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26/02/2021 | FRANCE | N°18/27827

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 6, 26 février 2021, 18/27827


Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 6



ARRÊT DU 26 FÉVRIER 2021



(n° /2021, 22 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/27827 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B64QV



Décision déférée à la Cour : Jugement du 21 Novembre 2018 -Tribunal de Grande Instance de FONTAINEBLEAU - RG n° 16/00089





APPELANT :



Maître Alexis ROCH Notaire associé de la

SCP Alexis ROCH et Claire ROLLAT-ROCH

[Adresse 5]

[Localité 11]



Assisté par Me Gérard SALLABERRY, de la SCP KUHN, avocat au barreau de PARIS, toque : E0379

Représenté par M...

Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 6

ARRÊT DU 26 FÉVRIER 2021

(n° /2021, 22 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/27827 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B64QV

Décision déférée à la Cour : Jugement du 21 Novembre 2018 -Tribunal de Grande Instance de FONTAINEBLEAU - RG n° 16/00089

APPELANT :

Maître Alexis ROCH Notaire associé de la SCP Alexis ROCH et Claire ROLLAT-ROCH

[Adresse 5]

[Localité 11]

Assisté par Me Gérard SALLABERRY, de la SCP KUHN, avocat au barreau de PARIS, toque : E0379

Représenté par Me Thierry KUHN de la SCP KUHN, avocat au barreau de PARIS, toque : P0090

INTIMES :

Monsieur [A] [F]

[Adresse 3]

[Localité 10]

Représenté par Me Karine ALTMANN, avocat au barreau de PARIS, toque : E2070

Madame [K] [T] épouse [F]

[Adresse 3]

[Localité 10]

Représentée par Me Karine ALTMANN, avocat au barreau de PARIS, toque : E2070

Monsieur [P] [O] [L]

[Adresse 2]

[Localité 8]

Assistée et représenté par Me Jérôme BERTIN de la SELARL BERTIN & BERTIN AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : J126

Madame [G] [H]

[Adresse 2]

[Localité 8]

Assistée et représentée par Me Jérôme BERTIN de la SELARL BERTIN & BERTIN AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : J126

Maître [W] [R] Mandataire Judiciaire de la sarl AODH

[Adresse 4]

[Localité 7]

Non assisté, non représenté (régulièrement assigné -PV 659-)

SA SMA ANCIENNEMENT DÉNOMMÉE SAGENA agissant poursuites et diligences en la personne de son Président domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 12]

[Adresse 14]

[Localité 6]

Assistée de Me François BILLBEAU, de la SCP BILLEBEAU MARINACCE, avocat au barreau de PARIS, toque : R043

Représentée par Me Patricia HARDOUIN de la SELARL 2H Avocats à la cour, avocat au barreau de PARIS, toque : L0056

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 17 Décembre 2020, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Marie-José DURAND, Conseillère exerçant les fonctions de Président, et Valérie GUILLAUDIER, Conseillère chargée du rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Marie-José DURAND, Conseillère exerçant les fonctions de Président

Valérie GUILLAUDIER, Conseillère

Bénédicte PRUVOST, Présidente de Chambre

Greffière lors des débats : Mme Suzanne HAKOUN

ARRÊT :

- défaut

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, délibéré initialement fixé au 19 février 2021, puis prorogé au 26 février 2021, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Marie-José DURAND, Conseillère exerçant les fonctions de Président et par Suzanne HAKOUN, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

FAITS ET PROCÉDURE :

Par acte authentique du 25 avril 2012, dressé par M. ROCH, notaire, M. et Mme [F] ont vendu à M. [O] [L] et Mme [H] un immeuble à usage d'habitation, situé [Adresse 2] à [Localité 13] pour un prix de 213 000 euros.

Le terrain avait été acquis par M. et Mme [F] le 25 mai 2006 pour un prix de 65 000 euros et la construction réalisée à la suite d'un permis de construire délivré le 5 février 2007 et de deux permis modificatifs du 5 octobre 2007 et du 19 décembre 2007 et une déclaration d'achèvement des travaux en date du 30 juin 2008.

Soutenant l'existence de désordres de structure, de fuites et d'une obstruction du réseau d'assainissement, M. [O] [L] et Mme [H] ont, après expertise amiable, sollicité une expertise judiciaire.

Par ordonnance en date du 2 juillet 2013, une expertise a été ordonnée et l'expert a déposé son rapport le 15 avril 2015.

Par actes des 19 et 28 janvier 2016, M. [O] [L] et Mme [H] ont assigné maître [R], ès qualités de liquidateur de la SARL AODH, désignée par les vendeurs comme l'entreprise de construction, la SMA, venant aux droits de la société SAGENA, assureur de celle-ci, M. ROCH et M. et Mme [F] en réparation de leur préjudices.

Par jugement du 21 novembre 2018, le tribunal de grande instance de Fontainebleau a statué en ces termes :

Vu le rapport d'expertise déposé le 15 avril 2015 par monsieur [B] ;

-DIT que l'entreprise AODH a réalisé des travaux de fondations, de plancher du vide sanitaire, de maçonnerie, de charpente, de menuiseries, de branchements des réseaux EDF et eau et de plâtrerie d'une valeur totale de 56.626,21 euros ;

-DIT que pour le surplus les travaux ont été réalisés par monsieur et madame [F] personnellement ;

-DIT que les travaux ont fait l'objet d'une réception tacite ;

-FIXE la date de la réception tacite de l'ouvrage au 30 juin 2008 ;

-DIT que monsieur et madame [F] ont la qualité de constructeurs au sens de l'article 1792-1,2° du Code civil et qu'ils sont à ce titre redevables de la garantie décennale à leurs acquéreurs ;

-QUALIFIE de désordres de nature décennale les défauts affectant la construction réalisée par monsieur et madame [F] et l'entreprise AODH et vendue à monsieur [O] [L] et madame [H] ;

-DIT qu' à défaut de souscription de garantie facultative complémentaire, la SMA est tenue à garantie des seuls dommages matériels causés à l'ouvrage, à l'exclusion des dommages immatériels et des dommages matériels consécutifs ;

-DIT qu'en mentionnant faussement à l'acte authentique de vente dressé le 25 avril 2015 que l'assurance dommages-ouvrage obligatoire avait été souscrite par monsieur et madame [F] vendeurs-constructeurs, maître ROCH a commis une faute de nature a engager sa responsabilité professionnelle ;

-CONDAMNE in solidum monsieur [A] [F], madame [K] [T] épouse [F], la société d'assurance SMA (SA) et maître Alexis ROCH à payer à monsieur [P] [O] [L] et madame [G] [H] la somme de 268.061 euros T.T.C actualisée sur l'indice BT du coût de la construction, en indemnisation du coût de réparation des désordres affectant l'ouvrage ;

-CONDAMNE in solidum monsieur [A] [F], madame [K] [T] épouse [F] et maître Alexis ROCH à payer à monsieur [P] [O] [L] et madame [G] [H] la somme totale de 3.600 euros en indemnisation du préjudice de jouissance subi ;

-CONDAMNE in solidum monsieur [A] [F], madame [K] [T] épouse [F] et maître Alexis ROCH à payer à monsieur [P] [O] [L] et madame [G] [H] la somme de 2.000 euros en indemnisation du préjudice moral subi ;

-DÉBOUTE monsieur [O] [L] et madame [H] de leur demandes formées à l'encontre de la SMA au titre des préjudices moral et de jouissance ;

-DÉBOUTE monsieur [O] [L] et madame [H] de leur demande au titre des frais de déménagement et ré-emménagement ainsi que de leur demande d'indemnisation au titre de la perte de chance de ne pas avoir effectué un meilleur investissement ;

FIXE les parts de responsabilité fondant les recours entre co-débiteurs dans les termes suivants:

- responsabilité de monsieur et madame [F] : 50 %

- responsabilité de l'entreprise AODH : 25 %

- responsabilité de maître ROCH : 25 % ;

-DÉBOUTE monsieur [O] [L] et madame [H] de leur demande d'inscription des sommes portées en condamnation au passif de la procédure collective de l'entreprise AODH ;

-CONDAMNE in solidum monsieur [A] [F], madame [K] [T] épouse [F], la société d'assurance SMA (SA) et maître Alexis ROCH à supporter les dépens de l'instance ;

-ACCORDE à maître C.CONTREPOIDS-BERTIN avocat, le bénéfice de l'article 699 du Code de procédure civile ;

-DIT que dans l'hypothèse où les condamnations prononcées au profit de monsieur [O] [L] et madame [H] ne seraient pas réglées spontanément et où l'exécution forcée serait confiée à un huissier de justice, les sommes retenues par ce dernier en application du décret du 10 mai 2007 seront supportées par le débiteur ne s'exécutant pas ;

-CONDAMNE in solidum monsieur [A] [F], madame [K] [T] épouse [F], la société d'assurance SMA (SA) et maître Alexis ROCH à payer à monsieur [P] [O] [L] et madame [G] [H] la somme de 4.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile;

-DÉBOUTE les parties du surplus de leurs demandes comme inutiles ou mal fondées ;

-ORDONNE l'exécution provisoire du présent jugement à hauteur de la moitié des sommes

allouées.

***

M. Alexis ROCH a interjeté appel le 11 décembre 2018.

M. [F] et Mme [T] ont interjeté appel le 6 janvier 2019.

M. [O] [L] et Mme [H] ont formé un appel incident par conclusions signifiées le 29 avril 2019.

Par ordonnance du conseiller de la mise en état du 09 mai 2019 les procédures inscrites au rôle sous les numéros RG : 18/27827 et RG 19/00498 ont été jointes .

Dans ses dernières conclusions en date du 2 mai 2019, la SA SMA SA demande à la Cour de :

A titre principal,

I. Dire et juger que la SMA SA venant aux droits de la société SAGENA est recherchée en qualité d'assureur de la société AODH, société radiée le 11 juin 2013 et dont le contrat d'assurance a été résilié le 18 novembre 2009 pour défaut de paiement de la prime d'assurance en application de l'article L. 113-3 du Code des assurances,

Dire et juger que la mobilisation des garanties de la SMA SA suppose à titre préalable que les requérants démontrent par la production de pièces justificatives que la société AODH serait intervenue de manière effective dans le cadre de la construction du pavillon conduite par les époux [F],

Dire et juger que la SMA SA demande une nouvelle fois dans le cadre des présentes instances en appel comme lors des opérations d'expertise judiciaire, que les maîtres d'ouvrage, les époux [F], par ailleurs maîtres d''uvre et constructeur du pavillon, de produire des éléments rapportant la preuve que la société AODH aurait exécuté des prestations à leur demande,

Dire et juger que les pièces produites par les époux [F] n'en rapportent pas la preuve en particulier les devis et factures incohérents et imprécis insusceptibles d'impliquer la société AODH, ainsi que les relevés bancaires déjà produits par les époux [F] lors de l'expertise judiciaire, dont les montants ne font surtout que confirmer l'absence de toute cohérence des sommes alléguées par les parties afin d'expliquer le rôle qui aurait été confié à la société AODH, le jugement attaqué ayant mis en évidence l'incohérence entre les sommes figurant sur les factures et les relevés de compte produits,

Dire et juger que les époux [F] ont refusé et refusent encore aujourd'hui de produire aux débats la copie des chèques et/ou des relevés bancaires afin de déterminer une hypothétique relation contractuelle et financière entre ces derniers et AODH, mais aussi de préciser les ouvrages qui auraient été exécutés par ladite société,

En conséquence, dire et juger que la preuve de l'intervention effective de la société AODH dans le cadre de la construction du pavillon par les époux [F] n'est pas rapportée,

Dire et juger que de prétendus travaux qui auraient été réalisés par la société AODH n'ont fait l'objet d'aucune réception au sens de l'article 1792-6 du Code civil, faisant obstacle à la mobilisation des garanties invoquées de la SMA SA, de sorte que le jugement devra être infirmé en ce qu'il l'a condamnée à garantir des travaux indéterminés sur la base de pièces contestables,

Dire et juger que la réception tacite alléguée n'est pas rapportée et n'est aucunement établie par le jugement de première instance, au regard de l'absence de tout paiement du prix d'un ouvrage clairement identifié, révélant l'absence de toute volonté non-équivoque des époux [F] de recevoir un ouvrage que la société AODH aurait avec certitude mis en 'uvre, le paiement minoritaire évoqué par les documents produits de 52.626,61 € sur le prix réel d'un pavillon compris entre 175.000 € et 204.400 €, ne peut en aucun cas établir une volonté (non-équivoque) des époux [F] de réceptionner un tel pavillon,

Dire et juger que les garanties de la SMA SA ne sauraient été mobilisées ni à l'égard d'une société dont on ignore si elle est réellement intervenue sur le pavillon construit par les époux [F] ni a fortiori pour de prétendus travaux qui n'ont l'objet d'aucune réception, il demeure une équivoque certaine sur une prétendue volonté des époux [F] d'avoir réceptionné des travaux rattachés de manière artificielle à la société AODH,

Infirmer le jugement attaqué en ce qu'il a retenu une garantie de la SMA SA alors qu'il n'y ni démonstration d'une intervention effective de la société AODH ni réception (formelle ou tacite) qui aurait été exprimée de manière non-équivoque par les époux [F],

Dire et juger en tout état de cause que l'action de Monsieur [O] [L] et Madame [H], de Me ROCH et des époux [F] est irrecevable comme étant entachée de forclusion, dans le cadre d'un contrat de vente entre les époux [F] et AODH, au regard des articles 1641 et suivants du code civil, le jugement devant aussi être infirmé à cet égard pour avoir retenu un motif inopérant afin de rejeter cette irrecevabilité caractérisée,

Rejeter toute demande qui serait formulée à l'encontre de la SMA SA par l'une quelconque des parties aux présentes instances, et infirmer le jugement pour avoir mobilisé les garanties de la SMA SA,

II. Dire et juger que les désordres affectant la structure et le gros-oeuvre, la couverture et les réseaux enterrés du pavillon ont pour origine exclusive, d'une part, des erreurs de conception et d'exécution commises par les époux [F] en leur qualité de maîtres d'ouvrage, maîtres d''uvre et constructeurs, et, d'autre part, une faute de Maître ROCH lors de l'établissement de l'acte de vente le 25 avril 2012 entre les époux [F] et les requérants,

Dire et juger que les défauts de conception et d'exécution relevés par l'expert judiciaire dans son rapport incombent nécessairement aux époux [F] dans la mesure où ils ne rapportent pas la preuve de l'intervention d'une quelconque société extérieure pour la construction de leur pavillon,

Dire et juger que Maître ROCH a eu un rôle causal direct et certain dans la survenance et l'aggravation des désordres en insérant une mention erronée dans l'acte de vente stipulant l'existence d'une assurance dommages-ouvrage qui n'avait en réalité pas été souscrite par les époux [F], de sorte que les requérants ont donné leur consentement sur la base d'une clause fondamentale mais irrégulière et n'ont donc pas pu mobiliser des garanties dommages-ouvrage afin de remédier rapidement aux désordres,

Dire et juger en conséquence qu'à supposer que les époux [F] produiraient la copie de chèques et les relevés bancaires justifiant du versement de sommes d'argent à la société AODH et qu'en conséquence il serait prouvé que c'est elle qui aurait effectivement réalisé des prestations identifiées sur le pavillon, aucune responsabilité ne saurait être retenue à son encontre, de sorte que les garanties de la SMA SA ne sauraient être davantage mobilisées,

Infirmer le jugement en ce qu'il a retenu une responsabilité de la société AODH et rejeter toute demande qui serait formée à l'encontre de la SMA SA par l'une quelconque des parties.

A titre subsidiaire :

III. Dire et juger que le contrat d'assurance de la société AODH souscrit auprès de la SMA SA a été résilié en application de l'article L. 113-3 du Code des assurances à la date du 18 novembre 2009 pour non-paiement des primes, ce qui a mis fin à l'ensemble des garanties facultatives à cette date, les garanties obligatoires n'étant pas davantage mobilisables en l'absence de réception de travaux clairement identifiés rattachables de manière certaine à la société AODH,

Dire et juger que les garanties de la SMA SA ne sauraient être mobilisées au titre des préjudices immatériels, ce que le jugement a retenu en page 18, notamment les prétendus préjudices de jouissance, les frais de déménagement et réaménagement, la perte de chance et le préjudice moral, et qu'elle ne peut être tenue qu'au titre des garanties obligatoires (assurance de la garantie décennale au sens de 1792 du Code civil), à la condition toutefois que la preuve d'une réception de travaux clairement identifiés soit rapportée, ce qui n'est aucunement le cas,

Dire et juger que le montant total retenu par l'expert judiciaire au titre des travaux réparatoires est disproportionné au regard de la réalité des désordres, de la nature des travaux à mettre en oeuvre et des analyses détaillées du Cabinet BMA,

Dire et juger qu'à supposer qu'il serait démontré que la société AODH serait intervenue de manière effective pour des ouvrages susceptibles d'être identifiés, et que la preuve d'une réception réelle de ces ouvrages serait rapportée, les sommes mises à la charge de la SMA SA ne pourraient être comprises qu'entre 38.556,58 € TTC et 44.488,36 € TTC, ces sommes représentant une part entre 26 et 30 % de la somme retenue par le Cabinet BMA au titre des travaux réparatoires de 148.294,33 € TTC (123.578,61 € HT) relatifs au désordre de nature décennale,

Infirmer le jugement en ce qu'il a retenu un montant bien supérieur aux évaluations précitées et confirmer l'absence de toute mobilisation des garanties de la SMA SA au titre des préjudices immatériels allégués,

Condamner les époux [F] et Maître ROCH à garantir la société SMA SA de toute condamnation, qui ne saurait être impliquée que dans les limites de la police d'assurance alléguée,

En tout état de cause,

IV. Condamner les époux [F] et Maître ROCH ainsi que tout succombant à payer à la société SMA SA la somme de 5.000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Les condamner aux entiers dépens, comprenant les frais d'expertise, dont distraction au profit de Me Patricia HARDOUIN, avocate au Barreau de Paris, en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions en date du 29 janvier 2019, M. ROCH demande à la Cour de :

- INFIRMER le jugement du tribunal de grande instance de Fontainebleau en ce qu'il :

« CONDAMNE monsieur [A] [F], madame [K] [T] épouse [F], la société d'assurance SMA (SA) et maître Alexis ROCH à payer à monsieur [P] [O] [L] et madame [G] [H] la somme de 268.061 euros T.T.C actualisée sur l'indice BT du coût de la construction, en indemnisation du coût de réparation des désordres affectant l'ouvrage »

« CONDAMNE monsieur [A] [F], madame [K] [T] épouse [F] et maître Alexis ROCH à payer à monsieur [P] [O] [L] et madame [G] [H] la somme totale de 3.600 euros en indemnisation du préjudice de jouissance subi »

« CONDAMNE monsieur [A] [F], madame [K] [T] épouse [F] et maître Alexis ROCH à payer à monsieur [P] [O] [L] et madame [G] [H] la somme de 2.000 euros en indemnisation du préjudice moral subi»

« ACCORDE à maître C. CONTREPOIDS-BERTIN avocat, le bénéfice de l'article 699 du Code de procédure civile ; »

« CONDAMNE monsieur [A] [F], madame [K] [T] épouse [F], la société d'assurance SMA (SA) et maître Alexis ROCH à payer à monsieur [P] [O] [L] et madame [G] [H] la somme de 4.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile »

Statuant à nouveau :

- DIRE ET JUGER que Monsieur [O] [L] et Madame [H] ne caractérisent pas le lien de causalité qui doit nécessairement exister entre la faute invoquée et les désordres de nature décennale invoqués,

- DIRE ET JUGER que la faute reprochée à Maître Alexis ROCH ne peut donner lieu qu'à une condamnation sur le terrain de la perte de chance de ne pas avoir conclu la vente,

- DIRE ET JUGER que la réparation de cette perte de chance ne peut prospérer puisqu'il n'est justifié d'aucune chance réelle que les Consorts [O] '[H] aient renoncé à l'acquisition si le Notaire n'avait pas indiqué l'existence d'une assurance dommages-ouvrage,

- DIRE ET JUGER qu'en tout état de cause, la réparation du préjudice de perte de chance doit être calculée en déterminant l'éventualité favorable dont ont été privées les victimes, avant de lui appliquer un coefficient correspondant à la chance que les victimes aient bénéficié de cette éventualité sans la faute du Notaire,

- DIRE ET JUGER que la seule éventualité favorable perdue par les Consorts [O] ' [H] du fait de la signature de la vente est celle de ne pas avoir pu bénéficier d'une indemnisation plus tôt et sans procédure judiciaire.

En tout état de cause,

- DIRE ET JUGER que compte tenu de l'absence de préjudice indivisible allégué par les Consorts [O] ' [H], la faute délictuelle reprochée à Maître Alexis ROCH ne peut donner lieu à une condamnation in solidum avec les constructeurs condamnés sur le terrain de la garantie décennale,

- DIRE ET JUGER que si par extraordinaire, une telle condamnation in solidum devait être prononcée à l'égard de Maître Alexis ROCH et des constructeurs, le Notaire ne pourrait être tenu qu'à concurrence seulement de la perte de chance

En conséquence,

- DEBOUTER les Consorts [O] ' [H] de l'ensemble de leurs demandes à l'encontre de Maître Alexis ROCH,

- CONDAMNER la partie succombante au paiement de la somme de 5.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- CONDAMNER la partie succombante en tous les dépens dont distraction au profit de la SCP KUHN conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

Dans leurs dernières conclusions en date du 13 novembre 2020, Monsieur [A] [F] et Madame [K] [T] épouse [F] demandent à la Cour de :

IN LIMINE LITIS

DÉBOUTER Monsieur [O] [L] et Madame [H] de leur demande que les pièces 1 à 13 communiquées par Monsieur et Madame [F] soient écartées des débats.

CONFIRMER la décision rendue par le tribunal de grande instance de FONTAINEBLEAU en date du 21 novembre 2018 en ce qu'elle a :

DIT que l'entreprise AODH a réalisé des travaux de fondations, de plancher du vide sanitaire, de maçonnerie, de charpente, de menuiseries, de branchements des réseaux EDF et eau et de plâtrerie d'une valeur totale de 56.626,21 euros ;

DIT que les travaux ont fait l'objet d'une réception tacite ;

FIXE la date de la réception tacite de l'ouvrage au 30 juin 2008 ;

QUALIFIE de désordres de nature décennale les défauts affectant la construction vendue à monsieur [O] [L] et madame [H] ;

CONFIRMER en outre la décision rendue par le tribunal de grande instance de FONTAINEBLEAU en date du 21 novembre 2018 en ce qu'elle a :

REÇU la mobilisation de la garantie de la société SMA SA assureur de la société AODH;

DIT la SMA tenue à garantie des désordres matériels ;

DIT qu'en mentionnant faussement à l'acte authentique de vente dressé le 25 avril 2015 que l'assurance dommages-ouvrage obligatoire avait été souscrite par monsieur et madame [F] vendeurs-constructeurs, maître ROCH a commis une faute de nature à engager sa responsabilité professionnelle;

DÉBOUTE M. [O] DE MIRAN DA et Mme [H] de leur demande au titre des frais de déménagement et de réaménagement ainsi que de la perte de chance de ne pas avoir réalisé un meilleur investissement.

INFIRMER la décision rendue par le tribunal de grande instance de FONTAINEBLEAU en date du 21 novembre 2018 en ce qu'elle a :

DIT que pour le surplus les travaux ont été réalisés par monsieur et madame [F] personnellement;

FIXE les parts de responsabilité fondant les recours entre co-débiteurs dans les termes suivants :

-responsabilité de monsieur et madame [F] : 50 %

-responsabilité de l'entreprise AODH: 25 %

-responsabilité de maître ROCH : 25 %

CONDAMNE monsieur [A] [F] à payer à monsieur [P] [O] [L] et madame [G] [H] la somme de 268.061 euros T. T.C actualisée sur l'indice BT du coût de la construction, en indemnisation du coût de réparation des désordres affectant l'ouvrage;

CONDAMNE monsieur [A] [F], madame [K] [N] à payer à monsieur [P] [O] [L] et madame [G] [H] la somme totale de 3.600 euros en indemnisation du préjudice de jouissance subi;

CONDAMNE monsieur [A] [F], madame [K] épouse [F] à payer à monsieur [P] [O] [L] et madame [G] [H] la somme de 2.000 euros en indemnisation du préjudice moral subi ;

Statuant à nouveau sur ces points

JUGER que Monsieur [A] [F] et Madame [K] [F] née [T] n'ont participé en aucune façon ni matériellement ni en qualité de Maître d'oeuvre à la construction [Adresse 2] à [Localité 13] propriété aujourd'hui de Monsieur [P] [O] [L] et de Madame [G] [H] ;

JUGER que Monsieur [A] [F] et Madame [K] [F] ne sont pas responsables des désordres de nature décennale allégués par Monsieur [P] [O] [L], Madame [G] [H];

CONSTATER l'intervention de la société AODH pour l'ensemble de la construction de la maison aujourd'hui propriété de Monsieur [P] [O] [L] et de Madame [G] [H] ;

JUGER que la société AODH est entièrement et exclusivement responsable des désordres de nature décennale allégués par Monsieur [P] [O] [L], Madame [G] [H];

En conséquence,

DÉCLARER mal fondées les demandes de Monsieur [O] [L], Madame [G] [H] qu'ils dirigent à l'encontre de Monsieur [A] [F] et Madame [K] [F] née [T].

DÉBOUTER purement et simplement Monsieur [O] [L], Madame [G] [H] de l'ensemble de leurs demandes fins et conclusions qu'ils dirigent à l'encontre de Monsieur [A] [F] et Madame [K] [F] née [T].

En tout état de cause

CONDAMNER la société SMA SA venant aux droits de la société SAGENA à garantir son assuré la société AODH au titre de la garantie décennale pour la totalité des désordres affectant la construction [Adresse 2] à [Localité 13] (77126) propriété aujourd'hui de Monsieur [P] [O] DE MlRANDA et de Madame [G] [H].

CONDAMNER la SMA SA venant aux droits de la société SAGENA à garantir Monsieur [A] [F] et Madame [K] [F] née [T] de toutes les condamnations qui pourraient être prononcées à leur encontre au profit des époux Monsieur [P] [O] [L] et de Madame [G] [H] en principal, frais, accessoires, intérêts, frais irrépétibles et dépens.

DÉBOUTER la société SMA SA venant aux droits de la société SAGENA de sa demande de garantie à l'encontre de Monsieur [A] [F] et Madame [K] [F] née [T] dans l'hypothèse d'une condamnation en sa qualité d'assureur décennal.

CONDAMNER Maître Alexis ROCH à garantir Monsieur [A] [F] et Madame [K] [F] née [T] de toute condamnation éventuelle pouvant intervenir à leur encontre dans le cadre de la présente procédure engagée par Monsieur [P] [O] [L], Madame [G] [H]

DÉBOUTER les époux [O] [L] de leur demande indemnitaire au titre de frais de déménagement et réaménagement, de préjudice de jouissance et de la perte de chance subie de ne pas avoir effectué un meilleur investissement et pour préjudice moral.

REJETER toutes demandes qui seraient formulées à l'encontre de Monsieur [A] [F] et Madame [K] [F] née [T] par l'une des parties aux présentes.

Subsidiairement

JUGER que le montant total retenu par l'expert judiciaire au titre des travaux réparatoires est disproportionné au vu des désordres constatés et des analyses du cabinet BMA.

En conséquence

RÉDUIRE les demandes des époux [O] [L] à de plus juste proportion.

En tout état de cause

CONDAMNER Monsieur [P] [O] DE MlRANDA, Madame [G] [H], Maître ROCH et la société SMA SA à payer in solidum aux époux [F] la somme de 4.000 euros conformément aux dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que les entiers dépens

Dans leurs dernières conclusions en date du 19 novembre 2020, M. [O] [L] et Mme [H] demandent à la Cour de:

Sur la confirmation partielle :

À titre principal,

- CONFIRMER le jugement rendu par le tribunal de grande instance de FONTAINEBLEAU en date du 21 novembre 2018 en toutes ses dispositions sauf en ce que Monsieur [O] [L] et Madame [H] n'ont pas vu leurs demandes intégralement satisfaites au niveau du quantum en ce qui concerne le préjudice de jouissance, le préjudice moral et la perte de chance de ne pas avoir effectué un meilleur investissement ainsi que l'indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile et ont été déboutés tant dans le principe que dans le quantum de leur demande relative aux frais de déménagement et réaménagement ;

- DÉBOUTER Maître ROCH de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions ;

- DÉBOUTER Monsieur [A] [F] et Madame [K] [T] épouse [F] de l'ensemble de leurs demandes, fins et prétentions ;

- DÉBOUTER la SMA SA en sa qualité d'assureur de la société AODH de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions ;

À titre subsidiaire en ce qui concerne Maître ROCH,

- CONDAMNER Maître ROCH en réparation du préjudice subi à hauteur de 25% du montant total des préjudices subis sur ce fondement ;

- DÉBOUTER Maître ROCH de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions ;

Sur l'appel incident :

Statuant à nouveau,

- CONDAMNER in solidum Monsieur et Madame [F], la SMA SA en sa qualité d'assureur de la société AODH et Maître Alexis ROCH à verser aux consorts [O] la somme de 7.690,00 € au titre des frais de déménagement et réaménagement ;

- CONDAMNER in solidum Monsieur et Madame [F], la SMA SA en sa qualité d'assureur de la société AODH et Maître Alexis ROCH à verser aux consorts [O] la somme de 5.000,00 € à titre de dommages et intérêts pour le préjudice de jouissance ;

- CONDAMNER in solidum Monsieur et Madame [F], la SMA SA en sa qualité d'assureur de la société AODH et Maître Alexis ROCH à verser aux consorts [O] la somme de 10.000,00 € à titre de dommages et intérêts pour la perte de chance subi de ne pas avoir pu effectuer un meilleur investissement et pour le préjudice moral ;

En tout état de cause :

- CONDAMNER in solidum Monsieur et Madame [F], la SMA SA en sa qualité d'assureur de la société AODH et Maître Alexis ROCH à payer à Monsieur [O] [L] et Madame [H] la somme de 60.000,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure de première instance et la présente procédure d'appel, en sus de la condamnation de première instance à ce titre ;

- CONDAMNER in solidum Monsieur et Madame [F], la SMA SA en sa qualité d'assureur de la société AODH et Maître Alexis ROCH aux entiers dépens de première instance et d'appel, dont distraction au profit de la SELARL BERTIN ET BERTIN-AVOCATS ASSOCIES représentée pour les besoins de la présente procédure par Maître Jérôme BERTIN, Avocat au Barreau de Paris, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;

- DIRE que dans l'hypothèse où les condamnations prononcées au profit de la concluante ne seraient pas réglées spontanément et où l'exécution forcée serait confiée à un huissier de justice, les sommes retenues par ce dernier en application du décret n°2007-774 du 10 mai 2007 portant modification du décret n°96-1080 du 12 décembre 1996 relatif au tarif des huissiers, devront être supportés par le débiteur, en sus de l'application de l'article 700 du code de procédure civile.

***

L'ordonnance de clôture est intervenue le 19 novembre 2020.

MOTIFS

Sur le défaut de communication des pièces :

M. [O] [L] et Mme [H] demandent que soient écartées des débats les pièces des consorts [F] en application des dispositions de l'article 906 du code de procédure civile car elles n'ont pas été communiquées simultanément aux dépôts de leurs conclusions et qu'ils n'en ont pas été destinataires en temps utile afin de pouvoir répliquer aux arguments avancés.

M. et Mme [F] font valoir que s'il est vrai que les pièces n'ont pas été communiquées simultanément à la notification des conclusions, les textes applicables n'interdisent pas que les parties produisent des pièces tout au long de l'instance d'appel, que celles-ci ont été signifiées aux intimés le 16 juillet 2019 et que le principe du contradictoire a été respecté.

***

Aux termes de l'article 906 du code de procédure civile, les conclusions sont notifiées et les pièces communiquées simultanément par l'avocat de chacune des parties à celui de l'autre partie.

M. et Mme [F] ne contestent pas ne pas avoir communiqué leurs pièces simultanément avec leurs conclusions.

Pour autant, ils justifient avoir transmis celles-ci le 16 juillet 2019 (pièce n°15 de M. et Mme [F]).

Au surplus, il n'est pas contesté que les pièces n°1 à 10 de M. et Mme [F] avaient déjà été communiquées en première instance et que seule la pièce n° 11, c'est à dire l'attestation du gérant de la société AODH, est nouvelle en cause d'appel.

En tout état de cause, la clôture étant intervenue le 19 novembre 2020, M. [O] [L] et Mme [H] ont été mis, en temps utile, en mesure de les examiner, de les discuter et d'y répondre.

Il convient donc de rejeter la demande de M. [O] [L] et Mme [H].

Sur le caractère décennal des désordres:

La SMA SA soutient que les désordres affectant la couverture et les réseaux d'évacuation de la maison ne sont pas de nature décennale car ils ne compromettent pas la solidité de l'ouvrage ou ne le rendent pas impropre à sa destination.

M. [O] [L] et Mme [H] font valoir que les désordres affectant la couverture sont susceptibles de remettre en cause l'étanchéité de l'immeuble aux intempéries et de ne pas permettre l'habitation à l'abri de celles-ci et que le fonctionnement normal des canalisations d'évacuation conditionne également l'habitabilité de l'immeuble.

***

Aux termes de l'article 1792 du code civil, tout constructeur d'un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l'acquéreur de l'ouvrage, des dommages, même résultant d'un vice du sol, qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination.

Selon l'expert judiciaire, une partie de la maison est fondée sur un remblai instable ce qui a pour conséquence de porter atteinte à la solidité de l'ouvrage.

Le caractère décennal des désordres affectant le gros-oeuvre et les structures de la maison n'est d'ailleurs pas contesté par les parties.

En ce qui concerne la couverture de la maison, l'expert a relevé des désordres avec des déformations et glissement des tuiles et constaté de nombreuses fuites.

Des désordres affectent également les réseaux d'évacuation de l'ouvrage et plus particulièrement les canalisations qui sont perturbées dans leur fonctionnement ce qui favorise leur obstruction.

Contrairement à ce qui est soutenu par la SMA SA, les désordres affectant la couverture et les réseaux d'évacuation de la maison, qui ont pour conséquence des fuites et infiltrations ainsi que l'obstruction des canalisations, ne permettent pas une habitabilité dans des conditions décentes et rendent l'immeuble impropre à sa destination.

Il convient donc de confirmer le jugement en ce qu'il a retenu que les désordres de l'immeuble avaient un caractère décennal.

Sur l'intervention de la société AODH et l'imputabilité des désordres :

La SMA SA soutient que seule la preuve du règlement et du mode de paiement de l'ensemble des prestations mentionnées par les factures produites serait susceptible d'établir l'intervention effective de la société AODH, que le différentiel important entre les factures qui auraient été émises par la société AODH et le coût réel de la construction confirme l'absence de force probante des pièces communiquées, que ces pièces ne permettent pas de démontrer les ouvrages précis qui auraient été réellement réalisés par la société AODH ni la correspondance entre les prestations prévues par le devis et les factures, que les époux [F] apparaissent comme les véritables constructeurs qui se sont chargés de la maîtrise d'oeuvre de l'opération et que si un lien devait être établi entre la société AODH et les époux [F], il ne pourrait s'agir que d'un contrat de vente et l'action serait alors irrecevable comme forclose au regard des articles 1641 et suivants du code civil.

M. et Mme [F] font valoir que les factures, l'assurance décennale et l'attestation du gérant établissent que les travaux à l'origine des désordres ont été réalisés par la société AODH.

M. [O] [L] et Mme [H] font valoir que les sept factures explicitent clairement l'intervention de la société AODH dans la réalisation des ouvrages de gros oeuvre, plâtrerie, couverture et menuiserie, peu important de savoir si cette intervention a été exclusive ou co-traitée avec d'autres intervenants et que la SMA SA ne peut prétendre que la société AODH n'aurait fourni que des matériaux de construction aux époux [F] sans intervenir dans la construction alors que l'activité de celle-ci concerne des travaux de maçonnerie générale et gros oeuvre et nullement la vente de matériaux au détail aux particuliers.

***

M. et Mme [F] versent aux débats sept factures établies par la société AODH intitulées 'chantier de la construction d'une maison d'habitation route de Salins à [Localité 13]'

La facture n° 2007-09/018, en date du 21 septembre 2007, adressée à M. et Mme [F] est relative à des fondations coulées (situation n°1) pour un montant de 2076, 26 euros (pièce n° 2 de M. et Mme [F]).

La facture n° 2007-09/019, en date du 21 septembre 2007, adressée à M. et Mme [F] est relative au 'plancher du VS coulé' (situation n°2) pour un montant de 5524, 32 euros (pièce n° 3 de M. et Mme [F]).

La facture n° 2007-10/011, en date du 10 octobre 2007, adressée à M. et Mme [F] est relative à l'achèvement du lot maçonnerie (situation n°3) pour un montant de 8032 euros (pièce n° 4 de M. et Mme [F]).

La facture n° 2007-11/018, en date du 20 novembre 2007, adressée à M. et Mme [F] est relative au lot charpente -couverture et mentionne la fourniture et la pose pour un montant de 17210, 46 euros (pièce n° 5 de M. et Mme [F]).

La facture n° 2008-01/08, en date du 10 janvier 2008, adressée à M. et Mme [F] est relative au lot plâtrerie (situation n°4) pour un montant de 10185, 25 euros (pièce n° 6 de M. et Mme [F]).

La facture n° 2007-11/017, en date du 20 novembre 2007, adressée à M. et Mme [F] est relative au lot menuiseries (fenêtres et portes) et mentionne la fourniture et la pose pour un montant de 6939, 80 euros (pièce n° 7 de M. et Mme [F]).

La facture n° 2007-11/016, en date du 20 novembre 2007, adressée à M. et Mme [F] est relative aux branchements pour un montant de 2658, 12 euros (pièce n° 8 de M. et Mme [F]).

Toutes ces factures comportent le tampon de la société AODH, domiciliée [Adresse 1], [Localité 9], ainsi que le numéro de SIRET de l'entreprise.

M. et Mme [F] produisent leur relevé de compte et justifient avoir payé à la société AODH la somme de 8032 euros le 14 novembre 2007 correspondant à la facture n°2007-10/011, la somme de 26 808, 38 euros le 11 décembre 2007 correspondant aux factures n° 2007-11/016, 2007-11/017 et 2007-11/018 (2658, 12+6939, 80+17210, 46), la somme de 10185, 25 euros le 29 janvier 2008 correspondant à la facture n° 2008-01/08 et la somme de 6000 euros le 10 octobre 2007 (pièce n° 10 de M. et Mme [F]).

Ils justifient également de la remise par la société AODH d'une attestation d'assurance de responsabilité décennale qui a été annexée à l'acte de vente de l'immeuble (pièce n°1 de M. et Mme [F]).

Il résulte de l'ensemble de ces éléments, et notamment des factures dont il n'est pas soutenu qu'elles constitueraient des faux, que la société AODH est intervenue sur le chantier de construction de la maison de M. et Mme [F].

Elle était notamment en charge des fondations, des travaux de maçonnerie et de la couverture de la maison pour lesquels des désordres de nature décennale ont été établis.

Contrairement à ce qui est soutenu par la société SMA SA, le montant limité des factures par rapport au coût réel de la construction n'est pas de nature à remettre en cause l'intervention de la société AODH.

De même, il n'existe pas de contradiction entre le montant des factures et leur paiement par les époux [F].

La société SMA SA soutient que le faible montant des factures et leur imprécision ne peuvent que représenter la fourniture des matériaux nécessaires aux prestations.

Cependant, cette affirmation n'est corroborée par aucun élément de preuve, le rapport de la société SOCOBAT versé aux débats par la société SMA SA étant insuffisant pour l'établir (Pièce n°6 de la société SMA SA).

De même, il résulte des factures que la pose a bien été réalisée par l'entreprise AODH qui ne peut, en raison de son activité, être qualifiée de simple vendeur de fournitures.

Il convient donc de confirmer le jugement en ce qu'il a retenu que la société AODH était intervenue sur le chantier de construction de la maison de M. et Mme [F] pour les travaux évoqués précédemment pour un montant total de 56 626, 21 euros.

Sur la réception des travaux:

La SMA SA soutient qu'aucune réception n'a été formalisée, qu'il ne peut y avoir de réception tacite en l'absence de volonté non équivoque des époux [F] de recevoir l'ouvrage, que les époux [F] ne peuvent avoir eu une volonté non équivoque de réceptionner le pavillon qu'ils ont eux-mêmes construits et qu'un maître de l'ouvrage ne peut recevoir de manière tacite un ouvrage en ne réglant qu'une partie du prix des travaux de construction.

M. et Mme [F] soutiennent que l'ouvrage réalisé par la société AODH a fait l'objet d'une réception tacite de leur part, qu'ils ont procédé à la déclaration d'achèvement des travaux le 30 juin 2008 qu'ils ont déposée à la mairie de leur commune, qu'ils ont pris possession des lieux à cette date, qu'ils ont réglé toutes les factures de la société AODH et que les désordres ne sont apparus que plusieurs années après la prise de possession des lieux.

M. [O] [L] et Mme [H] font valoir qu'il y a eu une prise de possession des lieux par les époux [F] dès le 30 juin 2008 et le paiement des factures de la société AODH, que la réception est considérée comme tacite par l'entrée du maître d'ouvrage en possession des lieux même en dépit du paiement du solde des travaux, que l'intégralité des sommes a été réglée par M. et Mme [F] et qu'ils ont manifesté leur volonté d'accepter l'ouvrage en habitant la maison de manière constante depuis leur entrée dans les lieux.

***

Aux termes de l'article 1792-6 du code civil, la réception est l'acte par lequel le maître de l'ouvrage déclare accepter l'ouvrage avec ou sans réserves. Elle intervient à la demande de la partie la plus diligente, soit à l'amiable, soit à défaut judiciairement. Elle est, en tout état de cause, prononcée contradictoirement.

La réception peut être tacite mais à la condition que soit établie la volonté non équivoque du maître de l'ouvrage d'accepter l'ouvrage.

Il appartient à celui qui invoque une réception tacite de l'ouvrage de la démontrer mais la prise de possession de l'ouvrage et le paiement des travaux font présumer la volonté non équivoque du maître de l'ouvrage de le recevoir avec ou sans réserves.

Il résulte des pièces versées aux débats que le chantier a fait l'objet d'une déclaration d'ouverture le 17 août 2007 et que les travaux se sont achevés le 30 juin 2008 (pièce n° 15 de M. [O] [L] et Mme [H]).

M. et Mme [F] ont réglé la quasi-totalité des sommes dues à la société AODH et ont pris immédiatement possession de l'immeuble qu'ils ont habité pendant plusieurs années.

Ils n'ont jamais contesté la qualité des travaux effectués ni émis la moindre réserve.

Il convient donc de constater leur volonté non équivoque de prendre possession de l'ouvrage et de confirmer le jugement en ce qu'il a retenu une réception tacite de celui-ci à la date d'achèvement des travaux c'est à dire le 30 juin 2008.

Sur la responsabilité décennale de la société AODH:

En raison de la nature décennale des désordres, de l'existence d'une réception tacite et du lien d'imputabilité entre les désordres et l'activité de la société AODH, il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a retenu que la responsabilité décennale de celle-ci était engagée.

Sur la responsabilité décennale de M. et Mme [F]:

M. et Mme [F] soutiennent qu'aucun élément du dossier n'apporte la preuve qu'ils ont participé à la construction de l'ouvrage et qu'il ne peut être soutenu qu'ils auraient assuré la direction des travaux et auraient la qualité de maîtres d'oeuvre.

M. [O] [L] et Mme [H] font valoir que M. et Mme [F] ont la qualité de constructeurs et doivent être condamnés in solidum avec les autres parties en réparation du préjudice subi.

***

Aux termes de l'article 1792-1 du code civil, est réputé constructeur de l'ouvrage :

1° Tout architecte, entrepreneur, technicien ou autre personne liée au maître de l'ouvrage par un contrat de louage d'ouvrage ;

2° Toute personne qui vend, après achèvement, un ouvrage qu'elle a construit ou fait construire.

M. et Mme [F] ont déposé une demande de permis de construire le 20 novembre 2006 qu'ils ont obtenu le 5 février 2007 (Pièce n°16 de M. [O] [L] et Mme [H]).

Ils soutiennent ne pas avoir participé personnellement à la construction de l'ouvrage mais ne contestent pas qu'ils ont, à tout le moins, fait construire leur maison.

Or, comme l'ont retenu à bon droit les premiers juges, en application de l'article 1792-1 du code civil, M. et Mme [F] ont la qualité de constructeur dès lors qu'ils ont fait construire leur maison.

Les conditions de la responsabilité décennale étant réunies, il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a retenu que la responsabilité décennale des vendeurs était engagée.

Sur la garantie de la SMA SA:

La SMA SA soutient que sa garantie n'est pas mobilisable pour les dommages immatériels et pour les désordres dépourvus de tout caractère décennal car le contrat a été résilié le 18 novembre 2009 sur le fondement de l'article L.113-3 du code des assurances pour non paiement des cotisations par la société AODH et que les garanties facultatives ont pris fin à la date de résiliation.

M. [O] [L] et Mme [H] font valoir que la SMA SA doit sa garantie en qualité d'assureur de responsabilité décennale de la société AODH mais également pour les dommages immatériels dès lors que l'assureur est tenu de garantir le remboursement des dommages immatériels survenus après la résiliation du contrat mais afférents à des faits antérieurs à cette résiliation, au titre de la garantie subséquente, pendant une période de 10 ans.

***

Aux termes de l'article L124.3 du code des assurances, le tiers lésé dispose d'un droit d'action directe à l'encontre de l'assureur garantissant la responsabilité civile de la personne responsable.

La société AODH a souscrit auprès de la société SAGENA un contrat d'assurance professionnelle 'Protection professionnelle des artisans du bâtiment' à effet du 4 avril 2005 garantissant sa responsabilité décennale et de bon fonctionnement pour les chantiers ouverts entre le 1er janvier 2007 et le 31 décembre 2007 et garantissant sa responsabilité civile professionnelle en raison des dommages corporels, matériels ou immatériels causés aux tiers et résultant de ses activités, que ce soit en cours ou après exécution de ses travaux.' (Pièce n° 1 de M. et Mme [F]).

En raison de la nature décennale des désordres, et en application du contrat souscrit par la société AODH, la SMA SA doit sa garantie pour les dommages matériels et les travaux réparatoires.

Il convient d'ailleurs de relever que la SMA SA ne conteste pas devoir sa garantie de ce chef mais uniquement le caractère décennal de certains désordres.

La SMA SA soutient en cause d'appel que les garanties facultatives prévues au contrat ont pris fin à la date de résiliation de celui-ci c'est à dire le 18 novembre 2009.

Cependant, en application de l'article L124-5 du code des assurances, la garantie peut être déclenchée si le fait dommageable a eu lieu pendant la durée de validité du contrat même si la réclamation est postérieure à la résiliation de celui-ci.

Il convient donc d'infirmer le jugement en ce qu'il a limité la garantie de la SMA SA aux seuls dommages matériels et, statuant à nouveau de ce chef, de la condamner à indemnisation de l'ensemble des préjudices subis par M. [O] [L] et Mme [H].

Sur le montant des préjudices :

- sur les travaux de reprise :

La SMA SA soutient que le montant de 268 061,16 euros retenu par l'expert est surévalué et que le rapport établi le 20 février 2015 par le Cabinet BMA a remis en cause plusieurs postes.

Cependant, et comme l'ont retenu à bon droit les premiers juges, le rapport du Cabinet BMA établi de manière non contradictoire le 20 février 2015 ne saurait remettre en cause les conclusions de l'expert judiciaire alors qu'au surplus, la SMA SA avait la possibilité, dans le cadre des opérations d'expertise, d'apporter tous les éléments utiles et tous les justificatifs nécessaires.

Il convient donc de confirmer le jugement en ce qu'il a retenu que le montant des travaux de reprise devait être fixé à la somme de 268 061,16 euros TTC.

- sur la demande au titre du préjudice de jouissance et au titre des frais de relogement et de déménagement:

M. [O] [L] et Mme [H] soutiennent qu'ils ne peuvent jouir paisiblement de la maison en raison des désordres, notamment ceux de la toiture et des canalisations, et qu'ils subissent un préjudice de jouissance à hauteur de 5000 euros. Ils sollicitent également la somme de 7690 euros correspondant à la perte d'usage de l'habitation pendant la durée des travaux de reprise estimée par l'expert à 4 mois, ces frais étant distincts, selon eux, du préjudice de jouissance puisqu'ils correspondent aux frais exposés pour se reloger et déménager.

Il résulte du rapport d'expertise que les désordres affectent notamment la couverture de la maison, avec un risque de fuites, et les canalisations, ce qui entraîne un préjudice de jouissance certain pour M. [O] [L] et Mme [H], qui sera nécessairement aggravé pendant la durée des travaux.

Pour autant, il n'est pas justifié de ce que les travaux à réaliser, même s'ils sont lourds selon l'expert, nécessiteront un déménagement de M. [O] [L] et Mme [H].

Il convient donc de confirmer le jugement en ce qu'il a rejeté la demande au titre des frais de relogement et de déménagement.

Le jugement sera infirmé en ce qu'il a limité le montant du préjudice de jouissance à la somme de 3600 euros correspondant à la valeur locative de l'immeuble pendant la durée des travaux puisqu'il convient de prendre également en considération le trouble de jouissance résultant de l'impossibilité pour M. [O] [L] et Mme [H] de jouir paisiblement du bien.

Au vu de l'ensemble de ces éléments, leur préjudice de jouissance sera fixé à la somme de 5000 euros.

Sur la demande au titre de la perte de chance de réaliser un meilleur investissement et le préjudice moral:

M. [O] [L] et Mme [H] soutiennent qu'ils se sont vus privés de la perte de chance de ne pas contracter la vente et que depuis la prise de possession de leur habitation, ils subissent des désordres et une procédure judiciaire qui a entraîné des perturbations sur leur vie personnelle, familiale et sociale.

Cependant, M. [O] [L] et Mme [H] ne justifient pas de la perte de chance de réaliser un meilleur investissement et le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a rejeté cette demande.

En ce qui concerne le préjudice moral, les premiers juges ont retenu à bon droit qu'il était caractérisé en raison des nombreuses inquiétudes et répercussions psychologiques entraînées par les désordres et la procédure judiciaire.

Il convient de relever que Mme [H] justifie, au surplus, de plusieurs arrêts de travail consécutifs à un syndrome dépressif (pièce n°29 de M. [O] [L] et Mme [H]).

Le jugement sera cependant infirmé en ce qu'il a limité le montant de ce préjudice à la somme de 2000 euros et le préjudice moral sera fixé, au vu des éléments évoqués précédemment, à la somme de 5000 euros.

***

En conséquence, il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a condamné in solidum M. et Mme [F] et la société SMA SA à payer à M. [O] [L] et Mme [H] la somme de 268 061 euros TTC en réparation des désordres affectant l'ouvrage.

Le jugement sera infirmé en ce qu'il a rejeté les demandes de condamnations in solidum dirigées contre la SMA SA, assureur de la société AODH, au titre des préjudices moral et de jouissance et, statuant à nouveau de ces chefs, M. et Mme [F] et la SMA SA seront condamnés in solidum à payer à M. [O] [L] et Mme [H] les sommes de 5000 euros au titre du préjudice de jouissance et 5000 euros au titre du préjudice moral.

Sur la responsabilité du notaire :

M. ROCH soutient qu'il y a absence de lien causal entre sa faute et le coût des travaux de réparation, que les préjudices ont été exclusivement causés par les époux [F] et la société AODH en leurs qualités de constructeurs, que le notaire n'a pas vocation à supporter le coût des travaux de réparation qui seraient la conséquence d'une mauvaise exécution des travaux, que le fait d'avoir mentionné une assurance dommages-ouvrage inexistante dans l'acte de vente n'a pas eu pour effet de causer les désordres et malfaçons constatés, que la perte de chance ne peut servir à pallier l'absence de lien causal entre la faute et le préjudice, que la condamnation in solidum est incompatible avec la qualification de perte de chance, que la condamnation in solidum ne peut porter que sur des faits distincts ayant causé un préjudice indivisible, que les consorts [S] n'apportent aucun élément de preuve sur la perte de chance de ne pas avoir souscrit la vente et que la seule éventualité favorable perdue est celle de ne pas avoir pu bénéficier d'une indemnisation plus tôt et sans procédure judiciaire.

M. [O] [L] et Mme [H] font valoir que le notaire a manqué à son obligation de vérifier la souscription de l'assurance dommage-ouvrage et qu'il existe un lien de causalité entre cette indication erronée et le dommage subi, que si le notaire avait correctement exécuté son devoir de conseil et attiré leur attention sur l'absence d'assurance dommages-ouvrage, ils n'auraient pas acquis le bien et auraient évité la totalité du dommage qu'ils subissent, qu'ils auraient pu contraindre les vendeurs à la souscription postérieure de cette assurance, que celle-ci leur aurait permis de bénéficier de conditions plus favorables et de profiter d'une indemnisation et que les époux [F] n'ont pas exécuté la condamnation de première instance ce qui témoigne du risque de ne pas être indemnisé. A titre subsidiaire, ils sollicitent sur le fondement de la perte de chance d'obtenir une indemnisation rapide et de ne pas procéder à l'acquisition de la maison la condamnation du notaire à hauteur de 25% de l'entier préjudice subi.

***

Aux termes de l'article 1382, devenu 1240, du code civil, tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

Il résulte des mentions de l'acte authentique de vente en date du 25 avril 2012 qu'une assurance dommages-ouvrage a été souscrite (Pièce n°14 de M. [O] [L] et Mme [H]).

Cependant, il n'est pas contesté par les parties que cette indication ne correspond pas à la réalité et qu'il n'existe pas d'assurance dommage-ouvrages pour l'immeuble.

M. ROCH, à qui il appartenait, en sa qualité de notaire, de vérifier l'exactitude des déclarations du vendeur concernant la souscription effective de ce contrat d'assurance, a donc commis une faute.

Il convient d'ailleurs de relever que M. ROCH ne conteste pas l'erreur contenue dans l'acte authentique de vente.

Pour autant, il appartient aux acquéreurs de l'immeuble de démontrer que cette faute présente un lien de causalité avec les préjudices dont ils demandent réparation.

Or, la faute de M. ROCH est sans lien avec les désordres décennaux qui ont pour origine l'intervention des époux [F] et de la société AODH.

Dès lors, M. ROCH ne peut-être condamné in solidum avec le vendeur et l'assureur du constructeur à réparer le préjudice résultant de ces désordres, que ce soit les travaux de réparation ou les préjudices complémentaires en découlant.

Au surplus, il n'est pas démontré que M. [O] [L] et Mme [H] ne pourront être indemnisés par leurs vendeurs et l'assureur du constructeur dont la responsabilité décennale est engagée.

En conséquence, le notaire ne pouvant être condamné in solidum avec le vendeur et le constructeur au titre des réparations des désordres de nature décennale affectant l'ouvrage et des préjudices complémentaires, il convient d'infirmer le jugement de ce chef.

M. [O] [L] et Mme [H] soutiennent, à titre subsidiaire, qu'ils ont perdu une chance d'obtenir une indemnisation rapide et de ne pas contracter.

Cependant, ils ne versent aux débats aucun élément pour justifier de cette perte de chance et du préjudice qui en résulterait, se contentant de solliciter à ce titre la condamnation du notaire à hauteur de 25 % de l'entier préjudice .

Il convient donc d'infirmer le jugement et de rejeter toutes les demandes dirigées contre M. ROCH.

Sur le partage de responsabilité et les recours en garantie entre co-obligés :

M. et Mme [F] soutiennent que le tribunal a fixé arbitrairement leur part de responsabilité à hauteur de 50% sans préciser quels travaux ils auraient réalisés, qu'il n'est pas établi qu'ils auraient participé aux travaux faisant l'objet de désordres, que les travaux à l'origine des désordres ont été réalisés par la société AODH, qu'ils n'ont pas assuré la direction des travaux et ne peuvent être considérés comme les maîtres d'oeuvre de l'opération.

La SMA SA fait valoir que les désordres constatés par l'expert judiciaire sont exclusivement imputables à des défauts de conception et de mise en oeuvre des travaux par les époux [F] qui ont assuré la maîtrise d'oeuvre de l'opération.

***

Dans leurs relations entre eux, les responsables ne peuvent exercer de recours qu'à proportion de leurs fautes respectives.

Il résulte du rapport d'expertise que les désordres de la maison sont consécutifs à un non respect des règles de l'art.

La faute de la société AODH, dont il a été démontré qu'elle était intervenue pour les travaux de fondation, maçonnerie, charpente et couverture est donc caractérisée.

Pour autant, les époux [F] sont également responsables pour partie des désordres.

Il a en effet été constaté par l'expert judiciaire qu'il n'y avait eu aucune étude de sol, qu'ils n'avaient pas fait appel à un maître d'oeuvre, qu'il n'y avait eu aucun plan d'exécution ni descriptif des travaux.

Il a précisé que les époux [F] avaient déposé une demande de permis de construire dont les dessins étaient 'surprenants'et que pour le modificatif, ils s'étaient contentés de copies issues de catalogues d'un fabricant de maison avec des rajouts grossiers.

Il a également constaté que les plans avaient été faits par les époux [F] qui avaient assuré la direction des travaux.

Eu égard aux fautes respectives de chacun des intervenants, le partage de responsabilité sera fixé à 50 % pour M. et Mme [F] et 50% pour la société AODH.

Il convient donc d'infirmer le jugement de ce chef.

Sur les frais irrépétibles et les dépens:

Le jugement sera infirmé en ce qui concerne la condamnation aux dépens et frais irrépétibles de M. ROCH dès lors que sa responsabilité n'est pas retenue

Le surplus des condamnations en première instance sera confirmé.

M. et Mme [F] et la SMA SA seront condamnés in solidum aux dépens d'appel et à payer à M. [O] [L] et Mme [H] la somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile avec distraction au profit de la SELARL BERTIN ET BERTIN conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Il convient de rejeter toutes les autres demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement, mais seulement en ce qu'il :

- DIT que pour le surplus les travaux ont été réalisés par M. et Mme [F] personnellement ;

- DIT qu'à défaut de souscription de garantie facultative complémentaire, la SMA est tenue à garantie des seuls dommages matériels causés à l'ouvrage, à l'exclusion des dommages immatériels et des dommages matériels consécutifs ;

- Condamne in solidum M. ROCH à payer à M. [O] [L] et Mme [H] la somme de 268 061 euros TTC en indemnisation du coût de réparation des désordres affectant l'ouvrage, la somme de 3600 euros en indemnisation du préjudice de jouissance, la somme de 2000 euros en indemnisation du préjudice moral et la somme de 4000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamne M. ROCH aux dépens ;

- Fixe la part de responsabilité de M. ROCH à 25 % ;

- Fixe le montant du préjudice de jouissance à la somme de 3600 euros et le montant du préjudice moral à la somme de 2000 euros ;

- Déboute M. [O] [L] et Mme [H] de leurs demandes formées à l'encontre de la SMA SA au titre des préjudices moral et de jouissance ;

- Fixe la part de responsabilité de la société AODH à 25 % ;

Statuant à nouveau de ces chefs :

- Condamne in solidum M. et Mme [F] et la SMA SA à payer à M. [O] [L] et Mme [H] la somme de 5000 euros au titre du préjudice de jouissance ;

- Condamne in solidum M. et Mme [F] et la SMA SA à payer à M. [O] [L] et Mme [H] la somme de 5000 euros au titre du préjudice moral ;

- Rejette toutes les demandes dirigées contre M. ROCH ;

- Fixe la part de responsabilité de la société AODH à 50% ;

Confirme le jugement pour le surplus,

Y ajoutant:

- rejette la demande de M. [O] [L] et Mme [H] de rejet des pièces de M. et Mme [F] ;

- Condamne in solidum M. et Mme [F] et la SMA SA aux dépens d'appel et à payer à M. [O] [L] et Mme [H] la somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile avec distraction au profit de la SELARL BERTIN ET BERTIN conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;

- rejette les autres demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La Greffière La Conseillère exerçant les fonctions de Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 6
Numéro d'arrêt : 18/27827
Date de la décision : 26/02/2021

Références :

Cour d'appel de Paris G6, arrêt n°18/27827 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2021-02-26;18.27827 ?
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