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19/05/2022 | FRANCE | N°21/01854

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 5, 19 mai 2022, 21/01854


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 5



ARRÊT DU 19 Mai 2022

(n°2022/ , 8 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 21/01854 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CDHBX



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 30 Juillet 2014 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS RG n° F12/11330



APPELANT



Monsieur [G] [P]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

né le 30 M

ai 1978 à [Localité 4]

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2015/012403 du 01/04/2015 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PARIS)

comparant en personne, as...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 5

ARRÊT DU 19 Mai 2022

(n°2022/ , 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 21/01854 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CDHBX

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 30 Juillet 2014 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS RG n° F12/11330

APPELANT

Monsieur [G] [P]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

né le 30 Mai 1978 à [Localité 4]

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2015/012403 du 01/04/2015 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PARIS)

comparant en personne, assisté de Me Guillaume SAUDUBRAY, avocat au barreau de PARIS, toque : P0501

INTIMEE

Association PROTECTION CIVILE DE PARIS

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représentée par Me Elisabeth DE BOISSIEU, avocat au barreau de PARIS, toque : P0218

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 10 Mars 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Marie-Christine HERVIER, Présidente de chambre chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Marie-Christine HERVIER, Présidente de chambre,

Madame Nelly CAYOT, Conseillère

Madame Lydie PATOUKIAN, Conseillère

Greffier : Madame Cécile IMBAR, lors des débats

ARRÊT :

- contradictoire,

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,

- signé par Madame Marie-Christine HERVIER, Présidente et par Madame Manon FONDRIESCHI, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE

Par contrat à durée déterminée du 22 septembre 2009, renouvelé jusqu'au 23 mars 2010, M. [G] [P] a été engagé par l'association Protection civile de Paris Seine comme moniteur de secourisme, technicien qualifié, 2ème degré, niveau D1. Il a ensuite été embauché en qualité de formateur par contrat à durée indéterminée à effet au 24 mars 2010 pour une durée de travail de 1 565 heures annualisées lissées à raison de 35 heures hebdomadaires moyennant une rémunération de 1 797,83 euros, statut technicien qualifié 2ème degré, niveau D1, coefficient 200 selon la classification de la convention collective nationale des organismes de formation applicable à la relation de travail. Par avenant du 28 février 2011, M. [P] a été classé technicien hautement qualifié, niveau E1, coefficient 240 et sa rémunération mensuelle bute fixée à 1 968 euros à compter du 1er janvier 2011. M. [P] disposait d'un véhicule de service selon convention de mise à disposition du 22 septembre 2009.

Par courrier recommandé du 5 octobre 2010 M. [P] s'est vu notifier un avertissement en raion de ses retards.

Par courrier recommandé avec du 27 avril 2011 M. [P] a été convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 9 mai 2011 puis s'est vu notifier son licenciement pour motif personnel par courrier recommandé avec avis de réception du 16 mai 2011.

L'association Protection civile de Paris Seine employait au moins onze salariés lors de la rupture.

Contestant son licenciement et estimant ne pas être rempli de ses droits, M. [P] a saisi le 12 octobre 2012, le conseil de prud'hommes de Paris afin d'obtenir la condamnation de l'employeur à lui verser diverses sommes au titre de l'exécution et de la rupture du contrat de travail. Par jugement du 30 juillet 2014, auquel il convient de se reporter pour l'exposé de la procédure antérieure et des demandes initiales des parties, le conseil de prud'homme de Paris, section activités diverses, a débouté M. [P] de l'ensemble de ses demandes et l'a condamné aux entiers dépens.

M. [P] a régulièrement relevé appel du jugement le 29 octobre 2014.

L'affaire a été appelée aux audiences des 15 novembre 2017 et 6 mars 2019 date à laquelle elle a fait l'objet d'une ordonnance de radiation. L'affaire a été rétablie au rôle de la cour à la demande de l'appelant aux termes de ses conclusions reçues le 26 février 2021 et rappelée à l'audience du 13 janvier 2022, puis renvoyée à l'audience du 10 mars 2022.

Aux termes de ses conclusions d'appelant déposées et soutenues oralement à l'audience du 10 mars 2022 auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé des prétentions et moyens en application de l'article 455 du code de procédure civile, M. [P] prie la cour d'ordonner le rétablissement de l'affaire au rôle et la convocation des parties et de:

- dire que l'instance n'est pas périmée au sens des dispositions combinées des articles 386 du code de procédure civile et R. 1452-8 du code du travail dans sa rédaction antérieure au décret n°2016-660 du 20 mai 2016 et débouter l'association de la protection civile de Paris de cette demande,

- infirmer le jugement,

- dire que son licenciement est abusif,

- condamner l'association Protection civile de Paris à lui payer les sommes suivantes :

* 21 000 euros de dommages et intérêts pour licenciement abusif,

* 1 798,58 euros à titre de rappel de salaire au regard de ses fonctions de formateur,

* 290,40 euros au titre du manque à gagner en résultant en terme d'indemnisation chômage Pôle emploi,

* 149,75 euros brut au titre de ses déplacements sur [Localité 5] et [Localité 3],

* 450 euros au titre de la destruction de son radio émetteur portatif personnel non remboursé par l'employeur,

- condamner l'association Protection civile de Paris aux entiers dépens.

Aux termes de ses conclusions d'intimée déposées et soutenues oralement à l'audience du 10 mars 2022 auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé des prétentions et moyens en application de l'article 455 du code de procédure civile, l'association Protection civile de Paris Seine prie la cour de :

- prononcer la péremption d'instance pour défaut d'accomplissement des diligences requises dans le délai de 2 ans. A titre subsidiaire, rejeter les pièces de M. [P] pour défaut de communication et non respect du principe du contradictoire,

- prononcer l'irrecevabilité de la demande formulée au titre des frais de déplacement et heures supplémentaires afférentes présentée pour la première fois en cause d'appel ; à défaut, prononcer la prescription de la demande formulée à ce titre,

A titre subsidiaire,

- débouter M. [P] de la demande formulée au titre des frais de déplacement et heures supplémentaires présentée pour la première fois en cause d'appel,

- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté M. [P] de toutes ses demandes,

- débouter M. [P] de l'ensemble de ses demandes et le condamner à lui verser la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

MOTIVATION :

Sur les demandes procédurales :

Sur la péremption de l'instance :

L'association Protection civile de Paris Seine soulève la péremption de l'instance sur le fondement des articles 386 du code de procédure civile et R. 1452-8 du code du travail en faisant valoir que :

- M. [P] n'a accompli aucune des diligences imposées par la cour d'appel par son courrier du 19 septembre 2016 dans le délai de deux ans,

- M. [P] n'a pas respecté les diligences mises à sa charge par l'ordonnance de radiation du 6 mars 2019.

M. [P] conclut au rejet de la demande;

L'article 386 du code de procédure civile dispose que 'l'instance est périmée lorsqu'aucune des parties n'accomplit de diligences pendant deux ans'. L'article R. 1452-8 du code du travail précise quant à lui qu' 'en matière prud'homale, l'instance n'est périmée que lorsque les parties s'abstiennent d'accomplir pendant le délai de deux ans mentionné à l'article 386 du code de procédure civile les diligences qui ont été expressément mises à sa charge par la juridiction'.

L'association Protection civile de Paris Seine ne peut valablement prétendre que M. [P] n'a pas accompli les diligences qui avaient été mises à sa charge par la cour dans son courrier du 19 septembre 2016 puisque ce courrier n'est qu'une convocation du greffe à comparaître à l'audience du 15 novembre 2017 et que les instructions qui y figurent relatives à la communication des pièces et demandes six mois avant la date de l'audience ne sont pas prescrites par le juge ni soumises à sanction étant rappelé de surcroît que la procédure est orale.

Par ailleurs, s'agissant de l'ordonnance de radiation du 6 mars 2019, la cour observe que l'affaire a été rétablie au rôle au vu des conclusions de l'appelant dûment communiquées par le biais du RPVA et du bordereau de communication de ces pièces, l'appelant justifiant de la communication de l'ensemble des pièces avec ses dernières conclusions le 21 février 2022, l'affaire ayant été renvoyée à cette fin de l'audience du 13 janvier 2022 à celle du 10 mars 2022.

La demande de péremption de l'instance est par conséquent rejetée.

Sur la demande de rejet des pièces :

La cour rappelle que les parties doivent se communiquer spontanément les pièces dont elles font état en temps utile, sans que cette communication puisse intervenir, en procédure orale, après les débats de l'affaire de sorte qu'en l'espèce, les pièces même si elles n'ont pas été communiquées en leur totalité en même temps que les conclusions mais seulement le 12 janvier 2022 selon bordereau du même jour, donc avant les débats du 10 mars 2022, l'ont été valablement dans le respect du principe de la contradiction. La demande tendant à les faire écarter des débats est rejetée.

Sur l'irrecevabilité de demandes formulées pour la première fois en cause d'appel :

L'association Protection civile de Paris Seine soutient que la demande présentée par M. [P] au titre de ses frais de déplacement est irrecevable sur le fondement de l'aticle 564 du code de procédure civile dès lors qu'elle est présentée pour la première fois en cause d'appel mais

la cour rappelle que le litige relève non pas de la procédure écrite mais de la procédure orale et est donc soumis au principe de l'unicité de l'instance de sorte qu'en application de l'article R. 1452-6 et R. 1452-7 du code du travail alors applicables, toute demande nouvelle dérivant du même contrat de travail est revecable même en appel.

La fin de non recevoir soulevée est donc rejetée.

Sur la prescription de la demande de remboursement des frais de déplacement et de repas:

L'association Protection civile de Paris Seine soulève la prescription de la demande présentée au titre des frais de déplacement et de repas en faisant valoir qu'elle est présentée pour la première fois en février 202l alors que le délai de prescription est de trois ans et cinq ans antérieurement à 2013 et que les déplacements dont la date n'est pas connue remontent nécessairement à une date antérieure au licenciement du 16 mai 2011.

La cour relève que la demande de remboursement des frais de déplacement et de repas présentée par M. [P] concerne des déplacements qui auraient eu lieu en décembre 2010 d'après la pièce à laquelle le salarié fait référence dans ses écritures laquelle mentionne ce mois à une date qui n'est pas précisée dans celle-ci et qui ne ressort pas de la pièce produite. Le point de départ du délai de prescription est donc au plus tard le 31 décembre 2010. Il est constant que l'action a été diligentée devant le conseil de prud'hommes le 11 octobre 2012, date de l'envoi de la requête aux fins de saisine de la juridiction.

La délai de prescription était à l'époque de cinq années s'agissant d'une demande portant sur l'exécution du contrat de travail, de sorte que la saisine du conseil de prud'hommes a interrompu ce délai, la cour rappelant, s'agissant d'une procédure orale et peu important la date à laquelle la demande a été présentée pour la première fois, que si en principe l'interruption de la prescription ne peut s'étendre d'une action à l'autre, il en est autrement lorsque les deux actions, au cours d'une même instance, concernent l'exécution du même contrat de travail.

Le fin de non recevoir tirée de la prescription est donc rejetée.

Sur l'exécution du contrat de travail :

Sur la demande de rappel de salaire :

M. [P] soutient qu'entre les mois de septembre 2009 et décembre 2010, il a été rémunéré comme technicien qualifié alors que compte tenu de son expérience et de son expertise sanctionnée par le brevet national d'instructeur de secourisme, il aurait dû bénéficier du statut de technicien hautement qualifié lequel ne lui a été recommu qu'en janvier 2011. Il s'appuie sur des emplois du temps d'instructeurs/moniteurs faisant apparaître son nom pour prétendre qu'il exerçait concrétement des fonctions d'instructeur dés son embauche ainsi que sur un mail du directeur de l'enseignement en date du 11 mars 2010 fixant l'ordre du jour des réunions des moniteurs et indiquant que la réunion du 10 heures à 13 heures est animée par lui.

L'association Protection civile de Paris Seine s'oppose à la demande en faisant valoir que contrairement à ce qu'il prétend, M. [P] ne pouvait bénéficier dés son premier contrat de travail à durée déterminée du statut de tehncien hautement qualifié à défaut de justifier d'une formation de deux semaines pour être formateur et de quatre semaines pour être formateur de formateur.

La cour rappelle qu'en cas de contestation sur la qualification onventionnelle d'un salarié, les juges du fond doivent rechercher les fonctions réellement exercées par le salarié, la charge de la preuve de la qualification revendiquée pesant sur ce dernier.

En l'espèce, le coefficient appliqué à M. [P] lors de son embauche correspond à un statut de technicien selon l'article 20.7.2 de la convention collective. Les feuilles d'emploi du temps communiquées par le salarié ne suffisent pas à justifier que dés son embauche en contrat de travail à durée déterminée il exerçait l'emploi de formateur de formateur revendiqué et aurait dû bénéficier du coefficient E1, 240 qu'il a acquis en janvier 2011. Par ailleurs pour l'année 2010, la cour relève que le fait que son nom soit mentionné comme animateur d'une réunion de moniteurs de secourisme dans un mail fixant l'ordre du jur de ces réunions ne suffit pas davantage à prouver qu'il exerçait concrètement les fonctions revendiquées.

La cour le déboute de sa demande et le jugement est confirmé de ce chef.

Sur la demande de dommages-intérêts pour les pertes sur le montant de l'indemnisation du chômage :

Eu égard à la solution du litige, la demande est rejetée et le jugement confirmé en ce qu'il a débouté M. [P] de ce chef.

Sur la demande de remboursement des frais de déplacement :

Pour la première fois en cause d'appel, M. [P] soutient qu'il a effectué à une date qu'il ne précise pas deux dépacements à [Localité 3] et [Localité 5] dont il réclame le paiement sur la base d'un taux horaire de 12,975 euros outre les frais de repas.

Il vise dans ses écritures une page de son emploi du temps du mois de décembre 2010 laquelle ne fait apparaître aucun déplacement à [Localité 5] et [Localité 3]. De son côté, l'employeur communique une feuille de temps signée par M. [P] pour le mois de décembre 2010 ne faisant apparaître aucun déplacement. La cour déboute M. [P] de sa demande de remboursement des frais de déplacement et de repas.

Sur la rupture du contrat de travail :

Aux termes de la lettre de licenciement fixant les limites du litige, M. [P] a été licencié pour les motifs suivantts :

« ['] Nous avons tout d'abord eu de très mauvais retours de stagiaires à la suite de formations que vous avez dispensées. De ces retours il ressort que vous n'aviez manifestement pas préparé certaines formations. Ainsi par exemple, lors de la formation du 5 mars 2011, vous êtes arrivé au début de la journée devant les stagiaires en leur annonçant que le programme de la journée vous était inconnu, ce qui est incompatible avec votre degré de responsabilité. De plus, les évaluations effectuées ce jour-là ont manifestement porté sur les connaissances des stagiaires à leur arrivée et non sur leur acquis de la journée. Ceci est contraire à toute pédagogie, aux pratiques en vigueur dans notre association, et dénote à tout le moins un total désintérêt de la mission qui vous est confiée. Ce défaut de préparation ainsi que ces manquements dans l'évaluation ont également été à déplorer lors de la formation continue PSE2 du 2 avril 2011.

Il est également de votre devoir de formateur d'accueillir les stagiaires. Or, nous avons noté de nombreuses arrivées sur le site après l'heure de début des formations, ou moins de 5 minutes avant, ce qui est incompatible avec l'accueil des candidats.

À cela s'ajoutent les plaintes que nous avons eues relatives à votre comportement. Elles émanent tout d'abord de stagiaires qui se sont plaints de votre manque d'accompagnement à leur égard au cours des ateliers d'apprentissage des gestes : vous êtes souvent absent de la salle de formation, en conversation avec d'autres formateurs, un café à la main pendant les cours, occupé derrière l'ordinateur, et très peu présent ou peu disponible pour les candidats. Ceci n'est pas compatible avec votre statut d'instructeur. De plus, des stagiaires nous ont rapporté des propos ou un ton inapproprié de votre part, l'absence de réponse à leurs questions et plus généralement votre désintérêt visible pour la formation que vous dispensez et le sort de vos stagiaires.

Cette attitude générale négative est également manifeste à l'égard des autres formateurs et des permanents du siège et se caractérise notamment par une volonté évidente de créer, souvent avec M. [B], un sous-groupe à part, exclusif de tout travail d'équipe et de cohésion de notre association. Une telle attitude est d'autant plus inadmissible de la part d'un instructeur de secourisme, formateur de formateurs, bénéficiant d'une forte autonomie et dont on attend réciproquement et légitimement une conduite exemplaire lors des formations, et plus généralement dans son travail.

Plusieurs autres membres de l'association nous ont également rapporté une attitude contestataire, un refus d'appliquer les consignes qui vous sont données, notamment lorsqu'elles émanent de [U] [T] pourtant en charge de l'organisation des formations, attitude que nous ne pouvons tolérer au sein d'une association comme la nôtre.

Par ailleurs, et malgré des demandes réitérées en ce sens, nous devons également faire face à votre refus de restituer les documents administratifs complétés relatifs à deux formations d'initiation aux premiers secours que vous avez dispensées le 7 avril 2011, soit il y a plus d'un mois.

Enfin, nous avons noté une utilisation abusive du véhicule de l'association mis à votre disposition pour les besoins du service : ainsi par exemple, nous avons noté 8 trajets aller/retour entre votre domicile et votre lieu de travail avec des kilométrages très supérieurs à la distance déterminée par application de la cartographie Mappy (65 km en moyenne contre 20 km pour le trajet normal). Une telle utilisation est à la fois parfaitement contraire aux stipulations de la convention de mise à disposition d'un véhicule de service que vous avez signé, mais également un impératif de saine gestion des biens de l'association. ['] ».

L'article L. 1235-1 du code du travail dans sa version en vigueur du 1er mai 2008 au 17 juin 2013 applicable au litige dispose qu'en cas de litige relatif au licenciement, le juge, à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties, au besoin après toutes mesures d'instruction qu'il estime utiles et que si un doute subsiste, il profite au salarié. Ainsi, l'administration de la preuve du caractère réel et sérieux des motifs du licenciement n'incombe pas spécialement à l'une ou l'autre des parties, l'employeur devant toutefois fonder le licenciement sur des faits précis, objectifs imputables au salarié et matériellement vérifiables.

L'association Protection civile de Paris Seine soutient que les faits sont matériellement établis dès lors qu'elle a eu de mauvais retours de stagiaires à la suite des formations que M. [P] a dispensées, s'appuyant sur des mails et courriers que lui ont adressés des stagiaires les 5 mars 2011, 7 mars 2011 pour exprimer leur mécontentement suite à la formation dispensée le 5 mars 2011. Elle invoque également un courriel de M. [P] lui-même en date du 2 avril 2011 par lequel il indique n'avoir pas été en mesure de procéder à l'évaluation des apprenants par des mises en situation. Elle communique également un relevé des retards de M. [P] en février 2011. Enfin, étant rappelé que la cour ne statue que sur les griefs énoncés dans la lettre de licenciement de sorte que les développements de l'employeur sur le comportement à connotation sexuelle inapproprié de l'intéressé sont inopérants, l'association Protection civile de Paris Seine verse aux débats un doucment manuscrit qu'elle présente comme le relevé kilométrique des déplacements de M. [P] faisant apparaître des déplacements de plus de 20 kms en février 2011.

De son côté, M. [P] conteste les faits qui lui sont reprochés en faisant valoir s'agissant de la formation du 5 mars 2011 que le programme ne lui avait pas été remis par le directeur adjoint de la formation et qu'il ne pouvait pas définir lui-même un programme qui aurait été différent de celui que le responsable de formation aurait élaboré. Il communique son emploi du temps établissant selon lui qu'il était en congé les jours précédant la formation de sorte qu'il n'a pas eu connaissance du programme lequel ne lui a pas été transmis. La cour relève toutefois que contrairement à ce qu'affirme le salarié, l'emploi du temps communiqué pour le mois de mars 2011 ne fait pas apparaître qu'il était en congé les jours précédant la journée de formation du 5 mars 2011. Il soutient que les mécontentements ont été exprimés par les stagiaires dont la formation n'a pas été validée et précise qu'il a été menacé et insulté par certains d'entre eux communiquant le mail en ce sens qu'il a adessé le 5 mars pour rendre compte des incidents et du niveau extrèmement bas des stagiaires ainsi que les fiches d'évaluation qui établissent les performances des stagiaires et leur niveau insatisfaisant. La cour considère en conséquence que les faits ne caractérisent pas une cause sérieuse de licenciement.

S'agissant de la formation du 2 avril 2011, M. [P] communique les feuilles de commentaires des stagiaires sur la formation qui font apparaître que, dans l'ensemble, ils se sont déclaré satisfaits de la formation, seuls trois sur les dix dont les fiches sont communiquées cochant des cases 'peu satisfaits' sur l'organisation, la logistique ou le contenu de la formation de sorte qu'aucun élément communiqué permet d'établir que le comportement de M. [P] était défaillant au regard de cette formation.

Par ailleurs, s'agissant du reproche relatif à la volonté de créer un sous groupe à part avec un autre formateur, la cour relève que l'employeur lui-même favorisait cette situation dès lors que M. [P] a fonctionné en binôme avec cet autre formateur non seuelement lors de la formation du 5 mars 2011 mais aussi lors de celle du 2 avril 2011.

Enfin, s'agissant de la voiture, M. [P] soutient que ce véhicule était utilisé par d'autres personnes que lui et communique un mail du 12 mai 2011 où il s'émeut de cette situation, l'employeur lui spécifiant les dates auxquelles le véhicule a été confié à d'autres salariés. La cour considère que le relevé manuscrit du kilométrage sans aucun élément venant le corroborer non signé du salarié et alors qu'il pouvait arriver que le véhicule soit mis à disposition d'autres personnes ne suffit pas à caractériser les faits reprochés.

Il n'est produit aucun élément susceptible de caratériser les autres griefs évoqués dans la lettre de licenciement sur l'insubordination, notamment à l'égard de Mme [T] visée dans la lettre de lciencement et le refus de restituer des documents administratifs.

En conséquence de ce qui précède la cour retenant les faits ne sont pas établis ou ne caractérisent pas une cause sérieuse de licencieent, considère que la cause réelle et sérieuse de licenciement n'est pas établie.

Sur les conséquences financières du licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Employé depuis moins de deux ans dans une structure comprenant au moins onze salariés M. [P] peut prétendre à une indemnité correspondant au préjudice subi en raison du licenciement abusif en application de l'article L. 1235-5 du code du travail dans sa version en vigueur au moment du licenciement. Eu égard à son ancienneté dans l'entreprise, son âge au moment du licencement (né en 1978), au montant de sa rémunération, à ce qu'il justifie de sa situation postérieure au licenciement, aux circonstances de la rupture, la cour condamne l'association Protection civile de Paris Seine à lui payer la somme de 6 000 euros de dommages-intérêts pour rupture abusive du contrat de travail. Le jugement est infirmé en ce qu'il l'a débouté de ce chef de demande.

Sur la demande de remboursement du matériel :

M. [P] soutient que son matériel de radio émetteur d'une valeur de 450 euros a été démoli dans l'incendie de son véhicule de service et en demande le remboursement, communiquant le mail de l'employeur en date du 21 février 2011 lui annonçant que l'appareil serait remplacé par un appareil de même valeur et une attestation de sa part indiquant qu'il refusait ce remplacement souhaitant être indemnisé à hauteur de la somme de 450 euros.

L'association conclut au débouté en faisant valoir avec raison que la preuve d'achat du matériel n'est pas rapportée. M. [P] ne justifiant pas de la réalité de son préjudice, la cour le déboute de sa demande. Le jugement est confirmé de ce chef.

Sur les autres demandes :

L'association Protection civile de Paris Seine, partie perdante est condamnée aux dépens de première instance et d'appel et déboutée de la demande qu'elle présente sur le fondement de l'aricle 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant contradictoirement et par mise à disposition au greffe,

REJETTE les demandes présentées par l'association Protection civile de Paris Seine tendant à la péremption de l'instance, le rejet des pièces communiquées par M. [G] [P], l'irrecevabilité des demandes présentées pour la première fois en cause d'appel et la fin de non recevoir tirées de leur prescription,

CONFIRME le jugement sauf en ce qu'il a débouté M. [G] [P] de sa demande de dommages-intérêts pour rupture abusive du contrat de travail,

DIT le licenciement sans cause réelle et sérieuse,

CONDAMNE l'association Protection civile de Paris Seine à verser à M. [G] [P] la somme de 6 000 euros de dommages-intérêts pour rupture abusive du contrat de travail,

CONDAMNE l'association Protection civile de Paris Seine aux dépens de première instance et d'appel et la déboute de sa demande présentée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

LA GREFFIÈRELA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 21/01854
Date de la décision : 19/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-19;21.01854 ?
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