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29/04/2022 | FRANCE | N°22/00177

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 12, 29 avril 2022, 22/00177


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS





Pôle 1 - Chambre 12





SOINS PSYCHIATRIQUES SANS CONSENTEMENT





ORDONNANCE DU 29 AVRIL 2022



(n° 174 ,5 pages)







N° du répertoire général : N° RG 22/00177 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CFTW4



Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 15 Avril 2022 -Tribunal Judiciaire de PARIS (Juge des Libertés et de la Détention) - RG n° 22/01271



L'audience

a été prise au siège de la juridiction, en audience publique, le 28 Avril 2022



Décision réputé contradicoire



COMPOSITION



Anne-Laure MEANO, présidente de chambre à la cour d'appel, agissant sur délé...

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 12

SOINS PSYCHIATRIQUES SANS CONSENTEMENT

ORDONNANCE DU 29 AVRIL 2022

(n° 174 ,5 pages)

N° du répertoire général : N° RG 22/00177 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CFTW4

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 15 Avril 2022 -Tribunal Judiciaire de PARIS (Juge des Libertés et de la Détention) - RG n° 22/01271

L'audience a été prise au siège de la juridiction, en audience publique, le 28 Avril 2022

Décision réputé contradicoire

COMPOSITION

Anne-Laure MEANO, présidente de chambre à la cour d'appel, agissant sur délégation du Premier Président de la cour d'appel de Paris,

assistée de Nolwenn CADIOU, greffier lors des débats et de la mise à disposition de la décision

APPELANTE

Madame [C] [V] [T] (Personne faisant l'objet de soins)

née le 22/08/1960 à LARBAA NATH IRATHEN

demeurant 5 square Jean Thebaud - 75015 PARIS

Actuellement hospitalisée au GHU Paris psychiatrie et neurosciences site Sainte Anne

comparante en personne et assistée de Me Solveig FRAISSE avocat commis d'office au barreau de Paris,

INTIMÉ

M. LE DIRECTEUR DU GHU PARIS PSYCHIATRIE SITE SAINTE ANNE

demeurant 1 rue Cabanis - 75014 PARIS

non comparant, non représenté,

TIERS

M. [L] [T]

demeurant 10 rue de la liberté - 92000 NANTERRE

non comparant, non représenté,

MINISTÈRE PUBLIC

Représenté par Mme Anne BOUCHET, avocate générale,

DÉCISION

Par décision du directeur du GHU Paris Psychiatrie et Neurosciences, centre hospitalier Sainte Anne, Mme [C] [T] a été hospitalisée le 7 avril 2022 et prise en charge sous la forme d'une hospitalisation complète, pour des troubles du comportement en application de l'article L. 3212-1 du code de la santé publique, à la demande d'un tiers, en la personne de M. [L] [T], son frère.

Le 12 avril 2022, le directeur de l'établissement a saisi le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Paris afin qu'il soit statué conformément aux dispositions des articles L.3211-12-1 et suivants du code de la santé publique.

Par ordonnance du 15 avril 2022, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Paris a ordonné le maintien de la mesure de soins psychiatriques sous forme d'hospitalisation complète.

Cette ordonnance a fait l'objet d'une tentative de notification à l'intéressée le 19 avril 2022, celle-ci n'étant néanmoins pas en mesure d'en prendre connaissance.

Mme [C] [T] a interjeté appel de cette décision par déclaration reçue au greffe le 25 avril 2022.

Les parties et le directeur de l'établissement ont été convoqués en vue de l'audience.

L'audience s'est tenue le 28 avril 2022 en audience publique.

Mme [C] [T] a été entendue et assistée par son conseil, qui a déposé ses conclusions écrites à l'audience, lesquelles sont écartées comme tardives, n'ayant pas été présentées en temps utile au regard du principe du contradictoire et de l'article 15 du code de procédure civile aucune circonstance n'ayant été invoquée de nature à justifier cette tardiveté.

Au début de l'audience, les parties ont été invitées à se prononcer sur la recevabilité de l'appel dès lors que l'acte d'appel pourrait être considéré comme inintelligible.

Le conseil de Mme [C] [T] a été entendu en ses observations et demande la mainlevée de la mesure d'hospitalisation sans consentement, indiquant :

-sur la recevabilité de la déclaration d'appel, qu'il résulte de celle-ci qu'elle est motivée par l'appelante à sa façon mais avec une claire intention de faire valoir ses droits et qu'en tout état de cause l'attestation produite à l'audience, établie par la secrétaire d'hospitalisation du centre hospitalier, démontre l'intention de faire appel de Mme [C] [T] lorsqu'elle a écrit ce courrier, de sorte que l'appel doit être déclaré recevable ;

-que la procédure devant le juge des libertés et de la détention est entachée d'irrégularités d'une part en l'absence de preuve médicale claire de ce que l'intéressée ne pouvait être entendue ni transportée à l'audience et d'autre part en raison du fait qu'elle n'a pu s'entretenir avec son avocat avant l'audience.

Mme l'avocate générale a été entendue et fait valoir :

- que la recevabilité de la déclaration d'appel pose question en l'absence de motivation claire, mais pourrait être admise au vu de l'attestation produite ;

- qu'il convient d'écarter l'irrégularité invoquée par le conseil de la patiente et de confirmer la décision du premier juge, les derniers certificats médicaux confirmant la persistance des troubles.

Mme [C] [T] a eu la parole en dernier, exposant en substance que son intention était bien de faire appel de la décision du juge des libertés et de la détention, que l'ensemble de ses problèmes ont commencé dans son milieu professionnel il y a 20 ans, qu'elle n'est pas contre les soins, se sent persécutée pour de bonnes raisons et souhaite retravailler.

L'affaire a été mise en délibéré.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la recevabilité de l'appel

L'appel a été interjeté dans les délais légaux et est motivé, certes de façon confuse, mais dont il résulte, au regard, en outre de l'attestation produite à l'audience et des observations de l'avocat, une intention claire de contester la mesure litigieuse et la décision du juge des libertés et de la détention.

Il sera donc déclaré recevable.

Sur la procédure devant le juge des libertés de la détention

L'article L. 3211-12-2 du code de la santé publique dispose en son alinéa 2:

'A l'audience, la personne faisant l'objet de soins psychiatriques est entendue, assistée ou représentée par un avocat choisi, désigné au titre de l'aide juridictionnelle ou commis d'office. Si, au vu d'un avis médical motivé, des motifs médicaux font obstacle, dans son intérêt, à son audition, la personne est représentée par un avocat dans les conditions prévues au présent alinéa.'.

En l'espèce, il résulte de l'ordonnance du 15 avril 2022 que Mme [C] [T] n'a pas comparu à l'audience et ce, 'sur certificat du médecin', et qu'elle a été représentée par un avocat commis d'office, au cours d'un débat contradictoire.

L'avis médical motivé du 14 avril 2022, qui décrit notamment la désorganisation idéo-comportementale, l'irritabilité et les idées délirantes de persécution de la patiente, conclut en effet qu'elle n'est pas auditionnable ni transportable.

Il en résulte que les conditions de l'article précité sont remplies.

Par ailleurs il ne résulte ni de l'ordonnance litigieuse ni des notes d'audiences que le conseil de Mme [C] [T], chargé de la représenter, ait fait valoir une quelconque difficulté concernant la garantie des droits de la défense et de la liberté de l'intéressée ni qu'il ait demandé le renvoi de l'affaire à une date ultérieure.

Il convient donc d'écarter l'irrégularité invoquée.

Sur le bien-fondé de la mesure

Aux termes du I de l'article L. 3212-1 du code de la santé publique, « une personne atteinte de troubles mentaux ne peut faire l'objet de soins psychiatriques sur la décision du directeur d'un établissement mentionné à l'article L. 3222-1 du même code que lorsque les deux conditions suivantes sont réunies : 1° Ses troubles mentaux rendent impossible son consentement ; 2° Son état mental impose des soins immédiats assortis soit d'une surveillance médicale constante justifiant une hospitalisation complète, soit d'une surveillance médicale régulière justifiant une prise en charge sous la forme mentionnée au 2° de l'article L. 3211-2-1 ».

L'hospitalisation de Mme [C] [T] a eu lieu dans un contexte de décompensation d'un trouble psychiatrique chronique, l'intéressée ayant été en rupture de soins thérapeutiques et de suivi pendant plusieurs mois.

Les certificats médicaux des 6, 7, 8 et 10 avril 2022 détaillent avec précision les troubles dont souffre Mme [C] [T], font état d'une 'symptomatologie Floride', avec discours décousu et désorganisé, idées délirantes à thématique de persécution, anosognosie, trouble du jugement et opposition aux soins.

L'avis médical motivé de M. [G], psychiatre, établi le 14 avril 2022 fait état de désorganisations idéo-comportementales, de paralogismes, d'idées délirantes de persécution, de défaut de conscience des troubles, de troubles du jugement et d'opposition aux soins et préconise la poursuite de l'hospitalisation complète, la patiente n'étant pas en mesure d'adhérer durablement aux soins.

Il est conclu que les soins psychiatriques doivent être maintenus à temps complet.

Dans le certificat médical de situation du 27 avril 2022, M. [G], psychiatre, indique qu'à l'entretien de ce jour, la patiente se montre calme mais présente des idées délirantes de persécution, non spontanément verbalisées mais toujours présentes, une altération du lien logique, un relâchement des associations, une anosognosie, des troubles du jugement, une ambivalence aux soins.

Il conclut à la poursuite d'une hospitalisation complète continue, sous contrainte afin de poursuite de l'évaluation clinique et thérapeutique, la patiente n'étant pas en mesure de consentir durablement aux soins.

Il résulte de ces éléments que les troubles rendant impossible le consentement de Mme [C] [T] sont avérés et que son état impose des soins psychiatriques assortis d'une surveillance médicale constante justifiant l'hospitalisation complète.

Ces éléments médicaux sont suffisamment précis pour justifier les restrictions à l'exercice des libertés individuelles de Mme [C] [T], qui demeurent adaptées, nécessaires et proportionnées à son état mental et à la mise en 'uvre du traitement requis, l'intéressée se trouvant dans l'impossibilité de consentir aux soins en raison des troubles décrits, son état nécessitant des soins assortis d'une surveillance constante.

L'ordonnance sera donc confirmée en ce qu'elle a maintenu la mesure de soins psychiatriques de Mme [C] [T] sous la forme d'une hospitalisation complète.

PAR CES MOTIFS

Nous, délégué du premier président de la cour d'appel, statuant publiquement par mise à disposition au greffe,

DÉCLARONS l'appel de Mme [C] [T] recevable,

CONFIRMONS l'ordonnance entreprise,

LAISSONS les dépens à la charge du Trésor public.

Ordonnance rendue le 29 AVRIL 2022 par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE MAGISTRAT DÉLÉGATAIRE

Une copie certifiée conforme notifiée le par fax à :

' patient à l'hôpital

ou/et ' par LRAR à son domicile

' avocat du patient

' directeur de l'hôpital

' tiers par LRAR

' préfet de police

' avocat du préfet

' tuteur / curateur par LRAR

' Parquet près la cour d'appel de Paris


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 12
Numéro d'arrêt : 22/00177
Date de la décision : 29/04/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-04-29;22.00177 ?
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