REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 2
ARRET DU 07 JANVIER 2021
(n° , 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/13474 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CCMD6
Décision déférée à la Cour : ordonnance du 11 Septembre 2020 du conseiller de la mise en état de la chambre 6-2 de la Cour d'appel de PARIS - RG n° 15/10240
DEMANDERESSES AU DEFERE
COMITÉ D'ENTREPRISE DE LA SOCIÉTÉ MUSÉE GRÉVIN
[Adresse 1]
[Localité 2]
Représentée par Me Boubacar SOGOBA, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, toque : 40
FÉDÉRATION CGT DU COMMERCE DE LA DISTRIBUTION ET D ES SERVICES
[Adresse 4]
[Localité 3]
Représentée par Me Boubacar SOGOBA, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, toque : 40
DEFENDERESSE AU DEFERE
S.A. MUSÉE GRÉVIN
[Adresse 1]
[Localité 2]
N° SIRET : 552 06 7 8 11
Représentée par Me Jean-Sébastien GRANGE, avocat au barreau de PARIS, toque : E0790
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 19 Novembre 2020, en audience publique, devant la Cour composée de :
Mme Mariella LUXARDO, présidente de chambre
M. François LEPLAT , président de chambre
M. Didier MALINOSKY, magistrat honoraire
qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Monsieur dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.
Greffier, lors des débats : Mme Samia BOUGUEROUCHE
ARRET :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Mme Mariella LUXARDO, Présidente et par Mme Sihème MASKAR, Greffière présente lors de la mise à disposition.
RAPPEL DES FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Vu le jugement rendu le 5 janvier 2010 par le tribunal de grande instance de Paris qui a déclaré le comité d'entreprise irrecevable à agir et débouté la Fédération CGT du Commerce, de la Distribution et des Services de son action ;
Vu l'arrêt rendu le 23 mai 2013 par la cour d'appel de Paris qui a notamment :
- Infirmé le jugement entrepris, sauf en ce qu'il a déclaré le comité d'entreprise de la société Musée Grévin irrecevable à agir ;
Statuant à nouveau,
- Dit que lors de la signature de l'accord d'intéressement du 15 mars 2006 la SA Musée Grevin avait atteint, ce même mois, le seuil de cinquante salariés depuis six mois ;
- Dit que les salariés pouvaient ainsi prétendre à la participation à compter de l'exercice 2005/2006 ;
- Ordonné la réouverture des débats afin que les deux parties puissent conclure sur le montant de la réserve spéciale de participation ;
Vu l'arrêt rendu le 21 janvier 2015 par la chambre sociale de la Cour de cassation, qui a cassé et annulé l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 23 mai 2013, remis la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et renvoyé l'affaire et les parties devant la cour d'appel de Paris autrement composée ;
Vu la déclaration « d'appel » transmise le 21 mai 2015 par le comité d'entreprise de la société Musée Grévin et par l'organisation syndicale Fédération CGT du Commerce, de la Distribution et des Services ;
Vu l'ordonnance du 11 avril 2016 qui a déclaré irrecevables les conclusions d'incident de la société Musée Grévin et l'a condamnée aux dépens d'instance ;
Vu l'arrêt du 26 septembre 2016, statuant en déféré sur l'ordonnance du 11 avril 2016, l'a infirmée et a déclaré recevables les conclusions d'incident du 29 décembre 2015 ;
Vu l'ordonnance rendue le 11 septembre 2020 par le magistrat chargé de la mise en état qui a :
- Constaté la péremption d'instance et le dessaisissement de la cour ;
- Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Condamné in solidum le comité d'entreprise de la société Musée Grévin et la fédération CGT du Commerce, de la Distribution et des Services aux dépens et frais de l'instance éteinte ;
- Rappelé qu'en application de l'article 916 du code de procédure civile, la présente ordonnance peut être déférée à la cour dans les quinze jours de sa date, par requête remise au greffe de cette chambre contenant, outre les mentions prescrites par l'article 57 et à peine d'irrecevabilité, l'indication de la décision déférée ainsi qu'un exposé des moyens en fait et en droit ;
Vu la requête adressée le 28 septembre 2020 par laquelle le comité d'entreprise de la société Musée Grévin et la fédération CGT du commerce, de la distribution et des services ont déféré à la cour cette ordonnance ;
Vu les conclusions récapitulatives transmises le 10 novembre 2020 par lesquelles le comité d'entreprise de la société Musée Grévin et la fédération CGT du commerce, de la distribution et des services demandent à la cour de :
- Recevoir les appelants dans leurs écritures ;
- Les dire bien fondées ;
- Dire et juger que l'instance n'est pas périmée ;
- Rejeter toutes les demandes, fins et prétentions de la société Musée Grévin ;
- Statuer sur l'incident ;
Vu les conclusions transmises le 13 novembre 2020 par lesquelles la société Musée Grévin demande à la cour de :
- Recevoir la société Musée Grévin en ses écritures ;
- Les dire bien fondées ;
In limine litis,
- Constater la nullité de la requête en déféré ;
En tout état de cause,
- Constater la péremption de l'instance ;
À titre reconventionnel,
- Condamner les appelants à indemniser le Musée Grévin à hauteur de 1.000 € chacun à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive ;
- Condamner les appelants à indemniser le Musée Grévin à hauteur de 3.500 € chacun sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Les condamner solidairement aux entiers dépens de première instance et d'appel, et à la prise en charge des frais d'expertise.
Vu la convocation du 12 novembre à l'audience du 19 novembre 2020.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la nullité de la requête en déféré
La société Musée Grévin (ci après la société) sollicite, au visa des articles 57 et 916 du code de procédure civile, la nullité de la requête en déféré au motif qu'elle n'indiquerait aucune des pièces sur lesquelles elle est fondée. La société fait valoir qu'il s'agit d'une garantie de fond qui ne peut être régularisée.
Le comité d'entreprise et la fédération CGT du commerce de la distribution et des services (ci-après la fédération) font valoir, d'une part, que la requête reprend les mêmes éléments que devant le conseiller de la mise en état et que les pièces, identiques à celles produites devant le conseiller de la mise en état, sont rappelées dans le corps de la requête et, d'autre part, au visa de l'article 114 du code de procédure civile, qu'il s'agit d'une irrégularité de forme et qu'il n'existe aucune nullité sans texte. Ils soutiennent que la société ne peut leur faire grief de cette irrégularité car elle a parfaitement connaissance des éléments en litige.
En droit, l'article 57 du code de procédure civile dispose que, lorsqu'elle est formée par le demandeur, la requête saisit la juridiction sans que son adversaire en ait été préalablement informé. Lorsqu'elle est remise ou adressée conjointement par les parties, elle soumet au juge leurs prétentions respectives, les points sur lesquels elles sont en désaccord ainsi que leurs moyens respectifs.
Elle contient, outre les mentions énoncées à l'article 54, également à peine de nullité :
-lorsqu'elle est formée par une seule partie, l'indication des nom, prénoms et domicile de la personne contre laquelle la demande est formée ou s'il s'agit d'une personne morale, de sa dénomination et de son siège social ;
-dans tous les cas, l'indication des pièces sur lesquelles la demande est fondée.
Elle est datée et signée.
En l'espèce, la cour relève que la requête comporte le rappel de tous les actes de procédure et de toutes les décisions depuis la déclaration d'appel initiale du 21 mai 2015, soit de la présente cour, soit de la cour de cassation, outre le courrier du 16 juillet 2018 des appelants et celui du 15 juillet 2019 de la société intimée sollicitant la péremption de l'instance.
Ainsi, la société ne peut valablement soutenir l'absence d'indication des pièces sur lesquelles se fondent la requête du comité d'entreprise et de la fédération.
La cour rejette la demande de nullité de la requête.
Sur la péremption d'instance
L'article 86 du code de procédure civile dispose que l'instance est périmée lorsque aucune des parties n'accomplit de diligences pendant deux ans.
Pour soutenir que le délai de péremption a été interrompu, le comité d'entreprise de la société Musée Grévin et la fédération CGT du Commerce, de la Distribution et des Services font valoir que depuis l'arrêt sur déféré du 26 septembre 2016, le dossier porte la mention « terminé » sur le RPVA et qu'aucun message électronique n'a pu être traité par le greffe, de sorte que les appelants lui ont adressé le 16 juillet 2018, par la voie du Palais, une demande de fixation dont ils produisent une copie.
Cependant, s'il est exact que le dossier informatique de la cour a été à tort déclaré « terminé » le 11 avril 2016, comme l'indique l'accusé de réception à la société du Musée Grévin de son message du 15 juillet 2019, d'une part, les appelants ne justifient pas, eux, d'avoir tenté d'adresser un courrier électronique à la cour durant le délai de péremption, aucun message de refus n'étant produit, et d'autre part, les appelants ne justifie ni de l'envoi ni de la réception du courrier daté du 16 juillet 2018 à la cour ou à la société intimée alors qu'il fait mention de sa communication à l'avocat de la partie adverse.
Par ailleurs, la société Musée Grévin, qui sollicite la péremption d'instance, par un message RPVA en date du 15 juillet 2019, n'a fait aucune diligence pendant le délai de péremption pour rétablir l'affaire.
Ainsi, il n'est dès lors pas justifié que le délai de péremption ait été interrompu.
Par ailleurs, c'est en vain que les appelants invoquent les dispositions de l'article R.1452-8 du code du travail, applicables exclusivement dans le cadre d'une procédure prud'homale.
Enfin, la constatation de la péremption de 1'instance ne méconnaît pas les dispositions de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, la fermeture du dossier informatique n'ayant pas privé le comité d'entreprise de la société Musée Grévin et la fédération CGT du Commerce, de la Distribution et des Services de leur droit d'accès à la justice, dans les formes prévues par l'a1inéa 2 de l'article 930-1 du code de procédure civile.
Il convient donc de constater la péremption d'instance et de confirmer à ce titre l'ordonnance déférée.
Sur les autres demandes
La société Musée Grévin sollicite la condamnation des appelants à une somme de 1.000 € chacun pour procédure abusive pour avoir déféré l'ordonnance d'incident à la cour.
Le droit d'ester en justice ne trouve sa limite que dans l'abus fait de celui-ci, avec malice, mauvaise foi ou bien lorsqu'il résulte d'une erreur équipollente au dol.
En l'espèce, la société Musée Grévin ne justifiant en rien d'un abus de droit exercé par les appelants à déférer une ordonnance d'incident, sa demande de dommages et intérêts sera rejetée.
Par ailleurs, la péremption d'instance ayant été prononcée pour le défaut de diligences de toutes les parties, y compris de la société Musée Grévin, cette dernière est irrecevable à solliciter le paiement des frais d'expertise par les appelants, alors que la présente cour a été saisie après renvoi sur cassation totale.
Au regard de la situation des parties, il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Au regard de la solution du litige, chaque partie supportera la charge des dépens de l'instance éteinte par elle exposés.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Confirme l'ordonnance sur incident du 11 septembre 2020 ;
Constate la péremption d'instance et le dessaisissement de la cour ;
Dit irrecevable la société Musée Grévin en sa demande de paiement des frais d'expertise par le comité d'entreprise de la société Musée Grévin et la fédération du commerce, de la distribution et des services ;
Déboute la société Musée Grévin de sa demande de dommages et intérêts ;
Dit que chaque partie supportera la charge des dépens et frais de l'instance éteinte par elle exposés.
LE GREFFIER LA PRESIDENTE