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11/02/2021 | FRANCE | N°19/08335

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 2, 11 février 2021, 19/08335


Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 2



ARRET DU 11 FEVRIER 2021



(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/08335 - N° Portalis 35L7-V-B7D-B7YP2



Décision déférée à la Cour : Décision du 25 Février 2019 -Commission arbitrale des journalistes de PARIS - RG n° 19/00521





APPELANTE



SA LE POPULAIRE DU CENTRE Représentée par le Préside

nt du Conseil d'administration M. [Y] [N].

[Adresse 4]

[Localité 3]

représentée par Me Laure MULLER, avocat au barreau de PARIS, toque : G0529 substitué par Me Anne LAUREN...

Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 2

ARRET DU 11 FEVRIER 2021

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/08335 - N° Portalis 35L7-V-B7D-B7YP2

Décision déférée à la Cour : Décision du 25 Février 2019 -Commission arbitrale des journalistes de PARIS - RG n° 19/00521

APPELANTE

SA LE POPULAIRE DU CENTRE Représentée par le Président du Conseil d'administration M. [Y] [N].

[Adresse 4]

[Localité 3]

représentée par Me Laure MULLER, avocat au barreau de PARIS, toque : G0529 substitué par Me Anne LAURENT, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND

INTIME

Monsieur [X] [M]

[Adresse 2]

[Localité 3]

né le [Date naissance 1] 1966 à [Localité 3]

représenté par Me Julie RODRIGUE, avocat au barreau de PARIS, toque : C1150

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 03 Décembre 2020, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Mme Mariella LUXARDO, Présidente, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Mariella LUXARDO, Présidente

M. François LEPLAT, Président

M. Didier MALINOSKY, Magistrat honoraire

Greffier, lors des débats : M. Olivier POIX

ARRÊT :- CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme LUXARDO, Présidente et par Sihème MASKAR , Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le signataire.

M. [X] [M] a été embauché par la société anonyme Le Populaire du Centre le 1er octobre 1986 et occupait, au dernier état de ses relations contractuelles, le poste de chef de rédaction adjoint en charge du service photographie, en contrat de travail à durée indéterminée.

Le 16 janvier 2017, la société Le Populaire du Centre lui a notifié son licenciement pour faute grave. A cette date, son salaire de référence était de 5.231,79 euros bruts mensuels.

M. [X] [M] a saisi le conseil de prud'hommes de Limoges le 11 mai 2017 aux fins de contester son licenciement et demander la condamnation de son employeur à lui verser diverses indemnités.

Par jugement du 18 septembre 2018, le conseil de prud'hommes de Limoges a requalifié le licenciement pour faute grave en licenciement pour cause réelle et sérieuse et condamné la société Le Populaire du Centre à verser à M. [X] [M] une indemnité de préavis et les congés payés afférents, mais s'est déclaré incompétent pour connaître des demandes portant notamment sur l'octroi d'une indemnité de licenciement, dont la prérogative incombe à la commission arbitrale des journalistes.

M. [X] [M] a interjeté appel de ce jugement auprès de la cour d'appel de Limoges qui, par arrêt du 13 janvier 2020, a considéré que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse.

La société Le Populaire du Centre a formé un pourvoi en cassation le 13 janvier 2020.

Parallèlement, M. [X] [M] a saisi la commission arbitrale des journalistes le 10 avril 2018, afin qu'elle statue sur le montant de l'indemnité de licenciement qui lui est due.

Par décision entreprise du 25 février 2019, la commission arbitrale des journalistes a écarté la faute grave et, au regard d'une ancienneté de 28 années, a :

Fixé à 150.000 euros l'indemnité de licenciement de M. [X] [M] en application de l'article L.7112-4 du code du travail pour la totalité de son ancienneté de 28 années,

Condamné la société anonyme Le Populaire du Centre à payer la somme de 150.000 euros au titre de l'indemnité de licenciement de l'article L.7112-4 du code du travail à M. [X] [M] avec intérêts de droit au taux légal à compter de la connaissance par la société de la saisine de la commission arbitrale ainsi que 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Vu l'appel interjeté le 8 avril 2019 par la société anonyme Le Populaire du Centre;

Vu les dernières écritures signifiées le 20 avril 2020 par lesquelles la société Le Populaire du Centre demande à la cour de :

Vu les dispositions des articles 1480 et suivants du code de procédure civile,

Vu les dispositions de l'article L.7112-4 du code du travail,

Dire et juger recevable et bien fondé le recours en annulation formé par la société Le Populaire du Centre,

En conséquence,

A titre principal,

Annuler la sentence arbitrale rendue par la commission arbitrale des journalistes le "6" février 2019 déposée au tribunal de grande instance de Paris le 25 février 2019 et non signée par les arbitres désignés en ce qu'elle a rejeté la demande de renvoi préjudiciel devant la chambre sociale de la cour d'appel de Limoges et le nécessaire sursis à statuer formé par la société Le Populaire du centre et dit et jugé qu'elle était seule compétente pour apprécier la qualification des frais allégués de faute grave et de son existence en cas de rupture du contrat de travail, tout en considérant ne pas avoir les éléments objectifs et suffisants pour caractériser une faute grave imputable à M. [M], et en fixant à 150.000 euros l'indemnité de licenciement';

Statuant à nouveau dans la limite de la compétence de la commission arbitrale,

Surseoir à statuer dans l'attente de la décision de la chambre sociale de la Cour de cassation suite au pourvoi formé à l'encontre de l'arrêt de la cour d'appel de Limoges du 13 janvier 2020';

A titre subsidiaire,

Si par impossible la cour devait annuler la sentence arbitrale rendue par la commission arbitrale des journalistes le "6" février 2019 déposée au tribunal de grande instance de Paris le 25 février 2019 tout en rejetant la demande de renvoi préjudiciel et de sursis à statuer,

Statuant à nouveau dans la limite de la compétence de la commission arbitrale,

Supprimer purement et simplement l'indemnité de licenciement en application de l'article L.7112-4 du code du travail';

A titre infiniment subsidiaire,

Si par impossible la cour devait annuler la sentence arbitrale rendue par la commission arbitrale des journalistes le "6" février 2019 déposée au tribunal de grande instance de Paris le 25 février 2019 tout en rejetant la demande de renvoi préjudiciel et de sursis à statuer,

Statuant à nouveau dans la limite de la compétence de la commission arbitrale,

Limiter l'indemnité de licenciement en la fixant à 15 mois de salaire';

En tout état de cause,

Débouter M. [M] de sa demande de dommages-intérêts consécutivement au caractère soi-disant dilatoire de la présente procédure initiée par la société Le Populaire du Centre';

Condamner M. [M] à porter et payer à la société Le Populaire du Centre une somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Vu les dernières écritures signifiées le 9 avril 2020 au terme desquelles M. [X] [M] demande à la cour de :

Vu les articles L.7112-3, L.7112-4, D.7112-2, D.7112-3 du code du travail,

les articles 1492, 1494 et 1495 du code de procédure civile,

Rejeter le recours en annulation élevé par la société Le Populaire du Centre contre la décision de la commission arbitrale des journalistes rendue le 25 février 2019 et déposée au greffe du tribunal de grande instance de Paris sous le n°19/00521';

Débouter en conséquence la société Le Populaire du Centre de ses demandes';

A titre subsidiaire,

Confirmer le montant de l'indemnité de licenciement due à M. [M] à la somme de 150.000 euros';

En tout état de cause,

Condamner la société Le Populaire du Centre à payer la somme de 10.000 euros à M. [X] [M] en raison du caractère abusif de la présente procédure';

Condamner la société Le Populaire du Centre à payer à M. [X] [M] la somme de 6.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile';

Condamner la société Le Populaire du Centre aux entiers dépens.

Pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, la cour, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, renvoie aux conclusions qu'elles ont déposées et à la décision déférée.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Selon leurs versions applicables à l'espèce :

- l'article L.7112-2 du code du travail prévoit : "Dans les entreprises de journaux et périodiques, en cas de rupture par l'une ou l'autre des parties du contrat de travail à durée indéterminée d'un journaliste professionnel, la durée du préavis, sous réserve du 3° de l'article L. 7112-5, est fixée à :

1° Un mois pour une ancienneté inférieure ou égale à trois ans ;

2° Deux mois pour une ancienneté supérieure à trois ans.

Toutefois, lorsque la rupture est à l'initiative de l'employeur et que le salarié a une ancienneté de plus de deux ans et de moins de trois ans, celui-ci bénéficie du préavis prévu au 3° de l'article L. 1234-1." ;

- l'article L.7112-3 du code du travail prévoit : "Si l'employeur est à l'initiative de la rupture, le salarié a droit à une indemnité qui ne peut être inférieure à la somme représentant un mois, par année ou fraction d'année de collaboration, des derniers appointements. Le maximum des mensualités est fixé à quinze. "

- l'article L.7112-4 du code du travail prévoit : "Lorsque l'ancienneté excède quinze années, une commission arbitrale est saisie pour déterminer l'indemnité due.

Cette commission est composée paritairement d'arbitres désignés par les organisations professionnelles d'employeurs et de salariés. Elle est présidée par un fonctionnaire ou par un magistrat en activité ou retraité.

Si les parties ou l'une d'elles ne désignent pas d'arbitres, ceux-ci sont nommés par le président du tribunal de grande instance, dans des conditions déterminées par voie réglementaire.

Si les arbitres désignés par les parties ne s'entendent pas pour choisir le président de la commission arbitrale, celui-ci est désigné à la requête de la partie la plus diligente par le président du tribunal de grande instance.

En cas de faute grave ou de fautes répétées, l'indemnité peut être réduite dans une proportion qui est arbitrée par la commission ou même supprimée.

La décision de la commission arbitrale est obligatoire et ne peut être frappée d'appel."

Sur la demande de sursis à statuer formée par la société Le Populaire du Centre :

À titre principal, la société Le Populaire du Centre demande l'annulation de la décision de la commission arbitrale des journalistes pour avoir rejeté sa demande de renvoi préjudiciel devant la chambre sociale de la cour d'appel de Limoges, qui serait, selon elle, seule compétente pour apprécier la qualification des faits reprochés à M. [X] [M].

Mais la commission arbitrale des journalistes a la pleine compétence pour fixer l'indemnité de rupture du contrat de travail à l'initiative de l'employeur due en application de l'article L.7112-4 du code du travail et retenir les critères pour y parvenir, indépendamment de ceux retenus par la juridiction prud'homale, qui conserve la sienne du chef des autres préjudices pour lesquels le journaliste peut demander réparation.

Dans ces conditions, il n'y avait pas lieu à surseoir à statuer dans l'attente de l'arrêt de la cour d'appel de Limoges et c'est donc justement que la commission arbitrale des journalistes a passé outre cette demande, ce que la cour confirme.

Sur la demande de suppression ou de limitation de l'indemnité de licenciement formée par la société Le Populaire du Centre :

Poursuivant l'annulation de la décision entreprise, la société Le Populaire du Centre demande à la cour, à titre subsidiaire, de supprimer toute indemnité de rupture du contrat de travail de M. [X] [M], du fait de la nature et de la gravité des manquements qu'il a commis ou de la minorer à quinze mois de salaire.

A cet égard, elle fait valoir que le licenciement de M. [X] [M] est parfaitement justifié par les déclarations de trois journalistes reporters photographes, qui ont dénoncé des agissements de la part de M. [X] [M], leur responsable, de nature à porter atteinte à leur intégrité physique et mentale, au sens des articles L.1412-1 et L.1412-2 du code du travail ;

Que ces dénonciations ont donné lieu à une enquête, diligentée par le cabinet RH Partners auquel elle l'a confiée, dans le cadre de l'obligation de sécurité dont elle est débitrice, cabinet qui a conclu à une situation extrêmement dégradée ayant atteint un point de non-retour entre M. [X] [M] et son équipe.

Ce faisant la commission arbitrale des journalistes, après que le conseil de prud'hommes de Limoges a requalifié le licenciement pour faute grave de M. [X] [M] en licenciement pour cause réelle et sérieuse par jugement du 18 septembre 2018, a estimé, dans sa décision entreprise du 25 février 2019, insuffisants les éléments objectifs rapportés par la société Le Populaire du Centre pour caractériser une faute grave et l'a condamner à verser à son ancien salarié la somme de 150.000 euros, prenant en compte son ancienneté de 28 années et son salaire de référence.

Force est de constater que, devant la cour, la société Le Populaire du Centre ne rapporte pas davantage d'éléments précis et circonstanciés pour caractériser une faute grave de la part de M. [X] [M].

La cour estimant que la commission arbitrale des journalistes a fait une exacte appréciation de l'état des services de M. [X] [M] au sein de la société Le Populaire du Centre pour lui octroyer une indemnité de rupture du contrat de travail de 150.000 euros par application de l'article L.7112-4 du code du travail, confirmera donc la décision entreprise.

Sur le caractère abusif de la procédure :

M. [X] [M] forme une demande indemnitaire à hauteur de 10.000 euros à l'encontre de la société Le Populaire du Centre pour procédure abusive.

Il fait état d'une volonté de nuire de celle-ci, qui multiplierait les procédures à son encontre alors que la cour d'appel de Limoges, dans son arrêt du 13 janvier 2020, a qualifié son licenciement de licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Le droit d'ester en justice ne trouve sa limite que dans l'abus fait de celui-ci, avec malice, mauvaise foi ou bien lorsqu'il résulte d'une erreur équipollente au dol.

En l'espèce, M. [X] [M] ne caractérise pas de la part de la société Le Populaire du Centre, qui a pu se méprendre sur l'étendue de ses droits à voir modérer l'indemnité qui lui a été allouée par la commission arbitrale des journalistes, des agissements constitutifs d'un abus de droit.

M. [X] [M] verra donc rejetée sa demande de dommages et intérêts formulée de ce chef.

Sur l'article 700 du code de procédure civile :

Il est équitable d'allouer à la société Le Populaire du Centre une indemnité de procédure de 3.000 euros.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire,

Confirme la décision de la commission arbitrale des journalistes entreprise,

Et y ajoutant,

Rejette toutes autres demandes,

Condamne la société anonyme Le Populaire du Centre à payer à M. [X] [M] la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la société anonyme Le Populaire du Centre aux dépens d'appel.

LE GREFFIER, LA PRESIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 2
Numéro d'arrêt : 19/08335
Date de la décision : 11/02/2021

Références :

Cour d'appel de Paris K2, arrêt n°19/08335 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2021-02-11;19.08335 ?
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