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20/04/2022 | FRANCE | N°21/15173

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 13, 20 avril 2022, 21/15173


Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 13



ARRÊT DU 20 AVRIL 2022



(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/15173 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CEHWL



Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 09 Juillet 2021 - Juge de la mise en état d'AUXERRE - RG n° 20/00476





APPELANT



Monsieur [S] [C]

Né le [Date naissance 2] 1949 à [LocalitÃ

© 4]

[Adresse 1]

[Adresse 1]



Représenté par Me Arnaud GUYONNET de la SCP AFG, avocat au barreau de PARIS, toque : L0044

Ayant pour avocat plaidant Me Isabelle JOULLAIN, avoca...

Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 13

ARRÊT DU 20 AVRIL 2022

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/15173 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CEHWL

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 09 Juillet 2021 - Juge de la mise en état d'AUXERRE - RG n° 20/00476

APPELANT

Monsieur [S] [C]

Né le [Date naissance 2] 1949 à [Localité 4]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représenté par Me Arnaud GUYONNET de la SCP AFG, avocat au barreau de PARIS, toque : L0044

Ayant pour avocat plaidant Me Isabelle JOULLAIN, avocat au barreau de PARIS, toque: D1481

INTIMÉS

Maître [L] [R]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

et

S.C.P. [R] TOURAILLE

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Représentés par Me Philippe BOCQUILLON de l'AARPI 2BV AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : E1085

Ayant pour avocat plaidant Me David FOUCHARD, avocat au barreau de DIJON

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 905 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 02 Mars 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Marie-Françoise d'ARDAILHON MIRAMON, Présidente, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Nicole COCHET, Première présidente de chambre

Mme Marie-Françoise d'ARDAILHON MIRAMON, Présidente de chambre

Mme Estelle MOREAU, Conseillère

Greffier, lors des débats : Mme Séphora LOUIS-FERDINAND

ARRÊT :

- Contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Marie-Françoise d'ARDAILHON MIRAMON, Présidente de chambre, pour la Première présidente empêchée et par Séphora LOUIS-FERDINAND, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

* * * * *

M. [S] [C], entrepreneur, a confié la défense de ses intérêts à M. [L] [R], avocat au barreau de Dijon, membre de la Scp Picard-[R], devenue Scp [R]-Touraille dans une affaire qui l'opposait notamment à la société Sanofi Winthrop Industrie (la société Sanofi) venant aux droits de la société Synthelabo groupe.

Par jugement en date du 15 mai 2002 confirmé par arrêt de la cour d'appel de Dijon du 14 septembre 2004, le tribunal de grande instance de Dijon a notamment :

- déclaré M. [C] contractuellement responsable des désordres qui affectent les locaux appartenant à la société Sanofi,

- fixé la créance de la société Sanofi à l'encontre de M. [C] à la somme de 41 094,53 euros et celle de ce dernier à l'encontre de la société Sanofi à la somme de 16 182,50 euros,

- ordonné la compensation entre ces deux sommes et condamné M. [C] à verser à la société Sanofi la somme de 24 805,31 euros ttc, outre intérêts aux taux légal à compter de la date de la présente décision,

- condamné la Sarl Chaudronnerie du moulin à vent à garantir M. [C] de l'intégralité des condamnations mises à sa charge, sans que la Sarl Chaudronnerie du moulin à vent puisse se prévaloir de la compensation ordonnée au profit de M. [C],

- condamné la société Beretta Miroiterie à garantir à la Sarl Chaudronnerie du moulin à vent de l'intégralité des condamnations mises à sa charge dans le cadre du présent jugement,

- condamné la société Beretta Miroiterie à verser à M. [C] la somme de 4 800 euros en réparation de son préjudice.

Dans le cadre de la procédure d'appel, M. [C] avait pour avocat postulant M. [K] [Z] en qualité d'avoué à la cour et pour avocat plaidant M. [L] [R].

La Sarl Chaudronnerie du moulin à vent a été mise en liquidation judiciaire le 16 novembre 2004 et la société Beretta Miroiterie, le 4 mai 2010.

Par actes du 23 juillet 2020, M. [C] a assigné la Scp [R]-Touraille et M.[R] devant le tribunal judiciaire d'Auxerre aux fins de voir engager leur responsabilité professionnelle.

Par ordonnance du 9 juillet 2021, le juge de la mise en état du tribunal judiciaire d'Auxerre a :

- déclaré l'action introduite par M. [C] à l'encontre de la Scp [R]-Touraille et M. [R] irrecevable car prescrite,

- condamné M. [C] à payer à la Scp [R]-Touraille et M. [R] la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné M. [C] aux dépens de l'instance.

Par déclaration du 2 août 2019, M. [C] a interjeté appel de cette ordonnance.

Dans ses dernières conclusions notifiées et déposées le 18 février 2022, M. [C] demande à la cour de :

- infirmer en toute ses dispositions l'ordonnance,

- dire et juger que son action en justice n'est pas prescrite,

- dire recevable son action,

- débouter la Scp [R]-Touraille et M. [R] de l'intégralité de leurs demandes, fins et conclusions,

- condamner la Scp [R]-Touraille et M. [R] au paiement de la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Dans leurs dernières conclusions notifiées et déposées le 24 février 2022, la Scp [R]-Touraille et M. [R] demandent à la cour de :

- confirmer en toutes ses dispositions l'ordonnance entreprise,

- condamner M. [C] à leur verser une indemnité de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner M. [C] aux dépens.

SUR CE,

Le juge de la mise en état a jugé que :

- par lettre en date du 8 avril 2005, M. [R] a réclamé, en exécution des décisions rendues, le règlement, soit par la Sarl Chaudronnerie du moulin à vent, soit par la Sarl Beretta Miroiterie, de la somme de 16 182,50 euros au titre du solde du coût des travaux dû en faveur de son client, de sorte qu'il a poursuivi sa mission postérieurement à l'arrêt rendu le 14 septembre 2004, uniquement pour tenter de recouvrer la somme de 16 182, 50 euros, allouée à son client au titre du solde des factures,

- il ne pouvait effectuer davantage de diligences dans le cadre de l'exécution de cet arrêt rendu principalement au profit de la société Sanofi à laquelle incombait de faire exécuter la décision, ce qu'elle a, au demeurant entrepris,

- le litige porte en réalité sur la mise à exécution 10 ans plus tard par la société Sanofi des condamnations prononcées en sa faveur à l'occasion de la vente d'un bien immobilier par les époux [C] au prix de 65 000 euros,

- aucune mise à exécution de l'arrêt de la cour d'appel de Dijon ne pouvait intervenir à l'initiative de M. [R], dès lors que celui-ci était dans l'impossibilité d'agir dans le cadre de la garantie dont bénéficiait M. [C] avant que ce dernier n'ait réglé les sommes auxquelles il avait lui-même été condamné, de sorte que M. [C] ne peut se prévaloir utilement de la lettre de M. [R] du 8 avril 2005 pour soutenir que le délai de prescription n'a pas commencé à courir faute d'exécution totale de l'arrêt rendu le 14 septembre 2004,

- les lettres de M. [R] de 2015 et de 2016 s'inscrivent dans le cadre d'une nouvelle mission et ne sauraient constituer la poursuite d'un mandat donné plus de 10 ans plus tôt, la lettre du 29 juillet 2015 étant adressée non pas à [S] mais à [I] [C] et celle du 5 avril 2016 ayant seulement pour objet de vérifier un éventuel paiement indu de la part de M. [S] [C],

- compte tenu de l'ensemble de ces éléments, il convient de considérer que la mission de M. [R] a pris fin, si ce n'est le jour du prononcé de l'arrêt du 14 septembre 2004, à la date du dernier acte effectué par ce dernier, soit au plus tard le 8 avril 2005, peu important qu'il n'y ait pas eu révocation formelle de son mandat ou qu'il n'ait pas notifié la fin de sa mission,

- l'action introduite tardivement par assignation en date du 23 juillet 2020, alors que la

prescription était acquise depuis le 19 juin 2013, le nouveau délai quinquennal prévu à l'article 2225 du code civil ayant commencé à courir à compter du 19 juin 2008, date de l'entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008, est irrecevable.

M. [C] fait valoir que :

- il n'est pas contestable que M. [R] n'a jamais fait exécuter l'arrêt qui a été rendu par la cour d'appel de Dijon le 14 septembre 2004, celui-ci reconnaissant dans sa lettre du 8 avril 2005 qu'il était bien en charge de l'exécution de cet arrêt, qu'il était saisi des garanties dont devait bénéficier M. [C], pour en arriver à la conclusion qu'il était dû à son client une somme de 16 182,50 euros,

- il invoque à tort la responsabilité de l'avoué alors qu'il reconnaît avoir eu en main toutes les pièces d'exécution nécessaires,

- la garantie des deux sociétés condamnées pouvait être mise en oeuvre sans que la condamnation principale ait été elle-même mise à exécution,

- la thèse d'une nouvelle mission invoquée par M. [R] ne saurait prospérer,

- dans la mesure où M. [R] n'a jamais fait exécuter la décision, aucun délai de prescription n'a couru puisque l'article 2225 du code civil énonce que l'action en responsabilité se prescrit à compter de la fin de la mission,

- par ses correspondances du 8 avril 2005 et du 29 juillet 2015, M. [R] reconnaît que sa mission n'était pas terminée et que son mandat était toujours en cours,

- le délai de prescription de 5 ans n'a donc pas pu courir avant le 29 juillet 2015 voire même le 5 avril 2016, date à laquelle M. [R] adressait une correspondance à Me [F], huissier de justice, de sorte que l'assignation ayant été délivrée le 23 juillet 2020, l'action n'était pas prescrite à cette date.

Les intimés répondent que :

- la mission de l'avocat peut prendre fin sans qu'il y ait eu révocation formelle de son mandat ou qu'il ait notifié la fin de sa mission,

- la signification des décisions rendues et leur mise à exécution relevaient en principe de la compétence des avoués à la cour, de sorte qu'on ne peut admettre en l'espèce un principe de prorogation automatique du mandat de l'avocat sans aucune fin ni limite,

- un an après que l'arrêt de la cour d'appel du 14 septembre 2004 a été rendu exécutoire, il n'était toujours pas mis à exécution, de sorte que la mission de M. [R] avait nécessairement pris fin en vertu de l'article 420 du code de procédure civile,

- aucun document versé aux débats n'établit que M. [R] a pu être avisé du commandement de payer avant saisie-vente délivré le 15 septembre 2005 ou du procès-verbal de saisie vente qui marquent la mise à exécution du jugement à l'encontre de M. [C] par la société Sanofi le 3 novembre 2005,

- la lettre du 8 avril 2005 ne constitue pas un acte d'exécution susceptible de faire obstacle à l'application, un an après l'arrêt, de l'article 420 du code de procédure civile,

- aucune mise à exécution de l'arrêt de la cour d'appel de Dijon ne pouvait intervenir à l'initiative de M. [R] dont le client était condamné au principal, dès lors qu'il était dans l'impossibilité d'agir dans le cadre de la garantie dont bénéficiait M. [C] avant que ce dernier n'ait réglé les sommes auxquelles il avait été lui-même condamné,

- M. [R] après l'année 2015, a accepté de se saisir à nouveau du dossier, pour tenter une exécution à l'encontre des sociétés Chaudronnerie du moulin à vent et Beretta Miroiterie, mais il s'agissait d'accepter une nouvelle mission d'assistance et non d'agir dans la continuité d'actes accomplis plus de 10 années auparavant.

Aux termes de l'article 2277-1 ancien du code civil, l'action dirigée à l'encontre des personnes légalement habilitées à représenter ou assister les parties en justice à raison de la responsabilité qu'elles encourent de ce fait se prescrivait par dix ans à compter de la fin de leur mission.

L'article 2225 du code civil issu de la réforme du 17 juin 2008 entrée en vigueur le 19 juin 2008 dispose désormais que :

L'action en responsabilité dirigée contre les personnes ayant représenté ou assisté les parties en justice, y compris à raison de la perte ou de la destruction des pièces qui leur ont été confiées, se prescrit par cinq ans à compter de la fin de leur mission.

S'agissant de l'application de la loi dans le temps, l'article 26 de la loi du 17 juin 2008 prévoit que les dispositions de la présente loi qui réduisent la durée de la prescription s'appliquent aux prescriptions à compter du jour de l'entrée en vigueur de la présente loi, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure.

L'article 420 du code de procédure civile disposait, dans sa version applicable jusqu'au 6 mai 2012 que l'avocat ou l'avoué remplit les obligations de son mandat sans nouveau pouvoir jusqu'à l'exécution du jugement pourvu que celle-ci soit entreprise moins d'un an après que ce jugement est passé en force de chose jugée.

Le 8 avril 2006, Me [R] a écrit à ses confrères avocats et avoués des deux sociétés garantes:

'Je me permets de vous rappeler que M. [C], dont je suis le conseil, a été condamné à une somme de 41 094,53 euros au titre des travaux de reprise, pendant qu'une somme de 16 182,50 euros lui était due au titre du solde de factures de travaux.

Mais M. [C] a été garanti de l'intégralité des condamnations mises à sa charge dans le cadre de la présente instance.

La Sarl Chaudronnerie du moulin à vent a été condamnée à garantir M. [C], sans que la Sarl Chaudronnerie du moulin à vent puisse se prévaloir de la compensation ordonnée au profit de M. [C].

La société Beretta Miroiterie a été dans les mêmes conditions condamnée à garantir la Sarl Chaudronnerie du moulin à vent .

C'est donc une somme de 16 182,50 euros en principal outre intérêts qui doit être réglée soit par la Sarl Chaudronnerie du moulin à vent, laquelle pourra se retourner contre Beretta , soit par Beretta directement.

Je vous remercie de me confirmer que le nécessaire sera fait dans les meilleurs délais.

Je note ce dossier à quinzaine en vous indiquant que sans réponse utile, je ferai procéder à l'exécution pour avoir en mains toutes les pièces d'exécution nécessaires en provenance de mon avoué à la cour.'

Cette lettre du 8 avril 2005 adressée aux seuls avocats des parties ne constitue pas un acte d'exécution envers les deux sociétés à l'encontre desquelles M. [C] bénéficiait d'une condamnation à garantie exécutoire et ce dernier ne justifie d'aucune démarche postérieure de son avocat justifiant d'une tentative d'exécution des condamnations prononcées à son profit moins d'un an après que ce jugement est passé en force de chose jugée soit avant le 15 septembre 2005.

Il s'en déduit, faute de prolongation de son mandat et de preuve que M. [R] ait reçu un mandat express aux fins de faire exécuter la décision rendue que sa mission d'assistance a pris fin le 14 septembre 2004, date de l'arrêt confirmatif du jugement.

M. [C] qui estime que le 29 juillet 2015 M. [R] intervenait toujours dans le cadre de sa mission initiale conteste la thèse de ce dernier selon laquelle un nouveau mandat lui aurait été donné à cette date.

En conséquence, le délai de prescription pour agir au titre du seul mandat qu'il admet avoir donné courrait jusqu'au 19 juin 2013 et l'action intentée au titre de ce mandat par assignation du 23 juillet 2020 est prescrite.

La décision du premier juge est, en conséquence, confirmée, par substitution de motifs.

Succombant, M. [C] est condamné aux dépens d'appel et à payer aux intimés la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour

Confirme l'ordonnance du juge de la mise en état ayant déclaré l'action de M. [I] [S] [C] prescrite,

Le condamne aux dépens et à payer à M. [L] [R] et à la Scp [R]-Touraille la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

LA GREFFIÈRELA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 13
Numéro d'arrêt : 21/15173
Date de la décision : 20/04/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-04-20;21.15173 ?
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