Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 1 - Chambre 9
ORDONNANCE DU 24 MAI 2022
Contestations d'Honoraires d'Avocat
(N° /2022, 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/00532 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CAW35
NOUS, Laurence CHAINTRON, Conseillère à la Cour d'Appel de PARIS, agissant par délégation de Monsieur le Premier Président de cette Cour, assistée de Eléa DESPRETZ, Greffière présente lors des débats et de Vanessa ALCINDOR, Greffière présente lors de la mise à disposition au greffe.
Vu le recours formé par :
Monsieur [Z] [O]
[Adresse 1]
[Localité 4]
Comparant en personne,
Demandeur au recours,
contre une décision du Bâtonnier de l'ordre des avocats de [Localité 3] dans un litige l'opposant à :
Maître SEVERINE [K]
[Adresse 2]
[Localité 3]
Comparante en personne,
Défenderesse au recours,
Par décision contradictoire, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, après avoir entendu les parties présentes à notre audience du 19 Avril 2022 et pris connaissance des pièces déposées au Greffe,
L'affaire a été mise en délibéré au 24 Mai 2022 :
Vu les articles 174 et suivants du décret du 27 novembre 1991 ;
****
Au mois d'août 2018, M. [Z] [O] a confié à Me [U] [K] la défense de ses intérêts dans le cadre d'une procédure de divorce, tant sur le plan pénal, que civil.
Aucune convention d'honoraires n'a été signée entre les parties.
Par courrier recommandé avec demande d'avis de réception du 14 janvier 2019, M. [O] a saisi le bâtonnier de l'ordre des avocats du barreau de Paris d'une demande de remboursement partiel des honoraires versés à Me [K], soit 650 euros TTC.
Par décision contradictoire du 12 septembre 2019, la déléguée du bâtonnier a :
- débouté M. [O] de sa demande ;
- fixé à la somme de 1 875 euros le montant des honoraires dus par M. [O] à Me [K] pour le suivi de son dossier ;
- constaté que M. [O] a réglé 850 euros à titre de provision sur cette somme ;
- dit que M. [O] devra régler le solde à Me [K], soit 1 025 euros ;
- dit que M. [O] devra régler les frais de signification de la décision s'il y avait lieu d'y recourir,
- rejeté toutes autres demandes.
La décision a été notifiée aux parties par lettres recommandées avec avis de réception en date du 16 septembre 2019 dont l'AR a été signé le 20 septembre 2019 par M. [O] et est revenue avec la mention 'pli avisé et non réclamé' par Me [K].
Par lettre recommandée avec avis de réception du 12 octobre 2019, le cachet de la poste faisant foi, M. [O] a formé un recours contre la décision précitée.
Les parties ont été convoquées à l'audience du 18 janvier 2022 par lettres recommandées avec avis de réception en date du 5 octobre 2021 dont M. [O] a signé l'AR le 7 octobre 2021 et qui est revenue avec la mention 'pli avisé et non réclamé' par Me [K].
A l'audience, l'affaire a été renvoyée au 22 mars 2022 pour citation de Me [K] par M. [O].
Par exploit d'huissier du 7 mars 2022, M. [O] à fait citer Me [K] pour l'audience du 22 mars 2022 suivant procès verbal article 659 du code de procédure civile.
A l'audience du 22 mars 2022, l'affaire a été renvoyée au 19 avril 2002 pour convocation de Me [K] à sa nouvelle adresse.
Me [K] a été convoquée à cette audience par lettre recommandée avec avis de réception en date du 22 mars 2022 dont elle a signé l'AR le 23 mars 2022.
A l'audience, M. [O] a sollicité l'infirmation de la décision déférée et le remboursement de la somme versée à son avocate d'un montant de 850 euros TTC.
Me [K] a sollicité la confirmation de la décision déférée en ce qu'elle a condamné M. [O] à lui payer la somme de 1 025 euros. Elle a par ailleurs sollicité la condamnation de M. [O] à lui payer la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
SUR CE,
Sur les honoraires
A l'appui de ses prétentions, M. [O] expose que Me [K] lui avait demandé au titre de ses honoraires la somme forfaitaire de 850 euros pour la procédure pénale et le début de la procédure civile. Il fait valoir qu'aucune convention d'honoraires n'a été signée entre les parties et qu'aucune facture ne lui a été adressée. Il relève qu'à l'exception d'un rendez-vous, d'un courrier adressé à son ex épouse et de 2 appels téléphoniques, aucune diligence n'a été effectuée par Me [K]. Il indique avoir dû changer d'avocat et précise que Me [K] n'a pas transféré le dossier à sa nouvelle avocate.
En réplique, Me [K] soutient avoir effectué de nombreuses diligences. Elle expose que la mission confiée par M. [O] était délicate car sa fille mineure se plaignait d'attouchements sexuels et que son ex-épouse l'accusait de consommer de la cocaïne et de l'alcool. Elle estime avoir accompli son devoir de conseil, essayé d'organiser un droit de visite pour son client et d'entrer en contact avec la mère. Elle indique avoir adressé à M. [O] par courrier du 5 août 2018 une convention d'honoraires. Elle affirme avoir consacré à ce dossier 7,5 heures de travail.
Le recours de M. [O] qui a été effectué dans le délai d'un mois prévu par l'article 176 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 est recevable.
Les pièces communiquées par les parties établissent que Me [K] est intervenue pour le compte de M. [O] à compter du mois d'août 2018 jusqu'au mois d'octobre 2018 dans le cadre d'une procédure de divorce avec un volet pénal et un volet civil.
Pour connaître les conditions financières de l'intervention de Me [K] pour le compte de M. [O], et les diligences que l'avocate revendique, il y a lieu de se reporter aux documents suivants :
- un document intitulé 'CONVENTION D'HONORAIRES' qui prévoyait le versement d'une provision sur honoraires d'un montant de 850 euros en août 2018 et une facturation au temps passé sur la base d'un taux horaire hors frais de 250 euros que Me [K] soutient avoir adressée à M. [O] par courrier du 5 août 2018, laquelle n'est pas signée par ce dernier,
- une note d'honoraires n° 18101 du 18 octobre 2018 d'un montant de 1 875 euros,
- une fiche de diligences dressée pour le bâtonnier dans laquelle Me [K] a notamment indiqué que :
* elle a 20 ans d'exercice en qualité d'avocate et exerce seule en structure individuelle,
* l'affaire était délicate, une plainte ayant été déposée à l'encontre de son client par sa fille mineure pour attouchements sexuels,
* 2 rendez-vous se sont tenus les 3 et 5 août 2018 d'une durée respective de 2 heures et 1 heure,
* 5 entretiens téléphoniques d'une durée comprise entre 10 minutes et 30 minutes chacun ont eu lieu,
* 5 courriers ont été adressés et reçus pour un temps de travail d'une heure 30,
* elle a consacré à l'examen du dossier 1 heure de travail,
* au total, elle a consacré au dossier 7,5 heures de travail,
* son taux horaire est de 250 euros,
* les diligences ont été accomplies entre le 3 août 2018 et le 18 octobre 2018,
* le montant total de ses honoraires est de 1 875 euros, sur lequel elle a perçu la somme de 850 euros, soit un solde d'honoraires restant dû de 1 025 euros.
Me [K] ne produit aucun document démontrant que M. [O] ait accepté les conditions financières de son intervention, de sorte qu'il est retenu qu'aucune convention d'honoraires n'a été signée, ni conclue par les parties.
Ainsi, à défaut d'une telle convention d'honoraires, il convient pour fixer les honoraires dus à Me [K] à compter du mois d'août 2018 jusqu'au mois d'octobre 2018 de faire application des dispositions de l'article 10 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 modifié par la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 qui dispose notamment que : ' Les honoraires tiennent compte, selon les usages, de la situation de fortune du client, de la difficulté de l'affaire, des frais exposés par l'avocat, de sa notoriété et des diligences de celui-ci.'
Force est de constater que l'application littérale de l'article 10 de la loi précitée dans ce dossier présente des difficultés dès lors que l'avocate ne justifie pas avoir communiqué à son client son taux horaire HT habituel, M. [O] contestant avoir reçu la convention d'honoraires prétendument adressée le 5 août 2018. Par ailleurs, aucune information sur la situation de fortune de M. [O] n'a été communiquée.
Pour ces motifs, nous fixerons les honoraires de manière forfaitaire comme l'a fait le bâtonnier de Paris, en ne tenant compte que des diligences que Me [K] justifie dans la présente instance.
Les parties admettent que :
- un rendez-vous s'est tenu au cabinet de Me [K],
- des entretiens téléphoniques ont eu lieu entre elles.
Par ailleurs, Me [K] a dû examiner le dossier.
Elle verse aux débats :
- un projet de courrier à l'attention de l'ex-épouse de M. [O] adressé à son client par courriel du 28 août 2018,
- un courriel de M. [O] du 3 septembre 2018 lui transférant un courriel de son ex épouse,
- un courrier adressé à la brigade de protection de la famille le 15 septembre 2018 sollicitant d'être informée de l'état d'avancement du dossier,
- des échanges de courriels entre M. [O] et son ex-épouse.
Aucun acte de procédure, aucun document d'analyse du dossier de son client, aucune consultation n'est versée aux débats par Me [K].
Le dossier s'inscrivait dans un contexte délicat d'accusations d'attouchements sur une enfant mineure et de consommation de drogue et alcool.
Au vu de l'ensemble de ces éléments, et au regard du faible nombre de diligences justifiées par Me [K], il y a lieu de fixer à la somme de 850 euros TTC le montant des honoraires dus par M. [O] à Me [K] au titre des diligences effectuées, étant rappelé que Me [K] ne conteste pas que cette somme lui a déjà été réglée par M. [O]. Celui-ci sera débouté par voie de conséquence de sa demande de remboursement de la somme de 850 euros TTC.
La décision déférée est donc infirmée de ce chef.
Sur les autres demandes
Il n'apparaît pas inéquitable de laisser à la charge de Me [K] les frais irrépétibles qu'elle a été contrainte d'engager pour assurer la défense de ses intérêts. Elle sera par conséquent déboutée de sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
M. [O], partie perdante, sera condamné aux dépens en application des dispositions de l'article 696 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
Statuant en dernier ressort, par ordonnance contradictoire, et par mise à disposition de la décision au greffe,
Infirmons la décision déférée rendue par la déléguée du bâtonnier de l'ordre des avocats du barreau de Paris du 12 septembre 2019 ;
Statuant à nouveau des chefs de la décision infirmée et y ajoutant,
Fixons les honoraires dus par M. [Z] [O] à Me [U] [K] à la somme de 850 euros TTC ;
Constatant que M. [Z] [O] a réglé à Me [U] [K] la somme de 850 euros TTC;
Déboutons M. [Z] [O] de sa demande de remboursement d'honoraires ;
Disons n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamnons M. [Z] [O] aux dépens de la présente instance ;
Rejetons toute autre demande ;
Disons qu'en application de l'article 177 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991, l'ordonnance sera notifiée aux parties par le greffe de la cour suivant lettre recommandée avec accusé de réception.
LA GREFFIERE LA PRÉSIDENTE