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13/05/2022 | FRANCE | N°18/09145

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 12, 13 mai 2022, 18/09145


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 12



ARRÊT DU 13 Mai 2022



(n° , 5 pages)





Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 18/09145 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B6E4R



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 09 Juillet 2018 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de MEAUX RG n° 16/00459





APPELANTE

[Adresse 4]

[Adresse 1]

B.P 408 R 2

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non comparante, non représentée, dispensée de comparaître à l'audience



INTIMEE

Société [6]

[Adresse 3]

Zone Industrielle

[Localité 2]

représentée par Me Morgane COURTOIS D'ARCOLLIERES, avocat...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 12

ARRÊT DU 13 Mai 2022

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 18/09145 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B6E4R

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 09 Juillet 2018 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de MEAUX RG n° 16/00459

APPELANTE

[Adresse 4]

[Adresse 1]

B.P 408 R 2

[Localité 5]

non comparante, non représentée, dispensée de comparaître à l'audience

INTIMEE

Société [6]

[Adresse 3]

Zone Industrielle

[Localité 2]

représentée par Me Morgane COURTOIS D'ARCOLLIERES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0503 substituée par Me Amélie FORGET, avocat au barreau de PARIS, toque : C 1834

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 11 Mars 2022, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Lionel LAFON, Conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Pascal PEDRON, Président de chambre

Madame Sophie BRINET, Présidente de chambre

Monsieur Lionel LAFON, Conseiller

Greffier : Madame Claire BECCAVIN, lors des débats

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé

par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

-signé par Monsieur Pascal PEDRON, Président de chambre et par Madame Claire BECCAVIN, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La cour statue sur l'appel interjeté par la caisse primaire d'assurance maladie du Bas Rhin (la caisse) d'un jugement rendu le 9 juillet 2018 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Meaux dans un litige l'opposant à la société [6] (la société).

FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Les circonstances de la cause ayant été correctement rapportées par le tribunal dans son jugement au contenu duquel la cour entend se référer pour un plus ample exposé, il suffit de rappeler que M. [F] [R], salarié de la société, a souscrit le 24 avril 2014 une déclaration de maladie professionnelle en joignant un certificat médical initial constatant une "hernie discale L4 L5 symptomatique".

La caisse, le 20 janvier 2016, après avis favorable du comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles (CRRMP) de la région [Localité 5] Alsace Moselle, saisi au motif que la condition relative à la liste limitative des travaux fixée au tableau n°98 n'était pas remplie, a notifié à la société sa décision de prendre en charge au titre de législation sur les risques professionnels l'affection "sciatique par hernie discale L4-L5 inscrite dans le tableau n°98"

Après avoir vainement contesté l'opposabilité de cette décision devant la commission de recours amiable, la société a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de Meaux lequel par jugement du 9 juillet 2018 lui a déclaré inopposable la décision de la caisse de prise en charge de la maladie professionnelle déclarée par M. [F] [R].

Le jugement lui ayant été notifié le 10 juillet 2018, la caisse en a interjeté appel le 24 juillet 2018.

A l'audience du 11 mars 2022, la caisse n'est ni présente ni représentée ; par courrier parvenu au greffe social le 9 mars 2022 elle avait sollicité une dispense de comparution qui lui a été accordée à l'audience ; la caisse a par ailleurs adressé des conclusion aux termes desquelles elle demande à la cour de :

- dire et juger que l'instance n'est pas frappée de péremption,

- confirmer la décision de prise en charge au titre du risque professionnel de la maladie du 24 avril 2014 de M. [F] [R],

- déclarer opposable à la société [6] la décision de prise en charge au titre de la législation sur les risques professionnels de la maladie du 24 avril 2014 dont est atteint M. [F] [R] au titre du tableau 98,

- infirmer en toutes ses dispositions le jugement déféré,

- condamner la société au paiement de la somme de 1000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société aux dépens.

La caisse fait valoir en substance que la société ne justifie pas qu'une diligence ait été mise à sa charge par la cour entre la remise de ses conclusions le 15 mars 2019 et l'audience du 15 octobre 2021 ; le non respect des délais d'instruction n'est pas sanctionné par l'inopposabilité à l'égard de l'employeur ; la pathologie dont souffre M. [F] [R], une sciatique par hernie discale L4L5, est codifiée au tableau n°98, et aucun changement de qualification n'est intervenu en cours d'instruction.

Par conclusions écrites soutenues oralement à l'audience par son avocat, la société demande à la cour de :

In limine litis,

- déclarer l'instance devant la cour éteinte par l'effet de la péremption,

Subsidiairement sur le fond,

A titre principal,

- confirmer le jugement déféré qui lui a déclaré inopposable la décision prise par la caisse de reconnaître le caractère professionnel de l'affection déclarée par M. [F] [R] le 24 avril 2014, les dispositions des articles R.441-10 alinéa 1 et R.441-14 alinéa 1 du code de la sécurité sociale n'ayant pas été respectées,

A titre subsidiaire,

- lui déclarer inopposable la décision prise par la caisse de reconnaître le caractère professionnel de l'affection déclarée par M. [F] [R] le 24 avril 2014, les conditions de saisine du CRRMP n'étant pas réunies,

A titre infiniment subsidiaire,

- recueillir l'avis d'un autre CRRMP relativement au lien de causalité direct entre le travail habituel de M. [F] [R] et sa pathologie,

En tout état de cause,

- condamner la caisse aux dépens d'appel.

La société fait valoir en substance que la caisse lui a fait parvenir ainsi qu'à la cour ses conclusions écrites le 15 mars 2019 mais que durant les deux années qui ont suivi aucune diligence n'a été accomplie ni par la caisse ni par elle-même ; la caisse n'a pas respecté les délais d'instruction ; l'affection déclarée par M. [R] n'est pas mentionnée dans l'un des tableaux des maladies professionnelles, la caisse n'établissant pas que l'affection déclarée correspondrait stritement aux prévisions du tableau n°98, ne prouvant notamment pas l'atteinte radiculaire xce topographie concordante; la transmission du dossier de M. [R] au CRRMP ne pouvait intervenir qu'à la condition que l'affection ait entraîné un taux d'IPP prévisible au moins égal à 25% ce qui n'est pas établi ; l'avis d'un autre CRRMP doit être sollicité afin d'établir s'il existe un lien direct et essentiel entre l'affection déclarée par son salarié et le travail exercé par celui-ci.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens développés par des parties, il est renvoyé à leurs conclusions visées par le greffe le 11 mars 2022 à l'audience.

SUR CE, LA COUR

Sur la péremption

Il résulte des dispositions du décret n°2018-928 du 29 octobre 2018 ayant abrogé l'article R.142-22 du code de la sécurité sociale, que l'article 386 du code de procédure civile est applicable en matière de sécurité sociale tant aux instances d'appel initiées à partir du 1er janvier 2019 qu'à celles en cours à cette date.

Lorsque la procédure est orale, les parties n'ont pas, au regard de l'article 386 du code de procédure civile, d'autre diligence à accomplir que de demander la fixation de l'affaire (Civ. 2, 17 novembre 1993; n°92 -12807; 6 décembre 2018; n°17-26202).

La convocation de l'adversaire étant le seul fait du greffe, la direction de la procédure échappe aux parties qui ne peuvent l'accélérer. (Civ. 2, 15 novembre 2012; n°11- 25499).

Il en résulte que le délai de péremption de l'instance n'a pas commencé à courir avant la date de la première audience fixée par le greffe dans la convocation.

En l'espèce, la date de première audience fixée par le greffe dans la convocation du 21 septembre 2020 étant celle du 15 octobre 2021 et l'affaire ayant été plaidée après renvois à l'audience du 11 mars 2022, aucune péremption d'instance ne saurait être retenue, étant précisé qu'aucune diligence n'a été mise par la juridiction à la charge des parties à quelque moment que ce soit.

Le moyen tiré de la péremption de l'instance ne saurait donc prospérer.

Au fond

Sur l'opposabilité de la décision de prise en charge de la maladie professionnelle déclarée le 24 avril 2014

1- Sur le respect du délai d'instruction

La société demande à la cour de lui déclarer inopposable la décision de prise en charge de la maladie déclarée par son salarié au motif que la caisse n'avait pas respecté les délais d'instruction.

La caisse qui a reçu le 25 avril 2014 la déclaration de maladie professionnelle concernant M. [R], a informé l'employeur :

- le 23 juillet 2014, du fait qu'un délai d'instruction complémentaire lui était nécessaire,

- le 21 octobre 2014, à titre conservatoire, de sa décision de refus de prise en charge de la maladie à titre professionnel pour un motif d'ordre administratif,

- le 5 novembre 2014, de la possibilité de consulter les pièces du dossier jusqu'au 25 novembre 2014 avant sa transmission au CRRMP,

- le 20 janvier 2016, de sa décision de prise en charge de la maladie au titre de la législation relative aux risques professionnels, suite à l'avis du CRRMP du 5 janvier 2016.

Cette décision de prise en charge est donc intervenue au-delà du délai de six mois résultant des dispositions des articles R 441-10 et R 441-14 du code de la sécurité sociale dans leur rédaction issue du décret 2009-938 du 29 juillet 2009, applicable au litige.

Cependant, l'inobservation du délai dans la limite duquel doit statuer la caisse n'est sanctionnée, faute de décision rendue dans ce délai, que par la reconnaissance du caractère professionnel de la maladie, dont seule la victime peut se prévaloir, comme l'a précisé la Cour de cassation (Civ.2 : 07 janvier 2021, n°19-24.697 ; 09 juillet 2020, n°19-11.400; 04 mai 2016, n°15-12.202).

Dès lors, l'employeur ne peut se prévaloir de l'inobservation du délai dans la limite duquel la caisse doit statuer, laquelle ne constitue nullement une cause d'inopposabilité de cette décision à l'égard de l'employeur.

Le moyen d'inopposabilité soulevé de seul chef par la société ne saurait donc prospérer.

2 - Sur la condition médicale réglementaire

Aux termes de l'article L.461-1 du code de la sécurité sociale, est présumée d'origine professionnelle toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans les conditions prévues à ce tableau.

En cas de recours de l'employeur, il incombe à l'organisme social qui a décidé d'une prise en charge de rapporter la preuve de la réunion des conditions du tableau, notamment la preuve de la caractérisation de la pathologie prise en charge.

Le tableau n°98 des maladies professionnelles est relatif aux affections chroniques du rachis lombaire provoquées par la manutention manuelle de charges lourdes. Il mentionne s'agissant de la désignation des maladies : Sciatique par hernie discale L4-L5 ou L5-S1 avec atteinte radiculaire de topographie concordante. Radiculalgie crurale par hernie discale L2-L3 ou L3-L4 ou L4-L5, avec atteinte radiculaire de topographie concordante.L'atteinte radiculaire de topographie concordante renvoie à la cohérence entre le niveau de la hernie et le trajet de la douleur.

Il convient donc de rechercher, si l'affection déclarée par M. [R] et décrite au certificat médicale initial, caractérise ou non l'une des maladies désignées au tableau n°98 des maladies professionnelles.

En l'espèce, le certificat médical initial en date du 24 avril 2014 (pièce n° 3 de la caisse) fait mention des constatations suivantes : hernie discale L4 L5 symptomatique.

Il est fait mention dans le colloque médico-administratif produit par la caisse (pièce n°9) d'une "hernie discale L4 L5" et du code syndrome "098AAM51A" qui correspond à celui de la sciatique par hernie discale L4-L5 inscrite dans le tableau n°98 des affections chroniques du rachis lombaire provoquées par la manutention manuelle de charges lourdes.

Le CRRMP reprend le diagnostic de sciatique par hernie discale L4-L5 inscrite au tableau 98 (pièce n°8 de la caisse).

Dans son courrier 23 juillet 2014 comme dans les suivants la caisse identifie la maladie comme étant la sciatique par hernie discale L4-L5 visée par le tableau 98A.

Cependant, aucun document ne vient établir l'existence d'une « sciatique par hernie discale L4-L5 ou L5-S1 avec atteinte radiculaire de topographie concordante » qui est la pathologie visée au tableau n°98. Rien n'explique quels sont les éléments ayant permis à la caisse de valider l'existence d'une atteinte radiculaire de topographie concordante.

Comme le soulève la société, la caisse n'établit donc pas par ses productions l'existence d'une atteinte radiculaire de topographie concordante, telle qu'exigée par le tableau n° 98 des maladies professionnelles et ne caractérise donc pas la maladie telle que désignée par le tableau.

Dans ces conditions, la maladie du tableau n°98 retenue par l'organisme n'étant pas caractérisée, la prise en charge de celle-ci par la caisse ne saurait être opposable à l'employeur.

Le jugement déféré ayant déclaré inopposable à la société la décision de la caisse de prendre en charge la maladie professionnelle déclarée par M. [R] sera donc confirmé.

Les dépens de la présente instance seront donc supportés par la caisse.

PAR CES MOTIFS

LA COUR ,

DÉCLARE l'appel recevable;

DIT n'y avoir lieu à péremption de l'instance d'appel ;

CONFIRME le jugement déféré;

DEBOUTE la la caisse primaire d'assurance maladie du Bas Rhin de sa demande en frais irrépétibles

CONDAMNE la caisse primaire d'assurance maladie du Bas Rhin aux dépens d'appel.

La greffière Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 12
Numéro d'arrêt : 18/09145
Date de la décision : 13/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-13;18.09145 ?
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