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12/05/2022 | FRANCE | N°19/13664

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 10, 12 mai 2022, 19/13664


Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 10



ARRÊT DU 12 MAI 2022



(n° , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/13664 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CAITD



Décision déférée à la Cour : Jugement du 14 Mai 2019 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 17/14958





APPELANT



Monsieur [U] [E]

né le [Date naissance 1] 1958 à

[Localité 8] (Iran)

[Adresse 2]

[Localité 5]



Représenté par Me Stéphanie QUATREMAIN de la SCP CHOURAQUI QUATREMAIN, avocat au barreau de PARIS, toque : P 170







INTIMÉ



Monsieur [...

Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 10

ARRÊT DU 12 MAI 2022

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/13664 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CAITD

Décision déférée à la Cour : Jugement du 14 Mai 2019 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 17/14958

APPELANT

Monsieur [U] [E]

né le [Date naissance 1] 1958 à [Localité 8] (Iran)

[Adresse 2]

[Localité 5]

Représenté par Me Stéphanie QUATREMAIN de la SCP CHOURAQUI QUATREMAIN, avocat au barreau de PARIS, toque : P 170

INTIMÉ

Monsieur [X] [J]

né le [Date naissance 3] 1957 à [Localité 7] (Iran)

[Adresse 4]

[Localité 5]

Représenté par Me Vincent BELCOLORE, avocat au barreau de PARIS, toque : D1022

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 15 Février 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Laurent NAJEM, Conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Madame Florence PAPIN, Présidente

Madame Patricia LEFEVRE, Conseillère

Monsieur Laurent NAJEM, Conseiller

Greffier, lors des débats : Madame Dorothée RABITA

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Florence PAPIN, Présidente et par Dorothée RABITA, greffier présent lors de la mise à disposition.

***

Arguant avoir remis à M. [X] [J] une somme totale de 200 000 euros, M. [U] [E], après une vaine mise en demeure de payer, adressée par son conseil le 23 juin 2015, notifiée le 24 juin 2015, l'a assigné devant le tribunal de grande instance de Paris en remboursement de cette somme, par acte d'huissier de justice du 27 octobre 2017.

Le tribunal de grande instance de Paris, par jugement du 14 mai 2019 a :

Débouté M. [E] de toutes ses prétentions,

Condamné M. [E] aux entiers dépens,

Débouté M. [J] de sa demande au titre des frais irrépétibles.

Par déclaration d'appel du 5 juillet 2019, M. [U] [E] a interjeté appel du jugement du tribunal de grande instance de Paris.

Par ses dernières conclusions notifiées par voie électronique (RPVA), le 4 octobre 2019, M. [U] [E], appelant, demande à la cour d'appel de Paris, de :

Vu les articles 1359, 1362 et 1875 du code civil,

Vu la jurisprudence de la Cour de cassation et des cours d'appel,

Déclarer M. [E] recevable en son appel,

En conséquence,

Le dire bien fondé,

Infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau

Dire et juger que M. [E] établit tant le principe de sa créance, par

les chèques versés au débat et les échanges d'emails, que son montant à l'égard de

M. [X] [J] ;

Ce faisant

Condamner M. [J] à rembourser à M. [E] la somme

de 200 000 euros qui lui a été prêtée ;

Assortir le paiement de cette somme des intérêts au taux légal, à compter

du 23 juin 2015 sur la totalité de la somme réclamée,

Condamner M. [J] à verser à M. [E] la somme de 50 000 € à

titre de dommages et intérêts ;

Condamner M. [J] au paiement de la somme de 5 000 euros au titre de

l'article 700 du code de procédure civile,

Condamner M. [J] aux dépens de première instance et d'appel,

dans les termes de l'article 699 du code de procédure civile dont distraction au profit

de Maitre Stéphanie QUATREMAIN, avocate associée au sein de la SCP

CHOURAQUI- QUATREMAIN, du Barreau de Paris.

Il indique que le premier juge a considéré à juste titre que la remise de chèque rendait vraisemblable l'existence d'une créance. Il soutient que M. [J] reconnaît lui avoir remis les chèques dont le principe comme le montant ne sont pas contestés ; que le prétendu prêt, non démontré, est une invention de l'intimé pour échapper à tout remboursement ; que les chèques remis par l'intimé valent commencement de preuve par écrit.

Il allègue qu'il résulte des courriels que M. [J] a promis de rembourser sa dette ; que les pièces démontrent qu'il a versé la somme de 200 000 euros ; que pour respecter ses obligations, l'intimé a remis la somme de 200 000 euros en chèques non datés ; que ce montant n'a jamais été remis en question.

Il conteste connaître M. [B] [S] et lui avoir prêté une somme.

Il considère la résistance de M. [J] abusive, justifiant les dommages et intérêts qu'il réclame.

Par ses dernières conclusions notifiées par voie électronique (RPVA), le 30 octobre 2019, M. [J], intimé, demande à la cour d'appel de Paris, de :

débouter M. [E] en toutes ses demandes, fins et conclusions ;

condamner M. [E] à verser à M. [J] au paiement de la somme

de 3 000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure

civile

Il fait valoir que l'appelant ne démontre pas l'existence d'une obligation à son égard ; qu'il persiste à produire des documents en langue anglaise, comme tels irrecevables.

Il soutient que les relevés de compte remis par la partie adverse font état d'opérations sans indication du bénéficiaire ; qu'il n'y a aucune reconnaissance de dette ; qu'aucun prêt ne les lie.

Il expose justifier de ses séjours en Iran, contrairement à ce qui est soutenu par la partie adverse.

Il soutient qu'il a, sur la demande de son beau-frère, M. [B] [S] qui ne parvenait pas à rembourser M. [E], émis des chèques de « garantie », non datés ni localisés et dont il était convenu avec M. [E] qu'ils ne devaient pas être encaissés.

MOTIFS DE L'ARRÊT

Sur le prêt :

Aux termes de l'article 1315 du code civil dans sa rédaction applicable au présent litige, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver.

Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.

Il résulte de l'article 1347 du même code dans cette même rédaction que la règle imposant la preuve par écrit reçoit exception lorsqu'il existe un commencement de preuve par écrit.

On appelle ainsi tout acte par écrit qui est émané de celui contre lequel la demande est formée, ou de celui qu'il représente, et qui rend vraisemblable le fait allégué.

En l'espèce, M. [E] se prévaut d'un prêt, pour un montant de 200 000 euros.

Il est constant qu'aucun écrit n'a été régularisé. La seule reconnaissance versée a été signée par le frère de l'intimé : elle n'a donc aucune pertinence dans le présent litige.

M. [E] produit en premier lieu des relevés de ses comptes ouverts auprès de la SOCIETE GENERALE, BANQUE POSTALE et LCL. Cependant, si de nombreux paiements par chèque y figurent notamment pour des montants unitaires de 5 000 euros et un total de 180 000 euros, le bénéficiaire desdites chèques n'est pas connu, de sorte que le fait qu'ils aient été émis au bénéfice de M. [J] n'est pas démontré.

Il est ensuite produit la copie de 10 chèques émis par l'intimé au bénéfice de M. [E]. Ils ne comprennent ni le lieu ni la date de leur émission, ce qui ne leur confère aucune valeur fiduciaire au sens de l'article L. 131-3 du code monétaire et financier. Il est constant qu'un des chèques, remis à l'encaissement, a été rejeté pour ce motif. M. [J] expose qu'il ne s'agissait que de chèques remis à M. [E] aux seules fins de garantir la dette de son beau-frère mais qu'ils ne devaient pas être encaissés, sans davantage en justifier.

Ils constituent à tout le moins un commencement de preuve par écrit d'une obligation de remboursement.

M. [E] produit des échanges par courriel avec cette particularité qu'il s'exprime en français mais que M. [J] répond en anglais.

Ce seul fait ne rend pas lesdits éléments irrecevables : l'Ordonnance de [Localité 9] ne concerne que les actes de procédure. Il appartient au juge du fond, dans l'exercice de son pouvoir souverain, d'apprécier la force probante des éléments qui lui sont soumis.

Le 1er mai 2015, M. [E] demande à M. [J] à quelle date il compte le rembourser. Ce dernier lui expose le 14 juin 2015, en anglais qu'il va à [Localité 6] pour rencontrer son acheteur : « I already give him 200 000 $ discount in order to get the deal done and pay you your money. I understand the situation your are in ». (« Je lui ai donné un rabais de 200 000 $ aux fins d'obtenir le marché et de vous rendre votre agent. Je comprends la situation dans laquelle vous vous trouvez »). Un tel message démontre sans ambiguïté que M. [J] ne contestait pas être le débiteur de l'appelant, et qu'il avait l'intention de le rembourser, contrairement à ce qu'a retenu le premier juge.

Le 2 mai 2015,  il annonçait déjà « once the deal is made you will have all your money » (« une fois le marché conclu, vous aurez tout votre argent ») et le 14 mai « I will pay you very soon » (« Je vous paierai très bientôt »).

Il résulte de ces échanges que M. [E] réclamait de manière récurrente et en français le remboursement de sommes, M. [J] temporisant systématiquement, se prévalant de différentes raisons, mais sans jamais remettre en cause le principe de cette dette.

Ces courriels complètent utilement le commencement de preuve constitué par les chèques précités.

Dès lors, il est suffisamment établi que M. [J] est redevable de la somme de 200 000 euros, la décision déférée sera infirmée.

Il sera condamné à la payer et ce, avec intérêts au taux légal à compter du 24 juin 2015, date de présentation de la lettre recommandée de mise en demeure.

Sur les dommages et intérêts :

M. [E] réclame la somme de 50 000 euros à titre de dommages et intérêts, exposant qu'il n'a pas pu utiliser les fonds pour des investissements personnels. Il ne définit pas les placements envisagés. Aucun élément ne permet d'établir le préjudice allégué.

M. [E] sera débouté de sa demande à ce titre.

Sur les demandes accessoires :

Le jugement déféré sera infirmé en ce qui concerne les frais irrépétibles et les dépens.

M. [J] sera condamné aux dépens ainsi qu'à payer la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant en dernier ressort, contradictoirement et publiquement par mise à disposition de la décision au greffe

Infirme la décision déférée, sauf en ce qu'elle a débouté M. [E] de sa demande de dommages et intérêts  ;

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant

Condamne M. [X] [J] à payer à M. [U] [E] la somme de 200 000 euros en remboursement d'un prêt, et ce, avec intérêt au taux légal à compter du 24 juin 2015 ;

Déboute M. [E] de sa demande de dommages et intérêts ;

Condamne M. [X] [J] à payer à M. [U] [E] la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne M. [X] [J] aux dépens  ;

Déboute les parties du surplus de leurs demandes ;

LE GREFFIER LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 10
Numéro d'arrêt : 19/13664
Date de la décision : 12/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-12;19.13664 ?
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