La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

20/04/2022 | FRANCE | N°19/07893

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 4, 20 avril 2022, 19/07893


Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 4



ARRET DU 20 AVRIL 2022



(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/07893 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CAKYJ



Décision déférée à la Cour : Jugement du 11 Juin 2019 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - RG n° 18/08719



APPELANT



Monsieur [F] [Y]

[Adresse 1]

[Localité 4]
>Représenté par Me Amandine BOULEBSOL, avocat au barreau de PARIS, toque : C2293



INTIMEE



SAS SOCIETE FRANCAISE DES FOYERS ECONOMIQUES « SFFE » Agissant poursuites et diligences de son ...

Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 4

ARRET DU 20 AVRIL 2022

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/07893 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CAKYJ

Décision déférée à la Cour : Jugement du 11 Juin 2019 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - RG n° 18/08719

APPELANT

Monsieur [F] [Y]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représenté par Me Amandine BOULEBSOL, avocat au barreau de PARIS, toque : C2293

INTIMEE

SAS SOCIETE FRANCAISE DES FOYERS ECONOMIQUES « SFFE » Agissant poursuites et diligences de son Président en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Belgin PELIT-JUMEL, avocat au barreau de PARIS, toque : D1119

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 13 Juin 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Jean-François DE CHANVILLE, président , chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Monsieur Jean-François DE CHANVILLE, président

Madame Anne-Ga'l BLANC, conseillère

Madame Florence MARQUES, conseillère

Greffier, lors des débats : Madame Victoria RENARD

ARRET :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Jean-François DE CHANVILLE, président et par Madame Victoria RENARD, greffière, présente lors de la mise à disposition.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

La société française des foyers économiques (ci après, la société SFFE) est spécialisée dans l'installation et la maintenance d'équipements thermiques collectifs.

Suivant contrat de travail à durée indéterminée en date du 9 juillet 2007, M. [F] [Y] a été engagé par la société française des foyers économiques en qualité d'agent de maintenance d'exploitation, statut ouvrier, niveau II, position 5, coefficient 270.

Dans le dernier état des relations contractuelles, sa rémunération brute mensuelle était de 3.785,33 euros.

La convention collective applicable est celle des ouvriers, employés, techniciens et agents de maîtrise des entreprises de gestion d'équipements thermiques de l'exploitation d'équipements thermiques et de génie climatique.

Depuis le 30 mai 2016, M. [F] [Y] assume la fonction de délégué du personnel.

Le 18 septembre 2017, une altercation a eu lieu entre M. [F] [Y] et un collègue.

M. [F] [Y] a été en arrêt de travail du 19 au 23 septembre 2017, lequel a été renouvelé jusqu'au 5 décembre 2017 inclus.

Lors de la visite de reprise en date du 6 décembre 2017, le médecin du travail a, considéré que Monsieur [Y] était « inapte dans l'emploi dans l'entreprise en une seule visite. Il ne pourrait pas exécuter des taches ou de postes existants dans l'entreprise.

Tout maintien du salarié dans un emploi dans l'entreprise serait gravement préjudiciable à sa santé.

Préconiser un reclassement externe ».

Sur demande de précisions de l'employeur concernant le reclassement du salarié le médecin du travail a, le 18 décembre 2017, transmis un nouvel avis d'inaptitude en cochant la mention  « tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ».

Précédemment sollicitée, l'inspection du travail a rendu une décision expresse autorisant le licenciement de Monsieur [Y], le 31 janvier 2018. Cette décision n'a pas été contestée.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 5 février 2018, la société SFFE a notifié à Monsieur [Y] son licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement.

M. [F] [Y] a saisi le conseil de prud'hommes de Paris le 16 novembre 2018 aux fins de voir juger nul son licenciement et la société française des foyers économiques condamnée à lui payer, notamment, des dommages et intérêts en réparation de l'atteinte portée au statut protecteur de salarié et pour manquement de l'employeur à son obligation de sécurité.

Par jugement en date du 11 juin 2019, le conseil de prud'hommes de Paris, statuant en formation de jugement s'est déclaré compétent et a condamné la société française des foyers économiques à payer au salarié la somme de 2.500 euros sur le fondement de l'article 700 CPC et a débouté celui-ci du surplus de ses demandes. Les dépens ont été mis à la charge de la société française des foyers économiques.

Par déclaration au greffe en date du 10 juillet 2019, M. [F] [Y] a régulièrement interjeté appel de la décision, notifiée le 15 juin 2019.

Par conclusions remises via le réseau virtuel des avocats le 9 octobre 2019 , M. [F] [Y] demande à la cour de :

- Infirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté Monsieur [Y] de ses demandes ;

Statuant à nouveau de ces chefs,

- Dire et juger que le licenciement de Monsieur [Y] est nul ;

- Condamner la société SFFE à verser à Monsieur [Y] la somme de 132.486,55 bruts à titre de dommages et intérêts en réparation de l'atteinte portée au statut protecteur du salarié ;

- Condamner la société SFFE à verser à Monsieur [Y] la somme de 30.285,28 euros à titre de dommages et intérêts en réparation des préjudices subis du fait de la perte d'emploi ; - Condamner la société SFFE à verser à Monsieur [Y] la somme de 22.711,98 euros à titre de dommages et intérêts pour manquement de l'employeur à son obligation de sécurité de résultat ;

- Condamner la société SFFE à verser à Monsieur [Y] la somme de 2.500,00 euros au titre de l'article 700 du CPC au titre de la procédure d'appel.

Par conclusions remises via le réseau virtuel des avocats le 8 janvier 2020, la société française des foyers économiques demande à la cour de :

CONFIRMER le jugement entrepris, sauf en ce qu'il a :

- rejeté l'exception d'incompétence matérielle concernant la demande de Monsieur [Y] de 22.711,98 € à titre de dommages et intérêts pour manquement de l'employeur à son obligation de sécurité de résultat,

- condamné la société SFFE à verser à Monsieur [Y] la somme de 2.500 € à titre d'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens,

- l'a déboutée de sa demande de 2.000 € sur le fondement de l'article 700 du CPC,

Infirmer uniquement de ces chefs et statuant de nouveau :

- SE DECLARER incompétente pour statuer sur la demande de dommages et intérêts au titre d'un prétendu manquement de l'employeur à son obligation de sécurité et de résultat,

- juger que cette demande doit être portée devant le Tribunal judiciaire de Paris, Pôle Social, et renvoyer les parties à mieux se pourvoir,

- DIRE et JUGER Monsieur [F] [Y] irrecevable en sa demande de nullité du licenciement, et en ses demandes indemnitaires formulées au titre de la violation de son statut protecteur et de la perte d'emploi,

REJETER des débats les pièces adverses n°3 à 5, s'agissant d'attestations complaisantes,

- DIRE et JUGER le licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement de Monsieur [Y] fondé,

- DEBOUTER Monsieur [F] [Y] de toutes ses demandes, fins et conclusions,

- CONDAMNER Monsieur [F] [Y] à payer à la société SFFE la somme de 2.000 €,au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile, pour ses frais irrépétibles de première instance, et la somme de 2.000 € sur le même fondement, pour ceux exposés en appel,

- Le CONDAMNER aux entiers dépens.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé aux conclusions des parties pour un exposé complet du litige.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 4 janvier 2022.

MOTIFS DE LA DECISION :

1- Sur le rejet des pièces 3 et 5 du salarié

Rien ne justifie d'écarter ces deux attestations qualifiées d'attestations de complaisance par l'employeur de manière parfaitement péremptoire.

2- Sur la demande de dommages et intérêts pour manquement de l'employeur à l'obligation de sécurité de résultat.

L'employeur soutient que la demande de ce chef ne relève pas de la compétence de la juridiction prud'homale mais que le salarié sollicite des dommages et intérêts au titre de son accident du travail qui serait la conséquence d'un prétendu manquement de sa part à son obligation de sécurité, si bien que sa demande est sans lien avec le rupture du contrat de travail. L'employeur estime que le TASS est seul compétent en application des articles L 142-1 et L451-1 du code de la sécurité sociale.

Le salarié soutient que la cour est parfaitement compétente, puisqu'il a été victime d'une agression sur son lieu de travail.

En application de l'article L 4121-1 du code du travail, l'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs, ces mesures comprenant notamment des actions de prévention des risques professionnels, des actions d'information et de formation, la mise en place d'une organisation et de moyens adaptés.

La cour est ainsi parfaitement compétente pour connaître de cette demande laquelle n'a pas trait aux conséquences de l'accident du travail mais du manquement imputé à l'employeur qui en est l'origine.

Il résulte des pièces du dossier émanant tant du salarié que de l'employeur que l'agression de M. [F] [Y] par M. [J] a été soudaine.

Il est à noter que les circonstances de survenance des faits ne sont pas exactement établies, l'employeur précisant que la victime, en parlant de l'épouse de M. [J] ne serait pas totalement étrangère à la réaction outrancière de ce dernier.

Il est également remarqué que selon l'employeur, M. [Y] a quitté le bureau du directeur général alors que celui-ci lui avait demandé d'y rester, après le départ de M. [J] lequel était passablement énervé, sans que le salarié n'obéisse.

L'attestation de monsieur [B] [Y], frère de M. [F] [Y] (produite par le salarié), permet de comprendre que M. [J] est effectivement redescendu du bureau du directeur avant M. [F] [Y] lequel est arrivé immédiatement après.

Il en résulte de l'employeur a ainsi fait le nécessaire pour assurer la sécurité de son salarié.

Ainsi, en l'état des éléments qui sont soumis à son appréciation, la cour estime que l'employeur n'a pas manqué à son obligation de sécurité.

Le salarié est débouté de sa demande de ce chef et le jugement déféré confirmé.

3- Sur la nullité du licenciement et ses conséquences indemnitaires.

L'employeur soutient que cette demande est irrecevable en vertu du principe de séparation des pouvoirs.

Le salarié soutient que ce principe ne fait pas obstacle à la compétence du juge judiciaire lorsque l'inaptitude résulte d'un manquement de l'employeur à ses obligations, notamment à son obligation de sécurité de résultat. Il souligne que son inaptitude est due à l'agression qu'il a subie dans le cadre de son mandat.

Il résulte du principe de séparation des pouvoirs que le juge judiciaire n'est pas compétent pour annuler la décision rendue par l'inspecteur du travail autorisant le licenciement.

Au cas d'espèce, M. [F] [Y] demande à la cour de dire nul son licenciement à raison de la violation du principe de la liberté syndicale et pour licenciement prononcé en raison de l'exercice d'un mandat.

Il appartenait au salarié de former un recours à l'encontre de la décision de l'administration en date du 31 janvier 2018 ayant autorisé son licenciement, ce qu'il n'a pas fait. Le juge judiciaire est ainsi incompétent pour se prononcer sur la nullité.

Le juge judiciaire demeure compétent, sans porter atteinte au principe ci-dessus rappelé, pour statuer sur l'origine de l'inaptitude et indemniser le salarié des préjudices en résultant lorsqu'il l'attribue à un manquement de l'employeur à ses obligations.

M. [F] [Y] fonde sa demande de dommages et intérêts sur la violation de son statut protecteur alors que rigoureusement rien dans le dossier ne justifie cette demande.

Au titre de la perte d'emploi, il est soutenu que le licenciement pour inaptitude est bien la conséquence du manquement de son employeur à son obligation d'assurer sa santé et sa sécurité puisque les conséquences de l'agression ont eu pour effet de rendre impossible son reclassement.

Comme il a été dit plus haut, la société française des foyers économiques n'a pas failli à son obligation de sécurité de résultat. En conséquence, le salarié ne peut qu'être débouté de sa demande de ce chef.

Le jugement est confirmé.

4- Sur les demandes accessoires

Le jugement doit être infirmé en ce qu'il a alloué à M. [F] [Y] une somme sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et mis à la charge de la société française des foyers économiques les dépens de première instance.

M. [F] [Y] supportera les dépens d'appel.

Il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de M. [F] [Y] fondée sur l'article 700 du code de procédure civile à hauteur d'appel.

Il n'est pas inéquitable de laisser à la charge de la société française des foyers économiques ses frais irrépétibles de première instance et en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS :

LA COUR,

DIT n'y avoir lieu d'écarter les pièces n°3 et 5 présentées par le salarié,

CONFIRME le jugement déféré sauf en ce qu'il a déclaré le conseil des prud'hommes compétent pour se prononcer sur la nullité du licenciement a condamné de la société française des foyers économiques à payer à M. [F] [Y] la somme de 2.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et a mis à sa charge les dépens,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Déclare la juridiction prud'homale incompétente pour se prononcer sur la nullité du licenciement,

DEBOUTE M. [F] [Y] de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés en première instance et en cause d'appel,

DEBOUTE la société française des foyers économiques de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE M. [F] [Y] aux dépens de première instance et d'appel.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 4
Numéro d'arrêt : 19/07893
Date de la décision : 20/04/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-04-20;19.07893 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award