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19/05/2022 | FRANCE | N°21/114127

France | France, Cour d'appel de Paris, B1, 19 mai 2022, 21/114127


Copies exécutoires
délivrées aux parties le :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 1 - Chambre 10

ARRÊT DU 19 MAI 2022

(no , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général :
No RG 21/11412 - No Portalis 35L7-V-B7F-CD4OH

Décision déférée à la cour :
jugement du 04 juin 2021-juge de l'exécution de Paris-RG no 21/80072

APPELANT

Monsieur [X] [D]
[Adresse 2]
[Localité 3]

Représenté par Me Benjamin BEAULIER de l'AARPI AMBRE ASSOCIES, avocat au barreau de

PARIS, toque : K 0070

INTIMÉE

S.A.S. EFESO CONSULTING FRANCE
[Adresse 1]
[Localité 3]

Représentée par Me Julie COUTURIER de la SELARL JC...

Copies exécutoires
délivrées aux parties le :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 1 - Chambre 10

ARRÊT DU 19 MAI 2022

(no , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général :
No RG 21/11412 - No Portalis 35L7-V-B7F-CD4OH

Décision déférée à la cour :
jugement du 04 juin 2021-juge de l'exécution de Paris-RG no 21/80072

APPELANT

Monsieur [X] [D]
[Adresse 2]
[Localité 3]

Représenté par Me Benjamin BEAULIER de l'AARPI AMBRE ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : K 0070

INTIMÉE

S.A.S. EFESO CONSULTING FRANCE
[Adresse 1]
[Localité 3]

Représentée par Me Julie COUTURIER de la SELARL JCD AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : C0880

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 7 avril 2022, en audience publique, devant la cour composée de :
Madame Bénédicte PRUVOST, président de chambre
Madame Catherine LEFORT, conseiller
Monsieur Raphaël TRARIEUX, conseiller

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Monsieur Raphaël TRARIEUX, conseiller, dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.

GREFFIER lors des débats : Monsieur Grégoire GROSPELLIER

ARRÊT
-contradictoire
-par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
-signé par Madame Bénédicte PRUVOST, président de chambre et par Monsieur Grégoire GROSPELLIER, greffier présent lors de la mise à disposition.

Par arrêt daté du 17 septembre 2020, la Cour d'appel de Paris a condamné la SAS Efeso consulting France à payer à M. [D] la somme de 900 000 euros bruts avec intérêts au taux légal à compter du 25 février 2020, sous déduction de la somme de 449 215 euros, et 8 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Déclarant agir en vertu de cet arrêt, M. [D] a, le 10 novembre 2020, dressé un procès- verbal de saisie-attribution et de droits d'associés entre les mains de la société BNP Paribas et à l'encontre de la SAS Efeso consulting France, pour avoir paiement de la somme de 502 049,04 euros. Cette mesure d'exécution a été dénoncée à la débitrice le 17 novembre 2020.

La SAS Efeso consulting France ayant contesté ladite mesure d'exécution devant le juge de l'exécution de Paris, ce dernier, par jugement en date du 4 juin 2021, en a ordonné la mainlevée, a débouté tant la SAS Efeso consulting France que M. [D] de leurs demandes de dommages et intérêts, et a condamné M. [D] à payer à la SAS Efeso consulting France la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, après avoir relevé que les sommes dues devaient d'une part être assujetties aux cotisations sociales, d'autre part faire l'objet de la retenue des impositions à la source à compter du 1er janvier 2019, et que la dette était réglée.

Par déclaration en date du 18 juin 2021, M. [D] a relevé appel de ce jugement.

En ses conclusions notifiées le 20 septembre 2021, il a exposé :
- que plusieurs décisions de justice avaient été rendues dans le cadre de ce litige, la SAS Efeso consulting France ayant notamment régularisé une saisie-attribution à son encontre, dont le juge de l'exécution de Paris avait ordonné mainlevée par décision du 9 juin 2020, la Cour d'appel de Paris statuant le 20 mai 2021 ayant en outre condamné l'intéressée à lui régler la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts et 5 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
- qu'il détenait un titre exécutoire, à savoir l'arrêt rendu le 17 septembre 2020 par la Cour d'appel de Paris, statuant sur renvoi après cassation ;
- que le juge de l'exécution ne pouvait pas revenir sur le dispositif de cet arrêt ;
- que s'il était certain que les cotisations sociales devaient être déduites du compte, il n'en était pas de même des impositions à la source, la règle y relative n'étant applicable qu'à dater du 1er janvier 2019, et ce, en vertu du principe de non rétroactivité de la loi fiscale ;
- qu'il ne s'agissait pas de rappels de salaires ;
- que la SAS Efeso consulting France savait pertinemment que le taux d'imposition à lui applicable était de 8,20 % et non pas de 43 %.

M. [D] a demandé à la Cour d'infirmer le jugement, et pour le cas où elle déciderait que le prélèvement à la source des impositions sur le revenu serait applicable, de juger qu'il ne l'est qu'à dater du 1er janvier 2019 et au taux de 8,20 %. Il a réclamé en outre la somme de 50 000 euros à titre de dommages et intérêts, et 10 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Dans ses conclusions notifiées le 18 octobre 2021, la SAS Efeso consulting France a exposé :
- que le 19 octobre 2020, elle avait réglé à M. [D] la somme de 23 937,42 euros, qui correspondait aux rappels de salaires (1 055 569,02 euros) majorés des intérêts (119 615,07 euros) sous déduction des charges (216 993,45 euros), et également de l'impôt sur le revenu (423 774,72 euros), outre la somme allouée en application de l'article 700 du code de procédure civile (8 000 euros), le tout sous déduction de la somme payée en 2017/2018 (518 488,45 euros) ;
- qu'une indemnité versée en application de l'article L 1235-3-1 du code du travail n'était pas assujettie à l'impôt sur le revenu (en vertu de l'article 80 duodecies 1o 1 du code général des impôts) ;
- qu'en revanche, les rappels de salaires étaient soumis à l'impôt sur le revenu ;

- que ceux-ci devaient faire l'objet de la retenue à la source, sans avoir à distinguer selon la période à laquelle ils se rapportaient ;
- que dans ces conditions, en tant qu'employeur, elle avait réglé l'impôt sur le revenu à l'administration fiscale ;
- que conformément à l'article 204 H III du code général des impôts, si aucun taux d'imposition n'avait été transmis par l'administration fiscale, devait être appliqué un taux proportionnel par défaut ;
- qu'elle avait appliqué un taux d'imposition de 43 % (non personnalisé) sur les années 2010 à 2013 puis un taux de 8,20 % (personnalisé) sur les années 2014 à 2016 ;
- qu'au titre de l'année 2017, elle avait procédé à une régularisation de l'impôt sur le revenu, puisqu'ayant payé à l'administration fiscale la somme de 14 683,47 euros au lieu de celle de 77 051,54 euros qui aurait dû être réglée en appliquant le taux non personnalisé de 43 %.

La SAS Efeso consulting France a demandé à la Cour de confirmer le jugement sauf en ce qu'il avait rejeté sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive, et de lui allouer la somme de 15 000 euros de ce chef, outre 7 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

MOTIFS,

Selon l'article R 121-1 alinéa 2 du Code des procédures civiles d'exécution, le Juge de l'exécution ne peut ni modifier le dispositif de la décision de justice qui sert de fondement aux poursuites ni en suspendre l'exécution. Il peut toutefois trancher la question de savoir si, en cas de condamnation de l'employeur à régler des rappels de salaire, ce dernier doit y appliquer le prélèvement à la source, et dans l'affirmative, dans quelles conditions. La somme de 900 000 euros au paiement de laquelle a été condamnée la société Efeso consulting France par la Cour d'appel de Paris le 17 septembre 2020 constitue des revenus de remplacement, ainsi qu'il est mentionné dans l'arrêt qui indiquait en pages 7 et 8 que la rémunération annuelle de M. [D] était de 120 000 euros bruts, et que la somme susvisée de 900 000 euros représentait celle de 120 000 euros par an du 28 avril 2010 au 8 novembre 2017. Elle est donc soumise à l'impôt sur le revenu.

Le prélèvement à la source est entré en vigueur le 1er janvier 2019 conformément à l'ordonnance no 2017-1390 du 22 septembre 2017 ; il s'applique à tous les salaires versés postérieurement au 1er janvier 2019, et ce, sans qu'il y ait lieu d'opérer une distinction selon qu'ils se rapportent à une période travaillée postérieure ou non à cette date, contrairement à ce qu'affirme M. [D] dans ses écritures.

Selon les dispositions de l'article 204 H III du code général des impôts, lorsque le débiteur ne dispose pas d'un taux calculé par l'administration fiscale ou lorsque l'année dont les revenus ont servi de base au calcul du taux est antérieure à l'antépénultième année par rapport à l'année de prélèvement, il est appliqué un taux proportionnel fixé dans les conditions suivantes (suit un tableau). Ce taux par défaut est déterminé dans les conditions prévues par ce texte. En l'espèce il résulte des pièces produites que ce n'est que le 23 août 2020 que l'administration fiscale a notifié à la société Efeso consulting France quel était le taux d'imposition personnalisé applicable aux salaires dus à M. [D], soit 8,20 %.

Dans ces conditions, il ne peut être reproché à la société Efeso consulting France d'avoir appliqué, sur les années 2010 à 2013, le taux non personnalisé de 43 %, qui est applicable par défaut lorsque la rémunération est supérieure ou égale à 48 196 euros par an. Ce taux a été appliqué sur les années susvisées (sommes payées les 31 mai, 30 juin et 31 juillet 2020). Ensuite, sur les années 2014 et suivantes, le taux réel de 8,20 % a été appliqué (sommes payées postérieurement au 23 août 2020, soit les 31 août, 30 septembre et 31 octobre 2020). Par ailleurs, il résulte de la lecture d'une attestation de l'expert comptable de l'intimée, s'agissant des bulletins de paie complémentaires qui ont été établis suite au prononcé de l'arrêt de cette Cour le 17 septembre 2020, au titre des périodes comprises entre le 1er avril 2010 et le 8 novembre 2017, et entre le 24 octobre 2019 et le 31 octobre 2020, ainsi que de la lecture du bulletin de paie du mois de novembre 2020, qu'une régularisation du net fiscal a été opérée par l'employeur qui avait notamment, au titre de l'année 2017, réglé une somme insuffisante au titre des impositions.

Par ailleurs, pour le cas où l'appelant viendrait à contester le montant des impositions réglées, il lui appartient d'intenter toute procédure adéquate à l'encontre de l'administration fiscale, et la société Efeso consulting France ne dispose aucunement du pouvoir de trancher lesdites contestations ni de réclamer, en son nom, la restitution d'un excédent d'impôts. Elle ne peut pas non plus solliciter de l'administration fiscale la répétition de sommes qu'elle aurait versées en trop pour ensuite les remettre à son salarié.

Dans ces conditions, c'est à juste titre que le juge de l'exécution de Paris, après avoir constaté que la dette objet de la saisie était éteinte et que le cas échéant, l'administration fiscale pourrait procéder à une régularisation de la situation fiscale de l'appelant, a jugé que ladite saisie était injustifiée et en a ordonné mainlevée, puis débouté M. [D] de sa demande de dommages et intérêts.

Le jugement est confirmé sur ces points.

La société Efeso consulting France forme un appel incident et poursuit l'infirmation dudit jugement en ce qu'il a rejeté sa propre demande de dommages et intérêts, et réclame la somme de 15 000 euros de ce chef. Conformément à l'article L 121-2 du code des procédures civiles d'exécution, le juge de l'exécution ne peut accorder des dommages et intérêts à un débiteur qu'en cas d'abus de saisie. Au vu de la complexité des calculs à opérer, et de la question restant à trancher de savoir si le prélèvement à la source était applicable aux rappels de salaire ou non, c'est dans des conditions qui ne mettent pas en évidence un abus ou une quelconque intention de nuire que l'appelant a diligenté la mesure d'exécution querellée. Le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de dommages et intérêts formée par la société Efeso consulting France.

M. [D], qui succombe en son appel, sera condamné au paiement de la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

PAR CES MOTIFS,

Statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Statuant dans les limites de l'appel,

- CONFIRME le jugement en date du 4 juin 2021 en toutes ses dispositions ;

- CONDAMNE M. [X] [D] à payer à la société Efeso consulting France la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- CONDAMNE M. [X] [D] aux dépens d'appel.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : B1
Numéro d'arrêt : 21/114127
Date de la décision : 19/05/2022
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2022-05-19;21.114127 ?
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