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24/05/2022 | FRANCE | N°19/00369

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 9, 24 mai 2022, 19/00369


Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 9



ORDONNANCE DU 24 MAI 2022

Contestations d'Honoraires d'Avocat

(N° /2022, 6 pages)







Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/00369 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CAC33





NOUS, Laurence CHAINTRON, Conseillère à la Cour d'Appel de PARIS, agissant par délégation de Monsieur le Premier Président de cette Cour, assistée de Eléa DESPRET

Z, Greffière présente lors des débats et de Vanessa ALCINDOR, Greffière présente lors de la mise à disposition au greffe.





Vu le recours formé par :





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Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 9

ORDONNANCE DU 24 MAI 2022

Contestations d'Honoraires d'Avocat

(N° /2022, 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/00369 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CAC33

NOUS, Laurence CHAINTRON, Conseillère à la Cour d'Appel de PARIS, agissant par délégation de Monsieur le Premier Président de cette Cour, assistée de Eléa DESPRETZ, Greffière présente lors des débats et de Vanessa ALCINDOR, Greffière présente lors de la mise à disposition au greffe.

Vu le recours formé par :

Maître [C] [P]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Comparant en personne,

Demandeur au recours,

contre une décision du Bâtonnier de l'ordre des avocats de PARIS dans un litige l'opposant à :

Madame [N] [B]

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Alice CHANTRE, avocat au barreau de PARIS

Défendeur au recours,

Par décision contradictoire, statuant publiquement, par mise à disposition au Greffe, après avoir entendu les parties présentes à notre audience du 14 Avril 2022 et pris connaissance des pièces déposées au Greffe,

L'affaire a été mise en délibéré au 24 Mai 2022 :

Vu les articles 174 et suivants du décret du 27 novembre 1991 ;

****

Au cours de l'année 2018, Mme [N] [B] a confié à Me [C] [P] la défense de ses intérêts dans le cadre d'un dossier de responsabilité médicale à la suite de soins dentaires dont elle n'était pas satisfaite.

Aucune convention d'honoraires n'a été signée entre les parties.

Par courrier du 21 décembre 2018, Mme [B] a dessaisi Me [P] de sa mission.

Par courrier recommandé avec avis de réception du 23 janvier 2019, Mme [B] a saisi le bâtonnier de l'ordre des avocats du barreau de Paris d'une demande de contestation des honoraires sollicités par son avocat.

Par décision réputée contradictoire du 4 juin 2019, la déléguée du bâtonnier a :

- fixé à la somme de 3 600 euros HT (trois mille six cents euros HT) le montant total des honoraires dus à Me [P] par Mme [B] ;

- constaté le versement d'une somme de 1 500 euros HT ;

- dit en conséquence que Mme [B] devra verser à Me [P] une somme de 2 100 euros HT (deux mille cent euros HT), outre la TVA au taux de 20 % et ce, avec intérêts de droit au taux légal à compter du 23 janvier 2019, date de la saisine du bâtonnier;

- dit qu'en cas de signification de la décision, les frais d'huissier seront mis à la charge de Mme [B] ;

- débouté les parties de toutes autres demandes, plus amples ou complémentaires.

La décision a été notifiée aux parties par lettres recommandées avec avis de réception en date du 06 juin 2019 dont elles ont signé les AR le 07 juin 2019.

Par lettre recommandée avec avis de réception du 29 juin 2019, le cachet de la poste faisant foi, Me [P] a formé un recours contre la décision précitée.

Les parties ont été convoquées à l'audience du 13 octobre 2021 par lettres recommandées avec avis de réception en date du 07 juillet 2021 dont Me [P] a signé l'AR le 09 juillet 2021 et Mme [B] le 12 juillet 2021.

A l'audience à laquelle a comparu Me [P], l'affaire a été renvoyée au 27 janvier 2022.

Mme [B] a été convoquée à cette audience par lettre recommandée avec avis de réception en date du 13 octobre 2021 dont Mme [B] a signé l'AR sans date.

A cette audience à laquelle a comparu Me [P], l'affaire a été renvoyée au 14 avril 2022.

Par conclusions déposées et soutenues oralement à l'audience du 14 avril 2022, Me [P] demande de :

- dire que Mme [B] reste redevable à son égard de la somme de 5 400 euros HT (soit 300 euros HT x 18 heures), outre la TVA au taux de 20 %,

- dire qu'il sera déduit de cette somme, la somme de 1 500 euros HT réglée à titre de provision.

Par conclusions déposées et soutenues oralement à l'audience, Mme [B] demande, au visa des articles 174 et suivants du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991, 10 à 14 du décret n° 2005-790 du 12 juillet 2005, de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971, de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 et de l'article 700 du code de procédure civile, de :

À titre principal

- débouter Me [P] de l'ensemble de ses demandes,

- infirmer la décision du bâtonnier du 4 juin 2019,

En conséquence, statuant de nouveau :

- ramener le taux horaire à retenir, faute de convention d'honoraires, à de plus justes proportions, lequel ne saurait excéder 200 euros HT,

- fixer à la somme de 1 500 euros HT le montant total des honoraires dus à Me [P],

- constater le versement de la somme de 1 500 euros HT à Me [P],

- dire en conséquence qu'elle n'est plus redevable d'aucune somme à l'égard de Me [P],

Subsidiairement,

- débouter Me [P] de l'ensemble de ses demandes,

- confirmer la décision en toutes ses dispositions,

En tout état de cause,

- condamner Me [P] à verser la somme de 1 200 euros à Me [F] [H] sur le fondement de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 et de l'article 700 du code de procédure civile, Me [F] [H] renonçant le cas échéant à percevoir la part contributive de l'État allouée au titre de l'aide juridictionnelle, et à défaut, condamner Me [P] à verser la somme de 1 200 euros à Me [F] [H] sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile si toutefois Mme [B] n'était pas admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle,

- condamner en outre Me [P] aux entiers dépens.

SUR CE,

Sur les honoraires

A l'appui de ses prétentions, Mme [B] expose que, victime d'une erreur médicale dans le cadre de soins dentaires, elle a souhaité confier la défense de ses intérêts à Me [P] en remplacement d'un précédent conseil dont elle n'était pas satisfaite. Elle soutient que Me [P] ne l'a pas informée des modalités de détermination de ses honoraires, ni de l'état d'avancement de son dossier et qu'il a omis de se constituer aux lieux et places de son précédent conseil. Elle estime qu'elle n'a eu d'autre choix que de le dessaisir par courrier du 21 décembre 2018. Elle relève l'absence de convention d'honoraires signée entre les parties. Elle allègue que la réalité des diligences n'est pas justifiée par l'intimé. Elle expose avoir réglé une provision d'un montant de 1 500 euros HT. Elle conteste le montant du taux horaire retenu par le bâtonnier de 300 euros HT qu'elle estime excessif et estime que ce taux doit être ramené à la somme de 200 euros HT. Elle critique la décision du bâtonnier en ce qu'elle n'a pas pris en compte sa situation financière et la faiblesse de ses revenus induite par l'erreur médicale dont elle avait été victime. Elle relève que Me [P] ne lui a fourni aucune facture, ni compte détaillé et qu'il s'est contredit au cours de la procédure. Elle rappelle que la charge de la preuve de ses diligences pèse sur l'avocat. Elle conteste avoir acquiescé au taux horaire réclamé par l'avocat et au décompte contenu dans son courrier du 25 juin 2018. Elle reconnaît avoir eu un rendez-vous à son domicile le 23 juin 2018 avec Me [P], mais en conteste la durée. S'agissant des diligences prétendûment réalisées après le 25 juin 2018, elle relève que la facture du 24 décembre 2018 est irrégulière puisqu'elle ne comporte pas le numéro de facture, ni de décompte détaillé, et contient une erreur de calcul de la TVA. Elle conclut que Me [P] ne justifie ni de ses diligences, ni du temps passé postérieurement au 25 juin 2018.

En réplique, Me [P] soutient avoir consacré au dossier de Mme [B] un temps de travail de 20 heures, ramené à 18 heures à la suite d'une erreur de sa part. Il expose avoir succédé à un confrère dans un dossier de responsabilité médicale lors de l'expertise destinée à évaluer les préjudices de sa cliente. Il allègue avoir pu obtenir la désignation d'un sapiteur psychiatre afin d'établir le préjudice économique de Mme [B]. Il indique avoir accompli son mandat jusqu'à la deuxième réunion d'expertise à laquelle il a assisté. Il expose avoir adressé à Mme [B] une première facture le 25 juin 2018, puis une seconde facture le 24 décembre 2018 d'un montant de 6 000 euros HT, soit 7 400 euros TTC.

Le recours de Mme [B] qui a été effectué dans le délai d'un mois prévu par l'article 176 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 est recevable.

Il y a lieu de rappeler que les griefs de Mme [B] qui renvoient à la responsabilité de l'avocat dans l'accomplissement de sa mission tenant notamment au manquement de celui-ci à son devoir d'information relatif à la détermination de ses honoraires et au fait qu'il aurait omis de se constituer devant le tribunal de grande instance aux lieux et places d'un précédent confrère, ne relèvent pas de l'appréciation du bâtonnier, ni du premier président, statuant dans le cadre de l'article 174 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991.

Les pièces communiquées par les parties établissent que Me [P] est intervenu pour le compte de Mme [B] à compter du 23 juin 2018 (date d'un rendez-vous au domicile de sa cliente) jusqu'au 21 décembre 2018 (date de son dessaisissement).

Pour connaître les conditions financières de l'intervention de Me [P] pour le compte de Mme [B], et les diligences que l'avocat revendique, il y a lieu de se reporter aux documents suivants :

- un courrier du 25 juin 2018 qui mentionne une convention d'honoraires jointe qui n'est pas communiquée, sollicite un acompte de 1 500 euros HT, soit 1 800 euros TTC, et mentionne diverses diligences pour un temps total de travail de 13 heures 30 (pièce n° 1),

- une facture du 24 décembre 2018 d'un montant de 6 000 euros HT, soit 7 400 euros TTC qui mentionne un taux horaire de 300 euros HT (pièce n° 2).

Me [P] ne produit aucun document démontrant que Mme [B] ait accepté les conditions financières de son intervention, de sorte qu'il est retenu qu'aucune convention d'honoraires n'a été signée, ni conclue par les parties.

Ainsi, à défaut d'une telle convention d'honoraires, il convient pour fixer les honoraires dus à Me [P] à compter du 23 juin 2018 jusqu'au 21 décembre 2018 de faire application des dispositions de l'article 10 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 modifié par la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 qui dispose notamment que : ' Les honoraires tiennent compte, selon les usages, de la situation de fortune du client, de la difficulté de l'affaire, des frais exposés par l'avocat, de sa notoriété et des diligences de celui-ci.'

Force est de constater que l'application littérale de l'article 10 de la loi précitée dans ce dossier présente des difficultés dès lors que l'avocat ne justifie pas avoir communiqué à sa cliente son taux horaire HT habituel, Mme [B] contestant avoir reçu la convention d'honoraires prétendument adressée le 25 juin 2018, qui en tout état de cause n'est pas versée aux débats. Par ailleurs, l'avocat n'a communiqué aucune information sur sa notoriété et la situation de fortune de sa cliente.

Pour ces motifs, nous fixerons les honoraires de manière forfaitaire en ne tenant compte que des diligences que Me [P] justifie dans la présente instance.

Les parties admettent que :

- un rendez-vous s'est tenu au domicile de Mme [B] le 23 juin 2018,

- Me [P] a assisté sa cliente à une première réunion d'expertise.

Par ailleurs, Me [P] a dû examiner le dossier.

Il verse aux débats pour justifier de ses diligences un courrier de deux pages adressé à sa cliente le 25 juin 2018 à la suite du rendez-vous du 23 juin 2018 qui explique l'objet et la finalité de la mesure d'expertise (pièce n° 4).

Me [P] ne justifie pas des autres diligences réalisées visées dans son courrier du 25 juin 2018 et, notamment, de la rédaction d'un mémoire à l'ordre des dentistes et de 14 courriers et mails.

Il ne justifie pas davantage de sa présence à une seconde réunion d'expertise, alors qu'il avait été autorisé lors de l'audience du 14 avril 2002 à justifier de cette présence par note en délibéré.

Les parties admettent que Mme [B] a déjà réglé à Me [P] la somme de 1 500 euros HT.

S'agissant de la situation de fortune de Mme [B], celle-ci indique avoir dû arrêter son activité professionnelle à la suite de l'erreur médicale dont elle avait été victime.

Au vu de l'ensemble de ces éléments, et au regard du faible nombre de diligences justifiées par Me [P], il y a lieu de fixer à la somme de 1 500 euros HT le montant des honoraires dus par Mme [B] à Me [P] au titre des diligences effectuées, étant rappelé que Me [P] ne conteste pas que cette somme lui a déjà été réglée par Mme [B]. Celui-ci sera débouté par voie de conséquence de sa demande en paiement de la somme de 5 400 euros HT au titre de ses honoraires sous déduction de la somme réglée de 1 500 euros HT à titre de provision.

La décision déférée est donc infirmée de ce chef.

Sur les autres demandes

Il n'apparaît pas inéquitable de laisser à la charge de Mme [B] les frais irrépétibles qu'elle a été contrainte d'engager pour assurer la défense de ses intérêts. Elle sera par conséquent déboutée de sa demande à ce titre.

Il y a lieu de laisser à chacune des parties la charge de ses dépens.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, en dernier ressort, par ordonnance contradictoire, et par mise à disposition de la décision au greffe,

Infirmons la décision déférée rendue par la déléguée du bâtonnier de l'ordre des avocats du barreau de Paris du 4 juin 2019 ;

Statuant à nouveau des chefs de la décision infirmée et y ajoutant,

Fixons les honoraires dus par Mme [N] [B] à Me [C] [P] à la somme de 1 500 euros HT ;

Constatant que Mme [N] [B] a réglé à Me [C] [P] la somme de 1 500 euros HT ;

Déboutons Me [C] [P] de sa demande en paiement d'honoraires complémentaires ;

Laissons à chaque partie la charge de ses dépens ;

Rejetons toute autre demande ;

Disons qu'en application de l'article 177 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991, l'ordonnance sera notifiée aux parties par le greffe de la cour suivant lettre recommandée avec accusé de réception.

LA GREFFIERE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 9
Numéro d'arrêt : 19/00369
Date de la décision : 24/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-24;19.00369 ?
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