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12/05/2022 | FRANCE | N°21/07076

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 10, 12 mai 2022, 21/07076


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 10



ARRÊT DU 12 MAI 2022



(n° , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/07076 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CDPNU



Décision déférée à la cour : jugement du 29 mars 2021-juge de l'exécution de PARIS-RG n° 20/81909



APPELANTE



S.C.I. SARAH EVLYN

[Adresse 3]

[Localité 4]



représentée par Me Stéphanie PARTOUCHE, avocat au barreau de

PARIS, toque : A0854



INTIMÉE



Le Syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier sis [Adresse 1], représenté par son Syndic, la Société SULLY GESTION, Société par actions simpli...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 10

ARRÊT DU 12 MAI 2022

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/07076 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CDPNU

Décision déférée à la cour : jugement du 29 mars 2021-juge de l'exécution de PARIS-RG n° 20/81909

APPELANTE

S.C.I. SARAH EVLYN

[Adresse 3]

[Localité 4]

représentée par Me Stéphanie PARTOUCHE, avocat au barreau de PARIS, toque : A0854

INTIMÉE

Le Syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier sis [Adresse 1], représenté par son Syndic, la Société SULLY GESTION, Société par actions simplifiée, immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Paris sous le numéro 327532062, ddont le siège social est situé au [Adresse 2], représentée par son président domicilié en cette qualité audit siège,

n'a pas constitué avocat

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 905 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 30 mars 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Monsieur Raphaël TRARIEUX, conseiller faisant fonction de président, chargé du rapport et Madame Catherine LEFORT, conseiller.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Bénédicte PRUVOST, président de chambre

Madame Catherine LEFORT, conseiller

Monsieur Raphaël TRARIEUX, conseiller

GREFFIER lors des débats : M. Grégoire GROSPELLIER

ARRÊT :

-réputé contradictoire

-par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

-signé par Madame Bénédicte PRUVOST, président de chambre et par M. Grégoire GROSPELLIER, greffier, présent lors de la mise à disposition.

Par jugement contradictoire du 4 septembre 2020, assorti de l'exécution provisoire, le tribunal judiciaire de Paris a, notamment, condamné la société civile immobilière Sarah Evlyn (ci-après la Sci) à payer au syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier sis [Adresse 1] (ci-après le syndicat des copropriétaires) les sommes suivantes :

372,50 euros TTC au titre de son préjudice financier ;

3000 euros à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive ;

6000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

et condamné la Sci Sarah Evlyn aux dépens, y compris les frais d'expertise judiciaire.

Ce jugement a été signifié le 2 octobre 2020 à l'avocat de la Sci Sarah Evlyn et le 13 octobre 2020 à la Sci elle-même. La Sci en a interjeté appel le 12 novembre 2020.

En exécution de ce jugement, le syndicat des copropriétaires a fait pratiquer le 26 octobre 2020 entre les mains de la Bred Banque Populaire une saisie-attribution à l'encontre de la Sci Sarah Evlyn pour avoir paiement de la somme de 10.124,08 euros.

La saisie a été fructueuse à hauteur de 5.483,32 euros et a été dénoncée à la Sci par acte d'huissier du 27 octobre 2020.

Par acte d'huissier du 13 novembre 2020, le syndicat des copropriétaires a fait pratiquer une autre saisie-attribution et une saisie de droits d'associés et de valeurs mobilières entre les mains du Crédit Mutuel, pour avoir paiement de la somme de 10.391 euros.

Cette saisie a été fructueuse à hauteur de la somme de 263,17 euros et le compte titre présentait une valorisation de 18.366,75 euros. Elle a été dénoncée à la Sci par acte d'huissier du 18 novembre 2020.

Par acte d'huissier du 27 novembre 2020, la Sci a fait assigner le syndicat des copropriétaires devant le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Paris aux fins de voir prononcer la nullité des saisies-attributions, de se voir accorder un délai de paiement et de voir condamner le défendeur au paiement des frais de saisie.

Par jugement du 29 mars 2021, le juge de l'exécution a :

rejeté la demande tendant à l'annulation des saisies-attribution pratiquées les 26 octobre et 13 novembre 2020,

rejeté les demandes de condamnation à paiement des frais,

rejeté la demande de la Sci en délais de paiement ainsi que la demande reconventionnelle du syndicat des copropriétaires en dommages-intérêts,

condamné la Sci Sarah Evlyn aux dépens,

dit n'y avoir lieu à l'application de l'article 700 du code de procédure civile.

Selon déclaration en date du 12 avril 2021, la Sci a fait appel de ce jugement.

Par dernières conclusions du 10 décembre 2021, l'appelante demande à la cour de :

infirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

statuant à nouveau,

ordonner le remboursement des sommes qui auront pu être versées en vertu de l'exécution provisoire de la décision entreprise, en principal, intérêts, frais et accessoires, avec intérêts au taux légal à compter de leur versement, et ce au besoin à titre de dommages-intérêts ;

en conséquence,

annuler les saisies-attribution pratiquées les 26 octobre et 13 novembre 2020 ;

ordonner le remboursement des intérêts versés et de tous les frais de saisie réglés par elle ;

en tout état de cause,

condamner le syndicat des copropriétaires aux entiers dépens, dont distraction au profit de Maître Stéphanie Partouche, conformément à l'article 699 du code de procédure civile ;

condamner le syndicat des copropriétaires à lui rembourser les frais bancaires qu'elle a supportés en raison des saisies-attribution pratiquées les 26 octobre et 13 novembre 2020 et, postérieurement, les 17 décembre 2020 et 28 janvier 2021, soit, au jour de la rédaction de ses conclusions, la somme de 215 euros ;

condamner le syndicat des copropriétaires à lui payer la somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 1240 du code civil ;

condamner le syndicat des copropriétaires à lui payer la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

L'appelante fait tout d'abord valoir que les saisies-attribution contestées doivent être déclarées irrégulières en application de l'article 502 du code de procédure civile comme ayant été pratiquées avant que la formule exécutoire n'ait été apposée sur le titre le 23 décembre 2020. En second lieu, elle soutient que les saisies-attribution sont abusives en ce qu'elles ont été pratiquées prématurément ' faute pour le créancier de démontrer l'existence d'une défaillance du débiteur et de lui permettre de s'exécuter spontanément ou de proposer une solution amiable ' et qu'elles excèdent ce qui était nécessaire au recouvrement de sa créance, dès lors que le créancier disposait d'autres moyens pour en obtenir le paiement, notamment celui d'imputer les sommes dues sur le relevé des charges de copropriété.

Ensuite, elle estime que le refus opposé par le juge de l'exécution de lui accorder des délais de paiement était disproportionné.

Elle fonde sa demande de dommages-intérêts pour saisie abusive sur l'article 1240 du code civil, les saisies-attributions successivement pratiquées l'ayant contrainte à engager des frais supérieurs au montant de sa dette (frais de procédure, frais bancaires, etc) et à procéder à des déplacements durant la crise sanitaire, comportement constitutif d'une faute lui ayant causé un préjudice matériel et un préjudice moral dont elle demande réparation à hauteur de 5.000 euros.

L'intimé a été régulièrement assigné selon acte d'huissier délivré le 2 juin 2021 à personne habilitée. Il n'a pas constitué avocat.

MOTIFS

Sur la nullité des saisies-attribution

Selon les dispositions de l'article 502 du code de procédure civile, nul jugement ne peut être mis à exécution que sur présentation d'une expédition revêtue de la formule exécutoire, à moins que la loi n'en dispose autrement.

L'article 503 du même code dispose encore que les jugements ne peuvent être exécutés contre ceux auxquels ils sont opposés qu'après leur avoir été notifiés, à moins que l'exécution n'en soit volontaire.

L'appelante prétend que le premier juge a opéré une confusion entre deux étapes de la mise à exécution du titre exécutoire : d'une part la signification du jugement, qui fait courir le délai d'appel et pour laquelle le créancier n'aurait pas besoin de disposer d'un jugement revêtu de la formule exécutoire ; d'autre part, l'exécution forcée pour laquelle l'article 502 du code de procédure civile exige que le créancier soit en possession d'un jugement revêtu de la formule exécutoire.

Elle soutient que la grosse n'a été remise aux conseils des parties que le 23 décembre 2020 et produit en ce sens un courriel que son conseil a adressé à son confrère adverse lui demandant s'il avait reçu la grosse plus tôt que lui et une lettre du greffe du 23 septembre 2020 lui faisant savoir que la minute du jugement avait été envoyée aux impôts comme étant susceptible d'être soumise à une obligation d'enregistrement.

Or ni le courriel adressé par le conseil de la Sci à celui du syndicat des copropriétaires le 18 janvier 2021 lui demandant notamment de lui communiquer l'exemplaire de la grosse en sa possession « afin de vérifier la date à laquelle la formule exécutoire a été apposée sur [son] exemplaire » ni les termes de la lettre du greffe adressée au conseil de l'appelante le 23 septembre 2020 ne prouvent que, contrairement au principe, ce n'est pas au seul créancier, soit au syndicat des copropriétaires, que le jugement revêtu de la formule exécutoire a été délivré par le greffe à la suite de son prononcé en vue de son exécution.

Ainsi l'appelante ne démontre pas que l'intimé a procédé à la signification du jugement du 4 septembre 2020 à deux reprises, soit le 2 octobre 2020 à avocat, puis le 13 octobre 2020 à partie, sans que le créancier ait présenté à l'huissier de justice une expédition du jugement revêtue de la formule exécutoire, soit en violation des obligations de l'officier ministériel résultant de l'article 502 précité.

Il y a donc lieu d'écarter le moyen tiré de la violation des dispositions de l'article 502 du code de procédure civile comme étant mal fondé.

Sur la demande en dommages-intérêts pour saisies abusives, fondée sur l'article 1240 du code civil

Aux termes de l'article 1240 du code civil, tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

En l'espèce, il a été procédé à deux reprises à la signification du titre exécutoire les 2 et 13 octobre 2020 sans que la Sci réagisse ni n'exécute volontairement les condamnations financières. L'appelante ne prétend d'ailleurs pas avoir pris attache avec l'intimé pour convenir de modalités de paiement de ses condamnations, se bornant à souligner qu'elle a exécuté ses obligations de faire, ainsi qu'il résulte du procès-verbal de constat d'huissier du 18 novembre 2020, alors que le jugement prévoyait le cours d'une astreinte passé le délai de deux mois à compter de sa signification.

Le jugement, prononcé contradictoirement, étant assorti de l'exécution provisoire et régulièrement signifié, aucun texte n'imposait au syndicat des copropriétaires créancier de faire précéder la mesure de saisie-attribution d'une mise en demeure ou d'un commandement de payer, ni même d'observer un délai pour mettre à exécution le titre dont il bénéficiait. Il importe à cet égard de rappeler que, pour condamner la Sci Sarah Evlyn à des dommages-intérêts pour résistance abusive, le tribunal judiciaire de Paris a constaté, au vu des justifications produites, que celle-ci avait été approchée à diverses reprises par le syndicat des copropriétaires afin de trouver une solution amiable, et que les tentatives de règlement amiable s'étaient avérées vaines pendant près de six ans.

Dans ces conditions, les saisies litigieuses ne sauraient être déclarées abusives. Les frais d'exécution doivent rester à la charge du débiteur, conformément aux dispositions de l'article L.111-8 du code des procédures civiles d'exécution, dès lors que l'appelante ne démontre pas qu'ils étaient manifestement inutiles à la date à laquelle ils ont été exposés.

Sur la demande en délais de paiement

La cour constate qu'elle n'est pas saisie, à hauteur d'appel, d'une demande en délai de paiement, cette prétention ne figurant pas au dispositif des conclusions de l'appelante, qui seul saisit la cour conformément aux dispositions de l'article 954 du code de procédure civile, de sorte que l'argumentation développée par la Sci Sarah Evlyn est totalement inopérante.

***

Par conséquent, le jugement entrepris doit être confirmé en toutes ses dispositions.

Sur les demandes accessoires

L'issue du litige justifie de condamner l'appelante aux dépens et de la débouter de sa demande fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

Déboute la Sci Sarah Evlyn de sa demande fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la Sci Sarah Evlyn aux dépens d'appel.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 10
Numéro d'arrêt : 21/07076
Date de la décision : 12/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-12;21.07076 ?
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