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18/05/2022 | FRANCE | N°19/01210

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 3, 18 mai 2022, 19/01210


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 3



ARRÊT DU 18 Mai 2022

(n° , pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 19/01210 - N° Portalis 35L7-V-B7D-B7EWQ



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 13 Décembre 2018 par le Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de PARIS Acitvités diverses RG n° 15/08457





APPELANTE

Madame [U] [S]

[Adresse 2]

[Localité 3]

née le 19

janvier 1972 à [Localité 5]

représentée par Me Violaine CHAUSSINAND NOGARET, avocat au barreau de PARIS, toque : P0009







INTIMEE

Association AIDE FAMILIALE A DOMICILE ILE DE FRA...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 3

ARRÊT DU 18 Mai 2022

(n° , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 19/01210 - N° Portalis 35L7-V-B7D-B7EWQ

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 13 Décembre 2018 par le Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de PARIS Acitvités diverses RG n° 15/08457

APPELANTE

Madame [U] [S]

[Adresse 2]

[Localité 3]

née le 19 janvier 1972 à [Localité 5]

représentée par Me Violaine CHAUSSINAND NOGARET, avocat au barreau de PARIS, toque : P0009

INTIMEE

Association AIDE FAMILIALE A DOMICILE ILE DE FRANCE - AFAD IDF

Prise en la personne de son Président domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 4]

représentée par Me Françoise LE BARBIER, avocat au barreau de PARIS, toque : B1000, Me Jean-philippe AUTIER, avocat au barreau de PARIS, toque : L0053

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 23 mars 2022, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Roselyne NEMOZ-BENILAN, Magistrat Honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Fabienne ROUGE, Présidente de chambre

Madame Roselyne NEMOZ-BENILAN, Magistrat Honoraire

Madame Véronique MARMORAT, Présidente de chambre

Greffier : Mme Juliette JARRY, lors des débats

ARRET :

- Contradictoire

- par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- Signé par Madame Fabienne ROUGE, présidente de chambre et par Juliette JARRY, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Madame [U] [S] a été embauchée par l'Association Aide Familiale à Domicile Ile de France (AFAD-IDF) en qualité de technicienne de l'intervention sociale et familiale par contrat à durée déterminée du 9 juin 2008 qui s'est poursuivi en contrat à durée indéterminée

Le 20 mai 2015, elle a été convoquée à un entretien préalable à un éventuel licenciement, fixé au 28 mai.

Par lettre du 28 mai, elle a été dispensée d'activité en raison d'une faute commise dans l'exercice de ses fonctions. Le même jour, elle a été convoquée à un entretien préalable fixé au 4 juin, puis de nouveau convoquée le 11 juin 2015 à un entretien préalable à licenciement, qui s'est tenu le 17 juin.

Madame [S] a été licenciée pour cause réelle et sérieuse par lettre du 22 juin ainsi motivée : 'Vous avez été reçue en entretien le mercredi 17 juin 2015, par Madame [D], Directrice Générale et Mme [E], Directrice Départementale, afin d'entendre vos explications sur différents faits qui vous sont reprochés. Nous avons eu à déplorer de votre part les agissements fautifs suivants :

- Nombreux manquements professionnels dans l'exécution du contrat de travail

- Mise en danger d'un enfant en bas âge

- Une dégradation de l'image de l'AFAD-IDF

Nous vous rappelons les raisons qui nous contraignent à prendre cette décision :

Le 11 mai 2015, lors de votre intervention chez la famille [R], vous vous êtes trouvée seule au domicile avec la responsabilité des enfants [I] (1an et 3 mois) et [C] (3 ans) pendant l'absence de la mère de famille qui accompagnait son fils aîné en consultation à l'hôpital. A son retour de l'hôpital, Mme [R] vous a vu revenant vers le domicile avec l'enfant [C] et en entrant dans l'appartement, elle a entendu le petit [I] qui pleurait 'debout dans son lit'.

Vous avez été convoquée afin d'entendre vos explications, le 28 mai 2015. Lors de cet entretien vous avez violemment nié les faits récusant l'objet de votre convocation et estimant que vous n'aviez pas eu le temps nécessaire pour préparer votre défense pour l'entretien.

Il vous a donc été proposé un second entretien le 4juin 2015 que vous avez accepté et il vous a été remis un courrier en mains propres contre signature. Lors de l'entretien du 4 juin 2015, il vous a été exposé les termes de la lettre de la famille [R] au sujet des faits survenus le 11 mai précédent, faits que vous avez à nouveau contestés.

Vous avez déclaré avoir emmené les deux plus jeunes enfants avec vous pour aller chercher l'aînée à l'école, avoir demandé à voir le directeur de l'école qui ne savait pas où se trouvait l'enfant, avoir téléphoné à la mère de famille qui vous aurait dit que l'enfant devait rester à l'étude ce jour là.

Vos propos étant confus et contraires aux déclarations écrites de la famille, il nous a semblé souhaitable de nous entretenir à nouveau avec cette famille pour avoir confirmation du contenu de sa lettre.

Il résulte de la confirmation du déroulement des faits par Madame [R] que vous avez commis des manquements particulièrement graves concernant la prise en charge d'un enfant âgé de quinze mois que vous avez laissé seul par deux fois au cours du même après midi. En effet, ainsi qu'il vous a été exposé lors de l'entretien, quand bien même la mère de famille vous aurait autorisée à conduire l'aînée à l'école en laissant [I] tout seul à la maison, au motif qu'il venait de s'endormir, et que le trajet entre la maison et l'école est de courte durée, vous avez omis de respecter la règle fixée par notre association, à savoir que vous ne devez jamais laisser un enfant seul au domicile, en l'absence de tout autre adulte.

Il fait donc grief à l'association que vous ayez laissé [I] seul vers 13 h 30 pour conduire [F] à l'école le 11 mai 2015, enfreignant ainsi les consignes de l'association. Il fait également grief à l'association que vous ayez enfreint une deuxième fois cette règle le même jour et concernant le même enfant.

La mère de famille, de retour à son domicile à 16 h 15, a en effet retrouvé l'enfant seul, et pleurant dans son lit. Il apparaît que vous avez laissé cet enfant alors qu'il n'était pas endormi, ce qui a généré une angoisse manifestement inadmissible, compte tenu de l'état dans lequel sa mère l'a trouvé à son retour.

Vous avez donné en outre des explications peu compréhensibles au sujet des circonstances de la sortie d'école de [F] à une mère qui s'inquiétait de ne pas voir sa fille au retour de l'école.

En conclusion, vous avez enfreint les strictes règles de sécurité liées à la protection des enfants qui ne doivent jamais être laissés seuls sans la présence d'un adulte lorsque vous êtes amenée à sortir du domicile de la famille auprès de laquelle vous intervenez.

Vous n'avez pas respecté les consignes de la mère de famille et enfreint les règles visant la protection des enfants et fait naître ainsi une situation d'angoisse manifeste pour un enfant de quinze mois. Vous n'avez pas respecté la demande de la mère de famille et ramené l'aînée des enfants de l'école, créant de ce fait un motif d'angoisse supplémentaire pour cette mère, au cours de la même journée.

Tous ces faits se sont accumulés alors que vous étiez informée que Madame [R] se trouvait en outre à l'hôpital pour accompagner un autre de ses enfants. L'ensemble de ces faits constituent des manquements professionnels caractérisés, créant une situation de risque et d'angoisse inacceptables au sein de la famille que vous deviez aider. De plus, nous avons procédé à une vérification minutieuse de ces faits, notamment en demandant à la mère de famille de réitérer ses déclarations, ce qu'elle a fait, et consacré plusieurs entretiens à recueillir vos explications.

Vos explications ne nous ayant pas permis de modifier notre appréciation, nous considérons que vos manquements professionnels sont préjudiciables aux familles et à la bonne marche du service, rendant impossible votre maintien au sein de l'association.

Nous considérons que ces faits constituent donc une cause réelle et sérieuse de licenciement, votre préavis d'une durée de deux mois, débutera à la date de première présentation de cette lettre à votre domicile.

Nous vous dispensons de l'exécution de votre préavis, qui vous sera payé au mois le mois.'

La convention collective applicable à la relation de travail est celle de la branche de l'aide de l'accompagnement, des soins et services à domicile. A la date de la rupture, Madame [S] percevait un salaire brut de 1.895,67 Euros.

Le 8 juillet 2015, Madame [S] a saisi le Conseil de Prud'hommes de Paris pour contester son licenciement.

Par jugement du 13 décembre 2018, le juge départiteur du Conseil de Prud'hommes a débouté Madame [S] de ses demandes.

Le 14 janvier 2019, Madame [S] a interjeté appel de la décision.

Par ses dernières conclusions du 6 octobre 2021, auxquelles il convient de se reporter en ce qui concerne ses moyens, Madame [S] demande à la cour d'infirmer le jugement, de dire son licenciement sans cause réelle et sérieuse et de condamner l'AFAD-IDF à lui payer 33.756,50 Euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et 1.000 Euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

Par ses dernières conclusions du 8 juillet 2019, auxquelles il convient de se reporter en ce qui concerne ses moyens, l'Association Aide Familiale à Domicile Ile de France (AFAD-IDF) demande à la cour de confirmer le jugement, de débouter Madame [S] de ses demandes et de la condamner à lui payer 1.000 Euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

MOTIFS

En vertu des dispositions des articles L.1232-1 et suivants du Code du travail, tout licenciement pour motif personnel doit être justifié par une cause réelle et sérieuse, c'est-à-dire être fondé sur des éléments objectifs, vérifiables et imputables au salarié ; le juge forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties, et lorsqu'un doute subsiste, il profite au salarié.

A l'appui de ses griefs, tels que formulés dans la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige, l'AFAD-IDF verse aux débats le courrier du 18 mai de Madame [R] qui explique que lorsqu'elle est revenue de l'hôpital, elle a vu Mme [S] revenir vers l'immeuble avec son fils [C] puis, lorsqu'elles sont rentrées dans l'appartement, son autre fils [I] debout sur son lit en train de pleurer.

Cette version de Madame [R] a toujours été contestée par Mme [S] qui prétend avoir emmené les deux enfants à l'école pour aller chercher [F], leur soeur, ne pas l'avoir trouvée et être revenue 'à la course' au domicile de madame [R] qu'elle a trouvée en bas de l'immeuble. Elle prétend que les déclarations de celle-ci sont confuses, que le rapport de la directrice se borne à les reprendre et que les conseillers rapporteurs ont laissé place 'à la possibilité des deux hypothèses'. Elle souligne qu'elle a toujours fait preuve d'un grand professionnalisme, reconnu tant par l'association que par les familles dont elle produit plusieurs attestations faisant état de leur entière confiance en elle.

Toutefois, c'est par de justes motifs, adoptés par la cour, que le premier juge, au vu du courrier circonstancié de Madame [R], de ses déclarations réitérées devant la directrice puis devant les conseillers rapporteurs et qu'il n'existe aucun motif de remettre en cause, a considéré que les faits reprochés, - avoir laissé seul un enfant de 18 mois - étaient matériellement établis.

Or le règlement intérieur interdit aux intervenants de laisser un enfant sans la présence d'un adulte et les qualités professionnelles de Mme [S] n'ôtent pas au manquement ainsi commis leur caractère fautif. Le jugement doit donc être confirmé en ce qu'il a dit que le licenciement de Mme [S] était justifié par une cause réelle et sérieuse.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement et contradictoirement,

Confirme le jugement en toutes ses dispositions ;

Condamne Madame [S] à payer à l'Association Aide Familiale à Domicile Ile de France (AFAD-IDF) la somme de 500 Euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Met les dépens à la charge de Madame [S].

La Greffière La Présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 3
Numéro d'arrêt : 19/01210
Date de la décision : 18/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-18;19.01210 ?
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