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22/04/2022 | FRANCE | N°17/12411

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 12, 22 avril 2022, 17/12411


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 12



ARRÊT DU 22 Avril 2022



(n° , 6 pages)





Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 17/12411 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B4HJ4



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 28 Juillet 2017 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de MELUN RG n° 15/00051





APPELANTE

Madame [U] [W] [O]

[Adresse 1]

[Localité 2]

repr

ésentée par M. [V] en vertu d'un pouvoir spécial



INTIMEE

CPAM 77 - SEINE ET MARNE

[Adresse 7]

[Adresse 7]

[Localité 3]

représentée par Me Florence KATO, avocat au barreau de PARIS, toque : D19...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 12

ARRÊT DU 22 Avril 2022

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 17/12411 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B4HJ4

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 28 Juillet 2017 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de MELUN RG n° 15/00051

APPELANTE

Madame [U] [W] [O]

[Adresse 1]

[Localité 2]

représentée par M. [V] en vertu d'un pouvoir spécial

INTIMEE

CPAM 77 - SEINE ET MARNE

[Adresse 7]

[Adresse 7]

[Localité 3]

représentée par Me Florence KATO, avocat au barreau de PARIS, toque : D1901 substituée par Me Camille MACHELE, avocat au barreau de PARIS, toque : D1901

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 02 Mars 2022, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Raoul CARBONARO, Président de chambre, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de  :

Monsieur Raoul CARBONARO, Président de chambre

Madame Sophie BRINET, Présidente de chambre

Monsieur Gilles REVELLES, Conseiller

Greffier : Madame Joanna FABBY, lors des débats

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé

par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

-signé par Monsieur Raoul CARBONARO, Président de chambre, et par Madame Joanna FABBY, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La cour statue sur l'appel interjeté par Madame [U] [W] [O] d'un jugement rendu le 28 juillet 2017 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Melun dans un litige l'opposant à la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Seine-et-Marne.

FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :

Les circonstances de la cause ayant été correctement rapportées par le tribunal dans son jugement au contenu duquel la cour entend se référer pour un plus ample exposé, il suffit de rappeler que Madame [U] [W] [O] a déclaré le 10 décembre 2012 une maladie professionnelle constatée médicalement le 19 novembre 2012 au titre du tableau numéro 57 A des maladies professionnelles consistant en une lésion de la coiffe des rotateurs de son épaule gauche ; que la caisse a refusé la prise en charge en raison du dépassement du délai de six mois prévu au tableau ; qu'elle a demandé l'avis du comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles d'Île-de-France qui a rendu un avis défavorable le 17 juillet 2013 ; qu'à la suite du refus de la caisse, Madame [U] [W] [O] a saisi la commission de recours amiable qui a rendu une décision défavorable le 14 novembre 2014, notifiée le 11 décembre 2014 ; que le 14 janvier 2015, Madame [U] [W] [O] a saisi le tribunal de son recours.

Par jugement du 18 mars 2016, le tribunal a désigné le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles d'Orléans Région Centre pour un avis motivé sur la prise en charge au titre du tableau numéro 57 A des maladies professionnelles de la lésion de la coiffe des rotateurs à l'épaule gauche déclarée par Madame [U] [W] [O].

Par jugement du 28 juillet 2017, le tribunal a débouté Madame [U] [W] [O] de son recours et dit que la lésion de la coiffe des rotateurs de l'épaule gauche déclarée par Madame [U] [W] [O] ne peut faire l'objet d'une prise en charge au titre de la législation sur les maladies professionnelles.

Le tribunal a retenu que l'avis motivé du 12 avril 2017 du comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles d'Orléans Centre Val de Loire ne retenait pas l'existence d'un lien de causalité direct avec l'activité professionnelle exercée par l'assurée, considérant que le dépassement du délai de prise en charge constitue un obstacle à la reconnaissance de maladie professionnelle de la pathologie déclarée.

Le jugement a été notifié par lettre recommandée avec demande d'accusé de réception délivrée le 27 septembre 2018 à Madame [U] [W] [O] qui en a interjeté appel par lettre recommandée avec demande d'accusé de réception adressée le 11 octobre 2017.

Par arrêt avant dire droit du 12 mars 2021, la cour a ordonné la réouverture des débats, le représentant de Madame [U] [W] [O] ayant fait valoir une excuse à son absence.

Par conclusions écrites visées et développées oralement à l'audience par son représentant, Madame [U] [W] [O] demande à la cour de :

déclarer recevable et bien-fondé son recours ;

à titre principal :

constater que la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Seine-et-Marne ne rapporte pas la preuve qu'elle a notifié par lettre recommandée avec accusé de réception sa décision du 13 mars 2013 de recourir au délai d'instruction complémentaire ;

en conséquence :

reconnaître à titre implicite la maladie professionnelle dont elle a été victime en date du 19 novembre 2012 ;

à titre subsidiaire :

constater au vu de l'ensemble des pièces versées aux débats que la tendinopathie chronique de la coiffe des rotateurs de l'épaule gauche est en lien direct avec l'activité de cuisinière exercée pendant plus de onze années au sein de la S.A.R.L. [4] ;

dire et juger en conséquence que cette pathologie doit faire l'objet d'une prise en charge au titre de la législation professionnelle ;

la renvoyer devant la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Seine et Marne pour la liquidation de ses droits ;

condamner la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Seine-et-Marne aux éventuels dépens de l'instance ;

à titre infiniment subsidiaire :

constater l'irrégularité de l'avis du Comité Régional de Reconnaissance des Maladies Professionnelles de la région d'Orléans Centre Val de Loire du 12 avril 2017 ;

écarter en conséquence des débats l'avis du comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles de la région d'[Localité 6] Centre Val de Loire du 12 avril 2017 ;

désigner, conformément aux dispositions de l'article R. 142-17-2 du code de la sécurité sociale, un nouveau comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles composé de ses trois membres afin qu'il se prononce sur le lien de causalité entre la pathologie à l'épaule gauche décrite dans le certificat médical initial du 19 novembre 2012 et son activité professionnelle de cuisinière ;

enjoindre la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Seine-et-Marne à communiquer son entier dossier à ce nouveau comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles y compris les pièces énumérées à l'article D. 461-29 du code de la sécurité sociale ainsi que le dossier de la présente procédure afin qu'il puisse donner un avis motivé.

Par conclusions écrites visées et développées oralement à l'audience par son avocat, la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Seine-et-Marne demande à la cour de :

déclarer l'appel de Madame [U] [O] recevable en la forme ;

le dire mal fondé ;

en conséquence, confirmer le jugement entrepris.

Pour un exposé complet des prétentions et moyens des parties, la cour renvoie à leurs conclusions écrites visées par le greffe à l'audience du 30 novembre 2021 qu'elles ont respectivement soutenues oralement.

SUR CE,

- Sur la demande de reconnaissance implicite de la maladie professionnelle

- Moyens des parties

Madame [U] [W] [O] expose qu'elle a déclaré le 10 décembre 2012 à la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Seine et Marne une maladie professionnelle pour une tendinopathie chronique de l'épaule gauche objectivée par certificat médical initial du 19 novembre 2012 et une I.R.M du 12 novembre 2012 ; que le service gestionnaire de la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Seine-et-Marne aurait réceptionné cette demande de maladie professionnelle, selon le tampon dateur, le 11 décembre 2012 ; que dans un courrier du 13 mars 2013, la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Seine-et-Marne estime devoir solliciter un délai complémentaire de trois mois ; que cette faculté est subordonnée à la preuve de la notification à l'assurée par lettre recommandée avec accusé de réception ; qu'en cas de non-respect de cette notification par L.R.A.R., la sanction n'est pas la nullité mais la reconnaissance implicite de la maladie professionnelle ; qu'à l'examen des pièces de ce dossier, la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Seine-et-Marne n'apporte nullement la preuve formelle et sans aucune ambiguïté qu'elle a bien respecté scrupuleusement les dispositions de l'article R.441-14 nouveau du code de la sécurité sociale.

La Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Seine-et-Marne réplique qu'en l'espèce, le certificat médical initial a été réceptionné le 23 novembre 2012 tandis que la déclaration de maladie professionnelle l'a été le 14 décembre 2012, point de départ du délai d'instruction de trois mois ; qu'il expirait le jeudi 14 mars 2013, délai imparti à la Caisse pour sa prise de décision sauf notification d'un délai complémentaire d'instruction pour proroger ledit délai de trois mois supplémentaires ; que ce fut fait le 13 mars 2013 et dûment réceptionné par l'intéressée le 16 mars 2013 ; que le délai d'instruction ainsi prorogé venait à expiration le 13 juin 2013 ; que le 10 juin 2013, elle notifiait un refus pour non réception de l'avis du comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles ; qu'il ressort de ce qui précède qu'elle a parfaitement respecté les délais d'instruction et qu'elle en justifie aujourd'hui suite au moyen nouveau soulevé en cause d'appel.

La cour a mis dans les débats le caractère irrecevable de la demande comme étant nouvelle.

Aux termes de l'article 564 du code de procédure civile, « A peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait ».

Si Madame [U] [W] [O] n'a pas soutenu devant les premiers juges avoir bénéficié d'une décision implicite d'acceptation de sa demande de reconnaissance de maladie professionnelle, sa demande tend toujours à cette reconnaissance, seul le moyen invoqué étant nouveau. Dès lors, la demande tendant à voir reconnaître l'existence d'une décision tacite d'acceptation de la caisse est recevable.

L'article R 441-10 du code de la sécurité sociale, dans sa version issue du décret n°2009-938 du 29 juillet 2009, applicable au litige, dispose que :

La caisse dispose d'un délai de trente jours à compter de la date à laquelle elle a reçu la déclaration d'accident et le certificat médical initial ou de trois mois à compter de la date à laquelle elle a reçu la déclaration de la maladie professionnelle et le certificat médical initial pour statuer sur le caractère professionnel de l'accident ou de la maladie.

L'article R441-14 du code de la sécurité sociale, dans sa version issue du décret n°2009-938 du 29 juillet 2009, applicable au litige, dispose que :

Lorsqu'il y a nécessité d'examen ou d'enquête complémentaire, la caisse doit en informer la victime ou ses ayants droit et l'employeur avant l'expiration du délai prévu au premier alinéa de l'article R. 441-10 par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. A l'expiration d'un nouveau délai qui ne peut excéder deux mois en matière d'accidents du travail ou trois mois en matière de maladies professionnelles à compter de la date de cette notification et en l'absence de décision de la caisse, le caractère professionnel de l'accident ou de la maladie est reconnu.

En cas de saisine du comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles, mentionné au cinquième alinéa de l'article L. 461-1, le délai imparti à ce comité pour donner son avis s'impute sur les délais prévus à l'alinéa qui précède.

Dans les cas prévus au dernier alinéa de l'article R. 441-11, la caisse communique à la victime ou à ses ayants droit et à l'employeur au moins dix jours francs avant de prendre sa décision, par tout moyen permettant d'en déterminer la date de réception, l'information sur les éléments recueillis et susceptibles de leur faire grief, ainsi que sur la possibilité de consulter le dossier mentionné à l'article R. 441-13.

La décision motivée de la caisse est notifiée, avec mention des voies et délais de recours par tout moyen permettant de déterminer la date de réception, à la victime ou ses ayants droit, si le caractère professionnel de l'accident, de la maladie professionnelle ou de la rechute n'est pas reconnu, ou à l'employeur dans le cas contraire. Cette décision est également notifiée à la personne à laquelle la décision ne fait pas grief.

Le médecin traitant est informé de cette décision.

Le délai d'instruction ne court qu'à compter de la réception par la caisse de la demande de reconnaissance de maladie professionnelle à laquelle doit être impérativement joint le certificat médical initial.

En l'espèce, Madame [U] [W] [O] a envoyé préalablement à la Caisse Primaire d'Assurance Maladie le certificat médical du 19 novembre 2012 à l'agence de [Localité 5]. Ce document n'était pas de nature à faire courir le délai de trois mois. La déclaration de maladie professionnelle du 10 décembre 2012 à laquelle n'était pas joint le certificat médical initial, adressé préalablement, a été reçue le 11 décembre 2012 à l'agence de [Localité 2]. Le point de départ du délai de trois mois ne pouvait donc courir faute de production simultanée des deux documents. Le délai n'a donc commencé à courir qu'à la date où la caisse a été en mesure de récupérer l'intégralité des documents, soit le 14 décembre 2012 à son siège de [Localité 5] selon l'horodatage de la déclaration de maladie professionnelle.

La preuve de l'envoi de la lettre d'information relative au délai supplémentaire d'instruction incombe à la Caisse. Cette lettre du 13 mars 2013 a été reçue le 16 mars 2013 par sa destinataire. Pour autant, la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Seine-et-Marne ne démontre pas qu'elle a été adressée au plus tard le jeudi 14 mars 2013, dernier jour pour ce faire.

En conséquence, la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Seine-et-Marne ne démontre pas avoir adressé à Madame [U] [W] [O] avant l'expiration du premier délai de trois mois la lettre l'informant de la nécessité de recourir à un délai complémentaire.

En conséquence, Madame [U] [W] [O] peut revendiquer la reconnaissance implicite par la Caisse de la tendinopathie chronique de l'épaule gauche objectivée par un certificat médical initial du 19 novembre 2012 et une I.R.M du 12 novembre 2012 dont elle est atteinte. La Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Seine-et-Marne sera donc condamnée à la prendre en charge.

Le jugement déféré sera donc infirmé et Madame [U] [W] [O] sera renvoyée devant la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Seine et Marne pour la liquidation de ses droits.

La Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Seine-et-Marne qui succombe sera condamnée aux dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS :

La Cour,

DÉCLARE recevable l'appel de Madame [U] [W] [O] ;

INFIRME le jugement rendu le 28 juillet 2017 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Melun en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau :

DIT que la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Seine-et-Marne a reconnu implicitement comme étant une maladie professionnelle la tendinopathie chronique de l'épaule gauche, objectivée par le certificat médical initial du 19 novembre 2012 et une I.R.M du 12 novembre 2012, dont est atteinte Madame [U] [W] [O] ;

ORDONNE en conséquence la prise en charge par la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Seine-et-Marne de la maladie tendinopathie chronique de l'épaule gauche objectivée par le certificat médical initial du 19 novembre 2012 et une I.R.M du 12 novembre 2012 dont est atteinte Madame [U] [W] [O] ;

RENVOIE Madame [U] [W] [O] devant la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Seine et Marne pour la liquidation de ses droits ;

CONDAMNE la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Seine-et-Marne aux dépens d'appel.

La greffière, Le président.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 12
Numéro d'arrêt : 17/12411
Date de la décision : 22/04/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-04-22;17.12411 ?
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