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19/04/2022 | FRANCE | N°19/06210

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 13, 19 avril 2022, 19/06210


Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 13



ARRÊT DU 19 AVRIL 2022



(n° , 11 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/06210 - N° Portalis 35L7-V-B7D-B7SFX



Décision déférée à la Cour : Jugement du 21 janvier 2019 - Tribunal de Grande Instance d'EVRY - RG n° 14/02694





APPELANT



Monsieur [J] [B]

Né le [Date naissance 5] 1960 à [L

ocalité 8]

[Adresse 4]

[Localité 3]



Représenté par Me Nadia BOUZIDI-FABRE, avocat au barreau de PARIS, toque : B0515

Assisté de Me Stéphanie THIERRY LEUFROY de la SELARL THIERRY-...

Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 13

ARRÊT DU 19 AVRIL 2022

(n° , 11 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/06210 - N° Portalis 35L7-V-B7D-B7SFX

Décision déférée à la Cour : Jugement du 21 janvier 2019 - Tribunal de Grande Instance d'EVRY - RG n° 14/02694

APPELANT

Monsieur [J] [B]

Né le [Date naissance 5] 1960 à [Localité 8]

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représenté par Me Nadia BOUZIDI-FABRE, avocat au barreau de PARIS, toque : B0515

Assisté de Me Stéphanie THIERRY LEUFROY de la SELARL THIERRY-LEUFROY, avocat au barreau de MEAUX

INTIMÉS

L'ASSOCIATION NATIONALE DES MOUSQUETAIRES

[Adresse 2]

[Localité 6]

Défaillant (signification à personne morale)

L'UNION NATIONALE DES MOUSQUETAIRES

[Adresse 2]

[Localité 6]

Défaillant (signification à personne morale)

UNION DES MOUSQUETAIRES

[Adresse 9]

[Adresse 1]

[Localité 7]

Représentée par Me Marie-Laure BONALDI, avocat au barreau de PARIS, toque : B0936

Assistée de Me Stéphanie MASKER de la SELAFA JEAN CLAUDE COULON ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : K0002

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 905 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 16 février 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Marie-Françoise d'ARDAILHON MIRAMON, Présidente de chambre, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Nicole COCHET, Première présidente de chambre

Mme Marie-Françoise d'ARDAILHON MIRAMON, Présidente de chambre

Mme Estelle MOREAU, Conseillère

Greffière lors des débats : Mme Sarah-Lisa GILBERT

ARRÊT :

- Réputé contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Nicole COCHET, Première présidente de chambre et par Séphora LOUIS-FERDINAND, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

* * * * *

Le groupement des Mousquetaires connu sous le nom d'Intermarché, créé en 1969, est un regroupement de commerçants indépendants, dont les structures d'exercice sont des filiales directes ou indirectes de la Sa ITM Entreprises, société franchiseur.

L'Union des Mousquetaires (UDM) est une association qui regroupe principalement des membres actifs, personnes physiques exerçant leur activité professionnelle sous une enseigne du groupement et des membres participants, personnes morales membres du groupement situées en amont des points de vente, dont l'objet premier est 'd'assurer la liaison entre tous les sociétaires, de promouvoir ou de maintenir l'esprit de groupe, et afin d'y parvenir, d'engager toutes actions, comme de participer à toute opération utile ou nécessaire à cet effet'.

La société civile à capital variable Société Civile des Mousquetaires (SCM), créée en 1986 a pour 'objet essentiel de détenir un portefeuille d'actions constitué par les actions de la société ITM entreprises et, au sein du groupement animé et conduit par la société ITM entreprises, de définir les objectifs à long terme dudit groupement et de réfléchir à son avenir, ainsi que de faire à cet égard toutes propositions. Elle n'a aucune activité commerciale'.

M. [J] [B] est devenu adhérent du groupement des Mousquetaires en 1994 et associé de la SCM en 1998 et concomitamment membre de l'UDM. Il a été exclu de la SCM par décision de l'assemblée générale du 15 mai 2007 au motif qu'il n'avait plus d'activité dans le groupement au titre d'un point de vente fonctionnant sous une de ses enseignes et a cessé d'être membre de l'UDM.

Une première contestation a surgi sur la valorisation des 20 parts sociales qu'il détenait dans la SCM et qui devaient être rachetées par elle.

M. [K] [N], expert-comptable désigné par le tribunal de grande instance de Paris aux fin d'évaluer les parts sociales de la SCM, a déposé son rapport le 31 mars 2008.

Entendant réclamer ses droits résultant des parts sociales détenues par l'UDM dans le capital de la SCM, M. [B] a, par acte du 20 mars 2014, fait assigner, devant le tribunal de grande instance d'Evry, l'UDM dont le siège est dans l'Essonne en paiement de la somme de 421 835,95 euros en conséquence de son éviction de ladite association.

Puis, par acte du 11 mai 2015, il l'a fait assigner, devant le même tribunal, aux fins de voir prononcer sa dissolution sur le fondement des articles 1er et suivants de la loi du 1er juillet 1901, 1108 et 1234 du code civil.

Par actes du 18 mars 2015, il a fait assigner, devant le tribunal de grande instance de Paris, l'association Union Nationale des Mousquetaires (UNM) et l'association Nationale des Mousquetaires (ANM) dont les sièges sont à Paris, aux fin de voir prononcer leur dissolution.

Par ordonnance du 15 décembre 2015, dans le cadre du dossier relatif aux assignations du 18 mars 2015, le juge de la mise en état du tribunal de grande instance de Paris a :

- reçu l'intervention volontaire de l'UDM,

- rejeté l'exception d'incompétence du tribunal soulevée par l'UDM,

- constaté l'existence d'une connexité avec l'instance engagée par M. [B] devant le tribunal de grande instance d'Evry contre l'UDM le 20 mars 2014,

- dessaisi le tribunal de grande instance de Paris du litige au profit du tribunal de grande instance

d'Evry.

Par ordonnances du 16 juin 2016, le juge de la mise en état a ordonné la jonction des trois instances pendantes devant le tribunal de grande instance d'Evry et débouté M. [B] de ses demandes de communication de pièces.

Par jugement du 21 janvier 2019, le tribunal de grande instance d'Evry a :

- déclaré prescrites l'ensemble des demandes formulées par M. [B] à l'encontre de l'UDM,

- déclaré irrecevables les demandes de M. [B] d'ordonner la dissolution de l'UNM et de l'ANM,

- débouté l' UDM de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive à l'encontre de M. [B],

- condamné M. [B] à verser à l' UDM la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté M. [B] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile à l'encontre de l' UDM,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire du jugement,

- condamné M. [B] au paiement des dépens.

Par déclaration du 21 mars 2019, M. [B] a interjeté appel de cette décision.

Dans ses dernières conclusions, notifiées et déposées le 20 juin 2019, M. [J] [B] demande à la cour de :

- le recevoir en son appel et l'y déclarant bien fondé,

- infirmer le jugement en toutes ses dispositions,

statuant à nouveau,

- condamner l' UDM à lui verser la somme de 421 835,95 euros en conséquence de son éviction de ladite association,

- annuler l'acquisition par l' UDM auprès des fondateurs des actions d'ITM entreprises,

- ordonner la dissolution des associations UDM, UNM et ANM,

- désigner un liquidateur extérieur à toute personne appartenant auxdites associations,

- ordonner auxdites associations qu'elles restituent les apports à ses membres,

- ordonner la dévolution du patrimoine à une ou plusieurs associations désignées par le liquidateur,

- condamner l' UDM à lui verser la somme de 12 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- la condamner en tous les dépens dont distraction à Me Nadia Bouzidi-Fabre, avocat aux offres de droit, conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions, notifiées et déposées le 19 septembre 2019, l'UDM demande à la cour de:

- déclarer M. [B] irrecevable en ses demandes,

- confirmer le jugement entrepris sauf en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive,

- condamner M. [B] à lui verser la somme de 8 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,

à titre subsidiaire,

- débouter M. [B] de sa demande en requalification de l'UDM en société,

- débouter M. [B] de sa demande en paiement, conséquence de son éviction,

- débouter M. [B] de sa demande en annulation de l'acquisition des actions de la société ITM entreprises,

- débouter M. [B] de sa demande en dissolution de l'UDM,

- plus généralement, débouter M. [B] de l'intégralité de ses demandes,

- condamner M. [B] à lui verser la somme de 8 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,

en tout état de cause,

- condamner M. [B] à lui verser la somme de 12 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner M. [B] aux entiers dépens qui seront recouvrés par Me Bonaldi-Nut, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

L'UNM et l'ANM à qui la déclaration d'appel et les conclusions de l'appelant ont été signifiées par actes du 27 juin 2019 remis à personnes morales, n'ont pas constitué avocat.

SUR CE,

Il n'y a pas lieu de statuer sur les demandes tendant à voir 'constater' présentes dans le dispositif des conclusions des parties, lesquelles ne constituent pas des prétentions au sens des articles 4, 53 et 954 du code de procédure civile mais des moyens de droit ou de fait qui pour être examinés par la cour doivent être invoqués au soutien d'une prétention dans la partie 'discussion' des conclusions.

Sur l'évolution de l'UNM en UDM

M. [B] soutient que les fondateurs de l'UDM ont entretenu volontairement une confusion entre les différentes associations créées, dans l'objectif de contourner les principes de droit pour servir les intérêts personnels de certains associés et que l'UDM ne justifie pas qu'elle est la nouvelle dénomination de l'UNM ni la continuité de l'association Ex créée en 1970.

L'UDM répond que depuis le 25 juin 1996, l'UNM est devenue l'UDM de sorte que dans son assignation du 18 mars 2015, M. [B] aurait dû viser l'association sous sa dénomination UDM.

Il ressort des pièces produites aux débats que l'association Ex, déclarée le 10 février 1970, devenue association Intermarché puis association nationale des Intermarchés, a été transformée le 12 février 1981 en Association nationale des Mousquetaires puis en Union nationale des Mousquetaires (UNM) selon procès-verbal d'assemblée générale extraordinaire du 25 novembre 1982, ainsi qu'il ressort du récépissé de la préfecture de Paris du 20 décembre 1982 et des statuts de l'association en date du 19 décembre 1984.

Une nouvelle association reprenant le nom d'Association nationale des Mousquetaires (ANM) a, par ailleurs, été déclarée le 21 décembre 1982.

En tout état de cause, l'UNM a pris la dénomination d'Union des mousquetaires (UDM) le 25 juin 1996 ainsi qu'il ressort de la publication faite au journal officiel le 21 juin 1997, association dont le siège social est depuis le 17 novembre 1998 à Bondufle.

Il s'en déduit que l'UNM est devenue l'UDM.

Sur les fins de non-recevoir

Sur la prescription des demandes à l'encontre de l'UDM :

Le tribunal a déclaré prescrites l'ensemble des demandes formées par M. [B] à l'encontre de l'UDM car :

- ses demandes correspondent à des actions personnelles qui se prescrivent par cinq ans à compter du jour où il a eu connaissance des faits permettant de les exercer, conformément aux dispositions de l'article 2224 du code civil,

- au regard des pièces sur lesquelles M. [B] fonde ses demandes dont le rapport d'expertise d'évaluation des parts sociales déposé le 31 mars 2008 et la lettre de l'UDM du 28 avril 2008, il a connu les faits lui permettant d'exercer son action à cette dernière date et un délai de plus de cinq ans s'est écoulé entre cette date et l'assignation de l'UDM le 20 mars 2014.

M. [B] soutient que :

- les premiers juges ont commis une mauvaise appréciation des faits car il fonde ses demandes chiffrées sur le rapport d'expertise d'évaluation des parts sociales déposé le 31 mars 2008, lequel a fait l'objet de voies de recours par la SCM qui soutenait qu'il était entaché d'erreur grossière et la Cour de cassation s'étant prononcée par un arrêt du 4 décembre 2012, il ne pouvait pas intenter d'action avant cette date puisqu'il existait un doute quant à l'annulation ou non du rapport d'expertise judiciaire,

- dès lors, le délai de la prescription quinquennale ne pouvait courir qu'à compter du 4 décembre 2012 et ses actions engagées en 2014 et 2015 ne sont pas prescrites.

L'UDM répond que :

- M. [B] a diligenté à son encontre des actions personnelles,

- il n'est plus membre de l'association depuis 2007 et ses demandes sont fondées sur des informations et des documents publiés bien avant la perte de sa qualité de membre et dont il a eu connaissance bien avant cette date de sorte que ses actions initiées par actes de 2014 et 2015 sont prescrites,

- la date à laquelle il a connu les faits lui permettant d'exercer son action est celle du 28 avril 2008, date où il a reçu une lettre de l'UDM lui apportant toutes les réponses à ses questions,

- il ne démontre nullement en quoi il était dans l'incapacité d'engager une instance relative à la dissolution de l'UDM ou à la requalification de cette association en société, avant l'arrêt de la Cour de cassation du 4 décembre 2012 , alors que toutes les pièces fondant sa demande sont bien antérieures.

L'article 2224 du code civil dispose que :

Les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

M. [B] sollicite, d'une part la requalification de l'association UDM en société afin de lui permettre d'obtenir l'attribution d'une partie de son capital soit la somme de 421 835 euros, d'autre part, la dissolution de ladite association et enfin, l'annulation de l'acquisition par l'UDM des actions de la société 'ITM Entreprises.

Sa demande en paiement de la somme de 421 835 euros correspond au pourcentage de parts sociales de l'UDM qu'il estime détenir.

Il fait valoir que l'UDM détient 39 % du capital de la SCM et qu'en sa qualité d'associé de la SCM à hauteur de 20 parts et d'adhérent de l'UDM, il est en droit de revendiquer après requalification de l'association en société, 0,0067 % des parts détenues par l'UDM dans la SCM soit 12,77 parts telles qu'évaluées par l'expert désigné par le président du tribunal de grande instance de Paris, en application des dispositions de l'article 1843-3 du code civil.

La cour d'appel de Paris a estimé dans son arrêt du 6 septembre 2011 que ce rapport n'était entaché d'aucune erreur grossière et le pourvoi formé par la SCM a été rejeté par arrêt de la Cour de cassation du 4 décembre 2012.

M. [B] n'a pu évaluer le montant de la somme qu'il estime devoir lui revenir qu'à compter du jour où l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 6 septembre 2011 est passé en force de chose jugée de sorte que le point de départ de son action en requalification de l'association en société et en paiement des parts qu'il estime lui appartenir doit être fixé à cette date et que cette action intentée par acte du 20 mars 2014 n'est pas prescrite, en infirmation du jugement.

En revanche, s'agissant de l'action en dissolution de l'UNM devenue UDM initiée le 18 mars 2015 et de l'UDM intentée le 11 mai 2015, outre la demande d'annulation de l'acquisition des actions d'ITM Entreprises, l'association soutient à bon droit que M.[B] n'est plus membre de l'association depuis 2007 et qu'il fonde son argumentaire sur les statuts de la SCM en date des 1er octobre 1986, 11 juin 1991 et 13 juin 2006, l'acte d'acquisition des actions d'ITM Entreprises par l'UDM et leur apport à la SCM en 1986, les formalités réalisées par l'UDM de 1970 à 1998 et la constitution de l'UDM en 1970, outre une lettre de l'UDM en date du 28 avril 2008 aux termes de laquelle l'UDM répond aux demandes de M. [B] de sorte qu'à compter de cette dernière date, il avait connaissance des faits lui permettant d'agir et que ces demandes sont prescrites, en confirmation du jugement sur ce point.

Sur le défaut d'intérêt à agir de M. [B] en requalification de l'UDM en société :

L'UDM fait valoir que cette demande est irrecevable faute pour M. [B] d'avoir un intérêt légitime, direct et personnel à agir au motif qu'il n'est plus membre de l'association depuis douze ans, sauf à considérer que l'appât du gain constitue un tel intérêt.

M. [B] ne répond pas à ce moyen mais il est évident que réclamant le paiement d'une partie des actions de la SCM détenues par l'UDM dont il estime être propriétaire du fait de sa qualité d'ancien membre de l'UDM par l'effet de sa requalification en société, il justifie d'un intérêt légitime, direct et personnel à agir et son action est également recevable à ce titre.

Sur le défaut d'intérêt à agir de M. [B] en dissolution de l'ANM :

Le tribunal a déclaré, d'office, irrecevable la demande de M. [B] tendant à voir ordonner la dissolution de l'ANM en retenant que :

- M. [B] n'est plus membre de l'UDM depuis 2007,

- il ne justifie pas d'un préjudice personnellement subi en conséquence des faits qu'il allègue relatifs à l'ANM,

- il ne justifie pas d'un intérêt légitime, c'est à dire d'un intérêt personnel juridiquement protégé à solliciter la dissolution judiciaire de l'ANM.

M. [B] sollicite la dissolution de l'ANM en alléguant que :

- la dissolution par voie judiciaire peut intervenir à la requête de toute personne y ayant un intérêt légitime,

- il est bien fondé à solliciter la dissolution de cette association car il a été adhérent du groupement Intermarché en 1994, a été coopté et a accédé à la qualité d'associé de la SCM en 1997, a acquis 20 parts de cette société, puis, en sa qualité d'adhérent du groupement Intermarché, est devenu membre de l'association Union Nationale des Mousquetaires.

M. [B] qui concentre tous ses moyens sur le rôle tenu par l'UDM (qu'il confond dans son argumentation sur ce point avec l'UNM, alors qu'il soutient par ailleurs mais faussement qu'il s'agirait de deux associations distinctes alors que l'UNM est devenue UDM) ne revendique ni ne prouve son adhésion à l'ANM, nouvelle association déclarée le 21 décembre 1982 et ne justifie d'aucun intérêt légitime, direct et personnel à agir en dissolution de cette association. En conséquence, le jugement est confirmé en ce qu'il a déclaré irrecevable son action à l'encontre de l'ANM.

Sur le bien fondé de la demande de requalification de l'association UDM en société

M. [B] soutient que la transformation d'une association en société ne fait l'objet d'aucune disposition générale mais que le juge peut être appelé à requalifier une association en société et que l'UDM doit être requalifiée en société aux motifs que :

- elle prend, de fait, peu à peu le contrôle de la SCM et donc du groupement des Mousquetaires,

- dans la SCM, l'UDM, qui détient au moins 38,97 % du capital et l'essentiel du pouvoir, dispose de la faculté surprenante d'évincer les petits porteurs, ces derniers n'ayant pas même la possibilité de s'exprimer, ainsi qu'il ressort des dispositions de ses statuts relatives à l'exclusion des associés,

- elle n'assure plus la variabilité du capital car les parts des adhérents sortants sont de fait annulées alors qu'elle devrait en principe les acquérir, ce qui augmente automatiquement le pourcentage de ses parts dans le capital de la SCM et fait qu'elle reçoit indirectement des libéralités,

- ses moyens financiers résultent notamment des cotisations perçues, lesquelles, contrairement aux cotisations usuelles des associations, sont calculées sur le chiffre d'affaires des points de vente exploités par les adhérents membres de l'association, de sorte qu'elle perçoit une sorte de complément de rémunération de franchiseur,

- cette substitution implicite de l'UDM à la société ITM entreprises est confortée également par le fait que l'UDM remet à l'adhérent le contrat d'enseigne, à titre d'information précontractuelle, au nom du groupement des Mousquetaires et a donc un rôle opérationnel auprès des exploitants de plus en plus fort,

- son objet lucratif est prouvé, son patrimoine constitué ayant vocation à être réparti comme des bénéfices aux associés fondateurs et leur relation d'affectio societatis révélée,

- la transformation de l'UDM en société civile ou commerciale lui permet de revendiquer un droit à attribution sur une partie du capital de la SCM détenu par l'UDM, société de fait,

- il est fondé à réclamer sur les 19 048 parts de la société UDM, 12,77 parts évaluées chacune par l'expert à la somme de 33 029 euros, outre les intérêts contractuels calculés suivant les prescriptions établies au sein de la SCM en matière de rachat.

L'UDM soutient que :

- ni sa création ni la fixation de son objet social n'ont de lien avec la SCM,

- la SCM est une société civile à capital variable, de sorte que le nombre global des parts sociales composant son capital social évolue au fur et à mesure des entrées et des sorties des associés et si le nombre global de parts sociales diminue alors que celui de l'UDM reste identique, mathématiquement, son seuil de détention a augmenté,

- cet effet mécanique n'a pas donné de pouvoir majoritaire à l'UDM car il convient de rappeler que les votes en assemblée résultent du principe 1 homme = 1 voix,

- elle n'a aucun rôle commercial, financier, de direction ou de contrôle du groupement,

- il n'est pas interdit pour une association d'exercer une activité commerciale ou lucrative, la seule limite étant le partage des bénéfices réalisés entre ses membres et elle a démontré qu'elle n'opérait aucune distribution des bénéfices,

- aucune disposition n'interdit à une association déclarée d'être associée d'une société, dès lors qu'elle ne lui confère pas la qualité de commerçant et la SCM étant une société civile, celle-ci ne lui confère pas la qualité de commerçant,

- elle accompagne les postulants puis les adhérents tout au long de leur 'parcours Mousquetaire' mais ne réalise en son nom et pour son compte aucune opération qui relève de la compétence du franchiseur et n'engage jamais l'adhérent auprès du franchiseur,

- ayant régulièrement acquis les parts sociales de la SCM, elle ne dispose d'aucun bien à titre gratuit, et ce, encore moins au profit d'une autre personne,

- pour pouvoir requalifier judiciairement une association en société, il faut que les conditions d'apport, de partage des bénéfices et de support des pertes édictés par l'article 1832 du code civil soient démontrées ce qui n'est pas le cas en l'espèce puisque l'UDM n'a jamais procédé à un partage de bénéfice.

Selon la loi du 1er juillet 1901, en son article 1er, l'association est 'la convention par laquelle deux ou plusieurs personnes mettent en commun, d'une façon permanente, leurs connaissances ou leur activité dans un but autre que de partager des bénéfices'.

Le code civil, en son article 1832, dispose que 'la société est instituée par deux ou plusieurs personnes qui conviennent par un contrat d'affecter à une entreprise commune des biens ou leur industrie en vue de partager le bénéfice ou de profiter de l'économie qui pourra en résulter'.

En préambule de ses statuts mis à jour le 13 juin 2006, la SCM rappelait que les fondateurs du groupement des Mousquetaires, commerçants indépendants, désireux de conserver leur indépendance, ont senti la nécessité de la maîtrise de structures communes et ont créé, dans cet esprit, la société anonyme à capital variable, ITM entreprises mais que la suppression de la variabilité du capital dans les sociétés anonymes en 1981 les a conduit à créer la société civile à capital variable SCM pour grouper leurs participations dans le capital social d'ITM entreprises et ainsi poursuivre leurs objectifs.

Conformément aux statuts, le règlement intérieur de la SCM, désireuse de contrôler le capital de la société ITM Entreprises prévoit en son article 1er que seules des personnes physiques agréées par les associés de la SCM lorsqu'elles remplissent des conditions d'ancienneté et de professionnalisme peuvent devenir associées et en son article 2 que lorsqu'un associé cessera de remplir les conditions requises pour être agréé, il fera l'objet d'une proposition d'exclusion présentée par la gérance à l'assemblée générale extraordinaire des associés à moins qu'il ne décide de présenter lui-même sa démission.

L'article 8 prévoit enfin que :

'La volonté formelle des associés de la SCM est qu'à l'avenir ne puissent être associés de cette société que des personnes physiques.

Cette règle souffre cependant une exception, ainsi que cela est stipulé dans les statuts.

Il est en effet nécessaire qu'un organisme tiers, personne morale, soit associé, afin de pouvoir éventuellement acquérir des parts lorsque la nécessité s'en fait sentir, c'est-à-dire essentiellement lorsque des associés veulent ou doivent se retirer rapidement, c 'est la raison pour laquelle il a été prévu la présence de l 'Union des Mousquetaires, UDM, Association régie par la loi du 1er juillet 1901, régulièrement déclarée'.

Enfin, le règlement rappelait le souhait indiqué dans les statuts que chaque membre de la société soit titulaire du même nombre de parts (fixé par les fondateurs à 60) à l'exception de l'UDM afin qu' 'un homme égale une voix'.

Au vu des statuts de l'UDM après refonte du 17 novembre 1998, elle se compose principalement, de membres actifs, personnes physiques adhérentes du groupement et dirigeant un point de vente ou une société fonctionnant sous une enseigne du groupement, lesquelles doivent être agréées, de membres participants, sociétés membres du groupement situées en amont des point de vente et de membres adhérents, personnes morales exploitant un point de vente ou une activité sous enseigne reconnue par le groupement.

L'article 11 prévoit que sur simple décision du conseil d'administration d'une manière pratiquement automatique, sans aucune possibilité de recours devant l'assemblée générale, cesseront automatiquement de faire partie de l'association, les membres actifs qui auront cessé d'exercer des fonctions de direction au sein d'une entreprise dépendant du groupe ou qui n'exercent plus leur activité au sein du même groupement ou d'une société en faisant partie.

Elle a pour objet, de manière identique à ce qui était prévu aussi bien dans les statuts adoptés aux termes d'une assemblée générale mixte du 28 avril 1983- produits par M.[B] en pièce 5- que dans ceux mis à jour le 1er janvier 1986 :

- d'assurer la liaison entre tous les sociétaires,

- de promouvoir et de maintenir l'esprit de groupe et, afin d'y parvenir, d'engager toutes actions comme de participer à toutes opérations utiles ou nécessaires à cet effet, notamment en matière de communication publicitaire,

- de faire connaître, à l'intérieur de l'association comme à l'extérieur, les principes ayant présidé à la constitution du groupement des Mousquetaires, principes admis par tous les membres de l'Association et qui reposent essentiellement sur l'encouragement de l'initiative privée, la promotion de l'Entreprise de taille humaine et la primauté de l'Homme par rapport aux capitaux,

- de prendre toutes initiatives conformes à ses propres intérêts comme aux intérêts de ses membres pour promouvoir ces principes et en assurer l'extension et le développement, notamment en participant à toute création d'association ou autres organismes exerçant leur activité dans le cadre de "l'Economie sociale".

Les statuts prévoient, à cette fin, divers moyens d'action et notamment :

- participer à l'information intérieure du groupement en collaborant aux publications dudit

groupement et, au besoin, en organisant des réunions, des voyages d'études, des rencontres, des colloques, etc...

- participer au développement du groupement des Mousquetaires en apportant son concours éventuel, à divers modes de financement et de promotion.

- aider à la culture, aux loisirs, à la distraction, à la formation, des membres de l'association en organisant toutes activités sportives, toutes manifestations, toutes actions de formation, soit directement, soit indirectement.

- participer à la recherche en matière sociale, économique, énergétique et technique.

- participer à l'amélioration de la qualité des produits vendus par le groupement des Mousquetaires, notamment par l'octroi de labels de qualité.

- participer à la mise en place d'une aide à l'investissement et à la gestion de la trésorerie.

- participer à la mise en place d'une mutualisation des assurances de biens et de personnes.

- organiser toutes manifestations ou actions afin d'aider à développer l'esprit de solidarité

entre ses membres.

M. [B] soutient que la finalité de l'UDM est de contourner certains principes légaux et n'est que 'l'émanation d'un contrat commercial et financier' mis en place pour servir les intérêts de la société ITM Entreprises ou de certains de ses associés à savoir acquérir l'ensemble des actions de ladite société pour lui permettre de contrôler les quorums du groupement et de minorer la valorisation de la part sociale de la SCM alors que l'achat par une société de ses propres actions est illicite ou très conditionné et que l'acquisition s'est faite par un emprunt remboursé par les cotisations prélevées sur les points de vente et indexées sur le chiffre d'affaires des magasins à l'enseigne du groupement, ce qui est contraire à son objet social.

Cependant, il ne justifie pas que la souscription d'un emprunt aux fins d'acquérir des parts sociales de la SCM soit contraire à son objet associatif ni que cette acquisition de parts sociales soit de nature à caractériser un élément du contrat de société.

Il prétend faussement que lors de sa constitution, l'UDM a acquis des actions de la société ITM Entreprises alors qu'ainsi qu'il a été dit supra l'UDM est la dernière dénomination d'une association (initialement Ex) créée en 1970 et que la dernière évolution de son objet social datait de 1983 lorsque la SCM a été créée en 1986.

L'UDM a acquis des actions de la société ITM Entreprises et les a apportées à la SCM afin de permettre à des associés retrayants ou exclus d'être rapidement payés du prix de cession de leurs parts sans augmentation des parts des associés et ce, pour que soit respectée la volonté des fondateurs de la SCM, à savoir limiter à un plafond le nombre de parts détenues par chaque associé, ainsi qu'il ressort du procès-verbal de la SCM en formation et de l'extrait du rapport de la gérance à l'assemblée générale extraordinaire de la SCM du 13 novembre 1986 et du règlement intérieur de la SCM.

Il n'existe donc aucun acte prémédité de spéculation, contrairement à l'allégation de M.[B].

Il admet que le nombre de parts de l'UDM dans la SCM soit 19 048 parts reste inchangé depuis l'origine mais ne justifie pas qu'il représente une fraction du capital beaucoup plus importante en raison de la diminution du nombre total des parts actuel qu'il n'établit pas, alors que les statuts mis à jour en 2006 précisent que le capital effectif de la société a varié depuis l'origine en fonction d'apports en numéraire effectués par de nouveaux associés et de remboursements effectués lors de retraits d'associés et que si, comme M. [B] le soutient les parts des sortants sont annulées, l'arrivée de nouveaux associés a entraîné l'attribution de nouvelles parts en fonction de leur apports en numéraire.

Il ne prouve donc pas que l'association recevrait indirectement des libéralités du fait de l'accroissement de la proportion de son capital dans la société.

De même, M. [B] ne justifie pas que le pouvoir de l'UDM se soit accru et qu'elle contrôle la SCM alors que ses statuts mis à jour le 11 juin 1991 prévoyaient en leur article 32, de manière identique que les statuts initiaux du 1er octobre 1986 que 'si une personne morale était associée, les règles fixées à l'article 21 s'appliqueraient c'est à dire que quelque soit le nombre des parts qu'elle détiendrait , celles-ci, pour tout vote émis et quelle que soit la nature de la décision sur laquelle il conviendrait de statuer, ne seraient prises en compte qu'à hauteur de soixante (maximum)'.

Cette disposition a été reprise à l'article 33 des statuts mis à jour le 13 juin 2006 qui rappelle également que 'les fondateurs souhaitent que chaque associé de la SCM soit titulaire du même nombre de parts' et que 'pour l'instant ce nombre, qui est également un maximum, est fixé à soixante parts, à l'exception de l'UDM'.

Il s'en déduit que la participation de l'UDM dans le capital de la SCM inchangée depuis 1986 n'a aucune influence sur son vote et ne lui donne pas de rôle prépondérant dans la société ni dans le groupement alors que l'objet social de la SCM est essentiellement de détenir le portefeuille des actions de la société ITM Entreprises et de définir les objectifs à long terme du groupe.

Une prise de contrôle de la SCM par l'UDM ne saurait être déduite des seules clauses relatives aux retraits et exclusions des associés prévues dans les statuts et le règlement intérieur de la société.

Par ailleurs, il n'est pas rapporté la preuve que la création d'un conseil de direction regroupant la SCM, la société ITM Entreprises et l'UDM annoncée dans les publications du groupe en 2005 ait été réalisée.

M. [B] ne peut déduire du fait que l'UDM organise le recrutement et l'intégration des postulants et remet aux nouveaux adhérents du groupement leur contrat d'enseigne à titre d'information pré-contractuelle qu'elle agirait comme un franchiseur et serait donc une filiale commerciale et financière du groupement alors que cette mission entre dans son objet social qui est 'd'assurer la liaison entre tous les sociétaires et de promouvoir et de maintenir l'esprit de groupe et, afin d'y parvenir, d'engager toutes actions comme de participer à toutes opérations utiles ou nécessaires à cet effet' ni surtout qu'elle recevrait une sorte de complément de rémunération de franchiseur au motif qu'elle recevrait des cotisations chiffrées en fonction du chiffre d'affaires, ce qui n'est pas prouvé, celles-ci devant selon les statuts percevoir des cotisations fixées par l'assemblée générale de ses membres sans qu'ils soit apporté d'autre élément sur leur détermination.

Enfin, l'association a un but non lucratif et n'a jamais partagé de 'bénéfices'. Par ailleurs, il n'est aucunement soutenu qu'elle ait supporté quelconques dettes.

En conséquence, M. [B] ne rapporte pas la preuve de l'existence d'éléments susceptibles d'entraîner la requalification de l'association UDM en société de sorte que M.[B] doit être débouté de sa demande à ce titre et de sa demande subséquente en attribution d'une partie du capital détenu par l'UDM, société de fait.

Sur la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive formée par l'UDM

Il n'est pas établi que le droit d'ester en justice dont a fait usage M. [B] a dégénéré en abus de droit, celui-ci ayant pu se méprendre sur l'étendue de ses droits. Le rejet de la demande de dommages et intérêts formée à ce titre par l'UDM est confirmé.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Les dispositions du jugement relatives aux dépens et à l'article 700 du code de procédure civile sont confirmées.

Les dépens d'appel doivent incomber à M. [B], partie perdante, lequel est également condamné à payer à l'UDM la somme de 6 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Infirme le jugement en ce qu'il a déclaré prescrites l'ensemble des demandes de M. [J] [B] à l'encontre de l'Union des Mousquetaires,

Statuant à nouveau, dans cette limite,

Déclare recevable l'action de M. [J] [B] en requalification de l'association Union des Mousquetaires en société et en paiement de la somme de 421 835,95 euros,

Déboute M. [J] [B] de ces mêmes demandes,

Déclare prescrites les actions de M. [J] [B] en dissolution de l'Union nationale des Mousquetaires devenue Union des Mousquetaires initiée le 18 mars 2015 et de l'Union des Mousquetaires intentée le 11 mai 2015 et sa demande d'annulation de l'acquisition par l'Union des Mousquetaires des actions d'ITM Entreprises,

Confirme le jugement en ses autres dispositions,

Condamne M. [J] [B] aux dépens, dont distraction au profit de Me Bonaldi-Nut, avocat,

Condamne M. [J] [B] à payer à l'Union des Mousquetaires la somme de 6 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

LA GREFFIÈRELA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 13
Numéro d'arrêt : 19/06210
Date de la décision : 19/04/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-04-19;19.06210 ?
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