, l'âge du locataire lui permet de prétendre aux dispositions relatives à la protection du locataire âgé, sachant qu'il n'est pas imposable et dispose ainsi au sens du texte de revenus modestes, ce qui commande de confirmer la nullité constatée du congé pour vendre ;

- les contestations sur les sommes sollicitées par les intimées sont encore une fois particulièrement fondées, la créance alléguée étant particulièrement critiquable, et conduiront la cour de plus fort à infirmer la décision, la seule créance à retenir étant au bénéfice de M. [P], au titre de l'indu, du remboursement de charges et de la diminution de loyer durant les travaux ;

- il y a lieu de procéder à la rectification des avis et quittances, et ce depuis le 30 mars 2018 et de les leur communiquer ;

- sont sollicités à titre subsidiaire des délais de paiement.

Dans ses conclusions remises le 11 mars 2022, la société Sauveur EM ayant pour mandataire la société Nexity Lamy demande à la cour, au visa de la loi du 6 juillet 1989 et de l'article 1728 alinéa du code civil, de :

- débouter M. [P] et l'Association Tutélaire de la Fédération Protestante des 'uvres dite ATFPO de l'intégralité de leurs demandes, fins et conclusions ;

En conséquence,

- confirmer l'ordonnance de référé rendue le 18 juin 2021 par le Juge des référés près le Tribunal judiciaire de Paris en ce qu'elle a :

déclaré la société Sauveur EM recevable en son action ;

prononcé la résiliation du bail conclu entre les parties aux torts de M. [P], à compter de ce jour ;

constaté que M. [P] est désormais occupant sans droit ni titre du logement situé [Adresse 8] ;

à défaut de libération volontaire, autorisé l'expulsion de M. [P] ainsi que celle de tout occupant de son chef, avec l'éventuelle assistance de la force publique et d'un serrurier ;

fixé le montant de l'indemnité mensuelle d'occupation provisionnelle à un montant de 643.80 euros, charges en sus, jusqu'à la libération complète des lieux, et condamné à titre provisionnel M. [P] à en acquitter le paiement intégral ;

rappelé que l'exécution provisoire de la présente ordonnance est de droit ;

- infirmer l'ordonnance dont il est fait appel en ce qu'elle a :

annulé le congé pour vente qu'elle a délivré le 21 janvier à M. [P] ;

dit que l'expulsion ne pourra intervenir qu'à l'issue d'un délai de quatre mois après le commandement d'avoir à libérer les lieux qui sera délivré ;

condamné M. [P] à lui verser la somme de 490,02 euros, représentant l'arriéré locatif au mois de mai 2021 inclus, rétabli par compensation ;

dit que les dépens de la présente instance seront recouvrés conformément aux dispositions régissant l'aide juridictionnelle ;

Statuant à nouveau,

- juger que le congé pour vente signifié le 21 janvier 2020 à M. [P] est parfaitement régulier ;

En conséquence,

- constater par l'effet du congé donné, l'absence de renouvellement du bail concernant les locaux loués ;

- juger que l'expulsion de M. [P] [J], s'il n'a pas déjà quitté les lieux, pourra intervenir sans délai, sous réserve de la décision à intervenir du Juge de l'exécution près le Tribunal judiciaire de Paris ;

- juger que, concernant les troubles de jouissance commis par le locataire, M. [P] et l'Association Tutélaire de la Fédération Protestante des 'uvres dite ATFPO lui sont redevables in solidum d'une somme de 1.000 euros à titre des dommages et intérêts venant grever l'arriéré locatif ;

En conséquence,

- condamner in solidum M. [P] [J] et l'Association Tutélaire de la Fédération Protestante des 'uvres dite ATFPO à lui verser la somme de 976.73 euros au titre de l'arriéré locatif au mois de janvier 2022, rétabli par compensation ;

- condamner in solidum M. [P] et l'Association Tutélaire de la Fédération Protestante des 'uvres dite ATFPO à lui payer la somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi que les entiers dépens de la première instance.

Y ajoutant, concernant la présente instance,

- condamner in solidum M. [P] [J] et l'Association Tutélaire de la Fédération Protestante des 'uvres dite ATFPO à lui payer la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner les mêmes aux entiers dépens de la présente instance.

La société Sauveur EM ayant pour mandataire la société Nexity Lamy fait état des éléments suivants :

- l'acte notarié est produit ;

- si le juge des référés a prononcé la résiliation du bail, il a précisé qu'il s'agissait d'une décision au provisoire ; la résiliation relève ici de l'évidence, au regard des divers manquements du locataire, s'agissant du non-paiement des loyers et charges, du refus d'accès à son appartement pour réaliser des travaux, du défaut d'entretien ;

- concernant le congé, force est de constater qu'il n'est pas rapporté la preuve que les ressources de M. [P] étaient inférieures au plafond de 13.207 euros applicable au jour de la signification du congé pour vente ; l'expulsion doit intervenir sans délais ;

- les sommes réclamées par l'appelant sont infondées, tant s'agissant de l'indu, des charges locatives, de l'arriéré locatif ou du trouble de jouissance, le locataire ayant été sur ce dernier point d'une particulière mauvaise foi ;

- la cour infirmera l'ordonnance de référé rendue le 18 juin 2021 en ce qu'elle a condamné le locataire à payer la somme de 490,02 euros au titre de l'arriéré locatif, et, statuant à nouveau, la cour le condamnera à lui payer la somme de 976,73 euros au titre de l'arriéré locatif.

SUR CE LA COUR

En application de l'article 835 du code de procédure civile, le président du tribunal judiciaire ou le juge des contentieux de la protection dans les limites de sa compétence, peuvent toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remises en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite. Dans tous les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, ils peuvent accorder une provision au créancier ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.

Le maintien d'un locataire dans les lieux, alors qu'il est devenu occupant sans droit ni titre, caractérise un trouble manifestement illicite. A tout le moins, l'obligation de quitter les lieux est non sérieusement contestable.

En l'espèce, il sera d'abord constaté que la SCI Sauveur EM produit un acte notarié du 18 janvier 2002 démontrant bien qu'elle est propriétaire de l'appartement litigieux (pièce 14).

La décision entreprise sera confirmée en qu'elle a rejeté la fin de non-recevoir pour défaut de qualité à agir, peu importe la date du document prouvant la propriété dont l'authenticité n'est en réalité pas contestée, n'étant pas à exiger du propriétaire qu'il fournisse une fiche de propriété à jour.

Au surplus, il y a lieu de relever :

- que, s'agissant du congé pour vendre, il faut rappeler que l'article 15 III de la loi du 6 juillet 1989 dispose que "le bailleur ne peut s'opposer au renouvellement du contrat en donnant congé dans les conditions définies au paragraphe I ci-dessus à l'égard de tout locataire âgé de plus de soixante-cinq ans et dont les ressources annuelles sont inférieures à un plafond de ressources en vigueur pour l'attribution des logements locatifs conventionnés fixé par arrêté du ministre chargé du logement, sans qu'un logement correspondant à ses besoins et à ses possibilités lui soit offert dans les limites géographiques prévues à l'article 13 bis de la loi n° 48-1360 du 1er septembre 1948 précitée. Le présent alinéa est également applicable lorsque le locataire a à sa charge une personne de plus de soixante-cinq ans vivant habituellement dans le logement et remplissant la condition de ressources précitée et que le montant cumulé des ressources annuelles de l'ensemble des personnes vivant au foyer est inférieur au plafond de ressources déterminé par l'arrêté précité.

[...] L'âge du locataire, de la personne à sa charge et celui du bailleur sont appréciés à la date d'échéance du contrat ; le montant de leurs ressources est apprécié à la date de notification du congé" ;

- qu'il sera relevé ici que le congé pour vendre a été délivré le 21 janvier 2020, à effet au 31 juillet 2020 et qu'à cette date, M. [P] était âgé de 68 ans ;

- que le plafond de ressources applicable pour l'application des dispositions suscitées à [Localité 9], pour une personne seule (pièces 23 et 24 des appelants) est, aux termes de l'arrêté du 29 juillet 1987 en vigueur au 21 janvier 2020, pour les logements autres que ceux mentionnés au II de l'article R. 331-1 du code de la construction et de l'habitation, de 24.006 euros par an ;

- que M. [P] justifie percevoir les APL (310 euros par mois en octobre 2021 pour le montant le plus élevé, pièce 21, soit au maximum 3.720 euros par an) et le minimum retraite (10.549,56 euros pour l'année 2020, pièce 14), en sorte que ses ressources apparaissent bien inférieures en toute hypothèse au plafond fixé ;

- qu'il ne s'est pourtant pas vu proposer un logement correspondant à ses besoins au sens de l'article 15 III de la loi du 6 juillet 1989 ;

- que dans ces circonstances, si le constat de la nullité du congé peut certes excéder les pouvoirs du juge des référés, les appelants font bien à tout le moins état de ce que le maintien dans les lieux du locataire ne caractérise pas un trouble manifestement illicite, l'obligation de quitter les lieux étant aussi sérieusement contestable, de sorte qu'il sera dit n'y avoir lieu à référé sur la demande d'expulsion, avec toutes conséquences de droit, fondée sur le congé ;

- que, concernant la résiliation du bail prononcée par le premier juge, par définition, et en application de l'article 484 du code de procédure civile, une ordonnance de référé est une décision provisoire rendue à la demande d'une partie, l'autre présente ou appelée, dans les cas où la loi confère à un juge qui n'est pas saisi du principal le pouvoir d'ordonner immédiatement les mesures nécessaires ;

- que le juge des référés, juge du provisoire, ne dispose ainsi pas des pouvoirs lui permettant de prononcer la résiliation d'un contrat, une telle demande constituant une prétention relevant des juges du fond, peu important les motifs allégués ;

- qu'il sera précisé que le juge des référés ne s'est ici pas limité à constater l'acquisition d'une clause résolutoire, ce qui aurait pu relever de ses pouvoirs, mais a bien "prononcé" la résiliation, la mention antérieure renvoyant les parties "à se pourvoir au fond ainsi qu'elles aviseront" n'étant pas de nature à empêcher de constater que le premier juge a, à tort, prononcé une mesure ne présentant pas un caractère provisoire ;

- qu'ainsi, la décision ne pourra qu'être infirmée en ce qu'elle a "prononcé la résiliation du bail", l'expulsion avec toutes conséquences de droit ne pouvant dès lors non plus être ordonnée sur ce fondement, la cour disant n'y avoir lieu référé sur ces demandes ;

- que, de plus, la société intimée sollicite en cause d'appel, en prenant en compte 1.000 euros à titre de dommages et intérêts pour les troubles de jouissance, que les appelantes soient condamnées in solidum à lui régler la somme de 976,73 euros au titre de l'arriéré locatif au mois de janvier 2022 ;

- qu'il est constant que cette demande n'est pas formée à titre provisionnel, les appelants relevant à juste titre qu'une telle prétention n'entre pas dans les pouvoirs du juge des référés qui ne peut accorder que des provisions sur le fondement de l'article 835 alinéa 2 du code de procédure civile, la cour ne pouvant donc que dire n'y avoir lieu à référé sur la demande, sans qu'il ne soit nécessaire d'examiner les autres moyens soulevés.

Ainsi, au regard de l'ensemble de ces éléments, il sera dit n'y avoir lieu à référé sur toutes les demandes formées par la SCI Sauveur EM.

Concernant les demandes formées par M. [P] et son curateur, il convient de constater :

- que sont sollicitées à titre provisionnel les sommes suivantes : 680,94 euros au titre de l'indu, 2.542,50 euros à parfaire au titre du remboursement de charges, 938 euros de diminution de loyer durant les travaux ;

- qu'il sera observé, concernant l'indu au titre de l'indexation des loyers, que la SCI Sauveur EM expose qu'une erreur a bien été commise, représentant, comme l'a indiqué le premier juge, une somme mensuelle de 14,93 euros, une rectification ayant été opérée à compter du mois d'octobre 2021, selon la pièce 22 de l'intimée ;

- qu'il résulte donc de cette même pièce, ainsi que l'exposent les appelants, que l'indu de l'indexation représente 537,48 euros au mois de mars 2021 (14,93 X 36 mois), plus 6 mois X 14,93 euros pour les mois d'avril à septembre 2021, outre une somme de 53,88 euros rajoutée en octobre 2021 sans explication, la société intimée ne venant apporter aucun élément probant sur ce point ni ne venant préciser les conditions dans lesquelles elle aurait procédé au remboursement de ces sommes ;

- que c'est donc à juste titre que M. [P] et son curateur sollicitent une condamnation provisionnelle à hauteur de 680,94 euros, correspondant aux sommes qui lui sont incontestablement dues ;

- qu'en revanche, pour le remboursement de charges, si les appelants indiquent que les régularisations annuelles ne sont pas intervenues, la SCI Sauveur EM produit (pièce 24) une régularisation pour les trois derniers exercices ;

- que la production de cette pièce, même tardive, est en tout cas de nature à constituer une contestation sérieuse à l'octroi d'une somme provisionnelle sur ce fondement, ce qui commande de dire n'y avoir lieu à référé à cet égard ;

- que, concernant la provision réclamée pour perte de jouissance au titre de la réalisation de travaux, l'intimée réplique à juste titre que la réparation du dégât des eaux, même si elle l'a empêché d'avoir accès à sa salle de bains, était en réalité prévue depuis deux ans avant la mise en place des travaux effectifs, M. [P] ayant longtemps refusé l'accès de son appartement (ce qui résulte des pièces 7 à 10 et 13) ;

- que l'octroi d'une provision sru ce point se heurte également à des contestations sérieuses, M. [P] ayant rendu particulièrement difficile l'accès à son logement ;

- que, s'agissant enfin de la rectification des avis et quittances depuis le 30 mars 2018 demandée par les appelants, cette demande ne saurait donner lieu à référé, étant observé que la société propriétaire a reconnu à tout le moins l'erreur sur l'indexation, le reste des contestations donnant toujours lieu à contentieux entre les parties.

Dès lors, la cour, par infirmation de la décision entreprise, dira n'y avoir lieu à référé sur l'ensemble des demandes des parties, sauf sur la demande de condamnation provisionnelle formée par les appelants au paiement de la somme de 680,94 euros au titre de l'indu.

Ce qui est jugé en cause d'appel commande de condamner l'intimée aux dépens de première instance et d'appel et de régler au conseil des appelants, bénéficiaires de l'aide juridictionnelle, la somme indiquée au dispositif, sur le fondement de l'article 37 de la loi sur l'aide juridique.

PAR CES MOTIFS

Infirme la décision entreprise en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Condamne la société civile immobilière Sauveur EM à verser à M. [J] [P] et son curateur ATFPO antenne Paris Est la somme provisionnelle de 680,94 euros ;

Dit n'y avoir lieu à référé sur toutes les autres demandes formées par les parties ;

Condamne la SCI Sauveur EM à régler à Me [V] [Y] [M] la somme de 3.000 euros en application de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

Condamne la SCI Sauveur EM aux dépens de première instance et d'appel.

LE GREFFIER LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 2
Numéro d'arrêt : 21/19017
Date de la décision : 25/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-25;21.19017 ?
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