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27/01/2021 | FRANCE | N°19/20019

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 15, 27 janvier 2021, 19/20019


Grosses délivrées aux parties le :



RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS









COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 15



ORDONNANCE DU 27 JANVIER 2021



(n°8, 14pages)







Numéro d'inscription au répertoire général : 19/20019 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CA4RC



Décision déférée : Ordonnance rendue le 05 Septembre 2017 par le Juge des libertés et de la détention du Tribunal de Grande Instance de PARIS



Nature de la décision : C

ontradictoire



Nous, Elisabeth IENNE-BERTHELOT, Conseillère à la Cour d'appel de PARIS, déléguée par le Premier Président de ladite Cour pour exercer les attributions résultant de l'article ...

Grosses délivrées aux parties le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 15

ORDONNANCE DU 27 JANVIER 2021

(n°8, 14pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 19/20019 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CA4RC

Décision déférée : Ordonnance rendue le 05 Septembre 2017 par le Juge des libertés et de la détention du Tribunal de Grande Instance de PARIS

Nature de la décision : Contradictoire

Nous, Elisabeth IENNE-BERTHELOT, Conseillère à la Cour d'appel de PARIS, déléguée par le Premier Président de ladite Cour pour exercer les attributions résultant de l'article L16B du Livre des procédures fiscales, modifié par l'article 164 de la loi n°2008-776 du 04 août 2008 ;

assistée de Véronique COUVET, greffier lors des débats et de la mise à disposition ;

Après avoir appelé à l'audience publique du 25 novembre 2020 :

LA société LCA PARTNERS SARL société de droit luxembourgeois

prise en la personne de ses co-gérants

Élisant domicile au cabinet de Me Antoine LANDON

[Adresse 3]

[Localité 7]

LA société TRICATEL SARL société de droit luxembourgeois

prise en la personne de ses co-gérants

Élisant domicile au cabinet de Me Antoine LANDON

[Adresse 3]

[Localité 7]

Représentées et assistées de Me Antoine LANDON, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE, toque : 1701

APPELANTES

et

LA DIRECTION NATIONALE D'ENQUETES FISCALES

[Adresse 4]

[Localité 8]

Représentée et assistée de Me Jean DI FRANCESCO de la SELARL URBINO ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0137

INTIMÉE

Et après avoir entendu publiquement, à notre audience du 25 novembre 2020, l'avocat des appelantes, et l'avocat de l'intimée ;

Les débats ayant été clôturés avec l'indication que l'affaire était mise en délibéré au 27 janvier 2021 pour mise à disposition de l'ordonnance au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

Avons rendu l'ordonnance ci-après :

Le 5 septembre 2017 le juge des libertés et de la détention (ci-après JLD) du Tribunal de Grande Instance (ci-après TGI ) de PARIS a rendu, en application de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales (ci-après LPF), une ordonnance à l'encontre de :

-La société TRICATEL SARL représentée par ses administrateurs [M] [A], [J] [V], [N] [C] et [R] [Y], dont le siège social est sis [Adresse 6], et qui a pour objet le conseil économique et également la prise de participations sous quelque forme que ce soit , dans dessociétés luxembourgeoises et étrangères et toutes autres formes de placement, l'acquisition par achat, souscription ou tout autre manière ainsi que l'aliénation par vente , échange ou toutes autre manière de titres, obligations, créances, billets et autres valeurs de toutes espèces, l'administration, le contrôle et le développement de telles participations.

-La société LCA PARTNERS SARL représentée par ses administrateurs [M] [A], [J] [V], [N] [C] et [R] [Y], dont le siège social est sis [Adresse 6] au Luxembourg, et qui a pour objet le conseil économique et également la prise de participations sous quelque forme que ce soit, dans des sociétés luxembourgeoises et étrangères et toutes autres formes de placement, l'acquisition par achat, souscription ou tout autre manière ainsi que l'aliénation par vente , échange ou toutes autre manière de titres, obligations, créances, billets et autres valeurs de toutes espèces, l'administration, le contrôle et le développement de telles participations.

L'ordonnance autorisait des opérations de visite et saisie dans les lieux suivants :

-locaux et dépendances sis [Adresse 2], susceptibles d'être occupés par la SAS WSN DEVELOPPEMENT et /ou la SARL XC Conseil et / ou la SARL BF CONSEIL et/ou la SC CLERFO et/ou la SCI COUDOU et/ ou la SCI TOURIA et/ ou l'individsion avec personne morale BF CONSEIL XL CONSEIL et/ou le groupement foncier agricole GFA OUTDOOR et/ ou la La société TRICATEL SARL et/ ou la société LCA PARTNERS SARL

-locaux et dépendances sis [Adresse 1], susceptibles d'être occupés par [M] [A] et/ou [E] [G] et/ou [M] [S] et/ou [M] [H] et/ou la SARL LA NOMADE GOURMANDE.

-locaux et dépendances sis [Adresse 5], susceptibles d'être occupés par [J] [V] et/ou [Z] [P] et/ou [J] [U].

L'autorisation de visite et saisie des lieux susmentionnés était délivrée aux motifs que les sociétés de droit luxembourgeois développeraient sur le territoire national une activité commerciale, sans souscrire les déclarations fiscales correspondantes et ainsi omettrait de passer les écritures comptables y afférentes.

Et ainsi serait présumée s'être soustraite et/ou se soustraire à l'établissement et au paiement des impôts sur les bénéfices et de la Taxe sur la Valeur Ajoutée (TVA), en se livrant à des achats ou des ventes sans facture, en utilisant ou en délivrant des factures ou des documents ne se rapportant pas à des opérations réelles ou en omettant sciemment de passer ou de faire passer des écritures ou en passant ou en faisant passer sciemment des écritures inexactes ou fictives dans des documents comptables dont la tenue est imposée par le Code général des impôts (articles 54 et 209-I pour l'IS et 286 pour la TVA).

L'ordonnance était accompagnée de 66 pièces annexées à la requête.

Il ressortirait des éléments du dossier que la société luxembourgeoise TRICATEL SARL qui a pour objet le conseil économique est contrôlée majoritairement par M [M] [A] et que la société LCA PARTNERS SARL qui a le même objet est est contrôlée majoritairement par M [J] [V].

Ces deux sociétés semblent domiciliées à l'adresse du groupe ALPHA MANAGEMENT SERVICES au Luxembourg qui propose des services en matière de fiscalité.,[N] [C] et [R] [Y] deux gérants des sociétés TRICATEL SARLet LCA PARTNERS SARL sont membres du groupe ALPHA MANAGEMENT SERVICES, les sociétés TRICATEL SARL et LCA PARTNERS SARL disposeraient de moyens d'exploitation inexistants ou très limités au Luxembourg.

Les principaux actionnaires des sociétés TRICATEL SARLet LCA PARTNERS SARL résident en France.Ainsi les moyens humains de la société TRICATEL SARL semblent au moins pour partie localisés sur le territoire national.Selon les éléments fournis par l'administration fiscale, les sociétés TRICATEL SARLet LCA PARTNERS SARL ne semblent disposer d'aucun moyen huain et matériel pour réaliser une activité commerciale au Luxembourg : deux de ses administrateurs étant domiciliés à [Localité 9], les deux autres étant à titre principal administrateurs de sociétés fiduciaires et comptables.

Les sociétés TRICATEL SARLet LCA PARTNERS SARL ont acquis en décembre 2013 des actions de la SAS WSN DEVELOPPEMENT auprès de la SARL XC CONSEIL ( dirigée par [M] [A])et auprès de la SARL BF CONSEIL (dirigée par [V] [J]) pour un montant de 8 763 414 euros, la SAS WSN DEVELOPPEMENT étant leader dans l'organisation de salons professionnels de prêt à porter et accessoires de mode à [Localité 9].

A partir de 2014, la SAS WSN DEVELOPPEMENT a distribué des dividendes aux sociétés TRICATEL SARL et LCA PARTNERS SARL en remplacement des SARL XC CONSEIL et BF CONSEIL.

Selon le fichier de traitement de la TVA intracommunautaire, la SAS WSN DEVELOPPEMENT a réalisé à titre principal des acquisitions intracommunautaires (prestations de services) (pièce 14): de la société MARKET MANAGEMENT LTD, de la société FIDANCIAL SL, de la société FAMILITYSA, de la société TRICATEL SARL et de la société LCA PARTNERS SARL .

Dès lors il en résulte que la société SAS WSN DEVELOPPEMENT bénéficie de manière régulière de prestations de services facturées par les sociétés FIDANCIAL SL, MARKET MANAGEMENT LTD, TRICATEL SARLet LCA PARTNERS SARL et de manière ponctuelle par la société FAMILITY SA.

Selon les pièces 2-1, 2-2, 1-1, 1-2, 2 et 7, il peut -être présumé que les prestations facturées par les sociétés TRICATEL SARL et LCA PARTNERS SARL à la SAS WSN DEVELOPPEMENT sont relatives au développement des salons professionnels organisés par cette dernière.

Les montants facturés par la société MARKET MANAGEMENT LTD (société commerciale irlandaise établie à Dublin) à la société française SAS WSN DEVELOPPEMENT (3 407 659 euros en 2014-2015) semblent en partie neutralisés, par des charges facturées par les sociétés TRICATEL SARLet LCA PARTNERS SARL à la société irlandaise (2 388 267 euros) .

Ainsi il peut être présumé que les prestations facturées à la société MARKET MANAGEMENT LTD par les sociétés TRICATEL SARL et LCA PARTNERS SARL sont liées au développement des salons professionnels organisés par la française SAS WSN DEVELOPPEMENT , dont elles sont respectivement président et directeur général.

Il résulte des éléments précités que :

[M] [A] et [J] [V], actionnaires des deux sociétés luxembourgeoises TRICATEL SARL et LCA PARTNERS SARL, sont domiciliés sur le territoire national et sont connus pour être les fondateurs de la SAS WSN DEVELOPPEMENT , leader dans l'organisation de salons professionnels tendances dans le domaine de la mode.

Les sociétés TRICATEL SARL et LCA PARTNERS SARL utilisent les servcices du groupe ALPHA MANAGEMENT, spécialisé en conseil fiscal et domiciliation.

Les sociétés TRICATEL SARL et LCA PARTNERS SARL perçoivent le dividendes de la SAS WSN DEVELOPPEMENT, suite à l'acquisition ds actions de cette dernière auprès de sociétés détenues à titre principal par MM [M] [A] et [J] [V].

Les sociétés TRICATEL SARL et LCA PARTNERS SARL perçoivent par ailleurs, de la SAS WSN DEVELOPPEMENT , des revenus conséquents relatifs à des prestations de services facturé par l'intermédiaire de la société MARKET MANAGEMENT LTD.

Pour autant, ni MARKET MANAGEMENT LTD, ni les sociétés TRICATEL SARL et LCA PARTNERS SARL ne semblent disposer des moyens pour réaliser des activités commerciales et notamment des prestations liées au développement dessalons rofessionnels.

Les sociétés TRICATEL SARL et LCA PARTNERS SARL disposent de moyens humains localisés sur le territoire national pour réaliser au moins une partie de leurs activités commerciales.

Attendu dès lors que, compte tenu de l'eensemble de ces éléments, les sociétés TRICATEL SARL et LCA PARTNERS SARL réaliseraient tout ou partie de leurs activités commerciales depuis le teritoire national, ne disposant pas au Luxembourg de moyens humains et matériels pour y développer leurs activités depuis le territoire national, sans souscrire les déclarations fiscales y afférentes et en omettant de passer les écritures comptables correspondantes.

Attendu qu'en raison des liens commerciaux existants entre les sociétés TRICATEL SARL et LCA PARTNERS SARL, SAS WSN DEVELOPPEMENT, les SARL XC CONSEIL et BF CONSEIL, notamment, le JLD a autorisé par ordonnance du 5 septembre 2017, la DNEF à procéder aux visites et saisies nécessitées par la recherche de la preuve des agissements présumés dans les lieux ou des documents et des supports d'informations illustrant la fraude présumée sont susceptibles de se trouver, à savoir :

-locaux et dépendances sis [Adresse 2], susceptibles d'être occupés par la SAS WSN DEVELOPPEMENT et /ou la SARL XC Conseil et / ou la SARL BF CONSEIL et/ou la SC CLERFO et/ou la SCI COUDOU et/ ou la SCI TOURIA et/ ou l'individsion avec personne morale BF CONSEIL XL CONSEIL et/ou le groupement foncier agricole GFA OUTDOOR et/ ou la La société TRICATEL SARL et/ ou la société LCA PARTNERS SARL

-locaux et dépendances sis [Adresse 1], susceptibles d'être occupés par [M] [A] et/ou [E] [G] et/ou [M] [S] et/ou [M] [H] e /ou la SARL LA NOMADE GOURMANDE.

-locaux et dépendances sis [Adresse 5], susceptibles d'être occupés par [J] [V] et/ou [Z] [P] et/ou [J] [U].

Le 2 octobre 2017, les sociétés TRICATEL SARL et LCA PARTNERS SARL ont interjeté appel de l'ordonnance du JLD ( RG 17/ 18104) et ont déposé une déclaration de recours contre les opérations de visite et saisies .

L'affaire a été audiencée pour être plaidée le 21 mars 2018, une radiation a été ordonnée par mention au dossier le 21 novembre 2018.

Les sociétés TRICATEL SARL et LCA PARTNERS SARL ont demandé la réinscription de l'affaire après radiation le 8 novembre 2019, seulement en ce qui concerne l'appel contre l'ordonnance du JLD (RG 19/20019).

L'affaire a été audiencée pour être plaidée le 1er avril 2020, l'audience n'a pu se tenir du fait de l'Etat d'urgence sanitaire (confinement national), l'affaire a été renvoyée pour être plaidée le 25 novembre 2020, puis mise en délibéré au 27 janvier 2021.

SUR L'APPEL :

Par conclusions du 8 novembre 2019 et conclusions du 25 novembre 2020, Les sociétés appelantes soutiennent :

Rappel des faits et de la procédure .

Les parties appelantes, les sociétés TRICATEL SARL et LCA PARTNERS SARL, rappellent l'historique de leur création, eur activité au sein de la WSN DEVELOPPEMENT et leur fonctionnement . Il est rappelé l'ordonnance du JLD du 5 septembre 2017 autorisant les opérations de visite domiciliaire, dont appel.

DISCUSSION .

Le recours à la procédure exceptionnelle de l'article L 16B nécessite que l'administration fiscale justifie de l'existence d'un impôt et que le 'contribuable' s'y soustrait. Les motifs de l'ordonnance sont rappelés. Selon les appelantes, l'ordonnance sera infirmée dans la mesure ou :

- aucune présomption de fraude ne peut sérieusement être établie à l'encontre des sociétés.

- la mesure ordonnée n'apparaît pas proportionnée au regard de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

I Sur l'absence d'éléments faisant présumer l'existence d'une fraude :

L'article L 16B du LPF exige l'existence de présomptions.

Les appelantes citent des décisions de jurisprudence selon lesquelles doit être infirmée l'ordonnance qui retient des éléments insuffisants, incomplets ou inexacts pour caractériser les présomptions de fraude. Le premier président saisi en appel doit analyser si l'administration fiscale n'a pas omis de présenter au JLD des éléments à décharge de nature à remettre en cause l'existence d'une présomption de fraude fiscale (Cass com 11 janvier 2017, n° 15-22-796).

-La logique économique de la création des sociétés LCA PARTNERS et TRICATEL.

Selon la jurisprudence, il n' y a pas de présomption de fraude lorsque l'organisation reprochée répond à une 'stratégie économique cohérente ' (A de Douai, 6 juillet 2017, n° 16/ 11693).

Au cas présent, l'administration fiscale a méconnu la logique économique présidant la création des sociétés TRICATEL SARL et LCA PARTNERS SARL en assimilant leur activité à celle de la WSN DEVELOPPEMENT, or l'activité des sociétés leur est propre. L'administration a fait un amalgame coupable en présentant l'activité des sociétés identiques à la société WSN DEVELOPPEMENT pour obtenir l'autorisation de visite auprès du juge.

-La nature de l'activité des sociétés appelantes et les moyens nécessaires.

Les appelantes contestent le fait que l'administration présuppose que les sociétés auraient besoin de moyens matériels et humains importants comme s'il s'agissait d'une activité de production de biens manufacturés, alors que la quasi totalité du revenu des sociétés n'est pas du chiffre d'affaire mais est constitué de produits financiers, provenant pour l'essentiel des dividendes versés par la société WSN DEVELOPPEMENT et donc de revenus purement passifs qui nécessitent très peu de moyens. Sont rappelés les revenus des sociétés constitués d'un pourcentage important en produits financiers.

Quant au chiffre d'affaire , il est constitué en partie de redevances de marques détenues par les sociétés et par une activité de développement de congrès pour l'organisation duquel il est fait appel à un prestataire. Ces activités nécessitent très peu de moyens.

Selon les conclusions, les sociétés TRICATEL SARL et LCA PARTNERS SARL auraient-elles exercé leur activité en France qu'elles n'auraient pas plus de moyens.

Sont rappelées les décisions des Cours d'appel de Douai et Rennes qui ont censuré des ordonnances de JLD du fait d'éléments trop ténus retenus par l'administration fiscale.

-Sur les relations avec la société MARKET MANAGEMENT LTD.

La présomption de fraude imputée à tort par l'administration fiscale repose en partie sur les relations de la société MARKET MANAGEMENT LTD avec les sociétés appelantes.Selon l'administration fiscale, la société MARKET MANAGEMENT LTD serait une 'coquille vide', créée par messieurs [J] et [M] pour que les sociétés TRICATEL SARL et LCA PARTNERS SARL facturent à travers elle des prestations en réalité destinées à la société WSN DEVELOPPEMENT, voire des prestations fictives. Cette insinuation ne repose sur aucun élément tangible et est de nature à induire en erreur le JLD, en effet la société MARKET MANAGEMENT LTD existe depuis 20 ans, elle a pignon sur rue , elle est un acteur spécialisé et reconnu dans le commerce international.La société WSN DEVELOPPEMENT a fait appel à elle pour une mission de commercialisation auprès d'exposants de leur territoire et de promotion de salons. Les sociétés TRICATEL SARL et LCA PARTNERS SARL ont conclu des contrats de mandat selon lesquels la société MARKET MANAGEMENT devait assurer l'organisation de congrès pour l'évènement ' fashion days in', les prestations de cette société étaient donc importantes , elles étaient différentes des salons de la société WSN DEVELOPPEMENT. Enfin, si des sommes sont facturées par les sociétés au titre de prestations de services communautaires à la société MARKET MANAGEMENT, c'est au titre du contrat de mandat. Dans une approche économique, la rémunération de la société MARKET MANAGEMENT et ses frais doivent être intégrés pour comprendre les charges engagées pour chaque congrès et la marge réalisée par les sociétés. Ainsi en aucun cas les montants de prestations de services communautaires facturés par les sociétés à la société MARKET MANAGEMENT ne correspondent aux montants facturés par ailleurs par la société MARKET MANAGEMENT à la société WSN DEVELOPPEMENT .

Les allégations de l'administration fiscale sont d'ailleurs démenties par les pièces qu'elle produit et pas les éléments dont elle pouvait disposer en faisant une simple recherche sur internet.( Piècrs 1, 2 7 et 17 de la requête).

-Sur le détournement de procédure.

Ce qui est reproché aux sociétés TRICATEL SARL et LCA PARTNERS SARL est d'avoir racheté les participations détenues par les sociétés BF CONSEIL et XC CONSEIL dans le capital de la société WSN DEVELOPPEMENT et d'obtenir le versement de dividendes de la société WSN DEVELOPPEMENT, or cela laisse à penser que des millions d'euros échapperaient à l'impôt en France, ce qui est déloyal, alors que les opérations de cession ont été faites en toute transparence et ont été imposées en France, et que si les dividendes sont versés c'est que la société WSN DEVELOPPEMENT a réalisé un bénéfice imposé en France.

Même s'il existait une présomption d'une quelconque fraude concernant les cessions et la perception des dividendes, ces présomptions ne relèveraient pas du champ de l'article L 16B du LPF (jurisprudence citée).

-Sur l'absence d'élément intentionnel.

Selon les parties appelantes, les termes même de l'article L 16 B du LPF témoignent de la nécessité de caractériser un élément intentionnel pour établir des présomptions de fraude ( article cité), dès lors le recours à la procédure exceptionnelle de visite et de saisie domiciliaire est subordonné à ce qu'il existe une volonté d'éluder l'impôt, à la caractérisation d'un élément intentionnel d'un comportement frauduleux. la procédure de visite domiciliaire se justifie pour garantir la collecte d'éléments de preuve par l'effet de surprise, dans le cas où les procédures ordinaires seraient vouées à l'échec. Or au cas présent l'administration fiscale a constaté certains faits dans les pièces qu'elle a elle même produites( pièces 10-1 et 10-2), il n' y a donc aucune opacité que permettent certaines législations utilisées par les fraudeurs pour masquer leurs agissements. Aucune intention frauduleuse ne peut donc être reprochée aux sociétés TRICATEL SARL et LCA PARTNERS SARL. Pour l'administration fiscale le seul fait qu'une société soit établie au Luxembourg semble constituer une présomption de fraude, alors que le Luxembourg n'est pas une zone de non droit et que les impositions auxquelles sont soumises les sociétés TRICATEL SARL et LCA PARTNERS SARL y sont importantes, et que ces sociétés n'ont fait qu'exercer leur droit de liberté d'établissement en Europe.

L'ordonnance devra être annulée faute du moindre élément matériel ou intentionnel faisant présumer l'existence d'une fraude.

- Sur l'absence de présentation par l'administration fiscale au juge des libertés et de la détention d'éléments à décharge.

Les parties appelantes allèguent que l'omission par l'administration fiscale dans sa requête d'éléments à décharge qui auraient été de nature à remettre en cause les éléments retenus au titre de l'existence d'une présomption de fraude fiscale, entraine la nullité de l'ordonnance, les parties citent des décisions de la cour de cassation ( Cass com 11 janvier 2017 et cass com du 14 octobre 2020). Selon les parties appelantes, il ne saurait en être autrement lorsque l'administration a totalement occulté des démarches du contribuable auprès de l'administration , qui sont des éléments permettant de porter une autre appréciation du caractère prétendument ' frauduleux' des agissements reprochés, or en l'espèce l'administration fiscale ne fait pas état des nombreuses demandes de dégrèvements faites par les sociétés concluantes depuis 2015.

Pour ce seul motif, le président annulera l'ordonnance du JLD.

II Sur l'absence de controle de proportionnalité quant à l'autorisation de la visite domiciliaire

Les sociétés appelantes rappellent l'article 8 de la CEDH et la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'Homme selon laquelle des perquisitions ou visites et saisies opérées dans les locaux d'une société commerciale portent atteinte aux droits protégés par l'article 8 de la Convention ( Société Colas Est et autres c/ France du 15 juillet 2003).

Selon le Doyen Hatoux, cité par les parties appelantes, 'cette exigence [le controle de proportionnalité de la mesure] implique une recherche concrète dans chaque cas ( Feuillet rapide 51/09, inf 14).

Le JLD doit donc vérifier in concreto si les mesures de visite et de saisie domiciliaire sont proportionnées, en vérifiant notamment qu'aucun autre moyen à la disposition de l'administration fiscale ne permet d'atteindre le but recherché. Or le JLD n'a procédé à aucun contrôle de proportionnalité. Le juge aurait dû indiquer en quoi les moyens déjà offerts à l'administration fiscale, tel que la procédure de contrôle inopiné prévu par l'article L 47 du LPF ne permettaient pas de recueillir les éléments de preuve recherchés.Il y a donc lieu d'annuler l'ordonnance de ce chef.

Compte tenu des circonstances de l'espèce, il apparaitrait inéquitable de laisser aux appelantes la charge des frais irrépétibles qu'elles se sont vus contraintes d'engager pour faire valoir leurs droits dans le cadre de la présente instance.Les appelantes sollicitent 5000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

En conclusion, il est demandé de :

-Annuler l'ordonnance rendue par le JLD du Tribunal de grande instance de Paris en date du 5 septembre 2017 ;

Et en conséquence,

-Annuler les opérations de visite et de saisies domiciliaires autorisées par cette ordonnance ;

-Ordonner la destruction de toute copie des documents dont la saisie est annulée, à charge pour l'administration de justifier de la destruction effective de ces documents dans un délai de 8 jours à compter de la signification de l'ordonnance , sous astreinte de 1000 euros par jour de retard jusqu'à la justification effective de la destruction de ces documents ;

-Se réserver la faculté de liquider l'astreinte ainsi ordonnée ;

-Dire et juger que l'administration fiscale sera rétroactivement réputée ne jamais avoir détenu les pièces saisies ;

-Condamner la DNEF à verser la somme de 5000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

-Condamner la DNEF aux entiers dépens.

Par conclusions du 20 février 2020 et conclusions du 25 novembre 2020 l'administration fiscale fait valoir :

1 Un rappel préalable de la procédure est exposé.

L'ordonnance du 5 septembre 2017 du JLD du TGI de Paris a autorisé le agents de l'administration des finances publiques à procéder à des opérations de visite domiciliaire à l'encontre des sociétés TRICATEL SARL et LCA PARTNERS SARL

2 Discussion.

2-1 Rappel préalable des faits.

a) Les éléments soumis à l'appréciation du juge justifiaient la mise en oeuvre d'une procédure de visite domiciliaire.

L'administration fiscale fait un rappel préalable des faits, ainsi que des éléments soumis à l'appréciation du juge qui ont justifié la mise en oeuvre d'une procédure de visite domiciliaire.

Selon l'administration fiscale, les éléments ont permis d'établir que les sociétés TRICATEL SARL et LCA PARTNERS SARL réaliseraient leurs activités depuis le territoire national sans souscrire les déclarations fiscales y afférentes et en omettant de passer les écritures comptables correspondantes .

b) Aux termes de l'article L 16B du LPF, l'autorité judiciaire peut autoriser l'administration à effectuer une visite domiciliaire lorsqu'il existe des présomptions qu'un contribuable se soustrait à l'établissement ou au paiement de l'impôt sur le revenu ou les bénéfices ou de la TVA, pour rechercher la preuve de ces agissements.

Il est rappelé la jurisprudence constante de la Cour de cassation en la matière.

Il est d'ailleurs rappelé que la Cour de cassation a jugé de manière constante que le premier président statuant en appel , appréciait l'existence des présomptions de fraude, sans être tenu de s'expliquer autrement sur la proportionnalité de la mesure qu'il confirmait ( Cass com 8/12/2009 pourvoi 08-21017, Cass com 21/01/2014 pourvoi 12-28695).

2-2 L'argumentation développée par les appelantes ne remet pas en cause le bien fondé des présomptions retenues par le premier juge

a) sur les présomptions

*Les appelantes soutiennent que l'administration aurait procédé à un 'amalgame coupable' en présentant les activités des sociétés appelantes et de la société WSN comme identiques pour obtenir l'autorisation de procéder à une visite domiciliaire.Ce grief n'est pas fondé car l'administration a clairement rappelé les situations propres à chaque société : TRICATEL SARL, LCA PARTNERS SARL et SAS WSN DEVELOPPEMENT. Aucun amalgame n'était opéré entre les sociétés dont l'activité est différencié selon chacune. En revanche, le JLD a bien précisé les liens connus entre ces sociétés.

*Les appelantes soutiennent également que l'administration ne s'est nullement intéressée à l'activité réelle de la société, activité qui bénéficie selon elles , de moyens suffisants au Luxembourg. Ce grief n 'est pas fondé, en effet le JLD a relevé plusieurs éléments s'agissant des moyens (insuffisants )au luxembourg : A l'adresse du siège social des sociétés TRICATEL SARL et LCA PARTNERS SARL figure la présence de 136 et 23 sociétés, dont la société ALPHA MANAGEMENT SERVICES qui avait jusqu'en 2015 comme adresse de siège social celle correspondant à l'ancienne adresse de siège social des deux sociétés TRICATEL SARL et LCA PARTNERS SARL.

ALPHA MANAGEMENT SERVICES se compose de 2 sociétés, dont ALPHA MANAGEMENT SERVICES LUXEMBOURG SA (AMS), qui assistent des clients en matière de comptabilité, fiscalité et droit des sociétés, et domiciliation de sociétés.

[Y] [R] et [C] [N] sont à la fois gérants des sociétés TRICATEL SARL et LCA PARTNERS SARL et PDG et administrateur de ALPHA MANAGEMENT SERVICES LUXEMBOURG SA (AMS), les bilans de la société TRICATEL SARL établis fin 2015 et fin 2016 ne mentionnent aucune immobilisation corporelle, le bilan de la société LCA PARTNERS SARL établi fin 2015 ne mentionne aucune immobilisation corporelle, pour celui établi fin 2016 il est indiqué des immobilisations corporelles pour un montant de 1 443,89 euros.

Cette insuffisance de moyens est à mettre en perpective avec l'activité des sociétés, qui ont perçu des dividendes conséquent versés par la SAS WSN DEVELOPPEMENT (entre 2 et 3 millions d'euros en 2015 pour chaque société TRICATEL SARL et LCA PARTNERS SARL). De plus ces sociétés ont réalisé des opérations intracommunautaires vers le territoire national uniquement à destination de la SAS WSN DEVELOPPEMENT pour des montants communs de 180 000 euros qui rémunèrent les mandats sociaux de TRICATEL SARLen tant que directeur général et de LCA PARTNERS SARL en tant que président.

*Outre ces prestations les sociétés TRICATEL SARL et LCA PARTNERS SARL ont réalisé à titre principal de sprestations intracommunautaires vers la société de droit irlandais MARKET MANAGEMENT LTD pour des montants non négligeables (pièce 33).

Les moyens au LUXEMBOURG pouvaient apparaitre insuffisants pour l'exercice d'une telle activité.

Par ailleurs dans sa décision le JLD constatait que [Y] [R] et [C] [N] deux des gérants des sociétés TRICATEL SARL et LCA PARTNERS SARL étaient membres du groupe ALPHA MANAGEMENT SERVICES, parallèlement il constatait que les principaux actionnaires des sociétés TRICATEL SARL et LCA PARTNERS SARL ( [A] [M] et [V] [J]) qui perçoivent des salaires luxembourgeois, résidaient en France, ce qui permettait de présumer l'existence d'une centre décisionnel des deux sociétés en France.

*Enfin les appelantes critiquent la description des relations entre les sociétés TRICATEL SARL, LCA PARTNERS SARL et MARKET MANAGEMENT

Le JLD a seulement relevé qu'à titre principal les sociétés TRICATEL SARL et LCA PARTNERS SARL ont réalisé des prestations au bénéfice de la société MARKET MANAGEMENT LDT pour des montants importants (pièce 33).

Quant à la société MARKET MANAGEMENT LDT, société commerciale irlandaise se présentant comme spécialiste du commerce international créant des solutions innovantes , elle a réalisé des prestations pour la SAS WSN DEVELOPPEMENT pour des montants compris entre 1 million et presque 2 millions d'euros entre 2012 et 2015 (pièce 14).

Le droit de communication effectué auprès de la SAS WSN DEVELOPPEMENT donnait des éléments desquels se déduisait que les montants facturés par la société MARKET MANAGEMENT LDT à la société française SAS WSN DEVELOPPEMENT semblaient en partie neutralisés , par des charges facturées par les sociétés TRICATEL SARL et LCA PARTNERS SARL à la société irlandaise.

Ainsi il pouvait être présumé que les prestations facturées à la société MARKET MANAGEMENT LDT par les sociétés LCA PARTNERS SARL et TRICATEL SARL étaient liées au développement des salons professionnels organisés par la société française SAS WSN DEVELOPPEMENT, dont elles sont respectivement président et directeur général.

b) Sur le détournement de procédure.

Selon les conclusions, ce que reproche l'administration aux sociétés TRICATEL SARL et LCA PARTNERS SARL est d'avoir racheté les participations détenues par les sociétés BF CONSEIL et XC CONSEIL dans le capital de la société WSN DEVELOPPEMENT et d'obtenir le versement de dividendes par celle-ci. Les appelantes ne font que procéder par affirmation et le grief n'est pas fondé. En effet l'administration a mis en exergue à la fois la réalisation des prestations intracommunautaires effectuées par les appelantes et l'insuffisance des moyens au Luxembourg. Ainsi, il a été sollicité auprés du JLD que celui-ci apprécie la présomption selon laquelle les sociétés appelantes exerçaient sur le territoire national tout ou partie de leur activité sans y respecter ses obligations fiscales déclaratives et comptables .

c) Sur la prétendue absence de proportion et de nécessité de la mesure.

L'administration cite plusieurs décisions de la CEDH et de la Cour de cassation selon lesquelles les personnes concernées par la visite domiciliaire doivent bénéficier d'un contrôle juridictionnel effectif de la régularité de la décision prescrivant la visite et de la régularité des mesures prises sur son fondement, sans que d'autres conditions soient exigées, et que dès lors qu'existent des présomptions d'agissements de fraude, la procédure de visite domiciliaire est justifiée.

S'agissant plus particulièrement du contrôle de proportionnalité, les appelantes soutiennent que l'administration pouvait recourir à d'autres moyens.

La cour de cassation a toujours jugé qu'aucun texte n'impose au juge de vérifier si l'administration pouvait recourir à d'autres modes de preuve ou à d'autres procédures pour permettre la mise en oeuvre d'une procédure de visite domiciliaire , l'article L 16 B exige seulement l'existence de présomptions de fraude à l'impôt sur le revenu, sur les bénéfices ou à la TVA, par l'un des agissements qu'il prévoit , dont fait partie la présomption de passation inexacte des écritures comptables.

La cour de cassation a également jugé que ce texte n 'exige pas des infractions d'une particulière gravité et que le juge n'avait pas à caractériser la mauvaise foi du contribuable. Elle a également rappelé que le juge de l'autorisation n'était pas le juge de l'impôt et n'avait pas à rechercher si les infractions étaient caractérisées, mais seulement s'il existait des présomptions de fraude, et que le premier président, statuant en appel , appréciait l'existence de présomptions de fraude, sans être tenu de s'expliquer autrement sur la proportionnalité de la mesure qu'il confirmait (jurisprudence citée).

Dès lors qu'existent des présomptions d'agissement de fraude, la procédure de visite était justifiée pour permettre de rechercher la preuve des agissements et d'accéder à des documents de gestion quotidienne de l'entreprise que le contribuable n'a pas l'obligation de remettre dans le cadre d'un contrôle classique, par conséquent le JLD n'avait pas à rechercher si d'autres moyens pouvaient être mis en place.

d) sur l'élément intentionnel

Les appelantes critiquent l'ordonnance du JLD en ce qu'elle n'aurait pas caractérisé le caratère intentionnel des agissements présumés. Le moyen manque en droit .En effet, lachambre commerciale a jugé que l'article L. 16 B du LPF exigeait de simples présomptions et que le premier président , en recherchant l'élément intentionnel avait ajouté à la loi une condition qu'elle ne comportait pas (Cass 7/12/2010 pourvoi 10-10923, Cassation 09:06:2015 n° 14-15436).

En conclusion, il est demandé de :

-confirmer l'ordonnance du JLD de PARIS du 5 septembre 2017;

-rejeter toutes demandes, fins et conclusions ;

-condamner les appelantes au paiement de la somme de 2 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'en tous les dépens.

SUR CE

Sur l'appel :

I Sur l'absence d'éléments faisant présumer l'existence d'une fraude

-La logique économique de la création des sociétés LCA PARTNERS et TRICATEL.

Les parties appelantes font un rappel concernant le fonctionnement des sociétés LCA PARTNERS SARL et TRICATEL SARL , elles estiment que l'administration fiscale a commis une erreur, qualifiée d ''amalgame coupable', en présentant les activités des sociétés appelantes et de la société WSN DEVELOPPEMENT comme identique, pour obtenir l'autorisation de visite auprès du JLD. Or dans sa requête, l'administration fiscale a bien décrit les situations propres à chaque société : TRICATEL SARL, LCA PARTNERS SARL et SAS WSN DEVELOPPEMENT. Aucun amalgame n'était opéré entre les sociétés dont l'activité et le fonctionnement est différencié selon chacune. Ainsi, cette argumentation ne remet pas en cause le bien fondé des présomptions retenues par le JLD.

- La nature de l'activité des sociétés appelantes et les moyens nécessaires

Les appelantes contestent qu'elles auraient besoin de moyens matériels et humains importants comme s'il s'agissait d'une activité de production de biens manufacturés, alors que la quasi totalité de leurs revenus est constituée de produits financiers.

Or il convient de relever que dans son ordonnance, le JLD a retenu que les sociétés LCA PARTNERS SARL et TRICATEL SARL semblent domiciliées à l'adresse du goupe ALPHA MANAGEMENT SERVICES qui propose des services en matière de fiscalité, qu'elles disposeraient de moyens d'exploitation inexistants ou très limités au Luxembourg (quasi absence d'immobilisations corporelles), que [Y] [I] et [C] [N] qui sont deux gérants des sociétés sont aussi membres du groupe Alpha Management Services), que les sociétés LCA PARTNERS et TRICATEL SARL ont pour gérants communs [A] [M], et [J] [V] qui sont domiciliés en France, que les principaux actionnaires des sociétés résident en France, que le JLD a pu en déduire que ces sociétés ne semblent pas disposer au Luxembourg des moyens d'exploitation suffisants nécessaires .

- sur les relations avec la société MARKET MANAGEMENT LTD.

les conclusions en appel critiquent la description faite par l'administration fiscale des relations entre les sociétés TRICATEL SARL, LCA PARTNERS SARL et MARKET MANAGEMENT.

Or il convient de rappeler que le JLD dans sa décision a seulement relevé qu'à titre principal les sociétés TRICATEL SARL et LCA PARTNERS SARL ont réalisé des prestations au bénéfice de la société MARKET MANAGEMENT LDT pour des montants importants ( pièce 33).

Quant à la société MARKET MANAGEMENT LDT, société commerciale irlandaise se présentant comme spécialiste du commerce international créant des solutions innovantes , elle a réalisé des prestations pour la SAS WSN DEVELOPPEMENT pour des montants compris entre 1 million et presque 2 millions d'euros entre 2012 et 2015 ( pièce 14). L'administration fiscale a pu produire des éléments selon lesquels les montants facturés par la société MARKET MANAGEMENT LDT à la société française SAS WSN DEVELOPPEMENT semblaient en partie neutralisés , par des charges facturées par les sociétés TRICATEL SARL et LCA PARTNERS SARL à la société irlandaise. Il en résulte qu'il pouvait être présumé que les prestations facturées à la société MARKET MANAGEMENT LDT par les sociétés LCA PARTNERS SARL et TRICATEL SARL étaient liées au développement des salons professionnels organisés par la société française SAS WSN DEVELOPPEMENT, dont elles sont respectivement président et directeur général.

Le JLD ainsi fait une description exacte des relations entre les sociétés TRICATEL SARL, LCA PARTNERS SARL et MARKET MANAGEMENT, à partir des pièces communiquées par l'administration fiscale.

Le JLD a déduit des pièces de l'administration et à juste titre que les sociétés LCA PARTNERS SARL et TRICATEL SARL disposeraient de moyens humains et matériels limités et en tout cas insuffisants au LUXEMBOURG pour la réalisation de leur activité, que ces sociétés disposent de moyens humains localisés sur le territoire national pour réaliser au moins une partie de leurs activités commerciales.

Ainsi il ressort de l'ordonnance rendue par le juge des libertés et de la détention que celui-ci a retenu plusieurs éléments qui permettent d'établir la présomption de fraude à l'encontre des sociétés TRICATEL SARL et LCA PARTNERS SARL, sur le fondement de l'article L 16B du LPF.

Ainsi le moyen fondé sur l'absence d'éléments faisant présumé l'existence d'une fraude concernant les sociétés LCA PARTNERS SARL et TRICATEL SARL sera rejeté.

-Sur le détournement de procédure

L'administration fiscale a présenté une requête au JLD sur le fondement de l'article L 16 B du LPF, les sociétés appelantes évoquent un 'détournement de procédure', aucun élément ne permet de démontrer ce grief qui en l'espèce n'est pas fondé.

Ce moyen sera rejeté.

-Sur l'absence d'élément intentionnel

Ainsi qu'une jurisprudence constante de la Cour de cassation le rappelle, l'article L. 16 B du LPF n'exige que de simples présomptions et ne demande pas la recherche du caractère intentionnel de la fraude. Ainsi la chambre commerciale de la Cour de cassation (Cass 7/12/2010 pourvoi 10-10923, Cassation 09:06:2015 n° 14-15436) a jugé que l'article L. 16 B du LPF exigeait de simples présomptions et que le premier président, en recherchant l'élément intentionnel avait ajouté à la loi une condition qu'elle ne comportait pas.

Ce moyen sera rejeté.

-Sur l'absence de présentation par l'administration fiscale du juge des libertés et de la détention d'éléments à décharge.

Il convient de rappeler que l'article L 16 B du LPF n'exige que de simples présomptions, le juge de l'autorisation n'étant pas le juge de l 'impôt et n'ayant pas à rechercher si les infractions sont caractérisées mais seulement à examiner s'il existe des présomptions de fraude justifiant les opérations de visite et de saisie.

Par ailleurs, la Cour de cassation subordonne la sanction d'une absence de communication d'éléments dont l'administration avait connaissance à la condition que ces pièces aient été de nature à remettre en cause l'appréciation des éléments de fraude par le juge. Ainsi la présence d'un élément erroné n'est pas systématiquement susceptible d'entraîner l'annulation de l'ordonnance.

En effet, conformément à une jurisprudence établie, dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel,il appartient au Premier président de rechercher si la requête ne contient pas d'autres éléments laissant présumer des agissements frauduleux. L'arrêt de la Cour de cassation du 18 décembre 2012 cité a rappelé l'obligation du premier président de 'rechercher si en dépit d'inexactitudes et d'incohérences supposées relevées dans la requête, cette dernière ne contenait pas d'autres éléments laissant présumer la fraude dont était suspectée la société' .

En l'espèce il convient de rappeler que le JLD dans son ordonnance a relevé après un examen in concreto des pièces qui lui étaient soumises selon la méthode dit 'du faisceau d'indices' qu'il existait des indices laissant apparaître des présomptions simples de manquements à certaines obligations fiscales justifiant que soit recherchée leur preuve au moyen d'une visite domiciliaire.

En l'espèce, la requête de l'administration était accompagnée de 66 pièces , dont l'origine est apparemment licite, que d'ailleurs les pièces ne sont pas contestées par l'appelante. Le JLD a rendu son ordonnance à l'appui de ses pièces,

L'absence de présentation d'éléments 'à décharge' alléguée par les parties appelantes relèvent d'une appréciation subjective des pièces prises en compte par l'administration.

L'administration a joit à sa requête les pièces qui lui paraissent fondées pour démontrer les présomtions de fraude, conformément à l'article L 16 B du LPF.

Ce moyen sera rejeté.

II- sur l'absence de contrôle de proportionnalité quant à l'autorisation de la visite domiciliaire.

Il convient de rappeler qu'en exerçant son contrôle in concreto sur le dossier présenté par l'administration fiscale, le JLD exerce de fait un contrôle de proportionnalité. En cas de refus, il peut inviter l'administration fiscale à avoir recours à d'autres moyens d'investigation moins intrusifs (droit de communication, vérification de comptabilité...). En conséquence, la signature de l'ordonnance par le JLD signifie que ce dernier entend privilégier l'enquête dite «'lourde'» de l'article L.16 B du LPF et que les diligences auprès du contribuable seraient insuffisantes et dénuées de «'l'effet de surprise'».

D'ailleurs aucun texte ne subordonne la saisine de l'autorité judiciaire, pour l'application

de l'article L. 16 B du LPF, à l'impossibilité de recourir à d'autres procédures de contrôle.

Des lors qu'existent des présomptions d'agissements de fraude, la procédure de visite domiciliaire est justifiée en ce qu'elle permet de rechercher la preuve de ces agissements et ainsi d'accéder a des documents de gestion quotidienne de l'entreprise ou relatifs a l'organisation interne, que le contribuable n'a pas l'obligation de remettre dans le cadre d'une procédure de contrôle classique.

L'article 8 de la CESDH, tout en énonçant le droit au respect de la vie privée et familiale, est tempéré par son paragraphe 2 qui dispose que 'il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui'.

En l'espèce, il n'y a pas eu de violation des dispositions de l'article 8 de la CESDH et la mesure n'a aucunement été disproportionnée eu égard au but poursuivi.

Dès lors, le JLD a, à juste titre, autorisé la visite domiciliaire.

Ce moyen sera rejeté

Ainsi, l'ordonnance du 5 septembre 2017 du juge des libertés et de la détention du Tribunal de Grande Instance de Paris sera confirmée.

Aucune circonstance dans le dossier ne justifie l'octroi du bénéfice de l'article 700 du Code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Statuant contradictoirement et en dernier ressort:

- Confirmons en toutes ses dispositions l'ordonnance rendue par le juge des libertés et de la détention du Tribunal de grande instance de PARIS en date du 5 septembre 2017 ;

- Disons n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;

-Rejetons toute autre demande ;

- Disons que la charge des dépens sera laissée aux parties appelantes.

LE GREFFIER

Véronique COUVET

LE DÉLÉGUÉ DU PREMIER PRESIDENT

Elisabeth IENNE-BERTHELOT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 15
Numéro d'arrêt : 19/20019
Date de la décision : 27/01/2021

Références :

Cour d'appel de Paris J3, arrêt n°19/20019 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2021-01-27;19.20019 ?
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