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19/05/2022 | FRANCE | N°21/03766

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 10, 19 mai 2022, 21/03766


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 10



ARRÊT DU 19 MAI 2022



(n° , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général :

N°RG 21/03766-N° Portalis 35L7-V-B7F-CDFYW



Décision déférée à la cour :

jugement du 22 janvier 2021-juge de l'exécution de Créteil-RG n° 20/05648



APPELANTE



Madame [X] [B] épouse [O]

[Adresse 3]

[Localité 4]



Représentée par Me Sylvie EX-IGNOT

IS de la SCP FOUCHE-EX IGNOTIS, avocat au barreau du VAL-DE-MARNE, toque : PC 155



INTIMÉE



LA CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL DE JARVILLE BONSECOURS

[Adresse 1]

[Localité 2]



Représentée par Me Xavier D...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 10

ARRÊT DU 19 MAI 2022

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général :

N°RG 21/03766-N° Portalis 35L7-V-B7F-CDFYW

Décision déférée à la cour :

jugement du 22 janvier 2021-juge de l'exécution de Créteil-RG n° 20/05648

APPELANTE

Madame [X] [B] épouse [O]

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentée par Me Sylvie EX-IGNOTIS de la SCP FOUCHE-EX IGNOTIS, avocat au barreau du VAL-DE-MARNE, toque : PC 155

INTIMÉE

LA CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL DE JARVILLE BONSECOURS

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par Me Xavier DE RYCK de l'AARPI ASA, avocat au barreau de PARIS, toque : R018

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 6 avril 2022, en audience publique, devant la cour composée de :

Madame Bénédicte PRUVOST, président de chambre

Madame Catherine LEFORT, conseiller

Monsieur Raphaël TRARIEUX, conseiller

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Madame Bénédicte PRUVOST, président de chambre, dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.

GREFFIER lors des débats : M. Grégoire GROSPELLIER

ARRÊT :

-contradictoire

-par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

-signé par Bénédicte PRUVOST, président de chambre et par Grégoire GROSPELLIER, greffier présent lors de la mise à disposition.

Par jugement du 15 mai 2003, le tribunal d'instance de Nancy a condamné Mme [B] épouse [O] à payer à la Caisse de Crédit Mutuel de Jarville Bonsecours (ci-après le Crédit Mutuel) la somme de 3 350,83 euros avec intérêts au taux contractuel de 8,90 % à compter du 16 février 2000, au titre d'un prêt consenti le 18 juin 1998, et celle de 857,37 euros avec intérêts au taux contractuel de 6,50 % à compter du 16 février 2000 également, au titre d'un prêt consenti le 10 août 1999.

Par arrêt du 20 mars 2006, la cour d'appel de Nancy a confirmé ce jugement et condamné en outre Mme [B] à payer au Crédit Mutuel une somme de 800 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

En exécution de ces deux décisions, le Crédit Mutuel a fait signifier le 27 août 2020 un commandement de payer aux fins de saisie-vente, pour un montant de 10.560,27 euros.

Par jugement du 22 janvier 2021, le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Créteil a :

- rejeté les contestations formées par Mme [B],

- constaté la validité du commandement de payer du 27 août 2020,

- condamné Mme [B] à payer au Crédit Mutuel la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Selon déclaration du 24 février 2021, Mme [B] a interjeté appel de ce jugement.

Par conclusions du 16 avril 2021, l'appelante demandait à la cour de :

- infirmer le jugement entrepris,

statuant à nouveau,

- annuler le commandement de payer aux fins de saisie-vente,

- déclarer en tout état de cause la créance du Crédit Mutuel prescrite,

- condamner le Crédit Mutuel à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner le Crédit Mutuel aux dépens.

Par ordonnance du 3 juin 2021, non déférée à la cour, le Crédit Mutuel a été déclaré irrecevable à conclure.

Par arrêt mixte du 16 décembre 2021, la cour a :

- confirmé le jugement en ce qu'il a déclaré régulier le commandement aux fins de saisie-vente du 27 août 2020,

y ajoutant sur le surplus,

- ordonné la réouverture des débats afin que les parties concluent sur la prescription biennale de tout ou partie des intérês réclamés dans le commandement aux fins de saisie-vente du 27 août 2020,

- renvoyé l'affaire à l'audience dématérialisée de procédure du 27 janvier 2022,

- réservé le surplus des demandes et les dépens.

Pour ce faire, la cour a fait application des dispositions de l'article R. 632-1 du code de la consommation, selon lesquelles le juge peut relever d'office toutes les dispositions dudit code, notamment celles de l'article L. 218-2 relatives à la forclusion biennale, dans les litiges nés de son application.

Par conclusions du 27 janvier 2022 après réouverture des débats, Mme [B] demande à voir :

- juger que les intérêts échus postérieurement au jugement de condamnation du 15 mai 2003, confirmé par l'arrêt du 20 mars 2006, se prescrivent par un délai de deux ans,

- fixer le montant de la créance du Crédit Mutuel à son égard à la somme de 2529,43 euros, subsidiairement à 3015,45 euros,

- condamner le Crédit Mutuel à lui payer la somme de 1000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner le Crédit Mutuel aux entiers dépens.

En réponse à l'arrêt avant-dire droit du 16 décembre 2021, le Crédit Mutuel a déposé des conclusions le 27 janvier 2022 également.

MOTIFS

A titre liminaire, il convient de constater que c'est par erreur que la cour a, après avoir ordonné la réouverture des débats, invité les parties à conclure sur la prescription biennale des intérêts, alors que, par ordonnance du 3 juin 2021, la partie intimée avait été déclarée irrecevable à conclure, nécessairement pour toute la durée de la présente procédure d'appel. Par conséquent, les conclusions signifiées le 16 décembre 2021 par le Crédit Mutuel ne pourront être prises en considération, pas davantage que ses pièces de première instance adressées à la cour.

Aux termes de l'article L. 111-4 alinéa 1er du code des procédures civiles d'exécution, l'exécution des titres exécutoires mentionnés aux 1° à 3° de l'article L. 111-3 ne peut être poursuivie que pendant dix ans, sauf si les actions en recouvrement des créances qui y sont constatées se prescrivent par un délai plus long.

Cependant si, depuis l'entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008 relative à la prescription, le créancier peut poursuivre pendant dix ans l'exécution du jugement portant condamnation au paiement d'une somme payable à termes périodiques, il ne peut, en vertu de l'article 2224 du code civil, applicable en raison de la nature de la créance, obtenir le recouvrement des arriérés échus plus de cinq ans avant la date de sa demande et non encore exigibles à la date à laquelle le jugement avait été obtenu (2ème Civ. 26 janv. 2017, n°15-28.173).

Il s'ensuit que la créance périodique non échue à la date de la décision de justice se prescrit selon le délai d'origine qui lui est applicable, en fonction de sa nature, et non selon le délai de prescription du jugement.

Or en application de l'article L. 218-2 du code de la consommation, les créances périodiques, notamment les intérêts, nées d'une créance en principal fixée par un titre exécutoire, en raison de la fourniture d'un bien ou d'un service par un professionnel à un consommateur, sont soumises au délai de prescription biennale (1ère Civ, 22 janv. 2020, 18-25.027). Ce délai biennal s'applique tant à l'action en recouvrement en vertu d'un titre exécutoire qu'à l'action en paiement en vue d'obtenir un tel titre.

Il en résulte que, en l'espèce, dès lors que les créances résultent de soldes impayés de deux prêts à la consommation, les intérêts échus postérieurement au jugement du 15 mai 2003 se prescrivent par deux ans ; qu'en revanche, il n'en est pas de même des intérêts courus sur l'indemnité octroyée par l'arrêt du 20 mars 2006 en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, qui se prescrivent par cinq ans conformément à l'article 2224 du code civil.

L'appelante entend voir imputer sur le capital les paiements d'un montant non contesté de 2853,24 euros tel que mentionné au décompte de l'huissier figurant au commandement aux fins de saisie-vente, en l'absence démonstration qu'ils se sont imputés sur les intérêts.

Cependant aux termes de l'article 1254 ancien du code civil, applicable aux présents versements antérieurs à l'entrée en vigueur de l'ordonnance du 10 février 2016, le débiteur d'une dette qui produit des intérêts ou des arrérages, ne peut point, sans le consentement du créancier, imputer le payement qu'il fait sur le capital par préférence aux arrérages ou intérêts : le paiement fait sur le capital et intérêts, mais qui n'est point intégral, s'impute d'abord sur les intérêts. Il s'ensuit que les paiements faits à hauteur de 2853,24 euros en 2014 et 2015 se sont imputés d'abord sur les intérêts, conformément à ces dispositions.

Il reste néanmoins à déterminer si ces paiements, imputables en priorité sur les intérêts, ont suffi à apurer l'intégralité des intérêts alors échus et s'ils ont entamé pour partie le capital, ce qui ne ressort pas de l'examen des décomptes produits par l'appelante en pièces n°7 à 10. A l'inverse, il ressort de l'examen du décompte d'intérêts de l'huissier de justice que les versements faits à hauteur de 2853,24 euros en 2014 et jusqu'au 1er septembre 2015 ont permis d'apurer pour partie les intérêts sans néanmoins entamer le capital restant dû de l'un ou l'autre prêts.

Enfin, il ressort des décomptes produits par l'appelante elle-même qu'aucun paiement n'est intervenu entre les 1er septembre 2015, date du dernier versement, et le 27 août 2020, date du commandement aux fins de saisie-vente, de sorte que les intérêts de retard doivent être calculés comme suit :

- principal 1 (au titre du prêt du 18 juin 1998) : 3350,83 euros

- intérêts sur 2 ans au taux de 8,90% : 596,73 euros

- principal 2 (au titre du prêt du 10 août 1999) : 857,37 euros

- intérêts sur 2 ans au taux de 6,50% : 111,51 euros

- indemnité au titre de l'article 700 CPC : 800 euros

- intérêts au taux légal sur 5 ans : 152,25 euros

total : 5868,69 euros, arrêtés au 28 août 2020, dont il n'y a pas lieu de déduire les versements à hauteur de 2853,24 euros, puisque ceux-ci s'étaient imputés d'ores et déjà sur les intérêts en 2014 et 2015, comme indiqué précédemment.

Par suite, il convient de fixer la créance du Crédit Mutuel à la somme de 5868,69 euros figurant au commandement aux fins de saisie-vente, dont la régularité a été confirmée par l'arrêt mixte du 16 décembre 2021, et d'infirmer le jugement entrepris dans cette limite.

Sur les demandes accessoires

Au regard de l'issue du litige, il n'y a pas lieu de prononcer de condamnation en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ni en première instance ni à hauteur d'appel.

Mme [B], qui demeure débitrice à l'égard du Crédit Mutuel, sera condamnée aux dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

Vu l'arrêt mixte du 16 décembre 2021,

Infirme le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté l'intégralité des demandes présentées par Mme [X] [B] épouse [O] et en ce qu'il l'a condamnée à payer à la Caisse de Crédit Mutuel de Jarville Bonsecours une somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Et statuant à nouveau dans cette limite,

Fixe la créance de la Caisse de Crédit Mutuel de Jarville Bonsecours figurant au commandement aux fins de saisie-vente du 27 août 2020 à la somme de 5868,69 euros,

Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile à hauteur de première instance,

Et y ajoutant,

Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile à hauteur d'appel,

Condamne Mme [X] [B] épouse [O] aux dépens d'appel.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 10
Numéro d'arrêt : 21/03766
Date de la décision : 19/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-19;21.03766 ?
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