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29/04/2022 | FRANCE | N°22/00172

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 12, 29 avril 2022, 22/00172


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS





Pôle 1 - Chambre 12





SOINS PSYCHIATRIQUES SANS CONSENTEMENT





ORDONNANCE DU 29 AVRIL 2022



(n°170, 5 pages)







N° du répertoire général : N° RG 22/00172 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CFTCL



Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 21 Mars 2022 -Tribunal Judiciaire de MELUN (Juge des Libertés et de la Détention) - RG n° 22/00093



L'audience a

été prise au siège de la juridiction, en chambre du conseil, le 25 Avril 2022



Décision réputée contradictoire



COMPOSITION



Anne-Laure MEANO, président de chambre à la cour d'appel, agissant sur dél...

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 12

SOINS PSYCHIATRIQUES SANS CONSENTEMENT

ORDONNANCE DU 29 AVRIL 2022

(n°170, 5 pages)

N° du répertoire général : N° RG 22/00172 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CFTCL

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 21 Mars 2022 -Tribunal Judiciaire de MELUN (Juge des Libertés et de la Détention) - RG n° 22/00093

L'audience a été prise au siège de la juridiction, en chambre du conseil, le 25 Avril 2022

Décision réputée contradictoire

COMPOSITION

Anne-Laure MEANO, président de chambre à la cour d'appel, agissant sur délégation du Premier Président de la cour d'appel de Paris,

assisté de Roxane AUBIN, greffier lors des débats et du prononcé de la décision

APPELANT

Monsieur [D] [R] (Personne faisant l'objet de soins)

né le 09/09/1994 à KINSHASA

demeurant 5 villa Champagne - 91860 EPINAY SOUS SENART

Actuellement hospitalisé au Groupe hospitalier Sud Ile de France

non comparant en personne, représenté par Me Karim ANWAR, avocat commis d'office au barreau de Paris,

INTIMÉ

M. LE PRÉFET DE SEINE ET MARNE

demeurant Hôtel de la préfecture - 12 rue des Saints Pères - 77010 MELUN

non comparant, non représenté,

LIEU D'HOSPITALISATION

GROUPE HOSPITALIER SUD ILE DE FRANCE

demeurant 170 rue marc Jacquet - 77000 MELUN

non comparant, non représenté,

MINISTÈRE PUBLIC

Représenté par Madame Brigitte RAYNAUD, avocate générale,ayant transmis un avis par courriel le 25/04/2022 à 09h39

DÉCISION

Monsieur [D] [R], né le 09 septembre1994 fait l'objet depuis le 12 mars 2022 d'une mesure de soins psychiatriques, d'abord à titre provisoire, sur décision du maire de la commune de Saint Fargeau-Pontierry, puis sur décision du représentant de l'Etat en Seine et Marne du 14 mars 2022, en application de l'article L.3213-1 du code de la santé publique, pour risque grave d'atteinte à la sûreté des personnes ou de troubles grave à l'ordre public.

Il est pris en charge sous la forme d'une hospitalisation complète, au centre hospitalier de Melun (CH Sud Ile de France).

Le 17 mars 2022, le préfet de Seine et Marne a saisi le juge des libertés et de la détention afin qu'il soit statué conformément aux dispositions des articles L. 3211-12-1 et suivants du code de la santé publique et par ordonnance du 21 mars 2022, le juge des libertés et de la détention de Melun a ordonné le maintien de la mesure de soins psychiatriques sous forme d'hospitalisation complète.

Puis, le 06 avril 2022, Monsieur [D] [R] a demandé la mainlevée de la mesure, en application des articles L. 3211-12 et R. 3211-1 du code de la santé publique.

Par ordonnance du 14 avril 2022, notifiée à Monsieur [D] [R] le même jour, le juge des libertés et de la détention de Melun a rejeté cette demande.

Monsieur [D] [R] a interjeté appel par déclaration motivée reçue au greffe de la cour d'appel le 20 avril 2022, faisant valoir qu'il suit bien son traitement.

Les parties ont été convoquées en vue de l'audience, qui s'est tenue le 25 avril 2022 en audience publique.

A l'audience, régulièrement convoqué, Monsieur [D] [R] n'a pas comparu, le certificat médical établi le 21 avril 2022 exposant que cette comparution était impossible en raison du fait qu'il avait été testé positif au SRAS Covid 2.

Monsieur [D] [R] a été représenté par son conseil dont les conclusions écrites, reçues le 25 avril 2022 à 11h20, au greffe ont été écartées comme tardives, n'ayant pas été présentées en temps utile au regard du principe du contradictoire et de l'article 15 du code de procédure civile alors que l'audience avait lieu à 13 h, sans que les circonstances invoquées ne justifient cette tardiveté, le dossier ayant été mis à disposition au greffe et en outre communiqué via le RPVA en temps utile.

Le conseil de Monsieur [D] [R] a été entendu en ses observations et soutient :

-en réponse au ministère public, que l'appel est recevable, l'ordonnance critiquée étant jointe à la déclaration d'appel, ce qui permet d'éclairer l'intention de l'appelant ;

-que la procédure devant la cour d'appel est irrégulière en l'absence de Monsieur [D] [R] dont il n'est pas démontré qu'il a réellement le covid 19 et qui n'a pas pu s'entretenir avec son avocat ;

-sur le fond, que Monsieur [D] [R] a déclaré au Juge des libertés qu'il était d'accord pour prendre son traitement, le certificat médical de situation constate qu'il a bien accepté celui-ci, quelques idées mégalomaniaques persistantes ne suffisant pas pour justifier le maintien d'une hospitalisation complète alors qu'aucune menace d'atteinte grave aux personnes n'est établie à ce jour, de sorte que la mainlevée de l'hospitalisation complète doit être prononcée.

Le représentant de l'Etat dans le département et le centre hospitalier n'ont pas comparu.

L'avocat général a conclu, par observations écrites, mises à disposition au dossier avant l'audience, à l'irrecevabilité de l'appel au motif que Monsieur [D] [R], dans sa déclaration d'appel a écrit en réalité à l'hôpital et demandé la levée de la contrainte, sans référence à l'ordonnance du Juge des libertés ni à sa volonté de faire appel de celle-ci.

L'affaire a été mise en délibéré.

MOTIFS,

Sur l'irrégularité invoquée par le conseil de Monsieur [D] [R] tenant à l'absence d'audition de celui-ci à l'audience du 25 avril 2022

Aucun élément ne permet de remettre en cause l'authenticité des constatations médicales ayant donné lieu au certificat médical du 21 avril 2022 selon lequel la comparution de Monsieur [D] [R] est impossible en raison du fait qu'il a été testé positif au SRAS Covid 2, aucune pièce médicale supplémentaire n'ayant à être transmise au conseil ni à la juridiction au regard des textes applicables en l'espèce.

Ces circonstances justifient, au regard des dispositions des articles L. 3211-12-2, L. 3211-12-4 et R. 3211-8 du code de la santé publique, que l'intéressé ne soit pas présent ni entendu à l'audience, l'avis du médecin faisant bien état de motifs médicaux qui, dans l'intérêt du patient, font obstacle à son audition et qui, en outre, caractérisent une circonstance insurmontable empêchant cette audition pour des raisons de santé publique.

Le conseil de Monsieur [D] [R] ayant eu accès à l'ensemble des pièces de la procédure et ayant pu représenter celui-ci, et n'ayant d'ailleurs formé aucune demande de renvoi, aucune atteinte aux droits de la défense n'est établie et la procédure devant le délégué du premier président de la cour d'appel est régulière.

Sur la recevabilité de l'appel

L'appel a été interjeté et reçu au greffe de la cour d'appel dans les délais légaux, il est motivé par référence à une demande de levée de la mesure d'hospitalisation complète et l'ordonnance du14 avril 2022 du juge des libertés et de la détention de Melun y est jointe, de sorte qu'il convient de considérer que l'appel est bien recevable.

Sur le fond

L'article L.3213-1 du code de la santé publique dispose que le représentant de l'Etat dans le département prononce par arrêté, au vu d'un certificat médical circonstancié, l'admission en soins psychiatriques des personnes dont les troubles mentaux nécessitent des soins et compromettent la sûreté des personnes ou portent atteinte, de façon grave, à l'ordre public.

Selon l'article L. 3211-12 que le juge des libertés et de la détention dans le ressort duquel se situe l'établissement d'accueil peut être saisi par la personne faisant l'objet des soins , à tout moment, aux fins d'ordonner, à bref délai, la mainlevée immédiate d'une mesure de soins psychiatriques prononcée en application des chapitres II à IV du titre concerné ; il ordonne, s'il y a lieu, la mainlevée de la mesure d'hospitalisation complète.

Une telle mesure ne peut être maintenue que si, au jour où le juge statue, les troubles mentaux de la personne qui en fait l'objet nécessitent des soins psychiatriques et compromettent la sûreté des personnes ou portent atteinte de façon grave à l'ordre public.

Le juge n'a pas à substituer son avis à l'évaluation faite par les médecins s'agissant des troubles psychiques du patient et de son consentement aux soins (1re Civ., 27 septembre 2017, pourvoi n° 16-22.544, Bull. 2017, I, n° 206) ; il contrôle que le conditions de fond des mesures de soins, propre à chaque mesure sont remplies au moment où il statue, compte tenu des éléments médicaux dont il dispose.

En l'espèce, Monsieur [D] [R] a été hospitalisé à l'occasion d'une garde à vue pour des faits de rébellion, présentant un délire de persécution et un comportement inadapté dans une association d'accueil; un risque de passage à l'acte auto et hétéro agressif était relevé.

L'ordonnance du 21 mars 2022, par laquelle le juge des libertés la détention a ordonné la poursuite de la mesure d'hospitalisation complète rappelle exactement que le patient faisait preuve alors d'une incapacité à consentir aux soins, compte tenu du déni de ses troubles et relève la persistance de ces troubles, caractérisés par un contact hermétique et une hétéro agressivité envers le personnel.

Le certi'cat médical du 13 avril 2022, évoque une amélioration de la symptomatologie, mais décrit néanmoins également un discours délirant à thème mégalomaniaque et une adhésion à ce délire, altérant le discernement, un déni des troubles et la nécessité d'employer la contrainte pour la prise du traitement, un risque de rupture du suivi et de nouvelles décompensations de la pathologie.

Ainsi que l'a relevé en substance le juge des libertés la détention dans l'ordonnance entreprise, les éléments médicaux récents établissent sans équivoque la persistance de troubles mentaux de l'intéressé avec une opposition aux soins ainsi que la nécessité de leur poursuite sous la forme d'une hospitalisation complète, une mainlevée à ce stade de la prise en charge chez un patient anosognosique et dont l'état de santé n'est pas stabilisé, apparaîssant prématurée.

Il convient d'ajouter que devant le juge des libertés la détention, à l'audience du 14 avril 2022, Monsieur [D] [R] exprimait toujours une attitude ambivalente disant à la fois prêt à suivre un traitement à l'extérieur de l'établissement hospitalier et estimant n'en avoir aucun besoin, comme en attestent les notes d'audience.

Le certificat médical de situation produit avant l'audience d'appel, soit le 21 avril 2022, indique quant à lui que M. [D] [R] se montre compliant aux soins, calme, de bon contact, euthymique et que ces propos sont globalement cohérents ; que cependant il persiste quelques idées mégalomaniaques, qu'il critique partiellement, que s'il a accepté la mise en place « d'un traitement retard », la première injection ayant eu lieu le 18/04/2022, il minimise toujours ses troubles.

Il conclut que cet état mental impose la poursuite des soins et nécessite la prolongation de la mesure de soins psychiatriques sans consentement sous la forme de l'hospitalisation complète.

Il résulte de l'ensemble de ces éléments que M. [D] [R] évolue de manière positive dans son adhésion aux soins et dans sa prise de conscience de ses troubles mais qu'il minimise toujours ceux-ci ; que ces troubles persistent et nécessitent toujours une surveillance médicale constante, une interruption de la prise en charge actuelle étant prématurée et pouvant entrainer des passages à l'acte hétéro agressif.

Ces éléments sont suffisamment précis pour justifier les restrictions à l'exercice des libertés individuelles de M. [D] [R], qui demeurent adaptées, nécessaires et proportionnées à son état mental et à la mise en 'uvre du traitement requis, l'intéressé ne présentant pas une capacité encore suffisamment constante à consentir avec aux soins en raison des troubles décrits.

Il en résulte que les troubles mentaux de Monsieur [D] [R] nécessitent des soins et une surveillance médicale constants et sont susceptibles de compromettent la sûreté des personnes ; l'ordonnance sera donc confirmée en ce qu'elle a rejeté la demande de mainlevée de la mesure d'hospitalisation complète de Monsieur [D] [R].

PAR CES MOTIFS,

Nous, délégué du premier président de la cour d'appel, statuant publiquement par mise à disposition au greffe,

DÉCLARONS l'appel de Monsieur [D] [R] recevable,

CONFIRMONS l'ordonnance entreprise,

REJETONS toute autre demande,

LAISSONS les dépens à la charge du Trésor public.

Ordonnance rendue le 29 AVRIL 2022 par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE MAGISTRAT DÉLÉGATAIRE

Une copie certifiée conforme notifiée le 29 Avril 2022 par fax à :

X patient à l'hôpital

ou/et ' par LRAR à son domicile

X avocat du patient

X directeur de l'hôpital

' tiers par LS

X préfet de police

' avocat du préfet

' tuteur / curateur par LRAR

X Parquet près la cour d'appel de Paris


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 12
Numéro d'arrêt : 22/00172
Date de la décision : 29/04/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-04-29;22.00172 ?
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