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04/02/2021 | FRANCE | N°18/04096

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 5, 04 février 2021, 18/04096


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 5



ARRÊT DU 04 FÉVRIER 2021



(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/04096 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B5D6L



Décision déférée à la cour : jugement du 29 janvier 2018 -tribunal de commerce de PARIS - RG n° 2016026059





APPELANTE



SA COMPTOIR NOUVEAU DE LA PARFUMERIE

Ayant son siège social [Adresse 1]

[Local

ité 2]

N° SIRET : 542 053 285

Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège



Représentée par Me Cyril BOURAYNE de la SELARL BOURAYNE & PREISSL, avocat ...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 5

ARRÊT DU 04 FÉVRIER 2021

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/04096 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B5D6L

Décision déférée à la cour : jugement du 29 janvier 2018 -tribunal de commerce de PARIS - RG n° 2016026059

APPELANTE

SA COMPTOIR NOUVEAU DE LA PARFUMERIE

Ayant son siège social [Adresse 1]

[Localité 2]

N° SIRET : 542 053 285

Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentée par Me Cyril BOURAYNE de la SELARL BOURAYNE & PREISSL, avocat au barreau de PARIS, toque : P0369

INTIMÉE

SASU ANDRE LOGISTIQUE

Ayant son siège social [Adresse 6]

[Localité 4]

N° SIRET : 350 953 683

Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentée par Me Véronique KLOCHENDLER LEVY, avocat au barreau de PARIS, toque : D1991

Ayant pour avocat plaidant Me Isabelle DE THIER, avocat au barreau de ROUEN substituée à l'audience par Me Vincent LEVAUFRE-HOUIS, avocat au barreau de ROUEN

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 22 octobre 2020, en audience publique, devant la cour composée de :

Mme Marie-Annick PRIGENT, présidente de chambre

Mme Fabienne SCHALLER, conseillère

Mme Camille LIGNIERES, conseillère chargée du rapport

qui en ont délibéré,

Greffière, lors des débats : Mme Hortense VITELA-GASPAR

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme Marie-Annick PRIGENT, présidente de chambre et par Mme Hortense VITELA-GASPAR, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS ET PROCÉDURE

La société Comptoir Nouveau de la Parfumerie, anciennement Hermès Parfum (ci-après la société « CNP ») exerce une activité de fabrication de parfums et de produits pour la toilette.

La société André Logistique a pour activité le transport routier de fret de proximité et de logisticien de transport.

Les deux sociétés ont été en relation d'affaires depuis le début des années 2000 pour des prestations de logistiques.

Les parties ont signé un contrat dit « de stockage et de transport » le 2 janvier 2010, aux termes duquel la société André Logistique effectuait le stockage de produits de la société CNP en son entrepôt d'[Localité 4] et exécutait des prestations annexes (mise à disposition de véhicule pour le transfert de produits, manutention, déchargement, référencement informatique des produits, etc.).

Le contrat du 2 janvier 2010 a été conclu pour une durée initiale de deux ans, renouvelable par tacite reconduction chaque année, sauf dénonciation par lettre recommandée six mois avant la date d'expiration de chaque période contractuelle.

Le 25 juillet 2013, la société CNP a invité la société André Logistique à soumissionner à un appel d'offres qu'elle mettait en place afin de revoir son schéma directeur de la logistique. La société CNP précisait qu'elle avait un besoin de 10.000 m2 de stockage en 2015 et de 14.000 m2 en 2016.

Par courriel du 2 septembre 2013, la société André Logistique a adressé sa réponse à cet appel d'offres mais a précisé ne pas pouvoir s'inscrire totalement dans le cahier des charges, ne disposant que de 7.500 m2 de stockage. En décembre 2013, la société André Logistique a atteint ses capacités de stockage. La société CNP a donc confié en 2014 des « éléments séparés » en stockage auprès d'autres prestataires.

Par courrier recommandé du 3 décembre 2014, la société CNP a notifié à la société André Logistique la résiliation du contrat du 2 janvier 2010 avec effet au 31 décembre 2015, indiquant que dans le cadre de l'appel d'offres, elle avait retenu une autre société, la société [Localité 3], pour le stockage de ses produits.

La société André Logistique a contesté cette rupture et demandé à ce que des alternatives soient trouvées, en vain.

Par courrier du 6 janvier 2016, la société André Logistique a mis en demeure la société CNP de lui payer la somme de 349.425,17 euros TTC ' soit 291.187,64 euros HT ' en raison de la rupture fautive des relations commerciales. En réponse, la société CNP a refusé de faire droit à cette demande, notamment en raison du respect du préavis prévu au contrat.

Par acte d'huissier de justice du 14 avril 2016, la société André Logistique a assigné la société CNP devant le tribunal de commerce de Paris afin d'obtenir réparation des préjudices qu'elle estime avoir subi en raison du non-respect de ses obligations contractuelles jusqu'au terme du contrat par la société CNP.

Par jugement du 29 janvier 2018, le tribunal de commerce de Paris a :

-condamné la société CNP à payer à la société André Logistique la somme de 198.239 euros à raison de la responsabilité contractuelle encourue, à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice causé par la diminution des prestations confiées avant le terme du contrat,

-condamné la société CNP à payer à la société André Logistique la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

-débouté les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires,

-ordonné d'office l'exécution provisoire,

-condamné la société CNP aux dépens.

Par déclaration du 22 février 2018, la société CNP a interjeté appel de ce jugement.

Par conclusions notifiées par le RPVA le 18 mai 2018, la société CNP demande à la cour de :

Vu les articles 1134 et 1315 du code civil,

-infirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Paris le 29 janvier 2018 en ce qu'il a condamné la société Comptoir Nouveau De La Parfumerie à payer à la société André Logistique la somme de 198.239 euros à titre de dommages et intérêts, de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens ;

-le confirmer en ce qu'il a débouté la société André Logistique de ses demandes plus amples ou contraires ;

Statuant à nouveau,

-débouter la société André Logistique de l'intégralité de ses demandes ;

-condamner la société André Logistique à payer à la société Comptoir Nouveau De La Parfumerie la somme de 20.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de l'instance.

Les conclusions notifiées par le RPVA le 3 septembre 2018 par la société André Logistique ont été déclarées irrecevables du fait de leur tardiveté par ordonnance du conseiller de la mise en état rendue le 17 octobre 2019.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 24 septembre 2020.

La cour renvoie, pour un plus ample exposé des faits, prétentions et moyens des parties, à la décision déférée et aux écritures susvisées, en application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS

A titre préliminaire, il convient de relever que l'intimée n'a pas valablement conclu en cause d'appel et que conformément aux dispositions de l'article 954 du code de procédure civile, dans sa version applicable aux faits de l'espèce, « La partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s'en approprier les motifs. »

Sur la responsabilité contractuelle de la société CNP

L'appelante critique le jugement qui l'a condamnée à payer des dommages et intérêts sur le fondement de la responsabilité contractuelle du fait de la diminution avant le terme du contrat des prestations confiées à la société André Logistique. Elle soutient que la réduction des commandes n'est pas en soi constitutive d'un abus ou d'une faute contractuelle dès lors qu'aucun engagement annuel de quantité minimale de commande n'a été pris ; que l'article 8 du contrat du 2 janvier 2010 la liant à la société André Logistique énonce la durée du contrat mais aucun engagement de volume de palettes stockées par la société André Logistique ou de chiffre d'affaires correspondant, ni d'obligation d'exclusivité ou de réservation d'espaces dédiés à la société CNP, la seule obligation des parties étant le respect d'un préavis. Elle soutient à ce titre qu'un préavis largement supérieur à celui fixé contractuelle a été respecté, la société CNP ayant envoyé sa lettre recommandée informant de la procédure d'appel d'offres et témoignant de sa volonté de ne pas reconduire le contrat dès le 3 décembre 2014, soit plus de six mois avant l'échéance du terme, comme cela était imposé par les dispositions de l'article 8 précité. Elle souligne que conformément à cet article 8, aucune indemnité n'était due par la société décidant de la non reconduction du contrat.

L'intimée est réputée avoir demandé la confirmation du jugement.

Sur ce ;

Vu les articles 1134 et 1135 anciens du code civil dans leur version applicables aux faits de l'espèce,

Vu le contrat de stockage et de transport conclu entre les parties le 2 janvier 2010 (pièce 1 de CNP),

Vu l'article 8 de ce contrat sur la durée du contrat qui prévoit : « le présent contrat est conclu pour une durée de deux ans à compter de sa signature. Il se renouvellera ensuite par tacite reconduction d'année en année, mais sans jamais devenir un contrat à durée indéterminée. L'une ou l'autre des Parties pourra y mettre fin au terme de chaque période contractuelle, y compris la première par envoi d'une lettre recommandée six mois avant la date d'expiration de chaque période contractuelle.

Il est expressément convenu entre les Parties que la non reconduction du contrat, à l'initiative d'une des Parties, ne donnera lieu à aucune indemnité envers l'autre Partie ».

Vu la lettre de résiliation du contrat émanant de la société CNP en date du 3 décembre 2014 indiquant :

« A l'occasion de l'appel d'offres pour la résiliation de prestations logistiques communiqué par mail en date du 25 juillet 2013, nous vous avions indiqué lors d'un déjeuner (...) que si la société n'était pas retenue, la relation entre nos deux sociétés cesserait au 31 décembre 2015. D'autre part, nous avons à deux reprises en mars et avril 2014 (') insisté sur le fait que nous étions toujours en appel d'offre et nous pourrions donc mettre fin à vos prestations de stockage et de transports à la date anniversaire du contrat actuel.

En début d'année, nous avons stoppé la prestation de stockage des éléments séparés dans vos entrepôts. Nous vous confirmons, par la présente, que la société [Localité 3] a été retenue dans le cadre de l'appel d'offres précité.

Jusqu'au 31 décembre 2015, votre société continuera par conséquent d'assurer les prestations suivantes, conformément aux dispositions du contrat de stockage et de transport conclu le 2 janvier 2010 :

-Mise à disposition d'un véhicule dédié pour effectuer les transferts de produit entre les différents sites ([Localité 3]-[Localité 5]-[Localité 4]);

-le stockage de produits finis jusqu'en juin 2015, date à laquelle tous les produits finis seront transférés à [Localité 3];

-le stockage des éléments de PLV;

-la manutention, le chargement et déchargement des éléments de PLV dans l'entrepôt d'André Logistique »;

-le référencement informatique des éléments de PLV;

-la préparation et la mise à disposition des éléments de PLV pour enlèvement par Hermès Parfums elle-même ou ses représentants transporteurs prestataires. »

A la fin de sa lettre de résiliation, la société CNP mentionne les tarifs de chacune des prestations et sollicite un accord de la société André Logistique quant aux prestations et aux tarifs tels que mentionnés. (pièce 3 de CNP)

Il n'est pas contesté que la société André Logistique a eu connaissance de l'appel d'offres initié par la société CNP en juillet 2013 et que par courriel du 2 septembre 2013, elle indiquait qu'elle ne pouvait « pas réellement [s']inscrire dans ce schéma n'ayant pas la réserve de surface demandée ([sa] surface actuelle étant de 2Hectare3 », et qu'elle pourrait « seulement envisager comme lors d'une étude précédente de réorganiser l'ensemble du site par tranche (Construction et réhabilitation) afin de répondre aux critères demandés avec la nécessité d'une étude par cabinet spécialisé si cela pouvait être envisageable ».(pièce 2 de CNP)

La résiliation du contrat à l'initiative de la société CNP est donc intervenue à la suite d'un appel d'offres auquel la société André Logistique a pu participer mais à l'issue duquel cette dernière n'a pas été retenue pour des raisons objectives de capacité de stockage offerte par le prestataire.

La société CNP a accordé à la société André Logistique un préavis d'une durée supérieure à celle prévue dans le contrat qui était de 6 mois, soit du 4 décembre 2014 au 31 décembre 2015.

Les premiers juges ont estimé que la société CNP avait engagé sa responsabilité contractuelle envers la société André Logistique en ce que « les variations constatées dans le niveau des prestations confiées ne sont pas dues aux variations de la production non conventionnellement garanties ; mais qu'elles sont pour l'essentiel dues à la décision de CNP de réorganiser sa logistique stockage et de transférer à [Localité 3] l'activité confiée à la société André Logistique sans attendre le terme du contrat qui la liait à CNP ».

La demande en indemnisation de la société André Logistique est fondée sur la responsabilité contractuelle, et non pas sur une rupture brutale prévue par les dispositions de l'article .442-6, I, 5° du code de commerce.

Par conséquent, il convient d'examiner si le contrat été exécuté loyalement jusqu'à son terme par la société CNP. Or, il ressort des termes du contrat et de la lettre de résiliation qui indique les modalités d'exécution du préavis en se référant au contrat que la société CNP ne s'est jamais engagée sur des volumes minima de prestations, mais seulement sur un type de prestations demandées et sur leur tarifs.

La société CNP a payé les prestations exécutées par la société André Logistique au tarif convenu contractuellement pour un total de 35.598 palettes confiées à la société Andre Logistique en 2015, soit en moyenne 2.967 palettes par mois. Elle n'a pas été déloyale sur la baisse progressive du volume des prestations demandées à la société André Logistique pendant la période de préavis dont une partie était transférée à la société [Localité 3], en ce qu'elle avait informé très clairement son cocontractant du fait qu'à l'issue de l'appel d'offres lancé en 2013 la société [Localité 3] avait été choisie pour les prestations logistiques.

Il n'est donc pas démontré que la société CNP a engagé sa responsabilité contractuelle envers la société André Logistique et le jugement l'ayant condamnée à indemniser la société André Logistique à ce titre sera donc infirmé.

Sur les dépens et frais

La société André Logistique succombe à l'instance. Les dispositions du jugement relatives aux dépens et aux frais irrépétibles seront infirmées. la société André Logistique sera condamnée à supporter les dépens de première instance et les dépens d'appel. Il est équitable que la société André Logistique participe aux frais irrépétibles engagés par la société CNP à hauteur de 5.000 euros.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant publiquement et contradictoirement,

INFIRME le jugement entrepris ;

Statuant à nouveau,

DÉBOUTE la société André Logistique de sa demande de dommages et intérêts sur le fondement de la responsabilité contractuelle ;

CONDAMNE la société André Logistique à payer à la société CNP la somme de 5000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la société André Logistique aux dépens de première instance et d'appel.

Hortense VITELA-GASPAR Marie-Annick PRIGENT

Greffière Présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 18/04096
Date de la décision : 04/02/2021

Références :

Cour d'appel de Paris I5, arrêt n°18/04096 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2021-02-04;18.04096 ?
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