RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 12
ARRÊT DU 22 Avril 2022
(n° , 4 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 18/05636 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B5RUI
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 30 Janvier 2018 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de PARIS RG n° 16/00167
APPELANTE
URSSAF ILE DE FRANCE
Division des recours amiables et judiciaires
[Adresse 5]
[Localité 3]
représentée par M. [T] [E] en vertu d'un pouvoir général
INTIMEE
ASSOCIATION [4]
[Adresse 2]
[Localité 1]
représentée par M. [B] [L] (Membre de l'association) en vertu d'un pouvoir spécial
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 10 Février 2022, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Sophie BRINET, Présidente de chambre, et Monsieur Lionel LAFON, Conseiller.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Sophie BRINET, Présidente de chambre
Monsieur Raoul CARBONARO, Président de chambre
Monsieur Lionel LAFON, Conseiller
Greffier : Madame Joanna FABBY, lors des débats
ARRET :
- CONTRADICTOIRE
- prononcé
par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, initialement prévu le 1 avril 2022 et prorogé au 22 avril 2022, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
-signé par Madame Sophie BRINET, Présidente de chambre et par Madame Claire BECCAVIN, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La cour statue sur l'appel interjeté par l'Urssaf de l'Ile de France d'un jugement rendu le 30 janvier 2018 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Paris dans un litige l'opposant à l'association [4].
FAITS, PROCEDURE, PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Les circonstances de la cause ayant été correctement rapportées par le tribunal dans son jugement au contenu duquel la cour entend se référer pour un plus ample exposé, il suffit de rappeler que suite à un contrôle de vérification de l'application des législations de sécurité sociale, d'assurance chômage et de garantie des salaires portant sur la période du 1er janvier 2012 au 31 janvier 2014, l'Urssaf de l'Ile de France (l'Urssaf) a notifié le 30 mars 2015 à l'association [4] (l'association) par une lettre d'observations, un rappel de cotisations et contributions sociales pour la somme de 9 720 euros correspondant à un chef unique de redressement : « artistes du spectacle : taux réduits et abattements forfaitaires » ; après un échange contradictoire, l'inspecteur du recouvrement a admis la prépondérance du caractère artistique des activités de l'association, ce qui a eu pour conséquence d'entraîner l'application des taux réduits de cotisations sur l'ensemble des rémunérations, mais il a maintenu sa position quant à la déduction spécifique forfaitaire, qu'il a refusé d'appliquer au motif que l'association employait des artistes de cirque ; que l'Urssaf a délivré le 6 août 2015 une mise en demeure invitant la société à régler la somme de 5 711 euros les cotisations redressées (5 101euros), augmentées des majorations de retard provisoires ( 610 euros)'; qu'après avoir saisi en vain la commission de recours amiable de sa contestation de ce redressement, la société a saisi le 5 janvier 2016 le tribunal des affaires de sécurité sociale de Paris. L'Urssaf a émis le 10 septembre 2015 une contrainte signifiée à l'association le 3 février 2016 par acte déposé à l'étude d'huissier portant sur le recouvrement de la somme la somme de 5 711 euros les cotisations redressées (5 101euros), augmentées des majorations de retard provisoires ( 610 euros) et l'association a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de Paris le 9 février 2016 pour former opposition à cette contrainte.
Par jugement du 30 janvier 2018, le tribunal, après avoir ordonné la jonction des instances, a :
- déclaré l'association [4] recevable en ses recours et bien fondée,
- annulé la décision, en date du 5 octobre 2015, de la commission de recours amiable de l'Urssaf d'Ile de France concernant l'association [4],
- annulé la contrainte du 10 septembre 2015 signifiée le 3 février 2016 par l'Urssaf de l'Ile de France à l'encontre de l'association [4],
- condamné l'Urssaf de l'Ile de France à payer à l'association [4] la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Le jugement lui ayant été notifié le 26 mars 2018, l'Urssaf en a interjeté appel le 25 mars 2018.
Dans des écritures reprises oralement à l'audience par son représentant, l'Urssaf demande à la cour de :
- déclarer son appel régulier en la forme,
- réformer en totalité le jugement déféré,
Et statuant à nouveau,
- confirmer le chef de redressement n°1 « Artistes du spectacle : taux réduits et abattement forfaitaire »,
- valider la mise en demeure du 6 août 2015 pour son entier montant,
- confirmer la décision prise par la commission de recours amiable du 5 octobre 2015,
- valider la contrainte émise le 10 septembre 2015 pour son entier montant.
Par conclusions écrites soutenues oralement à l'audience par son représentant, l'association [4] demande à la cour de :
A titre principal :
- confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
- débouter l'Urssaf d'Ile de France en son appel et de toutes ses prétentions, demandes et fins contraintes de ce chef,
à titre subsidiaire, si la cour faisait droit aux demandes de l'Urssaf,
- juger que l'association a acquitté à « juste titre » après de l'Urssaf l'ensemble des cotisations CSG-CRDS pour les rémunérations de ses salariés, en ce qui concerne les années civiles 2012, 2013 et 2014,
- juger que l'Urssaf a commis des erreurs dans la formule de calcul et que le montant du redressement pour les années 2012, 2013 et 2014 ne s'élève qu'à 3 946 euros de taux de cotisations Urssaf- artistes cas général et Fnal (type 312 et 334).
En application de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions et aux écritures des parties déposées à l'audience pour un plus ample exposé des moyens développés et soutenus à l'audience.
SUR CE, LA COUR
Il ressort de la lettre d'observations du 30 mars 2015 que le chef unique de redressement « artistes du spectacle : taux réduits et abattement forfaitaire » était justifié par les constatations suivantes : « [4] est une association agrée de Jeunesse et d'Education Populaire. Elle intervient dans des écoles primaires et propose des stages pour initier les enfants aux arts du cirque et du spectacle. L'association fait appel à des artistes du spectacle pour assurer ce travail d'initiation, d'animation et d'encadrement. De ce fait, ces rémunérations versées à ces artistes ne sont pas la contrepartie d'une représentation artistique mais celle d'un travail pédagogique. » Il ressort de ces éléments que le motif du redressement était l'absence d'activité artistique des salariés auxquels l'employeur appliquait les taux réduits de cotisations et la déduction spécifique forfaitaire.
A la suite des observations de l'association, l'inspecteur du recouvrement qui a de nouveau examiné le dossier de l'intimée, a répondu par lettre du 19 mai 2015 :
« Vous contestez que la remise en cause des taux réduits « artistes » appliqués pour les trois années contrôlées à l'ensemble de vos salariés, en indiquant que le précédent contrôle ne les avait pas remis en cause et que les salariés de l'association n'exercent pas une fonction pédagogique mais bien un travail artistique.
A l'appui de votre argumentaire, vous rappelez le cadre de vos actions et présentez divers témoignages attestant de la tenue de spectacles vivants par les artistes salariés de l'association [4].
Aussi la prépondérance du caractère artistique de ces activités est-elle acceptée, les taux réduits restent donc applicables.
Par ailleurs, vous ne contestez pas sur le fond la remise en cause de l'abattement forfaitaire appliqué à tort pour les artistes de cirque - cette remise en cause ayant déjà été relevée dans le précédent contrôle. Depuis ce précédent contrôle, vous précisez d'ailleurs que vous exercez : « les mêmes pratiques, les mêmes actions et les mêmes activités ».
La remise en cause de la déduction forfaitaire spécifique de 25% applicables aux seuls artistes lyriques est donc maintenue ».
La formulation très maladroite de cette dernière phrase doit s'analyser comme la volonté de l'Urssaf de maintenir le redressement, s'agissant de la déduction forfaitaire aux salariés de l'association, au motif qu'il s'agit d'artistes de cirque, alors que cette déduction pourrait être admise s'il s'agissait d'artistes lyriques.
En tout état de cause, il ressort de cette réponse de l'Urssaf, que l'inspecteur est revenu sur l'unique motif énoncé dans la lettre d'observations pour justifier le redressement litigieux qui tenait dans le fait qu'il avait constaté que l'activité de l'association était une activité pédagogique et non artistique. Remettant en cause ses propres constatations, l'Urssaf a minoré le montant du redressement en acceptant l'application de taux réduits, compte tenu de l'activité artistique de l'association. Contrairement à ce qu'indique l'Urssaf dans ses écritures, elle est donc revenue sur la position énoncée dans la lettre d'observations.
Elle a maintenu partiellement le redressement quant à la déduction forfaitaire unique en soutenant que cette déduction n'était pas applicable aux artistes de cirque qui n'entraient pas dans les professions prévues à l'article 5 de l'annexe IV du code général des impôts. Pour autant, ce motif ne ressort pas de la lettre d'observations du 30 mars 2015, qui ne contient aucune référence à la situation particulière des artistes de cirque quant à la déduction spécifique forfaitaire.
Dès lors, il convient de réouvrir les débats pour recueillir les explications des parties sur le fondement du redressement recouvré par la mise en demeure du 6 août 2015 et par la contrainte émise le 10 septembre 2015 et l'application des dispositions de l'article R.243-59 du code de la sécurité sociale compte tenu de l'écart entre les constatations de la lettre d'observations justifiant le redressement litigieux et le débat instauré devant la Cour s'agissant du point de savoir si la rémunération des artistes de cirque entre dans le champ de la déduction spécifique forfaitaire, dont entend bénéficier la cotisante.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
ORDONNE la réouverture des débats,
ENJOINT aux parties de s'expliquer sur le fondement du redressement recouvré par la mise en demeure du 6 août 2015 et par la contrainte émise le 10 septembre 2015 et l'application des dispositions de l'article R.243-59 du code de la sécurité sociale compte tenu de l'écart entre les constatations de la lettre d'observations justifiant le redressement litigieux et le débat instauré devant la Cour s'agissant du point de savoir si la rémunération des artistes de cirque entre dans le champ de la déduction spécifique forfaitaire, dont entend bénéficier la cotisante,
RÉSERVE l'ensemble des demandes,
RENVOIE l'affaire pour être plaidée à l'audience du :
vendredi 27 septembre 2022 à 13h30
Salle Huot-Fortin, 1H09, escalier H, secteur pôle social, 1er étage.
DIT que la notification du présent arrêt vaut convocation des parties à cette nouvelle audience.
La greffièreLa présidente