La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

13/01/2021 | FRANCE | N°18/05955

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 3, 13 janvier 2021, 18/05955


Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 3



ARRET DU 13 JANVIER 2021



(n° , 9 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/05955 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B5TQC



Décision déférée à la Cour : Jugement du 30 Mars 2018 -Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de CRETEIL - RG n° F13/03621





APPELANT



Monsieur [W] [N]

[Adresse 2]

[Ad

resse 2]

Représenté par Me Séverine HOUARD-BREDON, avocat au barreau de PARIS, toque : E0327



INTIMEE



SAS SECURITAS DIRECT

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me Marion HOCHART,...

Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 3

ARRET DU 13 JANVIER 2021

(n° , 9 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/05955 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B5TQC

Décision déférée à la Cour : Jugement du 30 Mars 2018 -Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de CRETEIL - RG n° F13/03621

APPELANT

Monsieur [W] [N]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représenté par Me Séverine HOUARD-BREDON, avocat au barreau de PARIS, toque : E0327

INTIMEE

SAS SECURITAS DIRECT

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me Marion HOCHART, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 17 Novembre 2020, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Daniel FONTANAUD, Président de chambre, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Monsieur Daniel FONTANAUD, Président de Chambre

Madame Fabienne ROUGE, Présidente de Chambre

Madame Laurence SINQUIN, Conseillère

Greffier, lors des débats : Mme Nasra ZADA

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- Par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- Signé par Daniel FONTANAUD, Président de chambre et par Nasra ZADA, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE

Monsieur [W] [N], engagé par la société SECURITAS DIRECT devenue VERISURE à compter du 4 mai 2009, en qualité d'expert sécurité, au dernier salaire mensuel brut de 3.204,87 euros, a été licencié pour faute grave par lettre du 8 avril 2013 énonçant le motif suivant :

'... Vous êtes embauché en qualité d'expert sécurité de notre société depuis le 4 mai 2009.

A ce titre, vos principales missions sont la prospection, la vente et l'installation de nos services et produits de télésurveillance dans le respect des objectifs donnés et procédures en vigueur au sein de notre société.

Or, nous avons constaté de votre part un manquement professionnel d'une particulière importance.

En effet, il apparaît que vous avez avancé les frais d'installation du matériel de télésurveillance pour l'une de vos clientes.

En effet, la cliente n°275068 souhaitait bénéficier à la fin du mois de janvier 2013 d'une offre Kit de base à 399 euros (HT) mais ne disposait pas, à cette date, de moyen de paiement lui permettant de régler les frais de vente et d'installation de son équipement. Vous avez alors convenu avec ladite cliente que vous lui avanceriez le paiement des frais, d'un montant de 477,20 euros TTC, et que celle-ci vous rembourserait par la suite.

Vous avez par suite ajouté à cette vente deux éléments supplémentaires, un contracteur et une télécommande, portant le montant TTC de cette vente à 577,68 euros.

La cliente vous a donné un chèque de ce montant.

Vous avez transmis le contrat pour facturation, sans y faire apparaître les éléments supplémentaires sur le mois de janvier, et avez donc transmis la somme de 477,20 euros en espèces à nos services de facturation ; ce qui vous permettait ainsi d'être commissionné pour cette vente sur le mois de janvier 2013.

Après avoir reçu la facture de l'installation initiale, pour un montant inférieur au chèque émis de 100,48 euros, la cliente s'est plainte auprès de l'entreprise afin de savoir ce qu'il était advenu de la différence.

Ce n'est qu'après cette réclamation du client en date du 12 février 2013, et suite à une demande d'explication formulée par nos services de facturation, que vous avez alors transmis le bon de travaux correspondant aux éléments supplémentaires pour facturation.

De tels agissements, d'une particulière gravité, sont totalement inacceptables ; en effet, l'avance de fonds envers un client est totalement prohibée par les règles internes à l'entreprise et avait ici pour unique but de vous permettre de prétendre à un commissionnement supplémentaire sur le mois commercial de janvier 2013.

Également, et sans plainte du client suite à ces faits, il subsiste à l'heure actuelle un doute sur le fait que vous auriez effectivement transmis le bon de travaux et le paiement correspondant aux deux éléments supplémentaires ainsi facturés.

Enfin, les plaintes formulées par la cliente auprès de Securitas Direct suite à vos agissements mettent en évidence l'impact fortement négatif qu'une telle pratique peut avoir quant à l'image et à la notoriété de notre société.

La date de la présente fixe la date de rupture de votre contrat de travail'

Par jugement du 30 mars 2018, le Conseil de prud'hommes de CRETEIL, statuant en formation de départage, a condamné la société SECURITAS DIRECT à payer à M. [N] les sommes suivantes :

- 148 euros en rappel de salaire au titre de la journée du 9 avril 2013, outre la somme de 14,80 euros

- 227,12 euros en rappel de salaires au titre des journées du 18 mai, 20 mai, 1er août et 2 août 2012, outre la somme de 22,71 euros au titre des congés payés

En outre, il a débouté M. [N] du surplus de ses demandes, a rappelé que les sommes allouées sont assorties des intérêts au taux légal à compter de la présente décision, a rejeté les autres demandes plus amples ou contraires et a condamné la société SECURITAS DIRECT aux dépens.

M. [N] en a relevé appel.

Par conclusions récapitulatives du 6 octobre 2020, auxquelles il convient de se reporter en ce qui concerne ses moyens, M. [N] demande à la cour d'infirmer le jugement en ce qu'il l'a débouté de toutes ses demandes à l'exception de celle relative aux rappels de salaires des journées indûment décomptées.

Il demande de juger son licenciement sans cause réelle et sérieuse et de condamner la société VERISURE à lui verser :

' 6 409,74 euros à titre d'indemnité de préavis

' 640,97 euros à titre de congés payés afférents

' 2 510,50 euros à titre d'indemnité légale de licenciement

' 32 048,70 euros nets de CSG CRDS à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

' 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement brutal et vexatoire

' 2 200,00 euros à titre de rappel de décommissionnements

' 220,00 euros au titre des congés payés afférents

' 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité de résultat au regard du harcèlement moral

' 1 000 euros à titre de dommages et intérêts pour absence de visites médicales périodiques

' 2 500 euros à tire de dommages et intérêts pour remise tardive et erronée de l'attestation pôle emploi.

Sur le temps de travail, M. [N] demande de condamner la société VERISURE à lui verser 128 966,68 euros à titre de rappels de salaire au titre des heures supplémentaires du 4 mai 2009 au 8 avril 2013 et 12 896,66 euros au titre des congés payés afférents.

A titre subsidiaire, il demande de condamner la société VERISURE à lui verser 30 000 euros à titre de dommages et intérêts pour violations des dispositions relatives aux durées maximales de travail et temps de repos.

En outre, M. [N] demande de condamner la société VERISURE à lui verser 19.229,22 euros à titre d'indemnité pour travail dissimulé, d'ordonner la remise d'une attestation pôle emploi, d'un certificat de travail et d'un bulletin de paie récapitulatif conformes à l'arrêt à intervenir, de condamner la société VERISURE à lui verser 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens et éventuels frais d'exécution forcée du jugement et de condamner aux intérêts légaux à compter de la saisine.

Par conclusions récapitulatives du 5 août 2020, auxquelles il convient de se reporter en ce qui concerne ses moyens, la société VERISURE, nouvelle dénomination de la société SECURITAS DIRECT, demande de confirmer le jugement, de débouter M. [N] de ses demandes de le condamner au paiement de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens d'instance.

La Cour se réfère, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et des prétentions des parties, à la décision déférée et aux dernières conclusions échangées en appel.

****

MOTIFS

Sur la rupture du contrat de travail

Principe de droit applicable

La faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise et justifie son départ immédiat.

L'employeur qui invoque la faute grave pour licencier doit en rapporter la preuve ; à défaut de faute grave, le licenciement pour motif disciplinaire doit reposer sur des faits précis et matériellement vérifiables présentant un caractère fautif réel et sérieux.

La cour examinera les motifs du licenciement énoncés dans la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige.

Application du droit à l'espèce

Dans la lettre de licenciement du 8 avril 2013, il est reproché à M. [N] d'avoir, le 13 janvier 2013 avancé les frais relatifs à l'installation de matériels de télésurveillance pour une cliente, d'avoir complété la commande initiale de la cliente sans transmettre à l'employeur le bon de travaux correspondant à cette nouvelle commande et de n'avoir pas reversé la somme encaissée auprès de la cliente.

S'agissant de l'avance des frais effectués par M. [N], celui-ci soutient que, le 2 janvier 2013, son supérieur hiérarchique, M. [O], lui a demandé d'avancer le montant de la vente effectuée à la cliente. Ainsi, le 4 janvier, il a avancé la somme de 480 euros en espèces et transmis le procès-verbal d'installation du matériel vendu au service de facturation.

Il verse aux débats l'attestation de M. [M] [Z], ancien salarié de la société qui écrit: 'J'atteste sur l'honneur avoir été présent le 27/03/14 lors de la conversation téléphonique entre [W] [N] et [X] [P], celui-ci a attesté que son supérieur hiérarchique le territorial [B] [O] connaissant les problèmes de paiement de la société ICI C'EST PARIS dont le numéro de contrat est 275068 avait demandé à [W] de régler à la place de la cliente afin que le contrat puisse être facturé pour l'activité de décembre 2012 et pour que l'agence puisse atteindre son objectif.'

Néanmoins, comme le souligne le juge départiteur, l'attestation de M. [Z] n'est pas pertinente puisqu'il rapporte les propos d'une autre personne, M. [P], qui commente les opinions ou intentions d'une tierce personne. M. [Z] n'a pas assisté à la supposée discussion entre M. [N] et M. [O] qu'il rapporte de façon indirecte.

Donc, aucun élément versé au débat ne permet de conforter l'explication invoquée par le salarié selon laquelle son supérieur hiérarchique lui aurait donné l'instruction expresse d'avancer les frais de la vente litigieuse.

S'agissant du bon de travaux relatif aux éléments de vente rajoutés à la vente initiale, le 16 janvier 2014, M. [N] n'a adressé ce bon de travaux et le paiement que le 13 février 2014 suite aux réclamations de son employeur, soit presque un mois après que l'achat ait été effectué.

Le salarié soutient qu'il n'a pas transmis le nouveau bon de commande ainsi que la somme en espèce versée par la cliente à son employeur en raison de son départ en congés le 18 janvier 2014.

Cependant, il ressort des éléments versés au débat que ce n'est que lorsque la société a demandé des explications au salarié, le 12 février 2013, après que la cliente demande des explications à propos de l'incohérence entre le montant de la facture et le montant remboursé au salarié, que celui-ci a transmis, le lendemain, le bon de travaux ainsi que la somme encaissée alors qu'il était revenu de congé depuis le 23 janvier 2013.

Il s'ensuit que les différents griefs détaillés dans la lettre de licenciement sont établis.

Néanmoins, si ces manquements sont établis et suffisamment sérieux pour justifier le licenciement de l'intéressé, il n'est nullement démontré que les fautes commises constituaient une faute grave au sens du droit du travail.

En conséquence, le jugement sera infirmé en ce qu'il a débouté M. [N] de ses demandes à titre d'indemnité compensatrice de préavis et congés payés y afférents ainsi qu'au titre de l'indemnité légale de licenciement.

Ainsi, il convient d'accorder à M. [N] les sommes suivantes qui sont justifiées au vu des pièces versées aux débats :

- 6.409,74 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis

- 640,97 euros au titre des congés payés afférents à l'indemnité compensatrice de préavis

- 2.510,50 euros à titre d'indemnité légale de licenciement

Par ailleurs, à défaut de la justification d'un préjudice, les conditions brutales et vexatoires de la rupture n'étant pas établis par ailleurs, la demande de dommages et intérêts de ce chef fera l'objet d'un rejet.

Sur la demande à titre de rappel de décommissionnements

La clause dénommée « décommissionnements ventes manquantes » insérée dans l'avenant au contrat de travail, prévoit que «'si un salarié réalise moins de 5 ventes installées facturées dans le mois, une déduction de 225 euros par vente manquante sera déduite des commissions sur les mois suivants. Cette règle ne s'appliquera pas à hauteur d'une fois par an et par année civile, aucun cumul n'étant possible d'une année sur l'autre'».

La société soutient que cette clause est régulière car cette déduction n'intervient pas sur le salaire fixe contractuel.

Néanmoins, la déduction d'un certain montant de la commission en fonction du nombre de ventes réalisées s'analyse en l'espèce en une'sanction'pécuniaire, laquelle est prohibée par l'article L. 1331-2 du code du travail aux termes duquel les amendes ou autres sanctions pécuniaires sont interdites, toute disposition ou stipulation contraire étant réputée non écrite.

La somme de 400 euros décomptée au mois de juillet 2010 ayant été régularisée au mois d'août 2010, il convient d'accorder à M. [N], au vu des pièces versées au débat, la somme de 1.800 euros à titre de rappel de décommissionnements et 180 euros au titre des congés payés y afférents.

Le jugement du Conseil de prud'hommes sera infirmé sur ce point.

Sur la demande au titre du manquement à l'obligation de sécurité au regard du harcèlement moral

Selon les dispositions de l'article L.1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

Aux termes de l'article L.4121-1 du code du travail dans sa rédaction ici en vigueur, l'employeur doit prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des salariés et doit veiller à l'adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l'amélioration des situations existantes.

M. [N] soutient que malgré les trois courriers de l'inspection du travail dont le dernier en date du 14 octobre 2014, qui démontrent que la société est alertée sur les risques qu'elle encourt eu égard à ses méthodes de management, elle ne modifie pas son comportement et ne met pas en place les mesures correctives pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.

Au soutien de ces prétentions, M. [N] indique avoir subi des pressions de la part de sa direction, notamment au vu des avertissements qu'il a reçu il y a plusieurs années pour ne pas avoir atteint des objectifs. Il explique avoir fait l'objet d'un véritable acharnement, sa hiérarchie n'appréciant pas ses réclamations.

Néanmoins, s'il ressort des éléments versés au débat l'existence de dysfonctionnements de management au sein de la société, il n'est pas établi d'éléments précis et suffisamment circonstanciés de nature à présumer un comportement harcelant à l'encontre de M. [N].

Au vu des éléments versés aux débats en cause d'appel, il apparaît que les premiers juges, ont à juste titre écarté l'existence d'un harcèlement moral dont aurait été victime M. [N].

Par ailleurs, il n'est pas établi que M. [N] ait subi un préjudice spécifique du fait d'un manquement par l'employeur de son obligation de sécurité à son égard.

En conséquence, il convient de confirmer le jugement de première instance et de débouter M. [N] de sa demande de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité au regard du harcèlement moral.

Sur la demande pour absence de visites médiales périodiques

S'il est constant que M. [N] n'a pas bénéficié de visites médicales périodiques, le salarié ne justifie pas avoir subi un préjudice, de sorte qu'il n'y a pas lieu d'accueillir favorablement sa demande.

Donc, le jugement sera confirmé sur ce point.

Sur la demande pour remise tardive et erronée de l'attestation pôle emploi

L'attestation pôle emploi a été remise au salarié le 17 mai 2013, soit un peu plus d'un mois après le licenciement qui a été notifié le 9 avril 2013.

M. [N] ne justifie pas que ce court retard et que les erreurs rectifiées par l'employeur lui ai causé préjudice.

En conséquence, le jugement sera confirmé sur ce point.

Sur la demande en rappel de salaire au titre des heures supplémentaires

Principe de droit applicable

Selon les dispositions de l'article L 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié d'étayer sa demande par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments.

Application du droit à l'espèce

Aux termes de l'article 4 du contrat de travail de M. [N] : ' Le présent contrat est un contrat a durée indéterminee à plein temps. Vous exercerez votre activité du Lundi au samedi,

le contact avec la clientèle le Samedi s'avérant indispensable, pour un total de 151,67 heures

par mois'.

M. [N] soutient qu'il devait faire face à une charge de travail le conduisant à réaliser un nombre important d'heures supplémentaires. Il explique qu'il travaillait pas moins de 31 heures par semaine, hors installations le dimanche. Il formule une demande au titre du paiement de ses heures supplémentaires pour un montant chiffré à 128 966,68 euros, outre 12 896,66 euros au titre des congés payés afférents. Cependant, l'intéressé n'apporte dans ses écritures aucune explication détaillée sur cette somme sollicitée.

Au vu des pièces produites, des courriels étaient envoyés à M. [N] tôt le matin ou tard le soir, cependant, ces courriels n'avaient pas pour objectifs d'obtenir un travail immédiat de la part du salarié, mais uniquement de le prévenir quant aux rendez-vous convenus pour les jours à venir.

Les attestations produites au débat affirmant que les clients pouvaient prendre rendez-vous de 9 heures à 21 heures du lundi au samedi, voir le dimanche si besoin, ne constituent pas en l'espèce des éléments suffisamment précis sur des heures effectivement réalisées.

Le tableau récapitulatif d'heures supplémentaires produit par le salarié pour les besoins de la cause indique que l'intéressé aurait effectué toutes les semaines pendant 3 ans, 31 heures supplémentaires. Néanmoins, compte tenu de l'activité flutuante inhérente à l'emploi concerné, ce tableau, qui n'apparaît pas crédible, ne permet pas connaître le détail d'heures que le salarié auait effectivement réalisées et ne met pas l'employeur en mesure d'y répondre.

Ainsi, l'intéressé n'apporte pas d'élément sérieux sur l'exécution des heures de travail au titre desquelles il sollicite le paiement de salaires et sa demande ne peut ici être considérée comme suffisamment étayée.

Au vu des éléments versés au débat, le salarié n'a d'ailleurs jamais sollicité de son supérieur hiérarchique une autorisation d'exécuter des heures au delà de celles prévues au contrat, et n'a pas évoqué auprès de ce dernier la nécessité dans laquelle il se serait trouvé de réaliser un nombre aussi conséquent d'heures supplémentaires pour atteindre ses objectifs. Il n'a pas réclamé le paiement de ces heures auprès de la société SECURITAS DIRECT pendant l'exécution du contrat de travail.

En conséquence, c'est à juste titre que le Conseil de prud'hommes, statuant en formation de départage, a rejeté les demandes de M. [N] relatives à l'accomplissement d'heures supplementaires.

Sur l'indemnité au titre du non respect des durées maximales de travail et temps de repos

Il incombe à la société de justifier du respect des seuils et plafonds prévus par les articles L. 3121-34 et L. 3121-35 du code du travail.

En l'espèce, la société verse au débat le fichier des installations de M. [N] d'août 2009 à avril 2013 et le fichier des rendez-vous clients du salarié de juillet 2009 à avril 2013. Néanmoins, ces éléments sont insuffisants puisqu'ils ne permettent pas de démontrer les horaires effectivement réalisés par le salarié.

En conséquence, il convient d'allouer à M. [N], à ce titre 1.000 euros.

Sur l'indemnité pour travail dissimulé

Selon les dispositions de l'article L 8221-5 du code du travail, est réputé travail dissimulé le fait, pour l'employeur, de se soustraire intentionnellement à la délivrance de bulletins de paie prescrite par l'article L. 3243-2, ou de mentionner sur ce dernier un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli.

En l'espèce, M. [N] soutient qu'il n'a jamais perçu le moindre paiement d'heure supplémentaire accomplie et explique, à ce titre, que le caractère intentionnel de la dissimulation est par conséquent incontestable.

Néanmoins, les éléments versés au débat ne permettent pas de démontrer les heures supplémentaires accomplies par le salarié, et celui-ci ne fait valoir aucun autre élément de nature à caractériser une intention de dissimulation de la part de l'employeur.

En conséquence, il convient de débouter M. [N] de ce chef de demande et de confirmer le jugement sur ce point.

Sur la demande de remise de documents

Compte tenu des développements qui précèdent, la demande tendant à la remise de documents sociaux conformes est fondée et il y est fait droit dans les termes du dispositif.

Sur les intérêts au taux légal

Il n'y a pas lieu de déroger aux dispositions des articles 1153 et 1153-1 du code civil, recodifiés sous les articles 1231-6 et 1231-7 du même code par l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, en application desquelles les créances salariales produisent intérêts au taux légal à compter de la réception par l'employeur de la convocation devant le conseil de prud'hommes et les créances indemnitaires produisent intérêts au taux légal à compter du prononcé de la décision en fixant tout à la fois le principe et le montant.

PAR CES MOTIFS

CONFIRME le jugement, sauf en ce qu'il a considéré le licenciement pour faute grave justifié et en ce qu'il a débouté M. [N] de ses demandes à titre de rappel de décommissionnements et au titre du non respect des durées maximales de travail et temps de repos;

REQUALIFIE le licenciement en cause réelle et sérieuse';

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés,

Condamne la société VERISURE à payer à M. [N]':

- 6.409,74 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis;

- 640,97 euros au titre des congés payés y afférents;

- 2.510,50 euros à titre d'indemnité légale de licenciement;

- 1.800 euros à titre de rappel de décommissionnements;

- 180 euros au titre des congés payés y afférents;

- 1.000 euros à titre de dommages et intérêts pour non respect des dispositions relatives aux durées maximales de travail et temps de repos;

DIT que les condamnations au paiement de créances de nature salariale porteront intérêts au taux légal à compter de la réception par la société de la convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes et que les condamnations au paiement de créances indemnitaires porteront intérêts au taux légal à compter de la mise à disposition du présent arrêt ;

ORDONNE la remise par la société VERISURE à M. [N] de bulletins de paye, d'une attestation Pôle Emploi et d'un certificat de travail conformes au présent arrêt:

Y ajoutant,

Vu l'article 700 du code de procédure civile

CONDAMNE la société VERISURE à payer à M. [N] 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

LAISSE les dépens à la charge de la société VERISURE.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 3
Numéro d'arrêt : 18/05955
Date de la décision : 13/01/2021

Références :

Cour d'appel de Paris K3, arrêt n°18/05955 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2021-01-13;18.05955 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award