Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE
délivrées le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 10
ARRET DU 20 AVRIL 2022
(n° , 1 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/01823 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B47F6
Décision déférée à la Cour : Jugement du 14 Décembre 2017 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de CRÉTEIL - RG n° 15/00419
APPELANTE
Me [R] [M] - Mandataire liquidateur de la SAS STAR TERRE
[Adresse 3]
[Adresse 3]
[Adresse 3]
Représenté par Me Anne-guillaume SERRE, avocat au barreau de PARIS, toque : R105
INTIME
Monsieur [W] [B]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représenté par Me Rachel SPIRE, avocat au barreau de PARIS, toque : B0335
L'UNEDIC DELEGATION AGS CGEA d'[Localité 4], prise en la personne de son représentant légal
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Représenté par Me Florence ROBERT DU GARDIER, avocat au barreau de PARIS, toque : P0061
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 02 Février 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Véronique BOST, Vice Présidente placée faisant fonction de conseillère par ordonnance du Premier Président en date du 16 décembre 2021, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :
Monsieur Nicolas TRUC, Président de la chambre
Madame Gwenaelle LEDOIGT, Présidente de la chambre
Madame Véronique BOST, Vice Présidente placée faisant fonction de conseillère par ordonnance du Premier Président en date du 16 décembre 2021
Greffier : lors des débats : Mme Sonia BERKANE
ARRET :
- contradictoire
- mis à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Monsieur Nicolas TRUC, Président et par Sonia BERKANE,Greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSE DU LITIGE
Monsieur [W] [B] a été embauché en 2009 par la société STAR TERRE en qualité de responsable magasinier réception et préparation de commandes.
Par avenant du 1er janvier 2010, sa rémunération a été augmentée. Par avenant du 1er mars 2013, une clause de non-concurrence a été définie.
M. [B] a été convoqué à un entretien préalable qui s'est tenu le 10 octobre 2014.
Il a été licencié par lettre du 21 octobre 2014.
Contestant son licenciement, il a saisi le conseil des prud'hommes de Créteil.
Par jugement du 14 décembre 2017, notifié le 21 décembre 2017, le conseil de prud'hommes de Créteil a:
- fixé le salaire de référence de M. [B] à 4 045,23 euros bruts,
- dit que le licenciement prononcé le 22 octobre 2014 est abusif,
- condamné la société STAR TERRE à payer à M. [W] [B] les sommes suivantes :
* 3 315,07 euros à titre de rappel d'indemnités de congés payés pour les années 2010
à 2014,
* 15 911,25 euros à titre de rappel de prime annuelle de 2010 à 2014,
* 12 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif,
* 1 200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
- ordonné à la société STAR TERRE de fournir à M. [W] [B] des bulletins de paie au mois le mois conforme au jugement à intervenir (sic) et une attestation Pôle Emploi rectifiée conforme
- débouté M. [W] [B] du surplus de ses demandes,
- débouté la société STAR TERRE de toutes ses demandes et prétentions,
- rappelé que l'intérêt légal est applicable de droit conformément à l'article 1153 du code civil à partir de la mise à disposition du jugement en ce qui concerne les dommages et intérêts,
- condamné la société STAR TERRE aux entiers dépens.
La société STAR TERRE a interjeté appel selon déclaration déposée par voie électronique le 19 janvier 2018.
Par jugement du 25 septembre 2019, le tribunal de commerce de Créteil a ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l'égard de la société STAR TERRE et désigné Maître [R] en qualité de liquidateur.
Par dernières conclusions notifiées par RPVA le 28 octobre 2019, Maître [R], en sa qualité de mandataire liquidateur de la société STAR TERRE, demande à la cour de:
- in'rmer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes le l4 décembre 2017 en ce qu'il a :
- dit le licenciement de M. [B] abusif,
- condamné la société STAR TERRE à payer les sommes suivantes :
* 3 315 euros à titre de rappel d'indemnité de congés payés pour les années 2010 à 2014 ;
* 15 911,25 euros à titre de rappel de prime annuelle de 2010 à 2014 ;
* l2 000 euros à titre de dommages intérêts pour licenciement abusif ;
* 1 200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
- ordonné à la société STAR TERRE de fournir à M. [B] des bulletins de paie au mois le mois conforme au jugement à intervenir et une attestation Pôle emploi recti'ée conforme,
- debouté la société STAR TERRE de toutes ses demandes et prétentions,
- condamné la société STAR TERRE aux entiers dépens et éventuels frais d'exécution en application de l'article 699 du code de procédure civile,
Statuant à nouveau:
- débouter M. [B] de l'ensemble de ses demandes,
- Subsidiairement, juger irrecevables les demandes antérieures au 23 février 2012
A titre reconventionnel,
- dire et juger la liquidation judiciaire de la société STAR TERRE représentée par Me. [R] bien fondée en sa demande de remboursement d'avance de prime.
- condamner M. [B] à payer à la liquidation judiciaire de la société STAR TERRE la somme de 1 149,29 euros,
- confirmer le jugement entrepris pour le surplus.
- déclarer M. [B] irrecevable et en tout état de cause infondé en ses demandes incidentes faites en cause d'appel,
En tout état de cause,
- condamner M. [B] à payer à la liquidation judiciaire de société STAR TERRE représentée par Me. [R] la somme de 2 000 euros en vertu de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.
Il soutient que:
- la demande de M. [B] au titre de la nullité du forfait jour est irrecevable faute pour ce dernier d'avoir sollicité la réformation du jugement sur ce point,
- il n'existe pas de convention de forfait jours,
- la demande de M. [B] au titre des circonstances de la rupture est irrecevable faute pour ce dernier d'avoir sollicité la réformation du jugement sur ce point,
- la rupture du contrat de travail est intervenue sans brutalité,
- les indemnités de congés payés ne sont pas dues,
- la prime dont M. [B] demande le paiement n'est pas due au titre de la convention collective applicable à savoir celle du commerce de gros,
- les griefs invoqués dans la lettre de licenciement sont établis.
Par dernières conclusions notifiées par RPVA le 28 novembre 2019, M. [B] demande à la cour de:
- recevoir la demande d'intervention forcée à l'égard de l'AGS - CGEA [Localité 4],
- confirmer le jugement du Conseil de prud'hommes en ce qu'il a :
- fixé son salaire de référence à la somme de 4 045,23 euros bruts ;
- dit son licenciement prononcé le 22 octobre 2014 abusif ;
- condamné la société SAS STAR TERRE à lui payer les sommes suivantes :
* 3 315,07 euros à titre de rappel d'indemnité de congés payés pour les années 2010 à 2014 ;
* 15 911,25 euros à titre de rappel de prime annuelle de 2010 à 2014 ;
* 12 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif ;
* 1 200,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- ordonné à la société SAS STAR TERRE de lui fournir des bulletins de paie au mois le mois conforme au jugement à intervenir et une attestation Pôle emploi rectifiée conforme
- condamné la société SAS STAR TERRE aux entiers dépens;
- infirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Paris en ce qu'il l'a débouté du surplus de ses demandes,
Y faisant droit et statuant à nouveau :
- prononcer la nullité du forfait jour auquel il a été assujetti de manière illicite par la société STAR TERRE,
En conséquence,
- fixer au passif de la liquidation de la Société STAR TERRE sa créance super privilégiée à hauteur de 24 270 euros, soit six mois de salaire, à titre de dommages et intérêts, en raison de la mise en danger de sa santé et l'absence de règlement des heures supplémentaires travaillées sur le fondement des articles L. 4121-l et suivants du code du travail ainsi que des exigences constitutionnelles du droit à la santé et au repos, des articles 151 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne se référant à l'article 21 la Charte sociale européenne et à la Charte communautaire des droits sociaux fondamentaux des travailleurs, L. 3121-45 du code du travail, dans sa rédaction applicable au litige, interprété à la lumière de l'article 17, paragraphes 1 et 4 de la Directive 1993-104 CE du Conseil du 23 novembre 1993, des articles 17, paragraphe 1, et 19 de la Directive 2003-88 CE du Parlement européen et du Conseil du 30 novembre 2003 et de l'article 31 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne des articles susvisés des Directives de l'Union européenne,
- condamner la Société STAR TERRE à réparer l'intégralité du préjudice qu'il a subi résultant de la perte injustifiée de son emploi et fixer au passif de la liquidation de la Société STAR TERRE sa créance superprivilégiée à hauteur de 48 542,76 euros, soit 12 mois de salaire à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif, sur le fondement de l'article L. 1235-5 du code du travail dans sa version applicable à la cause ;
- fixer au passif de la liquidation de la Société STAR TERRE sa créance superprivilégiée à hauteur de 16 180 euros, soit 4 mois de salaire, à titre de dommages et intéréts au regard des conditions vexatoires de la rupture, sur le fondement de l'article 1231-1 du code civil ;
- condamner la Société STAR TERRE ainsi que son liquidateur judiciaire à lui fournir sous astreinte de 300 euros par jour de retard et par document à compter du 8 ème jour suivant la notification du jugement à intervenir, la cour se réservant le contentieux de la liquidation de l'astreinte :
- des bulletins de paie au moins le mois conformes au jugement à intervenir,
- une attestation Pôle Emploi recti'ée conforme
- condamner la Société STAR TERRE ainsi que son liquidateur judiciaire à régulariser sa situation auprès des organismes sociaux sous astreinte de 300 euros par jour de retard et par document, la Cour se réservant la liquidation de l'astreinte ;
- assortir les condamnations prononcées à son bénéfice des intérêts au taux légal ainsi que de la capitalisation des intérêts sur les intérêts échus conformément aux dispositions de l'article 1343-2 du code civil ;
- fixer au passif de la liquidation de la Société STAR TERRE sa créance superprivilégiée à hauteur de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens et éventuels frais d'exécution ;
- débouter la Société STAR TERRE de l'ensemble de ses demandes ;
- dire l'arrêt opposable dans toutes ses dispositions à l'AGS - CGEA [Localité 4] ainsi qu'à Maître [M] [R], en qualité liquidateur de la SAS STAR TERRE,
- dire que l'AGS-CGEA [Localité 4] doit garantir l'ensemble de ses créances.
Il soutient que:
- il était soumis à un forfait jour illicite,
- ses demandes en rappel de salaire ne sont pas prescrites compte tenu des dispositions transitoires de la loi du 14 juin 2013,
- la société STAR TERRE ne tenait pas compte de ses primes sur objectifs pour le calcul de l'indemnité de congés payés qui lui était versée,
- la société STAR TERRE ne lui a pas versé la prime annuelle conventionnelle,
- le licenciement n'est fondé sur aucun grief réel et sérieux.
Par dernières conclusions notifiées par RPVA le 14 janvier 2020, l'AGS demande à la cour de :
- in'rmer le jugement en ce qu'il a condamné la société STAR TERRE à diverses créances au béné'ce de Monsieur [B],
- con'rmer le jugement en ce qu'il a débouté Monsieur [B] du surplus de ses demandes,
- en conséquence, débouter Monsieur [B] de l'intégralité de ses demandes,
- condamner Monsieur [B] aux entiers dépens,
- dire et juger que s'il y a lieu à 'xation, celle-ci ne pourra intervenir que dans les limites de la garantie légale,
- dire et juger qu'en tout état de cause, la garantie prévue aux dispositions de l'article L. 3253-6 du code du travail ne peut concerner que les seules sommes dues en exécution du contrat de travail au sens dudit article L.3253- 8 du code du travail, les astreintes ou article 700 du code de procédure civile étant ainsi exclus de la garantie,
- dire et juger que sa garantie est plafonnée, toutes créances avancées pour le compte du salarié, a un des trois plafonds dé'nis à l'article D.3253-5 du code du travail,
- statuer ce que de droit quant aux frais d'instance (dont les dépens) sans qu'ils puissent être mis à sa charge.
Elle s'associe aux explications du liquidateur et rappelle les conditions de sa garantie.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 22 janvier 2020.
L'affaire était fixée à l'audience du 24 mars 2020. Les parties ayant refusé la procédure sans audience, elle a fait l'objet d'un renvoi à l'audience du 2 février 2022.
MOTIFS
Sur l'irrecevabilité des demandes incidentes de M. [B]
En application de l'article 914 du code de procédure civile, les parties soumettent au conseiller de la mise en état, qui est seul compétent depuis sa désignation et jusqu'à la clôture de l'instruction, leurs conclusions, spécialement adressées à ce magistrat, tendant à l'irrecevabilité de l'appel.
En l'espèce, Maître [R] invoque l'irrecevabilité des demandes de M. [B] au titre de son appel incident en ce qui concerne le forfait jours et le caractère vexatoire de la rupture faute d'avoir sollicité la réformation du jugement sur ces points.
Il n'a pas saisi le conseiller de la mise en état d'une telle demande in limine litis.
Il est irrecevable à former cette demande devant la cour.
Sur la nullité du forfait jours
La conclusion d'une convention de forfait requiert l'accord du salarié. Une telle convention doit être établie par écrit.
En l'espèce, M. [B] indique qu'à partir de 2010 et sans avoir recueilli son accord, la société STAR TERRE lui a appliqué une convention de forfait en jours.
Maître [R] soutient que la mention « forfait jour » sur les bulletins de paie est impropre et qu'il avait été décidé que M. [B] n'aurait pas à rendre compte de son temps de travail.
La mention «forfait jour » sur les bulletins de salaire correspond bien à l'application d'un tel forfait à M. [B]. A compter de 2010, c'est la seule mention portée sur les bulletins de paie et il n'est plus fait mention d'heures supplémentaires.
En l'absence d'écrit, la convention est nulle.
M. [B] sollicite la somme de 24 270 euros de dommages et intérêts, soit six mois de salaire en conséquence de cette nullité faisant valoir qu'il a été privé des garanties afférentes à la protection de sa santé et privé du paiement des heures supplémentaires travaillées.
En ce qui concerne les heures supplémentaires, M. [B] peut en demander le paiement compte tenu de la nullité de la convention. Il lui appartient cependant de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées.
En l'espèce, M. [B] n'apporte aucun élément quant aux heures supplémentaires qu'il soutient avoir accomplies. Il n'est pas même établi qu'il aurait exécuté des heures supplémentaires.
En conséquence, il ne justifie d'aucun préjudice résultant d'heures supplémentaires non rémunérées.
En outre, dès lors qu'il n'est pas établi que M. [B] aurait travaillé au-delà des durées maximales de travail, il ne justifie pas d'une éventuelle mise en danger de sa santé et consécutivement d'un préjudice en résultant.
Il sera en conséquence débouté de sa demande de dommages et intérêts.
Sur les indemnités de congés payés
L'employeur sollicite l'infirmation du jugement en ce qu'il a alloué à M. [B] la somme de 3 315 euros à titre de rappel d'indemnité de congés payés.
Il fait valoir que les congés payés étaient bien calculés en tenant compte des primes de M. [B].
Il ressort des pièces produites aux débats que les indemnités de congés payés étaient calculées en tenant compte des primes de M. [B] et que celui-ci a été rempli de ses droits.
Le jugement sera infirmé sur ce point et M. [B] débouté de sa demande à ce titre.
Sur les rappels de prime conventionnelle
L'employeur demande l'infirmation du jugement en ce qu'il a alloué à M. [B] une prime conventionnelle en application de la convention collective nationale du commerce de détail et de gros à prédominance alimentaire.
L'employeur fait valoir que la convention collective applicable est la convention du commerce de gros du 23 juin 1970 ainsi que l'indique le contrat de travail.
Si les bulletins de paie font référence à la convention collective nationale du commerce de détail et de gros à prédominance alimentaire, le contrat de travail stipule la convention du commerce de gros alimentaire.
Toutefois cette mention sur les bulletins de paie est sans conséquence.
En outre, la convention collective nationale du commerce de détail et de gros à prédominance alimentaire indique expressément qu'elle ne s'applique pas aux entreprises relevant de la convention collective nationale de commerces de gros.
Compte tenu de l'activité de la société STAR TERRE qui intervient sur le MIN de [Localité 5], elle relève de la convention des commerces de gros.
M. [B] ne peut donc prétendre à la prime conventionnelle revendiquée.
Le jugement sera infirmé sur ce point et M. [B] sera débouté de sa demande à ce titre.
Sur la demande de remboursement d'avances sur prime
Le mandataire liquidateur soutient que les primes au titre de l'année 2014 ont fait l'objet d'avances mensuelles et que M. [B] a en conséquence perçu plus que ce à quoi il pouvait prétendre.
Le récapitulatif qu'il produit est insuffisant à démontrer l'existence d'un trop perçu alors notamment que les droits de M. [B] au titre de ses primes ne sont pas justifiés.
Le jugement entrepris sera confirmé sur ce point.
Sur le licenciement
Selon l'article L.1235-1 du code du travail, en cas de litige relatif au licenciement, le juge, à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties, au besoin après toutes mesures d'instruction qu'il estime utiles; si un doute subsiste, il profite au salarié.
En l'espèce, la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige, est ainsi rédigée :
' Nous avons constaté depuis plusieurs mois une nette dégradation de votre comportement et de l'exécution de vos obligations contractuelles, dégradation qui s'est accentuée depuis septembre 2014.
Concernant l'exécution de vos fonctions, nos griefs sont les suivants :
- Négligence :
Vous êtes responsable de la maintenance des équipements et du matériel du dépôt. Or j'ai constaté que le chariot élévateur était accidenté à l'aile avant gauche et pouvait provoquer des blessures ; vous n'aviez pas fait de constat, ni appelé un réparateur. Vous n'aviez pas informé votre direction.
A la suite de ce constat, j'ai procédé à une vérification du matériel et j'ai dû constater que d'autres matériels étaient abîmés ou cassés : couvercle des poubelles, mat du tire palette, ballets. Je ne peux tolérer que les salariés travaillent avec du matériel en mauvais état.
- Non exécution des tâches qui vous sont demandées :
Vous n'avez pas fait de topo des ventes hebdomadaires depuis votre retour de congé (25 août 2014) soit 7 semaines, malgré les instructions expresses en ce sens dont vous avez été destinataire comme l'ensemble du personnel commercial en juillet 2014, suite à une réunion exceptionnelle.
- Désorganisation :
en qualité de responsable du dépôt, vous devez faire en sorte que l'étiquetage soit conforme et que les décisions de l'agréeur, M. [E] soient suivies d'effet. Or ce n'est pas le cas: les produits non conformes ou refusés ne sont pas suivis conformément aux règles de la DGCCRF. Les produits ne sont pas mis en code 90 le temps de leur remise aux normes et/ou entreposés dans la partie dédiée 'REFUS MARCHANDISE'.
Ceci fait que nous avons eu des pénalités et des avertissements, le dernier en date étant du 2 septembre 2014.
Concernant la dégradation de votre comportement, nos griefs sont les suivants:
- Désinvolture dans votre rôle de cadre :
M. [Y] [S] vous avait informé de son absence et de la mienne du lundi 29 septembre au mercredi 1er octobre 2014 inclus ; au regard de vos fonctions et de votre statut de cadre, responsable de la discipline et de la sécurité des équipes en notre absence, vous aviez l'obligation d'anticiper cette absence.
Or vous avez quitté les locaux le mercredi 1er octobre, sans attendre le dernier transporteur Fargier et vous avez laissé la société entre les mains de M. [O] [U] en cours de préavis de licenciement, son dernier jour étant le 09 octobre 2014.
Cette action est inacceptable pour une personne ayant votre poste et vos responsabilités. Il vous appartenait d'organiser si nécessaire le transport des marchandises de notre dépôt vers les camions du transporteur dans [Localité 5] avant 11h30 afin d'éviter de laisser un salarié seul dans les locaux.
- Propos provocateurs et déplacés, comportement inadapté :
Suite à votre départ des locaux le 1er octobre 2014 laissant M. [U] [O] seul, je vous ai écrit un SMS vous demandant qui était le responsable dépôt chez Star Terre ; vous m'avez répondu : 'c'est plus un responsable dépôt que vous voulez c'est un esclave.'
Outre que cette réponse démontre que vous refusez d'assumer vos responsabilités, je ne peux tolérer cette marque d'insubordination. Par ces propos provocateurs, vous mettez en cause mon intégrité et ma gestion d'entreprise.
Ce comportement s'est manifesté également lors de critiques faites en présence de clients ou collaborateurs. Ainsi le 05 septembre 2014, vous avez demandé à Mme [N] [X] si vous deviez faire le dossier FORCO, ce qu'elle a confirmé. Vous lui avez répondu en présence de plusieurs collaborateurs en ces termes : 'Si je dois laver les voitures, il faut me le dire'.
Nous avions déjà attiré votre attention sur la nécessité de modifier votre comportement à l'égard des collaborateurs et de votre hiérarchie ; vous avez à plusieurs reprises critiqué les méthodes de travail de la société auprès des collaborateurs, critiqué le travail de vos collègues ou encore adopté un langage inadapté à l'égard de vos collaborateurs (agression verbale de M. [F] [I]) ou de votre direction ('Vous pouvez me mettre en tête de liste pour le licenciement' le 10 juillet 2014).
Nous ne pouvons que constater que vous ne vous êtes pas remis en cause et avez persisté dans un comportement inadapté.
Lors de notre entretien du 10 octobre 2014, vous avez maintenu vos propos du 1er octobre et refusé de vous en excuser.
Vous avez refusé de remettre en cause votre organisation du travail ; vous estimez que vous ne sauriez faire mieux ni différemment.
En conséquence, nous vous notifions par la présente votre licenciement.'
L'employeur produit de nombreuses attestations, portant sur la bonne ambiance qui régnait au sein de la société mais ne produit pas d'éléments de preuve de nature à établir la réalité des griefs invoqués dans la lettre de licenciement. Aucune pièce de nature à démontrer la négligence de M. [B] dans la tenue de l'entrepôt n'est ainsi communiquée. La non exécution de certaines tâches n'est pas établie. Il n'est pas démontré que les amendes infligées pour des non-conformité d'étiquetage soient imputables à M. [B]. En ce qui concerne les propos provocateurs, Mme [X], qui en atteste, est la soeur de Mme [A], présidente de la société de sorte que cette attestation n'est pas exempte de partialité.
Les griefs invoqués dans la lettre de licenciement ne sont pas établis.
Le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a jugé que le licenciement était dénué de cause réelle et sérieuse.
La société comportait moins de onze salariés.
Compte tenu notamment de l'effectif de l'entreprise, des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération versée à M. [B], de son ancienneté, de sa capacité à trouver un nouvel emploi eu égard à sa formation et à son expérience professionnelle et des conséquences du licenciement à son égard, tels qu'ils résultent des pièces et des explications fournies, il y a lieu de lui allouer une somme de 15 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Le jugement sera infirmé sur ce point.
Sur les circonstances de la rupture
M. [B] sollicite la somme de 16 180 euros en réparation des circonstances vexatoires de la rupture. Toutefois, il ne caractèrise pas de telles circonstances.
Il sera débouté de sa demande à ce titre.
Sur les frais de procédure
Les dépens seront fixés au passif de la liquidation de la société STAR TERRE.
Il sera également fixé la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile à hauteur d'appel.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Infirme le jugement en ce qu'il a condamné la société STAR TERRE à payer à M. [W] [B] les sommes de:
* 3 315,07 euros à titre de rappel d'indemnité de congés payés,
* 15 911,25 euros à titre de rappel de prime conventionnelle
* 12 000 euros à titre d'indemnité de licenciement
Statuant à nouveau et y ajoutant
Fixe au passif de la liquidation de la société STAR TERRE les sommes de :
* 15 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
* 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile
Rappelle que les créances de nature salariale portent intérêts au taux légal à compter de la réception par l'employeur de la convocation devant le bureau de conciliation et que les créances de nature indemnitaire portent intérêts au taux légal à compter de la décision jusqu'à l'ouverture de la procédure collective qui arrête le cours des intérêts et que la capitalisation est de droit conformément à l'article 1343-2 du code civil,
Déboute M. [W] [B] de ses demandes de rappel d'indemnité de congés payés, de rappel de prime conventionnelle et de dommages et intérêts au titre de la mise en danger,
Fixe les dépens de première instance et d'appel au passif de liquidation de la société STAR TERRE.
LA GREFFIERE LE PRESIDENT