Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE
délivrées le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 11
ARRET DU 19 AVRIL 2022
(n° , 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/07874 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B55PC
Décision déférée à la Cour : Jugement du 22 Février 2018 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'EVRY - RG n° 16/00454
APPELANT
Monsieur [I] [Y]
[Adresse 3]
[Adresse 3]
Représenté par Me Nawal BELLATRECHE TITOUCHE, avocat au barreau de PARIS, toque : B0748
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2018/015592 du 01/06/2018 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PARIS)
INTIMEES
La SELARL JSA (anciennement dénommée GAUTHIER-SOHM) mandataire ad'hoc de la société B SECURITE PRIVEE
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représentée par Me Nathalie CHEVALIER, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : PC143
Association UNEDIC DELEGATION AGS CGEA UNEDIC ILE DE FRANCE
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Représentée par Me Frédéric ENSLEN, avocat au barreau de PARIS, toque : E1350
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 03 Février 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Anne HARTMANN, Présidente de chambre, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :
Madame Anne HARTMANN, Présidente de chambre,
Madame Isabelle LECOQ-CARON, Présidente de chambre,
Madame Laurence DELARBRE, Conseillère,
Greffier, lors des débats : Madame Mathilde SARRON
ARRET :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Anne HARTMANN Présidente de chambre, et par Madame Manon FONDRIESCHI, Greffière présente lors du prononcé.
FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS
M. [Y] [I] né le 25 mars 1963 a été engagé par la société B Sécurité Privée le 1er mai 2013 en qualité d'agent de sécurité suivant un contrat de travail à durée indéterminée, à temps partiel. Les relations entre les parties étaient soumises à la convention collective des entreprises de prévention et de sécurité du 15 février 1985.
Le dernier bulletin de salaire transmis à M. [Y] est celui du mois de janvier 2014.
M. [Y] affirme avoir fait l'objet d'une mise à l'écart par la société B Sécurité Privée à compter du mois de février 2014, en ce sens qu'il n'avait plus reçu de planning, ce qui l'aurait empêché de travailler, bien qu'il se soit mis à la disposition de l'entreprise pour ce faire.
Par jugement du 24 septembre 2014, le Tribunal de commerce de Créteil a ouvert une procédure de liquidation de la société B Sécurité et désigné la SELARL Gauthier-Sohm en qualité de liquidateur (devenu la Selarl JSA).
Par jugement rendu le 11 mai 2016, le Tribunal de commerce saisi a clôturé les opérations de liquidation judiciaire et désigné la SELARL Gauthier-Sohm en qualité mandataire ad-hoc de la société B Sécurité Privée afin de poursuivre les instances en cours.
Par lettre du 7 octobre 2014, le mandataire liquidateur a demandé à M. [Y] de lui fournir des éléments d'appréciation, notamment quant à la période allant de février à septembre 2014 et faute de les obtenir, il a rejeté les créances de ce dernier.
Le 8 octobre 2014 le mandataire liquidateur a notifié à M. [Y] son licenciement pour cause économique.
Contestant la légitimité de son licenciement et réclamant outre les indemnités de rupture qui en découlent des rappels de salaire, M. [Y] a saisi le Conseil de Prud'hommes d'Évry le 16 mai 2016, qui par jugement du 22 février 2018 auquel la Cour se réfère pour l'exposé de la procédure antérieure et des prétentions initiales des parties a statué comme suit :
Constate que le contrat de travail ayant lié M. [I] [Y] à la SARL B Sécurité Privée a cessé le 31 janvier 2014 et que M. [Y] ne se prévaut pas d'un licenciement abusif à cette date ;
Déclare inopérant et de nul effet le licenciement intervenu le 8 octobre 2014
Vu l'article L.1471-1 du Code du travail ;
Dit que les chefs de demande qui porteraient sur la rupture à effet du 31 janvier 2014 et de ses suites ou conséquences sont prescrites ;
Pour le surplus, déclare irrecevable comme tardive la demande de fixation de créance au passif de la liquation de la SARL B Sécurité Privée
Dit M. [I] [Y] mal fondé en ses demandes ; l'en déboute ,
Met hors de cause l'AGS ,
Laisse les dépens éventuel à la charge du demandeur.
Par déclaration du 19 septembre 2018 M. [Y] [I] a interjeté appel de cette décisin notifiée le 27 février 2018 par lettre du greffe adressée aux parties, dont il n'est pas justifié de la réception.
Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 19 septembre 2018, M. [Y] demande à la Cour de :
Déclarer ses demandes recevables et bien fondées
Infirmer le jugement rendu par le Conseil de prud'hommes d'Evry ( RGN°16/00454) le 22 février en toutes ses dispositions,
Statuant à nouveau :
Fixer la créance de M. [I] [Y] au passif de la liquidation judiciaire de la société B Sécurité Privée comme suit :
953 euros au titre de l'indemnité pour non respect de la procédure
953 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis
95, 30 euros au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis
9000 euros au titre de dommages et intérêts pour rupture abusive ;
7000 euros au titre des congés du 1er mai au 24 septembre 2014
4900 euros au titre des salaires du 1er février 2014 au 24 septembre 2014
1500 euros au titre des supplémentaires du 1er mai 2013 au 31 janvier 2014
770 euros au titre des frais de déplacement mai 2013-janvier 2014
Ordonner à la SELARL Gauthier-Sohm, ès qualités de mandataire ad hoc de la société B Sécurité Privée, de remettre à M. [I] [Y] l'attestation destinée à Pôle Emploi, un certificat de travail rectifiés conforme à la présente décision ;
- Assortir les condamnations de l'intérêt légal à compter de la saisine du Conseil ;
- Ordonner la capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1154 du Code civil;
- Dire que le présent jugement sera opposable à l'AGS UNEDIC Ile-de-France ;
- Condamner l'AGS-CGEA à garantir le paiement de l'intégralité des sommes allouées à M. [I] [Y] et fixées au passif de la liquidation judiciaire de la société B Sécurité Privée ;
- Ordonner la mention du dispositif du présent arrêt en marge de l'état des créances de la société B Sécurité Privée déposé au greffe du tribunal de commerce de Créteil ;
Dans ses conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 29 novembre 2018 la SELARL JSA (anciennement dénommée GAUTHIER-SOHM) ès qualité de Mandataire Ad Hoc de la société B Sécurité Privée demande à la cour de :
A titre principal :
- Dire et juger Monsieur [I] [Y] irrecevable en ses demandes nouvelles en cause d'appel,
- Dire et juger Monsieur [I] [Y] irrecevable en sa saisine du Conseil de Prud'hommes,
- Constater la prescription de l'action de Monsieur [I] [Y],
- Dire et juger Monsieur [I] [Y] irrecevable en ses demandes, fins et
conclusions,
En conséquence,
- Confirmer en son intégralité le jugement du 22 février 2018,
- Débouter M. [I] [Y] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
A titre subsidiaire :
- Dire et juger mal fondées l'ensemble des demandes, fins et conclusions de Monsieur [I] [Y],
- Débouter M. [I] [Y] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
En tout état de cause :
- Condamner M. [I] [Y] à régler la somme de 1.000 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile au profit de la SELARL JSA (anciennement
dénommée GAUTHIER-SOHM) ès qualité de Mandataire Ad Hoc de la société B SECURITE
PRIVE,
- Condamner M. [I] [Y] aux entiers dépens.
Dans ses dernières conclusions récapitulatives adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 20 octobre 2021 l'UNEDIC Délégation AGS CGEA Ile de France demande à la cour de :
- Dire irrecevable M. [Y] en ses demandes nouvelles en cause d'appel
- Infirmer le Jugement dont appel en ce qu'il a dit M. [I] [Y] recevable en sa saisine du Conseil de prud'hommes
- Dire irrecevable M. [Y] en sa saisine du Conseil de Prud'hommes
Subsidiairement
- Constater la prescription des demandes afférentes à la rupture du contrat de travail
Très subsidiairement
- Confirmer le Jugement dont appel en l'ensemble de ces dispositions
- Débouter intégralement M. [Y] de l'ensemble de ses demandes
- Infiniment Subsidiairement
- Dire que l'AGS ne devra procéder à l'avance des créances visées aux articles L 3253-8 (ex-L 143-11-1) et suivants du code du travail.
- Limiter la garantie des éventuelles créances de salaire à 45 jours de salaire
- Dire inopposable à l'AGS-CGEA toutes les indemnités de rupture
- Condamner M. [Y] en tous les dépens.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 17 novembre 2021 et l'audience a été fixée au 3 février 2022.
Pour un plus ample exposé des faits, des prétentions et des moyens des parties, la cour se réfère à leurs conclusions écrites conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
SUR CE, LA COUR :
Sur l'irrecevabilité des demandes nouvelles
La société B Sécurité Privée représentée par son mandataire ad'hoc et l'AGS font valoir que les demandes de M. [Y] au titre du préavis et des congés payés afférents mais aussi d'indemnité pour rupture abusive formées pour la première fois à hauteur d'appel doivent être déclarées irrecevables car nouvelles.
M. [Y] n'a pas conclu sur ce point.
L'article 564 du code de procédure civile dispose qu'à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions, si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de lé révélation d'un fait.
L'article 565 poursuit que les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises aux premiers juges même si leur fondement juridique est différent.
Enfin l'article 566 précise que les parties ne peuvent ajouter aux prétentions soumises aux premiers juges que les demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire.
La cour retient que les demandes d'indemnités compensatrice de préavis et pour rupture abusive du contrat de travail, formées à hauteur de cour, tendent aux mêmes fins d'indemnisation du préjudice causé par le licenciement contesté, dont elles sont alors l'accessoire ou le complément nécessaire, de sorte que celles-ci seront déclarées recevables.
Sur la clôture de la liquidation de la société B Sécurité Privée pour insuffisance d'actif et ses conséquences
La société B Sécurité Privée représentée par son mandataire ad'hoc et l'AGS exposent que M. [Y] est irrecevable en sa saisine du conseil de prud'hommes compte-tenu de la clôture pour insuffisance d'actifs de la liquidation de l'employeur.
M. [Y] aux termes de ses dernières écritures demande à la cour de fixer ses créances au passif de la société B Sécurité Privée.
La cour rappelle que l'article L622-21 du code de commerce dispose "I.-Le jugement d'ouverture interrompt ou interdit toute action en justice de la part de tous les créanciers dont la créance n'est pas mentionnée au I de l'article L. 622-17 et tendant : 1° A la condamnation du débiteur au paiement d'une somme d'argent. (..) ».
S'agissant des procédures en cours, elles sont interrompues et ne peuvent tendre qu'à la fixation de la créance, s'agissant des sommes dues antérieurement au jugement d'ouverture.
La cour rappelle qu'après le jugement de clôture pour insuffisance d'actif, les créanciers ne recouvrent pas, en principe, de droit de poursuites contre le débiteur, sauf cas exceptionnels énumérés à l'article L643-11 du code de commerce, notamment lorsque la gestion du débiteur a été remise en cause (faillite personnelle, banqueroute, fraude..) ce qui n'est pas invoqué en l'espèce.
Il s'en déduit que les créances antérieures au jugement d'ouverture de la procédure collective ne peuvent pas plus à ce stade faire l'objet d'une fixation au passif de la liquidation de la société qui par définition a été liquidée et clôturée.
Il est constant au cas d'espèce, que M. [Y] n'a saisi le conseil de prud'hommes que postérieurement à la clôture pour insuffisance d'actifs de la liquidation de la société B Sécurité Privée.
Il se déduit de ce qui précède que M. [Y] qui se prévaut d'une créance antérieure au jugement d'ouverture de la procédure collective mais qui a agi alors que cette dernière était clôturée pour insuffisance d'actifs, doit être débouté de sa demande en fixation des différentes sommes réclamées contre la société B Sécurité Privée représentée par son mandataire ad'hoc, sans examen plus avant de ses prétentions, de sorte que l'AGS contre laquelle aucune condamnation ne pouvait être prononcée, ne peut être tenue d'aucune garantie liée à la procédure collective. Le jugement déféré sera infirmé en conséquence en toutes ses dispositions.
M. [I] [Y] qui succombe au fond et en son recours est condamné aux dépens d'instance et d'appel toutefois, l'équité ne commande pas de faire application de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
REJETTE l'exception d'irrecevabilité pour demandes nouvelles ;
INFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions.
Et statuant à nouveau :
DEBOUTE M. [I] [Y] de ses demandes en fixation de créances dirigées contre la société B Sécurité Privée représentée par son mandataire ad'hoc et de garantie formées à l'égard de l'UNEDIC AGS GGEA Ile de France.
DIT n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile.
CONDAMNE M. [I] [Y] aux entiers dépens d'instance et d'appel.
La greffière, La présidente.