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19/05/2022 | FRANCE | N°21/06200

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 7, 19 mai 2022, 21/06200


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

Au nom du Peuple français



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 7



ARRÊT DU 19 Mai 2022

(n° 52 , 15 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/06200 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CDNHQ



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 19 Novembre 2020 par le juge de l'expropriation de Bobigny RG n° 18/00180





APPELANTE

Société SCI [Adresse 21]

[Adresse 3]

[Adresse 18]

représentée par Me Marie-Céline PELÉ, avocat

au barreau de PARIS, toque : A0930





INTIMÉES

Société ANONYME D'ECONOMIE MIXTE DE CONSTRUCTION ET DE RENOVATION DE LA VILLE DE [Adresse 27]

[Adresse 16]

[Adresse 19]

repré...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

Au nom du Peuple français

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 7

ARRÊT DU 19 Mai 2022

(n° 52 , 15 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/06200 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CDNHQ

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 19 Novembre 2020 par le juge de l'expropriation de Bobigny RG n° 18/00180

APPELANTE

Société SCI [Adresse 21]

[Adresse 3]

[Adresse 18]

représentée par Me Marie-Céline PELÉ, avocat au barreau de PARIS, toque : A0930

INTIMÉES

Société ANONYME D'ECONOMIE MIXTE DE CONSTRUCTION ET DE RENOVATION DE LA VILLE DE [Adresse 27]

[Adresse 16]

[Adresse 19]

représentée par Me Christofer CLAUDE de la SELAS REALYZE, avocat au barreau de PARIS, toque : R175 substitué par Me Driss LAHLOU ELOUITASSI, avocat au barreau de PARIS

DIRECTION DÉPARTEMENTALE DES FINANCES PUBLIQUES DE LA SEINE ST DENIS COMMISSAIRE DU GOUVERNEMENT

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Localité 17]

non représentée

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 03 Mars 2022, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Hervé LOCU, Président chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Hervé LOCU, président

Monique CHAULET, conseillère

Raphaël TRARIEUX, conseiller

Greffier : Marthe CRAVIARI, lors des débats

ARRÊT :

- RÉPUTÉ CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Hervé LOCU, Président et par Marthe CRAVIARI, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

FAITS ET PROCÉDURE

Aux termes de l'arrêté préfectoral n°2014-0209 du 3 février 2014 les parcelles situées à l'intérieur de la déclaration d'utilité publique ont été déclarées cessibles au profit de la SEMISO.

Est concernée par l'opération la SCI [Adresse 21] en tant que propriétaire d'un bien immobilier à usage de café, restaurant et hôtel situé [Adresse 3]), sur la parcelle cadastrée section Z n°[Cadastre 6].

Le bien en cause est situé dans le périmètre du projet de la ZAC de la '[Adresse 25], et l'acquisition par la Société Anonyme d'Economie Mixte de construction et de rénovation de la ville de [Adresse 27] (SEMISO) des parcelles nécessaires au programme d'aménagement a fait l'objet d'une déclaration d'utilité publique par arrêté préfectoral n°2013-0770 du 25 mars 2013.

Par ordonnance du 11 mars 2014, le juge de l'expropriation de Bobigny a prononcé le transfert de propriété de cet ensemble immobilier au profit de la SEMISO.

La SEMISO a notifié son mémoire valant offres d'indemnisation à la SCI [Adresse 21] par lettre recommandée avec accusé de réception daté du 30 octobre 2018.

Par requête reçue au greffe de la juridiction de l'expropriation le 11 décembre 2018 et accompagnée d'un mémoire en offre, la SEMISO a saisi la juridiction du tribunal de grande instance devenu tribunal judiciaire de Bobigny aux fins de fixation de la valeur du bien de la SCI [Adresse 21]. Dans cette requête la SEMISO précise qu'aucun accord n'est intervenu dans le délai d'un mois prévu à l'article R.311-9 du code précité.

Par un jugement du 19 novembre 2020 après transport sur les lieux le 16 janvier 2020, le juge de l'expropriation de Seine-Saint-Denis a':

-Fixé l'indemnité due par la Société anonyme d'Economie Mixte de construction et de rénovation de la ville de [Adresse 27] (SEMISO) à la SCI [Adresse 21] au titre de la dépossession des locaux situés [Adresse 3]), sur la parcelle cadastrée section Z n°[Cadastre 6] à la somme de 877.160 euros (huit cent soixante-dix-sept mille cent soixante euros) se décomposant comme suit :

-774.690 euros au titre de l'indemnité principale, en retenant une surface totale de 455, 70 m² englobant la partie hôtel et un studio,

- 78.470 euros au titre de l'indemnité de remploi,

- 24.000 euros au titre de 1'indemnité pour pertes de revenus locatifs, correspondant à six mois de loyers ;

-Condamné la Société anonyme d'économie Mixte de construction et de rénovation de la ville de [Adresse 27] (SEMISO) à payer à la SCI [Adresse 21] la somme de 2.500 euros (deux mille cinq cents euros) en application de l'article 700 du Code de procédure civile ;

-Condamné la Société anonyme d'Economie Mixte de construction et de rénovation de la ville de [Adresse 27] (SEMISO) aux dépens ;

-Rejeté toutes les autres demandes des parties.

La SCI [Adresse 21] a interjeté appel le 07 avril 2021 limité à l'indemnité totale de dépossession, celle- ci contestant principalement le prix unitaire de son bien immobilier.

Pour l'exposé complet des faits, de la procédure, des prétentions et moyens des parties, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé à la décision déférée et aux écritures :

- Adressées au greffe, par la SCI [Adresse 21], appelante, le 1 juillet 2021 notifiées le 06 juillet 2021 (AR du 7 juillet 2021) et le 14 janvier 2022 notifiées le 17 janvier 2022(AR du 20 janvier 2022) aux termes desquelles elle demande à la cour de :

- Réformer le jugement rendu le 19 novembre 2020 en ce qu'il a retenu le prix unitaire de 2.000 euros/m² en valeur libre et une période de 6 mois pour la perte des revenus locatifs ;

En conséquence :

- Déterminer l'indemnité lui revenant pour la dépossession de la parcelle cadastrée section Z n°[Cadastre 6], sise [Adresse 3], sur la base du prix de 3.000 euros en valeur libre pour la partie hôtel et de 4.500 euros en valeur libre pour la partie habitation et d'une période de 12 mois pour la recherche d'un bien de remplacement, soit :

-Fixer à la somme de 1.202.565 euros le montant dû par la SEMISO au titre de l'indemnité principale;

-Fixer à la somme de 117.025 euros le montant dû par la SEMISO au titre des frais de remploi ;

-Fixer à la somme de 48.000 euros le montant dû par la SEMISO au titre de la perte de revenus locatifs ;

-Surseoir à statuer sur le montant du coût de déménagement dans l'attente de la réalisation effective du déménagement et présentation des factures afférentes, selon l'état de prise de possession des locaux par la SEMISO ;

- Condamner la SEMISO à lui verser le montant de 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamner la SEMISO à lui verser le montant de 4.000 euros au titre du coût du rapport d'expertise ;

- Condamner la SEMISO à lui verser le montant de 225 euros au titre du timbre fiscal.

- Déposées au greffe, par la SEMISO, intimée et appelante incidente, le 06 octobre 2021 notifiées le 07 octobre 2021 (AR du 8 octobre 2021) et le 21 octobre 2021 (04 novembre 2021) aux termes desquelles elle demande à la cour de :

-Dire la SEMISO recevable et bien fondée en ses écritures.

En conséquence,

- La recevoir.

A titre principal ;

-Infirmer le jugement en date du 19 novembre 2021 en ce qu'il a fixé :

- l'indemnité principale à 774.690 euros

- l'indemnité de remploi à 78.470 euros

- l'indemnité pour pertes de revenus locatifs à 24.000 euros.

En conséquence,

-Fixer l'indemnité d'expropriation revenant à la SCI [Adresse 21], propriétaire de la parcelle cadastrée section Z n°[Cadastre 6] située [Adresse 3]) à la somme de 640.119.25 euros se décomposant comme suit :

-indemnité principale : 581'017,50 euros

-indemnité de remploi : 59.101,75 euros

- Rejeter les demandes de la SCI [Adresse 21] ;

Le commissaire du gouvernement n'a pas déposé ou adressé de conclusions.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

la SCI [Adresse 21] fait valoir que':

-Concernant la détermination du prix unitaire'; elle critique des termes retenus en première instance que sont la vente le 9 avril 2014 d'un hôtel de 707 m², le jugement de la juridiction de céans en date du 27 janvier 2015 portant sur des locaux à usage d'hôtel situés [Adresse 12], la vente le 13 décembre 2017 d'un hôtel de 1.023 m², sis [Adresse 7] pour manque de similitudes et éloignement';

-Sur les locaux à usage d'habitation'; il convient de souligner que le studio présente une valeur vénale supérieure au reste de la partie hôtel'; il convient de faire siens les éléments de comparaison soumis par le commissaire du gouvernement dans cette affaire et datant des années 2018 et 2019 qui s'établit donc à 4.893 euros /m² en valeur libre';

-Concernant le montant pour la perte de revenus locatifs'; la jurisprudence indemnise la future perte de revenus locatifs, qui n'est pas comprise dans l'indemnité de remploi (Cour de Cassation, 3ème civile, 29 juin 2017, pourvoi n°16- 19.588)'; il faut rappeler que la SCI [Adresse 21] perçoit actuellement un loyer mensuel de 4.000 euros/mois HT-HC'; le loyer est perçu en exécution du bail signé en 2010 entre la SCI Le Périph et Monsieur [J] [S] [U], renouvelé en 2016, pour la somme de 4.000 euros HT/HC (Production n°2)'; pourtant, le premier juge a fixé à 6 mois la période couverte par l'indemnisation, soit la moitié du montant sollicité, or, il n'est pas raisonnable de considérer qu'un délai de 6 mois serait suffisant pour retrouver un bien de remplacement';

-Concernant le déménagement'; selon la situation au regard de la demande de la SEMISO de libérer intégralement le bien ou non, des frais rendus nécessaires par l'expropriation seront le cas échéant à engager par l'expropriée, il sera donc sursis à statuer et le cas échéant, la facture établie après déménagement sera réglée par la SEMISO';

- Avec le prix unitaire de 3.000 euros /m² et une indemnité pour perte locative basée sur 12 mois, la SCI [Adresse 21] sera indemnisée comme suit':

-Indemnité principale': 1.202.565 euros

-de remploi': 121'255,50 euros';

-perte de revenus locatifs': 48 000 euros';

- En outre, le coût du timbre fiscal de 225 euros, désormais acquitté obligatoirement, sera aussi remboursé';

- ayant missionné un expert immobilier dans le cadre de la présente instance, la société sollicite le versement de la somme de 4.000 euros, lesquels lui ont été refusés en première instance au motif que la facture de l'expert n'était pas versée aux débats (Production n°7).

La SEMISO répond que :

-Concernant les prétentions de la SCI [Adresse 21]';

-Sur le rapport d'expertise'; ce rapport a été établi de manière non contradictoire alors que l'article R. 322- 1 du code de l'expropriation permet au juge de l'expropriation de diligenter une expertise'; la SEMISO ne peut être condamnée à prendre à sa charge les frais d'une expertise non contradictoire, diligentée par et pour l'expropriée'; le rapport comporte de nombreuses inexactitudes et contradictions'; l'expert retient un prix unitaire de 3.000 euros / m². Or, ce prix ne correspond pas à une moyenne des ventes citées dans le rapport, mais à un prix nettement supérieur aux ventes alléguées, sans que ce choix soit explicité';

-Sur les termes de références de l'expropriée pour les locaux à usage d'hôtel'; elle critique l'ensemble de ces termes'du fait de leur meilleure situation que le bien en l'occurrence';

- Sur les termes de références retenus à bon droit par le juge de première instance pour les locaux à usage d'hôtel': la vente du 9 avril 2014 d'un hôtel de 707 m²'; le jugement tribunal de grande instance de Bobigny du 27 janvier 2015 et la vente du 13 décembre 2017 d'un hôtel de 1.023 m²'; c'est donc à bon droit que le juge de première instance a fixé la valeur unitaire à la somme de 2.000 euros / m² en valeur libre et à 1.700 euros/m² en valeur occupée';

-Concernant l'indemnité relative à la prétendue dépossession de locaux à usage d'habitation'; le bâtiment visé par l'expropriée a une destination commerciale et non d'habitation'; il convient de préciser que la destination habitation d'un bien ne se présume pas et doit être démontrée ; un local est réputé être à usage d'habitation s'il était affecté à cet usage au 1er janvier 1970. Aussi, les locaux construits ou faisant l'objet de travaux ayant pour conséquence d'en changer la destination postérieurement au ler janvier 1970 sont réputés avoir l'usage pour lequel la construction ou les travaux sont autorisés (voir CE, 5 avril 2019, Commune de [Localité 23], req., n°410039)'; si toutefois, par impossible, la cour accepte en son principe cette demande, le terme de référence produit par l'appelante sera retenu mais avec l'application d'un taux d'abattement de 25% pour mauvais entretien du studio';

- la cour, qui infirmera le jugement en date du 19 novembre 2021, fixera l'indemnité d'expropriation à la somme de 581.017,5 euros';

- la cour infirmera le jugement en date du 19 novembre 2021, fixera l'indemnité d'expropriation à la somme de 581.017,5 euros ';

A noter que le contrat de bail n'est pas suffisant à ce titre (CA Paris, Pôle 4, chambre 7, 12 décembre 2019, n°18/ 14302)'; la durée de douze mois est manifestement excessive'(CA Versailles, Expropriations, 26 janvier 2016, n°14/03509)'; l'ordonnance d'expropriation datant du l l mars 2014 et le mémoire valant offre ayant été notifié à la SCI [Adresse 21] dès le 7 décembre 2018, cette dernière a d'ores-et-déjà bénéficié d'un délai suffisant pour examiner le marché locatif.

SUR CE, LA COUR

- Sur la recevabilité des conclusions

Aux termes de l'article R311-26 du code de l'expropriation modifié par décret N°2017-891 du 6 mai 2017-article 41 en vigueur au 1 septembre 2017, l'appel étant du 7 avril 2021, à peine de caducité de la déclaration d'appel, relevée d'office, l'appelant dépose ou adresse au greffe de la cour ses conclusions et les documents qu'il entend produire dans un délai de trois mois à compter de la déclaration d'appel.

À peine d'irrecevabilité, relevée d'office, l'intimé dépose ou adresse au greffe de la cour ses conclusions et les documents qu'il entend produire dans un délai de trois mois à compter de la notification des conclusions de l'appelant. Le cas échéant, il forme appel incident dans le même délai et sous la même sanction.

L'intimé à un appel incident ou un appel provoqué dispose, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, d'un délai de trois mois à compter de la notification qui en est faite pour conclure.

Le commissaire du gouvernement dépose ou adresse au greffe de la cour ses conclusions et l'ensemble des pièces sur lesquelles il fonde son évaluation dans le même délai et sous la même sanction que celle prévue au deuxième alinéa.

Les conclusions et documents sont produits en autant d'exemplaires qu'il y a de parties, plus un.

Le greffe notifie à chaque intéressé et au commissaire du gouvernement, dès leur réception, une copie des pièces qui lui sont transmises.

En l'espèce, les conclusions de la SCI [Adresse 21] du 1er juillet 2021, de la SEMISO du 6 octobre 2021 adressées ou déposées dans les délais légaux sont recevables.

Les conclusions hors délai de la SCI [Adresse 21] du 14 janvier 2022 sont de pure réplique à celles de la SEMISO, appelant incident, ne formulent pas de demandes nouvelles ou de moyens nouveaux, sont donc recevables au delà des délais initiaux.

- Sur le fond

Aux termes de l'article 1er du premier protocole additionnel à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ratifiée qui s'impose au juge français, toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international ; ces dispositions ne portent pas atteinte au droit que possèdent les Etats de mettre en vigueur les lois qu'ils jugent nécessaires pour réglementer l'usage des biens conformément à l'intérêt général ou pour assurer le paiement des impôts ou d'autres contributions ou des amendes.

Aux termes de l'article 17 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen, la propriété est un droit inviolable et sacré, dont nul ne peut être privé si ce n'est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l'exige évidemment, et sous la réserve d'une juste et préalable indemnité.

L'article 545 du code civil dispose que nul ne peut être contraint de céder sa propriété, si ce n'est pour cause d'utilité publique, et moyennant une juste et préalable indemnité.

Aux termes de l'article L 321-1 du code de l'expropriation, les indemnités allouées couvrent l'intégralité du préjudice direct, matériel et certain causé par l'expropriation.

Aux termes de l'article L 321-3 du code de l'expropriation le jugement distingue, dans la somme allouée à chaque intéressé, l'indemnité principale et, le cas échéant, les indemnités accessoires en précisant les bases sur lesquelles ces diverses indemnités sont allouées.

Aux termes de l'article L 322-1 du code de l'expropriation le juge fixe le montant des indemnités d'après la consistance des biens à la date de l'ordonnance portant transfert de propriété ou lorsque l'expropriant fait fixer l'indemnité avant le prononcé de l'ordonnance d'expropriation, à la date du jugement.

Conformément aux dispositions de l'article L 322-2, du code de l'expropriation, les biens sont estimés à la date de la décision de première instance, seul étant pris en considération - sous réserve de l'application des articles L 322-3 à L 322-6 dudit code - leur usage effectif à la date définie par ce texte.

L'appel principal de la SCI [Adresse 21] porte sur la détermination du prix unitaire pour les locaux à usage commercial et pour les locaux à usage d'habitation et en sollicitant une indemnité distincte pour la partie hôtel et pour un studio, demandant une indemnité pour perte de revenus locatifs correspondant à douze mois de loyers et formulant une nouvelle demande de sursis à statuer au titre de l'indemnité pour déménagement.

L'appel incident de la SEMISO concerne le montant de l'indemnité principale et l'indemnité de remploi et le rejet de la demande d'indemnité pour perte de revenus locatifs.

S'agissant de la date de référence, le premier juge a retenu en application des articles L213-6 et L 213-4 du code de l'urbanisme la date du PLU d'Est Ensemble adopté le 4 février 2020 applicable depuis le 27 mars 2020.

Il a ajouté qu'à cette date, le commissaire du gouvernement indique que l'ensemble immobilier était situé en zone UP23C.

Les parties n'ont pas formé appel sur ce point ; la SCI [Adresse 21] indique que cette date ne fait pas débat ; la SEMISO n'a pas conclu sur la date de référence faisant état uniquement de la situation d'urbanisme, à savoir la zone Uao du PLU.

Pour ce qui est de la nature du bien, de son usage effectif et de sa consistance, il s'agit d'un ensemble immobilier à usage de café, restaurant et hôtel situé [Adresse 3] sur la parcelle cadastrée section Z N°[Cadastre 6] ; cette avenue est commerçante et très passante, est desservie par l'arrêt de métro ' [Adresse 25] de la ligne 13 (2 minutes à pied), l'arrêt de métro ' [Adresse 20]' de la ligne 13 (5 minutes à pied) et le boulevard périphérique parisien, situé juste à cote.

Le premier juge précise que :

'l'ensemble immobilier est bien desservi et bénéficie d'une attractivité particulière compte tenu de sa proximité immédiate avec les transports en commun et le boulevard périphérique parisien, ce qui constitue un élément de plus-value ;

'Il ressort du procès-verbal de transport qu'il s'agit d'un immeuble en angle donnant sur rue et comportant un rez-de-chaussée, 4 étages, ainsi qu'une petite cour à l'arrière du bâtiment, que les façades du bien sont en très bon état et que le café restaurant (situé au rez-de-chaussée) est globalement dans un état correct ; s'agissant de l'hôtel, situé dans les étages, il se compose 26 chambres ;

'le procès-verbal indique que l'ensemble est globalement dans un état d'usage, avec plusieurs chambres en mauvais état d'entretien. Chaque chambre ne dispose pas d'un sanitaire individuel.

'Monsieur [Y] [U] et Monsieur [D] [U], présents lors du transport, ont indiqué que l'hôtel comprend une quinzaine de logements sociaux.

La SCI [Adresse 21] souligne que si la parcelle prend place dans un quartier qui est caractérisé par un bâti ancien, elle est à proximité immédiate de [Localité 24] et des [Adresse 26], à la réputation mondiale ; outre les commerçants, il existe également à proximité un centre dentaire et surtout un hôtel Mercure ; l'expert immobilier à qu'ils ont confié une mission, conclut que la parcelle bénéficie d'un emplacement favorable pour une exploitation commerciale ; en résumé, la situation de la parcelle profite de nombreux facteurs de plus-value : proximité immédiate de [Localité 24], très bonne desserte, configuration en angle de l'immeuble qui bénéficie d'une situation véritablement très privilégiée au potentiel indéniable.

Elle ajoute que l'ensemble immobilier est dans un bon état général, l'immeuble ayant bénéficié récemment d'un ravalement complet, de sorte que les façades sont en très bon état.

Elle souligne que sur la consistance au premier étage, il existe un studio d'habitation qui sert au propriétaire du fonds de commerce qui n'est pas loué dans le cadre de l'activité hôtelière.

Elle indique que si les chambres présentent « un mauvais état d'entretien », tel que des traces au mur, imputables d'ailleurs aux seuls occupants l'hôtel, cela signifie seulement qu'un nettoyage approfondi, un rafraîchissement et quelques réparations suffiront à modifier cet état et qu'en revanche, la structure du bâti est saine.

Il ressort du rapport d'expertise versée aux débats par la SCI [Adresse 21] (pièce numéro 2) que l'hôtel avait une clientèle pour partie sédentaire, pour partie de passage, de personnes en situation précaire en séjour, majoritairement en séjours de longue durée et de particuliers ou de personnes adressées par des services organismes sociaux dans des proportions à peu près équivalente.

La SEMISO indique que la parcelle est située dans un secteur largement dégradé, avec notamment la présence immédiate du boulevard périphérique.

Elle souligne que sur la totalité des chambres, huit sont munies d'un WC et de douches séparées, deux autres de douche et que sur chaque palier se trouve des WC « à la turque » aux autres étages, sauf au 3e étage où ils sont « normaux ».

Ces chambres ne sont pas dans un état correct comme en atteste le procès-verbal de transport.

Elle ajoute qu'il ressort d'une mise en demeure adressée par la direction prévention et sécurité de la ville de [Adresse 27] sur Seine à la société Adamy qui exploite présentement l'hôtel « le Nord-Sud » en location-gérance que les chambres 4, 6, 18, 24, 25, 28 et 29 présentent un caractère impropre à l'habitation (pièce n°6) et que le rapport d'enquête fait état (pièce numéro 7) du mauvais entretien et de nombreux désordres affectant le bien exproprié. En outre, un arrêté préfectoral du 26 mai 2021 a même été émis à l'encontre de la SAS Adamy en raison d'un danger imminent pour la santé et la sécurité des occupants que présente l'installation d'électricité de l'immeuble exproprié (pièce numéro 8).

Cependant, comme l'indique exactement la SCI [Adresse 21], ces documents ne peuvent être pris en considération pour fixer la valeur vénale du bien arrêté au 19 novembre 2020.

En effet, l'article L322-1 du code de l'expropriation dispose que le juge fixe le montant des indemnités d'après la consistance des biens à la date de l'ordonnance portant transfert de propriété, soit en l'espèce à la date d'ordonnance du 11 mars 2014 et en outre, l'article L322-2 dudit code dispose que les biens sont estimés à la date de la décision de première instance, soit en l'espèce le 19 novembre 2020.

Pour une plus ample description, il convient de se référer au procès verbal de transport.

- Sur l'indemnité principale

1° Sur les surfaces

La surface retenue par le premier juge de 455,70 m², telle que mesurée par le cabinet [W] le 5 septembre 2017 (pièce N°3) conformément à l'accord des parties n'est pas contestée en appel.

En appel, la SCI [Adresse 21] présente des demandes distinctes pour l'hôtel de 433,30 m² pour le studio de 21,70 m², surfaces qui ne sont pas contestées par la SEMISO.

En conséquence, ces surfaces seront retenues.

Le jugement sera donc infirmé en ce sens.

2° Sur la situation locative

Aux termes de l'article L 322-1 du code de l'expropriation le juge fixe le montant des indemnités d'après la consistance des biens à la date de l'ordonnance portant transfert de propriété.

Comme en première instance, les parties s'accordent à dire que les locaux sont occupés en vertu des contrats suivants :

'bail commercial concédé le 1er janvier 2010 au profit de la société « le Nord-Sud »

'renouvellement de bail non daté concédé au profit de Monsieur [J] [S] [U] et prévoyant une durée de 9 années à compter rétroactivement du 6 juin 2016 (pièce n°3)

'le preneur a par la suite donné son fond de commerce en location-gérance :

'à la SARL BRB, à compter du 1er juillet 2016 pour une durée de 24 mois sur le contrat daté du 14 juin 2016 (pièce n°4)

'à la SAS ADAMY à compter du 1er septembre 2018 pour une durée de 12 mois selon contrat daté du 24 juillet 2018 (pièce n°5).

La SCI [Adresse 21] indique qu'actuellement la société ADAMY exploite le commerce en vertu d'un contrat qui s'est renouvelé tacitement pour un an, soit le 30 septembre 2020, que le locataire gérant aurait dû libérer les locaux au plus tard le 30 septembre 2020, mais que toutefois celui-ci va continuer à exploiter le fonds de commerce jusqu'à la prise de possession des locaux par la SEMISO.

En conséquence, il n'est pas contesté que le bien doit être évalué en valeur occupée.

La question de l'abattement pour occupation sera examinée ci après.

3° Sur la méthode

Le juge de l'expropriation dispose du pouvoir souverain d'adapter la méthode qui lui paraît la mieux appropriée à la situation des biens expropriés.

La méthode par comparaison retenue par le premier juge n'est pas contestée par les parties en appel.

Cependant, la SCI [Adresse 21] demande en appel une indemnité distincte pour la dépossession d'un logement d'une surface de 21,70 m² situé au premier étage, à laquelle s'oppose la SEMISO à titre principal et qui demande à titre subsidiaire l'application d'un abattement de 25 % pour mauvais entretien du studio.

4° Sur les références des parties

Le premier juge après examen des références des parties a retenu une valeur unitaire de 2000 euros/m² en valeur libre, et après un abattement pour occupation de 15 %, une valeur de 1500 euros/m² en valeur occupée soit une indemnité de dépossession foncière de :

1700 euros x 455,70 m² = 774'690 euros.

Il convient en conséquence d'examiner les références des parties :

A. Les locaux commerciaux

1) Les références de la SCI [Adresse 21]

Elle demande une valeur unitaire de 3000 euros/m² et elle verse aux débats un rapport d'expertise immobilière du 24 avril 2020 (pièce n°2), recevable ayant été soumis au débat contradictoire.

Cependant, comme l'indique la SEMISO, les termes cités dans ce rapport d'expertise ne sont pas exploitables en l'absence de toutes références.

En outre, la SCI [Adresse 21] cite une référence retenue par le premier juge qui sera examinée ci après, jugement du 27 janvier 2015, [Adresse 11], pour un prix unitaire de 1500 euros/m² en valeur occupée pour la partie hôtel (pièce N°6), et l'expert retient pour la partie hôtel une valeur occupée de 2900 euros.

Elle indique que le premier juge s'est fondé sur les trois éléments de comparaison suivants, dont deux qu'elle a fournis et un troisième par le commissaire du gouvernement :

'T1 : vente du 9 avril 2014 un hôtel de 707 m², 97, rue du Docteur Bauer, pour le prix unitaire de 1978 euros/m² en valeur occupée.

'T2 : jugement du tribunal de grande instance de Bobigny du 27 janvier 2015 portant sur des locaux à usage d'hôtel situé [Adresse 13], parcelle cadastrée section BD n°[Cadastre 1], superficie de 641 m², prix total de 1'272'900 euros, soit 1500 euros/m² en valeur occupée pour la partie hôtel de 507 m² (pièce n° 6)

'T3 : vente le 13 décembre 2017, un hôtel de 1023 m², [Adresse 7], 1466 euros/m² en valeur occupée.

Elle indique que le terme T3 doit être écarté, car il se situe à plus d'un kilomètre du exproprié dans le Val-d'Oise, que sa nature ne présente strictement pas de similitudes avec le bien exproprié, que l'hôtel correspond à l'établissement de chaîne et elle produit à l'appui une photographie de septembre 2016.

Cependant, la SCI [Adresse 21] indique elle-même qu'il importe au préalable de souligner que les biens mobiliers comparables dans leur nature à celui estimé, soit un hôtel meublé dit de préfecture, sont assez rares et qu'il convient donc d'exploiter ceux disponibles, même dans un secteur géographique quelque peu éloigné.

En conséquence, ce terme datant de moins de 5 ans, même s'il est plus éloigné de [Localité 24] que le bien exproprié, est comparable en consistance et il sera retenu étant précisé qu'il est vendu en situation occupée.

Pour les termes T1 et T2, la SCI [Adresse 21] indique qu'il doivent être retenus mais que leur prix doit être augmenté dans une proportion importante, car ils sont assez anciens et il est indispensable de tenir compte de l'augmentation du marché immobilier très dynamique et qu'en outre ils ne sont pas situés à proximité immédiate de [Localité 24] ; que s'ils sont localisés dans des communes jouxtant elle-même [Localité 24], ils sont à des distances significatives et ces hôtels étaient dans un moins bon état ; elle produit une photographie du terme T2 faisant état d'un état très dégradé, très vétuste.

Le terme T1 est ancien, datant de plus de 5 ans, en raison de la rareté des biens, sera retenu étant situé dans la même commune et dans une situation commerciale et géographique proche du bien exproprié.

Le terme T2 sera retenu pour les mêmes motifs étant précisé qu'il sera tenu compte du fait que ce terme concerne un bien en état vétuste.

La SCI [Adresse 21] indique que le premier juge a écarté à tort les références suivantes :

T4: vente le 27 février 2017 d'un hôtel de 930 m², 150, rue Jules Guesde à [Localité 22], 2634 euros/m² en valeur libre.

Cependant, comme elle l'indique elle-même, il n'est pas contestable que les prix de l'immobilier sont davantage élevés à [Localité 22]; en conséquence, ce terme situé au sein du quartier des affaires de la ville de Levallois non comparable sera écarté.

T5: arrêt de la cour d'appel de Paris du 14 janvier 2016 portant sur des locaux à usage d'hôtel situé [Adresse 14], parcelle cadastrée section AH n°[Cadastre 10], superficie de 98 m², 933'900 euros pour la partie hôtel de 566 m², soit 1650 euros/m².

Cependant, la SCI [Adresse 21] indique elle-même que le jugement dont appel a été rendu en 2013 ; en outre, ce bien bénéficie d'une situation en centre ville, avec un environnement de qualité différent ; cette référence non comparable doit donc être écartée.

2) Les références de la SEMISO

Elles demande de retenir et d'écarter les mêmes termes que le premier juge.

Sur l'abattement pour occupation pour le terme T 1, l'expert désigné par la SCI [Adresse 21] retient une valeur de 3000 euros/m² et un abattement pour occupation commerciale de 30 %.

La SEMISO demande de retenir un abattement de 25 %.

Au regard de la différence de valeur entre le terme retenu en valeur libre et les termes retenus en valeur occupée, il convient de retenir un abattement de 15% soit :

1400 x 0, 85 (abattement pour occupation) = 1190 euros.

S'agissant de l'abattement demandé par la SEMISO de 25 % pour mauvais entretien du bien, il n'y sera pas fait droit, puisque cet élément sera retenu comme élément de moins-value.

La moyenne des références retenues est donc en valeur occupée :

1190 + 1500 + 1466 = 4156/3 = 1385 euros/m².

Les facteurs de plus-value sont les suivants :

'l'immeuble est de qualité de construction ordinaire, mais avec un ravalement récent

'le bien bénéficie d'une attractivité particulière compte tenu de sa proximité immédiate des transports en commun et le boulevard périphérique parisien et il est donc mieux situé que les biens de référence

'le bien est situé dans un quartier offrant toute facilité en matière de commerces de proximité

'le bien présente un emplacement également favorable pour une activité d'hôtel restaurant

Les facteurs de moins-value sont les suivants :

'le bien est en état d'usage

'plusieurs chambres sont en mauvais état d'entretien et chaque chambre ne dispose pas d'un sanitaire individuel

Les facteurs de plus-value sont plus importants que les facteurs de moins-value.

Il doit en outre être tenu compte de l'ancienneté des termes de comparaison, du caractère vétuste du terme T2 et de la rareté du marché.

Au vu de ces éléments, le premier juge a exactement retenu une valeur unitaire de 1700 euros/m² en valeur occupée, la valeur revendiquée de 3000 euros/m² ne pouvant être atteinte.

L'indemnité principale de dépossession pour les locaux partis hôtel est donc de :

433,30 m² x 1700 euros = 736'610 euros en valeur occupée.

Le jugement sera infirmé en ce sens.

B. Le local d'habitation

La SCI [Adresse 21] indique que le studio situé au premier étage n'est pas inclus dans la partie hôtel, ce qui a été relevé par le premier juge dans son procès-verbal de transport, qu'il est d'une superficie de 21,70 m², et ce n'est que pour faciliter le débat qu'elle s'appuyait sur le prix de 3000 euros/m² alors que le jugement n'a appliqué que celui bien inférieur de 1700 euros ; or, ce studio présente une valeur vénale supérieure au reste de la partie hôtel et elle sollicite en conséquence une valeur de 4500 euros/m².

La SEMISO s'oppose à titre principal à cette demande en indiquant que le bâtiment exproprié est à destination commerciale et non d'habitation, et qu'il n'est pas démontré que ce studio est à usage d'habitation ; à titre subsidiaire, elle indique que l'état général du bien expropriée et des parties communes comprises est sans conteste très mal entretenu, qu'il est situé au premier étage d'un hôtel comprenant des activités de bar restaurant rez-de-chaussée qui constituent des sources de nuisances y compris le soir, ce qui constitue un facteur de moins-value ; qu'il convient après application d'un abattement pour occupation de 25 %, d'appliquer également un abattement pour mauvais entretien du bien, soit :

3000 euros/m² (abattement de 25 %) x 21,70m² = 65 100 euros.

Il ressort du procès-verbal de transport qu'au premier étage se trouve un studio composé d'une grande pièce principale avec 2 fenêtres, une salle de bains, que la pièce principale est dans un état correct avec de la peinture blanche aux murs et un parquet au sol, mais que le plafond comporte les traces d'un dégât des eaux avec des décollements importants et que la salle de bains comprend une douche, une toilette et un lavabo.

Ce studio n'a pas unevocation commerciale mais une vocation d'habitation et doit donc faire l'objet d'une indemnisation distincte, pour une indemnisation intégrale.

La surface de 21,70 m² non contestée par la SEMISO sera retenue.

Il convient d'examiner les références produites uniquement par la SCI [Adresse 21] :

Elle se prévaut d'un terme particulièrement pertinent, un jugement rendu le 11 mars 2021 par le juge de l'expropriation de [Localité 17] pour un appartement situé dans l'immeuble jouxtant l'immeuble, soit l'immeuble sis [Adresse 8] (RG 18/00 178), avec un prix unitaire de 4000 euros/m².

Cependant ce terme, postérieur au jugement déféré ne peut être qu'écarté.

Elle se prévaut également des éléments de comparaison soumis par le commissaire du gouvernement dans cette affaire datant des années 2018 et 2019 avec les références de publication :

N°du terme

Date de vente

Adresse

Surface

Prix en euros

Prix en euros/m²

Observations

CG6

18 janvier 2019

[Adresse 9]

69,10

310'640

4496

observations : terme retenu, le reportage photographique réalisé par l'expropriant ne permettant pas de considérer que cet immeuble est de meilleure qualité architecturale que celui du bien évalué.

Il sera tenu compte du fait que ce terme de comparaison est relatif à un bien possédant un parking, ce qui n'est pas le cas du bien à évaluer et constitue un élément de plus-value

CG7

21 mars 2019

[Adresse 9]

68,60

282'000

4111

observations : terme retenu (observations du terme CG 6)

CG8 et DEF 9

5 octobre 2018

[Adresse 4]

61,76

361'000

5845

observations : terme retenu (observations du terme CG 6)

CG10

11 avril 2019

[Adresse 5]

63

290'000

4603

observations : terme retenu (observations du terme CG 6)

CG11

13 mars 2019

[Adresse 15]

64,93

320'000

4928

observations : terme retenu (observations du terme CG 6)

La SCI du [Adresse 21] indique que la moyenne s'établit donc à 4893 euros/m² en valeur libre, et que l'appartement de 65 m² étant dans un bon état d'entretien, il convient de retenir un prix de 4500 euros/m².

Il convient de retenir ces termes non critiqués par la SEMISO dans sa demande à titre subsidiaire, qui sont antérieurs au jugement pour une moyenne de 4893 euros/m², soit après abattement pour occupation de 15% :

4893 x 0, 85 (abattement pour occupation) x 21, 70 m² = 90 251 euros arrondis en valeur occupée.

Le jugement sera donc infirmé en ce sens.

L'indemnité principale totale est donc de :

736'610 (hôtel) + 90 251 (studio) = 826 861 euros en valeur occupée

Le jugement sera infirmé en ce sens.

- Sur les indemnités accessoires

1° Sur l'indemnité de remploi

Elle est calculée selon la jurisprudence habituelle comme suit :

20% entre 0 et 5 000 euros : 1 000 euros

15% entre 5 001 et 15 000 euros : 1 500 euros

10% sur le surplus soit : (826 861 - 15 000 = 811 861) x 10% = 81 186, 10 euros

soit un total de 83 686, 10 euros.

Le jugement sera infirmé en ce sens.

2° sur l'indemnité pour perte de revenus locatifs

Le premier juge a fixé l'indemnité pour perte de revenus locatifs correspondant à 6 mois de loyer soit la somme de 48'000 /m²= 24'000 euros.

La SCI [Adresse 21] demande en appel de porter cette indemnité à la somme de 48'000 euros correspondants à 12 mois de revenus locatifs.

LA SEMISO demande l'infirmation en indiquant que l'appelante ne verse pas les relevés de compte des quittances de loyer attestant du versement des loyers, ni d'attestation comptable permettant de justifier de la régularité des revenus locatifs.

En outre, la durée de 12 mois est manifestement excessive, puisqu'il est habituellement retenu une période de 6 mois et l'appelante ne rapporte pas la preuve que son bien présente des spécificités telles qu'un délai particulièrement long pour retrouver un bien équivalent serait nécessaire.

La SCI [Adresse 21] justifie qu'elle perçoit actuellement un loyer mensuel de 4000 euros/mois HT-HC, en exécution du bail signé en 2010 avec Monsieur [S] [U], renouvelé en 2016 (pièce n° 2) et depuis la mise en location- gérance, que c'est le locataire gérant qui s'acquitte du loyer en exécution de son contrat à savoir la redevance de location gérance au bénéfice du propriétaire du fonds de commerce le loyer des murs au profit de la SCI le Périph ; un contrat passé avec la société BRB prévoyait un loyer d'un montant 4000 euros HT/HC (pièce n° 5) qui n'a pas été revalorisé lorsque la société ADAMY est devenue le locataire gérant (pièce n° 5).

Elle justifie en outre des liasses fiscales justifiant des loyers pour les années 2017, 2018, 2019 et 2020 pour son activité, ainsi que des liasses fiscales des locataires gérant de la SARL BRB pour 6 mois de l'année 2016, de l'année 2017, et de 15 mois au titre des années 2018/2019 de la société ADAMY.

Il convient donc au vu des pièces versées de retenir ce montant de loyer de 4000 euros.

La SCI [Adresse 21] convient elle-même que le marché en région parisienne est dynamique, et elle ne démontre pas que son bien présenterait des caractéristiques particulières justifiant de ne pas retenir le délai habituel de 6 mois et de le porter à un an de loyer. Si les termes versés aux débats sont peu nombreux, son expert (pièce N°2) cite 7 termes.

En conséquence, le jugement sera confirmé en ce qu'il a exactement retenu une durée de 6 mois d'indemnité pour perte de revenus locatifs d'un montant de 24'000 euros.

3° indemnité pour déménagement

En appel, la SCI [Adresse 21] formule une nouvelle demande, qui est recevable, une demande d'indemnité accessoire pouvant être formulée pour la première fois en cause d'appel, en demandant un sursis à statuer dans l'attente de la réalisation du déménagement effectif, s'agissant notamment de la chambre froide et des installations liées à l'exploitation du café.

LA SEMISO n'a pas conclu sur ce point.

L'article L 321-1 du code de l'expropriation dispose que les indemnités allouées couvrent l'intégralité du préjudice direct, matériel et certain causé par l'expropriation.

En conséquence, l'indemnité étant fixée en valeur occupée, il convient de faire droit à cette demande de sursis à statuer et en renvoyant l'examen de l'affaire à l'audience du jeudi 17 novembre 2022 à 9h00.

Il appartiendra à la SCI [Adresse 21] de démontrer ce préjudice par la production de facture ou devis de déménagement.

- Sur les frais d'expertise

Le premier juge a rejeté la demande de la CECI en l'absence de justification du montant des frais exposés.

En appel, elle produit la facture (pièce n° 7) pour un montant de 4500 euros TTC.

Cependant, il ne s'agit pas d'une expertise judiciaire, mais d'une expertise confiée par la SCI [Adresse 21], qui est intégrée dans l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles.

En effet, suite au décret N°2022-245 du 25 février 2022 favorisant le recours à la médiation, portant application de la loi pour la confiance dans l'institution judiciaire et modifiant diverses dispositions, l'article a été complété par ' les parties peuvent produire les justificatifs des sommes qu'elles demandent', celui-ci étant applicable aux instances en cours (article 1°).

- Sur le timbre fiscal

La SCI [Adresse 21] sollicite la condamnation de la SEMISO à lui verser le montant de 125 euros titre du timbre fiscal.

Cependant, l'article 695 du code de procédure civile prévoit que les dépens afférents aux instances et procédures d'exécution comprennent :

1° Les droits, taxes, redevances ou émoluments perçus par les (décret N°2017-892 du 6 mai 2017, article 68-i-2°) 'greffe' des juridictions ou l'administration des impôts à l'exception des droits, taxes et pénalités éventuellement dus sur les actes et titres produits à l'appui des prétentions du juge.

Le montant du timbre fiscal est donc inclus dans les dépens.

La SCI [Adresse 21] sera donc déboutée de sa demande.

- Sur l'article 700 du code de procédure civile

Il convient de confirmer le jugement qui a condamné la SEMISO à payer à la SCI du [Adresse 21] la somme de 2500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Il incombe à la SCI [Adresse 21] d'intégrer dans sa demande d'article 700 du code de procédure civile en appel le coût du rapport d'expertise à hauteur de 4000 euros et le montant du timbre fiscal de 225 euros ; or, celle-ci ne sollicite sur ce fondement que la somme de 2500 euros.

L'équité commande en conséquence de condamner la SEMISO à payer à la SCI [Adresse 21] la somme de 2500 euros sur le fondement l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

- Sur les dépens

Il convient de confirmer le jugement pour les dépens de première instance, qui sont à la charge de l'expropriant conformément à l'article L 312-1 du code de l'expropriation.

En raison du sursis à statuer sur l'indemnité de déménagement, les dépens seront réservés.

PAR CES MOTIFS,

La cour statuant publiquement par mise à disposition au greffe, contradictoirement et en dernier ressort,

Déclare recevables les conclusions des parties ;

Infirme partiellement le jugement entrepris ;

Fixe l'indemnité due par la société anonyme d'économie mixte de construction et de rénovation de la ville de [Adresse 27] (SEMISO) à la SCI [Adresse 21] au titre de la dépossession des locaux situés [Adresse 3]) sur la parcelle cadastrée section Z numéro [Cadastre 6] au titre de l'indemnité principale, au titre de l'indemnité de remploi et au titre de la perte de revenus locatifs à la somme de 934'547,10 euros en valeur occupée se décomposant comme suit :

'indemnité principale : 826 861 euros

'indemnité de remploi : 83 686, 10 euros

'indemnité pour perte de locatifs : 24'000 euros ;

Déboute la SCI [Adresse 21] de sa demande au titre du coût du rapport d'expertise ;

Déboute la SCI [Adresse 21] de sa demande au titre du timbre fiscal ;

Condamne la société anonyme d'économie mixte de construction et de rénovation de la ville de [Adresse 27],(SEMISO) à payer à la SCI [Adresse 21] la somme de 2500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

Sursoit à statuer sur l'indemnité demandée par la SCI [Adresse 21] au titre des frais de déménagement ;

Renvoi l'examen de l'affaire à l'audience du jeudi 17 novembre 2022 à 9h00 en salle Portalis (2.Z.60), escalier Z, 2ème étage ;

Réserve les dépens.

LE GREFFIERLE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 7
Numéro d'arrêt : 21/06200
Date de la décision : 19/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-19;21.06200 ?
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