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25/05/2022 | FRANCE | N°21/18636

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 2, 25 mai 2022, 21/18636


Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 2



ARRET DU 25 MAI 2022



(n° , 10 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/18636 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CERWQ



Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 15 Septembre 2021 -Président du TJ de [Localité 8] - RG n° 21/54212





APPELANTE



S.C.I. PARTNER'S, prise en la personne de ses représentants lé

gaux domiciliés en cette qualité audit siège



[Adresse 3]

[Localité 7]



Représentée et assistée par Me Roland PIROLLI, avocat au barreau de PARIS, toque : D0161







IN...

Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 2

ARRET DU 25 MAI 2022

(n° , 10 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/18636 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CERWQ

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 15 Septembre 2021 -Président du TJ de [Localité 8] - RG n° 21/54212

APPELANTE

S.C.I. PARTNER'S, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 3]

[Localité 7]

Représentée et assistée par Me Roland PIROLLI, avocat au barreau de PARIS, toque : D0161

INTIMES

M. [K] [O]

[Adresse 5]

[Localité 8]

Mme [G] [O] épouse [O]

[Adresse 5]

[Localité 8]

S.A.S. AUX BONHEURS

[Adresse 5]

[Localité 8]

Représentés et assistés par Me Laure RYCKEWAERT, avocat au barreau de PARIS, toque : D688

M. [H] [V]

[Adresse 2]

[Localité 6]

Mme [S] [V] épouse [V]

[Adresse 2]

[Localité 6]

Représentés par Me Maud-Elodie EGLOFF, avocat au barreau de PARIS, toque : C1757, substituée par Me Marguerite WARTER, avocat au barreau de STRASBOURG

SYNDICAT DES COPROPRIÉTAIRES DU [Adresse 5], représenté par son Syndic le Cabinet Hugues de LA VAISSIERE, domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 5]

[Localité 8]

Représenté et assisté par Me Anna QUILLIVIC, avocat au barreau de PARIS, toque : B0006

S.A. WAKAM, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 8]

Représentée par Me Caroline HATET-SAUVAL de la SCP SCP NABOUDET - HATET, avocat au barreau de PARIS, toque : L0046

Assistée de Me Anne ROSSI, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 07 avril 2022, en audience publique, Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre, ayant été entendue en son rapport dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile, devant la cour composée de :

Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre

Thomas RONDEAU, Conseiller,

Michèle CHOPIN, Conseillère,

Qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Saveria MAUREL

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre et par Saveria MAUREL, Greffier, présent lors de la mise à disposition.

*****

EXPOSE DU LITIGE

La SCI Partner's est propriétaire d'un local à usage de restaurant au rez-de-chaussée d'un immeuble en copropriété situé [Adresse 5], donné à bail commercial à la société Aux bonheurs, dont la gérante est Mme [G] [O].

Il dépend de ce local commercial un logement, inclu dans le bail, situé au 1er étage de l'immeuble (mais pas au-dessus du local commercial), dans lequel vit M. et Mme [O] et leurs enfants.

Le plafond de ce logement s'est effondré dans la nuit du 5 au 6 décembre 2020, si bien que les occupants ont dû évacuer les lieux. Un arrêté de péril a été pris par la mairie de [Localité 8] le 10 décembre 2020.

Par acte du 13 avril 2021, la société Aux bonheurs et M. et Mme [O] ont fait assigner la société civile immobilière Partner's devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Paris aux fins de voir diminuer le montant du loyer et obtenir le remboursement d'un trop perçu au titre des loyers de décembre 2020 et janvier 2021.

Par actes des 12, 14 et 21 mai 2021, la société Partner's a fait assigner en garantie :

- le syndicat des copropriétaires de l'immeuble, pris en la personne de son syndic la société La Vaissière,

- la société April immobilier, supposé assureur du syndicat des copropriétaires, en réalité simple courtier d'assurance ; l'assureur, la société Wakam, est intervenue volontairement à l'instance ;

- M. et Mme [V], les propriétaires du logement situé au 2ème étage de l'immeuble (au-dessus du local d'habitation endommagé).

La SCI Partner's a sollicité la condamnation du syndicat des copropriétaires à exécuter les travaux de réfection sous astreinte et une mesure d'expertise à titre subsidiaire.

Les deux instances ont été jointes.

Par ordonnance contradictoire du 15 septembre 2021, le juge des référés, a :

- mis hors de cause la société April Immobilier,

- reçu l'intervention volontaire de la société Wakam,

- renvoyé les parties à se pourvoir au fond, ainsi qu'elles en aviseront, mais dès à présent par provision,

- condamné la société civile immobilière Partner's à payer à la société civile immobilière Aux bonheurs la somme provisionnelle de 2.602,04 euros au titre du trop perçu de loyer de décembre 2020 et janvier 2021,

- dit que le loyer du contrat de bail commercial du 17 mars 2003 renouvelé dont est locataire la société Aux Bonheurs suivant cession du 28 octobre 2014 portant sur des locaux situés [Adresse 5] est réduit, à la somme provisionnelle de 1.041 euros, taxes, charges et accessoires inclus, par mois à compter du mois de février 2021 inclus,

- rappelé que la société Aux bonheurs peut récupérer le solde consigné visé dans son assignation,

- ordonné au syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 5] de réaliser les travaux décrits à l'annexe 1 du rapport des services de la Mairie de [Localité 8] du 10 décembre 2020 et dans l'arrêté du Maire de [Localité 8] numéro 20-00109 du 10 décembre 2020 ;

- ordonné au syndicat des copropriétaires de réaliser les travaux de recherche de fuite, réparation des fuites et de prévention de tout effondrement affaissement et désordre de structure identifiés dans l'avis technique de M.[B] [N] du 24 mai 2021 ;

- ordonné une expertise aux frais avancés de la société Partner's aux fins notamment de déterminer la cause des désordres,

- condamné le syndicat des copropriétaires à payer à la société Partner's la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné la société Partner's à payer à la société Aux bonheurs la somme de 2.000 euros sur le fondement des mêmes dispositions,

- condamné la société Partner's à payer à M. et Mme [V] la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, soit 750 € chacun ;

- condamné in solidum le syndicat des copropriétaires et la société Partner's aux entiers dépens.

Le premier juge a considéré :

- que les locataires sont fondés en leur demande de diminution de loyer dès lors qu'il est établi que le bailleur a manqué à son obligation de délivrance,

- que l'action en garantie de la société Partner's se heurte à contestation sérieuse, supposant d'apprécier les responsabilités,

- le syndicat des copropriétaires est tenu d'effectuer des travaux urgents tels que définis par l'architecte de la copropriété et par la mairie de [Localité 8],

- la société Partner's justifie d'un motif légitime à voir ordonner une expertise à ses frais avancés.

Par déclaration du 26 octobre 2021, la société Partner's a relevé appel de cette décision.

Dans ses dernières conclusions remises et notifiées le 21 mars 2022, elle demande à la cour de :

- dire M. et Mme [O] irrecevables à agir en référé à l'encontre de la société civile immobilière Partner's ;

- renvoyer les parties à se mieux pourvoir au fond ;

- dire n'y avoir lieu à référé sur les demandes de la société Aux bonheurs ;

- infirmer en toutes ses dispositions l'ordonnance de référé dont appel, sauf en ce qu'elle a déclaré recevable l'intervention à l'instance de la société d'assurances Wakam, en ce qu'elle a ordonné au syndicat des copropriétaires de procéder aux réfections y énoncées, et en ce qu'elle a condamné le syndicat à payer à la concluante une somme de 2.000 euros en vertu de l'art. 700 du code de procédure civile ;

Et statuant à nouveau,

- en tout cas de figure, dire la société Aux bonheurs mal fondée en sa demande de réfaction et de limitation du loyer contractuel ;

- en conséquence, la condamner à rembourser à la société civile immobilière Partner's les sommes qu'elle a perçues (fût-ce par compensation) en exécution de l'ordonnance de référé entreprise ;

- à titre subsidiaire, limiter cette réfaction à une somme de 400 euros par mois ;

- en conséquence, la condamner à rembourser à la société civile immobilière Partner's les sommes qu'elle a perçues (fût-ce par compensation) au-delà de cette somme, par exécution de l'ordonnance de référé entreprise ;

- dire que toute réfaction sur le loyer a pris fin à compter du 27 février 2022, et que le loyer contractuel au taux plein droit à partir de cette date être payé par la société Aux bonheurs à la société civile immobilière Partner's ;

- condamner solidairement ou in solidum le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5], la société anonyme d'assurances Wakam, M. [V] et Mme [V] à relever et garantir la société civile immobilière Partner's de toutes condamnations quelconques qui seraient mises à sa charge en faveur de la société Aux bonheurs, que ce soit à titre (provisionnel) principal, d'intérêts légaux, de dommages et intérêts, au titre des dépens et de l'article 700 du code de procédure civile, de manière générale à quelque titre que ce soit ;

- subsidiairement, condamner le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] seul à relever et garantir la société civile immobilière Partner's de toutes condamnations quelconques qui seraient mises à sa charge en faveur de la société Aux bonheurs ;

- dire n'y avoir lieu à mesure d'expertise ;

- subsidiairement et en cas contraire, dire que le syndicat des copropriétaires fera l'avance des frais d'expertise ;

- condamner solidairement ou in solidum les mêmes parties que ci-dessus ou bien le syndicat seulement aux dépens légaux, de première instance comme d'appel.

Dans ses dernières conclusions remises et notifiées le 7 mars 2022, le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] demande à la cour, de :

- débouter la société civile immobilière Partner's de l'ensemble de ses demandes à l'endroit du syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] ;

- et confirmant l'ordonnance de référé en date du 15 septembre 2021 de :

* dire n'y avoir lieu à condamnation sous astreinte à son endroit concernant la réalisation des travaux dans l'entrée de l'appartement appartenant à la société civile immobilière Partner's ;

* confirmer la mesure d'expertise aux frais avancés de la société civile immobilière Partner's ;

* condamner s'il y a lieu, la société Wakam à relever et garantir le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] de toutes condamnations éventuelles qui pourraient être mises à sa charge ;

* recevoir le syndicat des copropriétaires du [Adresse 4] en son appel incident et réformer l'ordonnance de référé en ce qu'elle a condamné le syndicat des copropriétaires à payer à la société civile immobilière Partner's la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la société civile immobilière Partner's à payer au syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] la somme de 2. 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens ;

Dans ses dernières conclusions remises et notifiées le 6 janvier 2022, la société Wakam demande à la cour de :

- confirmer l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions ;

- rejeter toutes demandes formées à l'encontre de Wakam en présence de contestations sérieuses ;

- rejeter toutes autres demandes plus amples ou contraires ;

- condamner tout succombant à payer à la société Wakam la somme de 3.000 euros en applications des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner tout succombant aux dépens.

Dans leurs dernières conclusions remises et notifiées le 28 mars 2022, la société Aux bonheurs et les époux [O] demandent à la cour de :

- confirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a :

condamné la société civile immobilière Partner's à verser à la société Aux bonheurs une provision à hauteur de 2.602,04 euros, au titre du loyer trop versé pour les mois de décembre 2020 et janvier 2021,

autorisé la société Aux bonheurs à limiter le loyer et les provisions sur charges à compter du mois de février 2021 à la somme de 1.041 euros jusqu'à la restitution des lieux, et l'autoriser à se voir restituer les sommes d'ores et déjà déposées sur le compte CARPA créé spécifiquement pour recevoir le solde du loyer,

condamné la société civile immobilière Partner's à verser à la société Aux bonheurs d'une part, et à M. et Mme [O] d'autre part la somme de 2.000 euros sur la base des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens de première instance,

- condamner la société civile immobilière Partner's à une somme supplémentaire de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de l'appel.

Dans leurs dernières conclusions remises et notifiées le 13 janvier 2022, M. et Mme [V] demandent à la cour de :

- les déclarer recevables en leurs conclusions ;

- confirmer l'ordonnance de référé rendue le15 septembre 2021 dans toutes ses dispositions ;

- déclarer la société civile immobilière Partner's irrecevable en ses demandes ;

- débouter la société civile immobilière Partner's de ses demandes ;

- condamner la société civile immobilière Partner's à payer à Mme et M. [V] la somme de 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens ;

Pour l'exposé des prétentions et moyens des parties, il est renvoyé à leurs dernières conclusions susvisées conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

SUR CE, LA COUR

Sur les fins de non-recevoir

La fin de non-recevoir soulevée par la société bailleresse à l'encontre des époux [O]

La société Partner's soulève l'irrecevabilité de l'action de M. et Mme [O] à son encontre pour défaut de qualité dès lors que seule la société Aux Bonheurs a la qualité de locataire.

Les époux [O] répliquent que personnes physiques exerçant au sein du restaurant exploité au rez-de-chaussée du local, objet du bail, et étant seuls à être autorisés au titre du même bail à demeurer dans l'appartement annexé au local commercial, ils ont un intérêt évident à agir en ce qu'ils ont été privés du logement, lequel correspond à leur résidence principale. Ils ajoutent que leur qualité à agir découle de leur intérêt à agir, cela conformément à la doctrine unanime selon laquelle en l'absence de titre légal attribuant précisément l'action en justice à certaines personnes, a qualité pour agir celui qui a un intérêt personnel au succès ou au rejet d'une prétention.

Si le bail commercial en cause est consenti à la société Aux bonheurs, laquelle a la qualité de locataire, sa gérante Mme [O] ainsi que son conjoint et ses enfants sont occupants du chef de ladite société du local d'habitation dépendant du bail commercial, et cela avec l'accord de la bailleresse.

Dès lors, M. et Mme [O] ont bien qualité à agir en justice aux côtés de la société Aux bonheurs, étant observé que la demande principale de diminution du loyer est à bon droit formée par la société Aux bonheurs, titulaire du bail.

La fin de non-recevoir sera donc rejetée.

La fin de non-recevoir soulevée par M. et Mme [V]

S'il est certain que M. et Mme [V] sont des tiers au bail commercial conclu entre la société Partner's et la société Aux bonheurs, la société Partner's a intérêt à agir à leur encontre au titre de l'action en garantie qu'elle forme à l'encontre des potentiels responsables de l'effondrement du plafond de l'appartement qu'elle donne à bail à la société Aux bonheurs, au rang desquels M. et Mme [V], le plafond de l'appartement endommagé correspondant au plancher de l'appartement des époux [V] et l'architecte de la copropriété ayant identifié un défaut d'étanchéité de la salle de bains de l'appartement de ces derniers.

Cette fin de non-recevoir sera donc elle aussi rejetée.

Sur l'action de la société Aux bonheurs et des époux [O] contre la société Partner's en diminution du loyer

La société Partner's demande à titre principal qu'il soit dit n'y avoir lieu à référé sur cette demande, arguant de l'existence d'une contestation sérieuse, et à titre subsidiaire, que la diminution du loyer prononcée par le premier juge soit limitée à 400 euros par mois. Elle demande en outre, au titre de son subsidiaire, que soit fixé au 27 février 2022 le terme de la mesure de réduction du loyer, date à laquelle les travaux de réfection réalisés par le syndicat des copropriétaires ont été terminés.

La société Partner's considère qu'il y a contestation sérieuse en ce que ni l'article 1719 du code civil ni la législation des baux d'habitation n'est applicable en l'espèce, s'agissant d'un bail commercial qui relève pour le tout de la législation des baux commerciaux.

La société Aux bonheurs réplique que selon la Cour de cassation, les articles 1719 et 1720 du code civil sont bien applicables à un bail commercial comportant une partie habitation; qu'en l'espèce la société Partner's a failli aux obligations résultant de ces textes et que la locataire est bien fondée en son action en référé aux fins de diminution du loyer en application des dispositions des articles 834 et 835 du code de procédure civile qui ont toutes vocation à s'appliquer dès lors que :

- il y a urgence, eu égard à la situation des consorts [O] qui demeurent dans un studio dans l'attente de pouvoir réintégrer l'appartement du bail,

- qu'il n'y a aucune contestation sérieuse quant à l'état du logement, qui est totalement inhabitable, ce qui ressort de l'arrêté pris par le maire, de l'attestation de l'architecte missionné par la copropriété et du constat d'huissier de justice établi le 21 mai 2021,

- qu'il n'y a aucune contestation sérieuse quant à l'obligation du bailleur de fournir un logement décent à la société Aux bonheurs.

Elle ajoute que si les travaux de réparation du plafond sont terminés, les travaux intérieurs n'ont pas été réalisés par la société bailleresse afin de rendre le logement habitable, et que s'agissant du montant de la réduction sollicitée et ordonnée par le premier juge, elle s'appuie sur des loyers de logements comparables dont ils ont justifiés.

Aux termes des articles 1719 et 1720 du code civil, le bailleur est obligé, par la nature du contrat, et sans qu'il soit besoin d'aucune stipulation particulière, de délivrer au preneur la chose louée et, s'il s'agit de son habitation principale un logement décent, d'entretenir cette chose en état de servir à l'usage pour lequel elle a été louée et d'y faire, pendant la durée du bail, toutes les réparations qui peuvent devenir nécessaires, autres que les locatives.

En l'espèce, il est constant que le bail commercial conclu entre la société Partner's et la société Aux bonheurs comporte une partie habitation, en sorte que le bailleur se trouve bien soumis aux obligations prévues aux articles 1719 et 1720 du code civil. Il est par ailleurs acquis aux débats, comme cela résulte notamment des certificats de scolarité des enfants [O] portant l'adresse du [Adresse 5], que le logement inclus dans le bail commercial constitue bien l'habitation principale de la famille [O].

Il n'est pas plus contestable que du fait de l'effondrement du plafond de ce logement en décembre 2020, celui ci est devenu inhabitable comme en atteste d'ailleurs et notamment un procès- verbal de constat d'huissier du justice du 21 mai 2020.

Il n'est pas non plus contesté que le syndicat des copropriétaires a terminé les travaux de reprise qui ont été mis à sa charge par l'ordonnance entreprise et que leur réception a été prononcée le 26 janvier 2022 ainsi qu'il ressort du procès-verbal de réception versé aux débats.

En outre, il résulte de la lettre de mise en demeure qui a été adressée le 15 février 2022 par le syndic de la copropriété à la SCI Partner's aux fins de voir exécuter les travaux privatifs, le logement comportant une douche sans étanchéité et sans façade, et aussi de photographies versés aux débats par les époux [O], que le logement objet du bail n'est toujours pas habitable contrairement à ce que soutient la société Partner's, laquelle ne produit aucun constat d'huissier de justice pour établir le contraire.

Il s'ensuit qu'incontestablement, du fait du sinistre survenu en décembre 2020 le bailleur manque à son obligation de délivrance et de réparations résultant des dispositions des articles 1719 et 1720 du code civil, causant ainsi à sa locataire un trouble manifestement illicite en ce que celle-ci se trouve privée de la possibilité de jouir de la partie habitation des lieux loués tout en devant poursuivre le paiement du loyer contractuel, et obligée de payer un loyer pour un logement provisoire.

Aux termes de l'article 835 code de procédure civile, le juge des référés peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé des mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite. Dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, il peut accorder une provision au créancier.

C'est donc à bon droit que le premier juge a fait cesser le trouble manifestement illicite subi par la société locataire en réduisant le loyer contractuel de la part afférente au logement et en lui allouant la partie du loyer payée indûment pour les termes échus de décembre 2020 et janvier 2021, cela à titre provisionnel.

Il apparaît toutefois, à l'examen des termes de comparaison produits par la société locataire, que la réfaction opérée sur le loyer a été un peu surévaluée. Il résulte en effet de ces loyers de comparaison, rapprochés avec le logement en cause, que la valeur locative de ce logement s'établit plutôt à 1100 euros, charges comprises.

Aussi, le loyer charges comprises du bail commercial s'établissant à 2481,42 euros, il sera dit, par infirmation de l'ordonnance déférée, que le loyer du bail commercial est réduit à la somme provisionnelle de 1381,42 euros taxes et charges incluses (et non à 1041 euros). Cette mesure doit se poursuivre dès lors qu'il n'est pas justifié par la bailleresse qu'elle a mis fin au trouble.

Par ailleurs, la provision au titre des termes de décembre 2020 et janvier 2021 sera ramenée à 2.200 euros (1.100 euros X 2) .

Sur l'exécution des travaux urgents par le syndicat des copropriétaires

La décision entreprise n'est pas discutée en ce qu'elle a ordonné au syndicat des copropriétaires, et cela sans astreinte, de réaliser les travaux décrits à l'annexe 1 du rapport des services de la mairie de [Localité 8] du 10 décembre 2020 et dans l'arrêté du maire de [Localité 8] numéro 20-00109 du 10 décembre 2020. Il n'est d'ailleurs pas plus discuté que ces travaux ont été réalisés.

Il y a lieu à confirmation de ce chef.

Sur l'action en garantie de la société Partner's contre le syndicat des copropriétaires, l'assureur de ce dernier (la société Wakam) et les époux [V]

L'action en garantie qui est formée par la société Partner's à l'encontre des parties qu'elle estime responsables des désordres est en l'état sérieusement contestable, dès lors que les responsabilités potentielles ne sont pas en l'état déterminées et ne pourront précisément l'être qu'au moyen d'une expertise amiable ou judiciaire.

En effet, selon la note technique établie le 24 mai 2021 par l'architecte de la copropriété, il existe trois causes possibles aux désordres : le mauvais état de la descente d'eau usée, le mauvais état des salles d'eau en parties privatives et particulièrement la pièce d'eau du 1er étage (logement inclus au bail commercial conclu entre la société Partner's à la société Aux bonheurs) dont la douche a été placée dans un placard, mais aussi la salle d'eau du 2ème étage en contre pente et sans étanchéité (logement des époux [V]).

C'est donc à bon droit que le premier juge a dit n'y avoir lieu à référé sur l'action en garantie de la société Partner's et sur l'action en garantie du syndicat des copropriétaires.

L'ordonnance sera confirmée de ces chefs.

Sur la demande d'expertise

Cette mesure a été sollicitée en première instance par la société Partners's qui en appel la considère désormais inutile et indique n'avoir pas consigné la provision mise à sa charge par le premier juge qui a ordonné cette mesure.

Le syndicat des copropriétaires sollicite la confirmation de la mesure d'instruction, s'opposant à toute consignation.

Cette mesure d'instruction est effectivement indispensable pour déterminer les responsabilités encourues et permettre qu'il soit ultérieurement statué sur les actions en garantie. Par ailleurs, il est constant qu'aucune expertise amiable n'a été mise en oeuvre par les parties intéressées.

Il ya donc lieu, sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile, de confirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a ordonné une mesure d'expertise aux frais avancés de la société Partner's, laquelle y a le plus intérêt dès lors qu'elle entend agir en garantie contre le syndicat des copropriétaires et son assureur et à l'encontre de M. et Mme [V].

Il convient d'impartir à la société Partner's un nouveau délai pour consigner la provision de 5000 euros mise à sa charge.

Sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile

La premier juge a exactement statué sur les dépens en les mettant à la charge in solidum de la société Partner's et du syndicat des copropriétaires, parties perdantes, de même que sur l'application de l'article 700 au profit de la société Aux bonheurs.

En revanche, il n'y a pas lieu à condamnation du syndicat des copropriétaires au paiement d'une indemnité à la société Partner's au titre de l'article 700 du code de procédure civile, alors qu'il est dit n'y avoir lieu à référé sur l'action en garantie de la SCI Partner's. En outre, il n'est pas inéquitable de laisser à la charge des époux [V] leurs frais irrépétibles de première instance.

L'ordonnance sera infirmée de ces chefs.

En appel, la SCI Partner's perdant pour l'essentiel, elle sera condamnée aux entiers dépens de cette instance et à payer à la société Aux bonheurs et aux époux [O] la somme globale de 4000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Au regard de l'équité et des responsabilités potentielles encourues, il sera laissé à la charge du syndicat des copropriétaires, de son assureur la société Wakam et des époux [V] la charge de leurs frais irrépétibles exposés en appel.

PAR CES MOTIFS

Rejette les fins de non-recevoir,

Confirme l'ordonnance entreprise, sauf sur le montant provisionnel de la réfaction du loyer et sur l'application de l'article 700 du code de procédure civile,

Statuant à nouveau de ces chefs,

Condamne la société civile immobilière Partner's à payer à la société civile immobilière Aux bonheurs la somme provisionnelle de 2.200 euros au titre du trop perçu de loyer de décembre 2020 et janvier 2021,

Dit que le loyer du contrat de bail commercial liant la société Partner's à la société Aux bonheurs est réduit à la somme provisionnelle de 1381,42 euros taxes, charges et accessoires inclus, par mois à compter du mois de février 2021 inclus,

Dit n'y avoir lieu à condamnation du syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] au paiement d'une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de M.et Mme [V],

Y ajoutant,

Dit que la société Partner's devra consigner la provision de 5.000 euros à valoir sur les frais d'expertise avant le 30 juin 2022, à la Régie d'avances et de recettes du tribunal judiciaire de Paris,

Condamne la société Partner's aux entiers dépens de l'instance d'appel,

La condamne à payer à la société Aux bonheurs et à M. et Mme [O] la somme globale de 4.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

Rejette toute demande plus ample ou contraire.

LE GREFFIER LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 2
Numéro d'arrêt : 21/18636
Date de la décision : 25/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-25;21.18636 ?
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