République française
Au nom du Peuple français
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4 - Chambre 7
ARRÊT DU 26 Novembre 2020
(n° 116 , 1 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 19/08676 - N° Portalis 35L7-V-B7D-B7ZVD
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 18 Avril 2019 par le juge de l'expropriation de [Localité 24] RG n° 18/00058
APPELANTE
Commune DE [Localité 48], agissant poursuites et diligences de son maire
Mairie de [Localité 48]
[Adresse 41]
[Localité 25]
représentée par Me Bruno BASSET, avocat au barreau de PARIS, toque : E0112
INTIMÉES
Madame [R] [E] [Y] épouse [S]
[Adresse 17]
[Localité 25]
Non comparante, représentée par Me Claudine SCOTTO D'APOLLONIA, avocat au barreau de PARIS, toque : C 1941
DIRECTION GENERALE DES FINANCES PUBLIQUES TRESORERIE GENERALE DE SEINE ET MARNE
France Domaine
[Adresse 13]
[Localité 24]
représenté par Mme [N] [J], comparante en visio conférence, en vertu d'un pouvoir général
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été appelé à l'audience publique du 24 Septembre 2020, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Hervé LOCU, président, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte du dépôt des conclusions dans le délibéré de la Cour, composée de :
Hervé LOCU, président
Marie-José DURAND, conseillère
Gilles MALFRE, conseiller
Greffier : Marthe CRAVIARI, lors des débats
ARRÊT :
- CONTRADICTOIRE
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Hervé LOCU, président et par Marthe CRAVIARI, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
Par délibération du 18 novembre 2014, la commune de [Localité 48] a approuvé un Plan Local d'Urbanisme qui intégre dans le périmètre d'un emplacement réservé numéroté 6, en vue de la réalisation d'un équipement public, en l'occurrence une gendarmerie, la parcelle ZC [Cadastre 12] située sur ladite commune de [Localité 48] au lieudit '[Localité 35]' d'une superficie totale de 4.139 m² appartenant à Madame [R] [E] [Y] veuve [S] située en bordure nord de la zone urbanisée de la commune et longée sur son côté cour par la RD 96, voie asphaltée, à cet endroit dénommée [Adresse 42],
Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 27 novembre 2015, Madame [R] [E] [Y] veuve [S] a adressé à la commune de [Localité 48] une mise en demeure d'acquérir la dite parcelle.
La parcelle est classée en zone 1AUb, soit une zone urbanisée. La date de référence est fixée au 15 décembre 2015.
En 1'absence d'accord amiable, et conformément à la procédure prévue à l'article L.230 -3 du Code de l'urbanisme, Madame [R] [E] [Y] veuve [S] a saisi, par mémoire déposé le 6 juillet 2018, le juge de l'expropriation de la Seine et Marne aux fins qu'il prononce le transfert de la propriété de ladite parcelle au profit de la commune et qu'il fixe le prix du terrain comme en matière d'expropriation.
Par jugement du 18 avril 2019, après transport sur les lieux le 05 octobre 2018, celui-ci a :
-Prononcé le transfert de la propriété de la parcelle cadastrée ZC [Cadastre 12] sur la commune de [Localité 48] au lieu dit [Localité 35] d'une superficie de 4.139 m² au profit de la commune de [Localité 48] ;
- Fixé à 347.020, 00 euros (trois cent quarante sept mille vingt euros), toutes causes confondues, l'indemnité à payer par la commune de [Localité 48] à Madame [R] [E] [Y] veuve [S] pour la dépossession de la parcelle située sur la commune de [Localité 48] cadastrée ZC [Cadastre 12] ;
-Dit que les dépens seront laissés à la charge de l'autorité expropriante en application des dispositions de l'article L.312 1 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;
-Condamné la commune de [Localité 48] à verser à Madame [R] [E] [Y] veuve [S] la somme de 2 000,00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
-Dit que les dépens seront laissés à la charge de l'autorité expropriante en application des dispositions de l'article L.312-1 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;
La commune de [Localité 48] a interjeté appel le 16 mai 2019.
Pour l'exposé complet des faits, de la procédure, des prétentions et moyens des parties, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé à la décision déférée et aux écritures :
- adressées au greffe, par la commune de [Localité 48], appelante, réciproquement, le 21 mai 2019 notifiées le 23 juillet 2019 (AR du 30 juillet 2019), le 12 novembre 2019 notifiées le 03 décembre 2019 (AR du 5 et du 7 décembre 2019), le 03 décembre 2019 notifiées le 10 décembre 2019 (AR du 12 et du 17 décembre 2019), et le 12 mars 2020 notifiées le 13 mai 2020 (AR du 19 et 20 mai 2020) aux termes desquelles elle demande à la cour :
- d'infirmer le jugement rendu' ;
- de prononcer le transfert de la propriété de la parcelle cadastrée ZC [Cadastre 12] sur la commune de [Localité 48] au lieu dit [Localité 35] d'une superficie de 4.035 m² au profit de la commune de [Localité 48] ;
- de fixer l'indemnité principale à titre principal à la somme de 135 000 euros' ;
- de fixer l'indemnité de remploi à titre principal à la somme de 145 000 euros' ;
- de fixer l'indemnité principale à titre subsidiaire à la somme de 138 198,75 euros' ;
- de fixer l'indemnité de remploi à titre subsidiaire à la somme de14 819,88 euros' ;
- de condamner Madame [Y] à lui verser une somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- de condamner Madame [Y] aux entiers dépens' ;
- adressées au greffe, par Madame [Y] veuve [S], intimée, le [Cadastre 12] octobre 2019 notifiées le 10 décembre 2019 (AR du 12 décembre 2020, pas d'AR de Me [G]), et le 25 février 2020, notifiées le 03 mars 2020 (AR du 05 mars 2020) aux termes desquelles elle demande à la cour :
- de déclarer irrecevable au fond l'appel de la commune de [Localité 48] ;
- de rejeter en conséquence l'ensemble de sa demande ;
- de confirmer le transfert de la propriété de la parcelle cadastrée ZC [Cadastre 12] sur la commune de [Localité 48] au lieu dit [Localité 35] d'une superficie de 4.139 m² au profit de la commune de [Localité 48] ;
- de confirmer le jugement sur le montant des indemnités ;
- de condamner la commune de [Localité 48] à lui verser la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile' ;
- de condamner la commune de [Localité 48] aux entiers dépens de l'instance ;
Et dans le mémoire du 28 février 2020 ;
- de juger que la parcelle ZC n°[Cadastre 12] bénéficie d'une situation privilégiée ;
- de constater que la demande d'alignement présentée par la commune de [Localité 48] n'est pas fondée ;
- de juger en outre que la parcelle ZC n°[Cadastre 12] n'est grevée d'aucune servitude de constructibilité permanente ;
- de rejeter l'ensemble de la demande de la commune de [Localité 48] ;
- adressées au greffe, par le Commissaire du gouvernement, intimé et appelant incident, le 10 octobre 2019, notifiées le 12 novembre 2019 ( AR du 14 novembre 2019), aux termes desquelles il demande à la cour':
- de déclarer recevable l'appel de la commune de [Localité 48].
- de déclarer non déchue de son appel la commune de [Localité 48].
- de reformer le jugement de première instance en fixant l'indemnité à allouer à Madame [R] [E] [Y] veuve [S], en principal, au montant global, remploi inclus, de 146 692,80 € (132 448 + 14 244,80) ; de manière subsidiaire, au montant global, remploi inclus, de 174 010,20 € (157 282 + 16 728,20) ;
MOTIFS DE L'ARRÊT
La commune de [Localité 48] fait valoir que':
-Concernant la date de référence à retenir, les parties sont d'accord pour retenir le 15 décembre 2015 ;
-Concernant la qualification de terrain à bâtir ; la motivation des premiers juges à ne pas considérer le terrain en l'occurrence de terrain à bâtir mais de terre agricole devra être confirmée en appel (par manque de desserte des réseaux électriques, d'eau potable, d'assainissement) ;
-Concernant la situation privilégiée de la parcelle ; il est critiquable que les premiers juges aient considéré le terrain en situation privilégiée pour les motifs suivants ;
-l'usage effectif du bien doit être apprécié à la date de référence, or les juges ont pris en compte le développement du secteur IV de Marne la Vallée ;
- la parcelle était longée par une route départementale, ce qui est insuffisant pour considérer comme privilégiée celle- ci ;
-il est contestable de considérer la parcelle comme située en «'limite de la zone urbanisée sur ses deux côtés'» alors qu'elle est à la sortie du bourg entourée de zones agricoles ;
- sa proximité avec la mairie et les équipement publics, scolaires, sportifs etc... est relative, toutes les parcelles les plus éloignées du centre-ville sont à distance comparables et la localisation des autres infrastructures est d'environ 800 mètres ;
- si la proximité aux réseaux est contestable, il faut prendre en compte que ces réseaux sont insuffisants pour accueillir l'opération d'aménagement d'ensemble à la date de référence ;
-Concernant l'absence de prise en compte de l'arrêté d'alignement privant la parcelle d'un accès sur la voie ; les premiers juges doivent être censurés pour avoir écarté l'arrêté du 12 octobre 2018 d'alignement de la commune pour les motifs suivants ;
-L'arrêté est postérieur à la date de référence ; il ne fait que déterminer la limite du domaine public routier rappelant ainsi les limites posées par le plan d'alignement de 1879 [Pièce 10] ; selon un arret du Conseil d'Etat du 26 mars 2012, «'un plan d'alignement a pour effet d'incorporer définitivement dans le domaine public, comme élément de la voirie communale, le sol des propriétés non bâties dans les limites qu'il détermine'» donc les autres propriétaire ne peuvent plus revendiquer une propriété dessus, et ce de manière inaliénables et imprescriptibles en suivant l'article L.3111-1 du CGPPP ;
-Un déclassement doit être nécessaire pour sortir du domaine public même si les premiers juges considèrent cela comme un espace longeant les voies nécessaires pour desservir les propriétés riveraines ;
-L'existence d'une dépendance de la voie publique peut être importante quand elle a vocation à permettre la circulation piétonne, ce qui a déjà été constaté dans cette commune (Cour administrative d'appel de Paris, 2décembre 2010 09P07120)'; cette bande de terrain d'une largeur de plus de quatre mètres aboutit à priver la parcelle d'un accès direct ou suffisant sur la voie publique et il ne pourrait être remédié à l'état d'enclave au moyen d'une servitude de passage car relevant du domaine public sans pouvoir y grever des servitudes légales de droit privé selon la Cour de Cassation [arrêt du 2 mars 1994 87-16.932] ;
-Concernant l'absence de prise en compte du périmètre d'attente dans lequel est inclus la parcelle ; les premiers juges n'ont pas pris en compte le périmètre d'attente qui empêche toute construction et donc toute valorisation au-delà de la nature de terrain agricole et cette servitude doit être prise en compte pour fixer la valeur des parcelles ;
- l'article 230-3 du Code de l'urbanisme peut s'appliquer au cas d'espèce. On retrouve un cas semblable dans l'arrêt de la CA de Rennes du 24 juin 2016 15/02456 où la servitude constructibilité restreint les possibilités de construction alors que l'emplacement réservé prohibe toute possibilité de construction, la première affectant partiellement la parcelle litigieuse et était permanente à la date de référence ; cette servitude d'urbanisme devrait être prise en compte pour fixer la valeur de la parcelle ;
-Le dispositif instauré par l'article L.123-2 du Code de l'urbanisme permet à la commune de geler pendant 5 ans la constructibilité des terrains, en l'occurrence, la servitude a pour objet de limiter à 12m² de surface de plancher la surface des construction, donc la constructibilité de la parcelle est réduite à néant ;
-Concernant l'estimation de la valeur vénale de la parcelle ;
-Les premiers juges écartent les termes du commissaire du gouvernement car les surfaces seraient trop important, ce qui est critiquable, car les surfaces étaient comparables (4 139 m²) contrairement à certains termes de la partie adverse pourtant retenus (267 m²). La cour d'appel de Paris (arrêt 22 novembre 2018, 17/14768) avait fixé un prix au m² de 37,50 euros/m² pour une parcelle en zone AU sur la commune de [Localité 39] d'une surface proche (3 823m²) en zone privilégiée et une situation semblable a été confirmée par la même cour (CA Paris 22 novembre 2018 17/14756) indiquant clairement que le prix fixé 76 euros/m² est «'sans commune mesure'»' ;
-Il est critiquable que les juges se soient fondés sur des termes situés en zone urbaine U, et non 1AU, influant sur les possibilités de construction ;
-elle propose de soumettre à la cour les estimations du service des domaines , un premier avis du 19 janvier 2013 dont la valeur de la parcelle ZC[Cadastre 12] (4139m²) était estimée à 124 170euros, et un second avis du 21 décembre 2017 à 145 000 euros [Pièce 12] ;
-elle propose de fixer à 34,25 euros/m² selon les quatres termes du commissaire du gouvernement ;
-elle propose une prise en compte uniquement de 104m² du fait de l'arrêté d'alignement, soit 138 198,75 euros pour 4 034 m² : indemnité principale de 138 198,75 euros et indemnité de réemploi de 14 819, 88 euros
Dans les conclusions responsives du 14 novembre 2019 :
-Le secteur IV n'est pas achevé, il ne le sera qu'en 2024, or on ne peut pas se fonder sur une projection future et on ne peut donner le caractère de privilégiée à la parcelle ;
-Critique de l'affirmation malvenue de citations tronquées de jurisprudence (concernant la cour d'appel d'Amiens du 16 novembre 2017, 16/03852) dont est joint l'entière décision [Pièce 13] ;
-Critique de la production d'une photographie et d'un plan graphique centrés à dessin pour témoigner de la proximité avec la zone urbaine ;
-Critique de l'affirmation de la partie adverse soulignant que 800 mètres n'est pas éloigné entre les équipements et la parcelle ;
-Ce n'est pas le classement de la parcelle qui conduit à écarter la notion de terrain en situation privilégiée, mais le fait qu'en dehors de la desserte par le réseau, le terrain ne disposait d'aucun attrait particulier ;
-Récuse l'aspect «'fallacieux'» du «'prétendu alignement'» ; posséder une façade sur la rue ne peut permettre d'écarter l'appartenance au domaine public, et si les avis de France domaine ne mentionnent pas cet arrêté d'alignement c'est que ledit arrêté est postérieur aux avis ;
-Critique de la remarque « outrageante » d'un arrêté émis à dessein des circonstances en l'occurrence, la mesure n'émanant pas de la commune mais des services eu Département et suite à un avis d'un géomètre expert [Pièce14] ;
-Est dénué de portée le document d'arpentage du 26 janvier 1988, car il se rattache à une action de bornage n'ayant vocation à s'appliquer uniquement à la délimitation des propriétés privées et ne peut pas affecter le domaine public (CE, 20 juin 1975 n°89785) ;
-Un extrait cadastral n'a pas de valeur probante sur les limites de propriétés, n'empêche pas l'opposabilité de l'arrêté d'alignement ;
-Un arrêté d'alignement n'a pas à être publié ou notifié (CE 20 juin 2008, Commune de [Localité 32] n°306079) ;
-Seul le plan d'alignement doit être publié, chose faite [Pièce 14] ;
-Les modalités de notification sont sans incidence sur la légalité de l'acte ;
-L'affirmation de l'intimée que pour déclarer une parcelle enclavée, il est obligatoire que la partie comprenant l'alignement forme une nouvelle parcelle ne se fonde sur aucune texte ou jurisprudence ;
-L'intimée n'a pas démontrer en quoi l'article L.322-2 du Code de l'expropriation devrait s'appliquer concernant l'institution de la servitude de périmètre d'attente ;
-Les quatre termes de comparaison du commissaire du gouvernement sont retenus comme pertinents pas uniquement par leurs superficies mais aussi pour localisation en zone 1AU ;
-Les termes de [Localité 39] sont tout à fait comparables, notamment du fait que la ville de [Localité 39] a plus d'attractivité ;
-L'argument des termes de 2013 et 2011 comme étant trop anciens est retourné contre l'intimée ayant versé au débat des référence de 2010, 2012 ;
-pour la référence de la transaction en zone AUV du 20 décembre 2017, l'intimée a oublié des m² de la parcelle concernée et fait passer de 166,17 euros/m² constaté par l'intimée à 15,95 euros/m² alors même qu'il s'agit d'une parcelle plus attractive et considérée comme terrain à bâtir ;
Dans les conclusions responsives du 3 décembre 2019 :
-Critique de la mise en doute de la recevabilité de l'appel formulée par le commissaire du gouvernement, le jugement étant notifié le 10 mai 2019 [Pièce 17] et la déclaration d'appel le 16 mai 2019 [Pièce 18] ;
Dans les conclusions responsives du 25 mars 2020 :
-l'appréciation d'une situation démographique passée ne peut pas se soustraire à l'interdiction de se fonder sur une situation économique future, en outre rien ne permet d'envisager une situation privilégiée le 15 décembre 2015 ;
-réfute de se baser sur la définition de la Cour de Cassation du 14 février 1996 95-7006, car la CA d'Amiens offre des critères précis d'appréciation ;
-soutient que les arrêts concernant les réseaux sont applicables, comme celui de la CA de Toulouse du 18 juin 2012 11/00002 qui concerne une parcelle proche d'équipement collectifs et de maisons d'habitation ;
-l'emprise de la parcelle objet de l'alignement ne peut être vue comme appartenant à la commune, car cela relève du domaine public départemental, sans confusion entre domaine public communal et celui départemental ;
-l'intimée n'apporte aucun élément pour dire que les villes de [Localité 33] et de [Localité 39] sont moins attractives faisant d'elles de mauvais termes alors que les hausses démographiques sont semblables ;
-le terme de [Localité 45] serait inadéquats car inconstructibles, ce qui n'est pas le cas ;
-le terme de [Localité 46] n'est pas enclavé contrairement à ce qu'affirme l'intimée ;
-Il ne faut pas confondre zone agricole et zone naturelle et zonage AU qui permet, non dans l'immédiat, la possibilité de construction, c'est pourtant un raisonnement que l'on peut retrouver en Cour de Cassation, et la présente cour devrait «'revenir à une certaine orthodoxie juridique'» ;
-Est reconnue par l'intimée l'erreur concernant son terme de comparaison mais remplacé par un arrêt de la Cour de Cassation inapplicable au cas d'espèce. De plus, la présence de la parcelle à proximité d'un centre touristique international ne tient pas, car la parcelle n'est pas AUV mais en 1AUBet n'est pas destinée au projet Village Nature avec zone agricole entre les deux ;
-Les parcelles ZC [Cadastre 16] et ZC [Cadastre 18] sont minorées par l'intimée par la présence d'un cimetière à proximité et du constat qu'il fallu attendre 20 ans pour qu'elles soient vendues, mais ces circonstances n'expliquent rien ;
-L'arrêt de la cour de cassation du 7 janvier 2016 (14-25597) n'imposant pas la décote de 90% ne prévaut pas sur une jurisprudence traditionnelle en la matière ;
-Maintient la pertinence du terme de l'arrêt du 22 novembre 2018 ayant les caractéristiques semblables sans être terrain à bâtir ;
-Maintient la pertinence du terme de l'arrêt du RG 18/07100 car se situant aussi dans le bourg de [Localité 48] ;
- Maintient la pertinence du terme de la commune de [Localité 33] car se situant aussi dans le bourg de [Localité 48], car des réseaux y étaient observés ;
Madame [Y] répond que':
Concernant les caractéristiques du bien ;
-la parcelle ZC [Cadastre 12] jouxte un terrain bâti en zone UAb [Pièce 14], elle est bordée par la RD 96 débouchant sur la RD 231 reliant directement la commune de [Localité 48] qui, permet de rejoindre l'autoroute A4 ou en traversant l'autoroute, d'arriver à la ville de [Localité 30], permet d'arriver en 10 minutes au [Adresse 47], et en 20 minutes à [Localité 38], et en 15 minutes aux Parcs Disneyland [Localité 40], et en 30 minutes de [Localité 40] ;
-les réseaux d'eau potables, d'assainissement et d'électricité desservent la parcelle ZC [Cadastre 12] [Pièce 15, 16, 17] ;
-la parcelle ZC [Cadastre 12] constitue un terrain ferme et de surface plane, propice aux constructions ;
-depuis quatre décennies la population de la commune de [Localité 48] croît constamment, doublant de 1970 à 2016, preuve d'une forte attractivité ;
-L'ensemble de ces éléments influent sur la valeur vénale de la parcelle procurant une plus-value acquise importante ;
Concernant la date de référence : il s'agit du 15 décembre 2015 ;
Concernant le classement de la parcelle au regard du plan local d'urbanisme, la parcelle ZC [Cadastre 12] est classée en zone 1AUb [Pièce 11] ;
Concernant la qualification de la parcelle expropriée au regard de l'urbanisme ;
-la parcelle ZC [Cadastre 12], est située dans un secteur constructible, est desservie comme exposé plus haut, jouxte une importante zone urbanisée classée UAb, néanmoins, les parties s'accordent sur le fait que la parcelle ZC [Cadastre 12] ne dispose pas de la qualification de terrain à bâtir ;
Concernant la qualification de terrain en situation hautement privilégiée ;
-De jurisprudence constante [Pièce 21, Cour de cassation 95-70006] la proximité à une zone habitée, la présence d'équipement scolaire, sportifs, touristiques, de loisirs ou commerciaux, de viabilité, et/ou une bonne desserte confèrent une plus-value à un terrain par rapport au prix d'une terre à vocation agricole sans spécificité particulière, et c'est selon les critères de la Cour de cassation, que les premiers juges constatent selon une parfaite motivation que la parcelle bénéficiait d'une situation privilégiée [Pièce 10, page 6] ;
-Concernant la critique du jugement de l'appelant concernant la situation privilégiée ;
-Le premier juge n'a pas que pris en compte le développement économique du secteur, mais aussi les critères de la situation privilégiée selon la Cour de cassation sans prise en compte de la vocation future du terrain en ne prenant en compte que la progression actuelle et passée du secteur IV de [Localité 37] ;
-La définition de la cour d'appel d'Amiens de la situation privilégiée est contraire à celle de la Cour de Cassation, et sa véracité est mise en doute car trop proche de la définition de terrain à bâtir ;
-L'appelante produit un extrait extrêmement réduit du plan graphique du plan local d'urbanisme et peu clair pour prouver l'éloignement de toute zone urbaine de la parcelle, ce qui est contredit par une reproduction plus lisible avec plan cadastral prouvant l'inverse où la zone ZC [Cadastre 12] ne jouxte pas de zone A, ni de zone 1AUa car elle est séparée par la RD 96 de la zone agricole la plus proche [Page24 et Pièces 3 et 11] ;
-Si elle est considérée comme trop éloignée une parcelle à 390 mètres du centre-ville et- à 800 mètres des infrastructures sociales, toutes situations privilégiées imaginables impliqueraient une proximité directe avec ces dernières ;
-l'appelante tente d'induire en erreur en amalgamant équipements publics et réseaux d'électricité, d'assainissement et d'eau en citant deux arrêts de la cour d'appel qui ne sont pas versés aux débats ;
Concernant le prétendu alignement privant la parcelle d'un accès sur la voie :
-Les premiers juges n'ont pas pris pas en compte cet alignement car l'arrêté du 12 octobre 2018 est postérieur à la date de référence, la partie de la parcelle n'est pas cadastrée, la découverte tardive de ce plan, les espaces non goudronnés longeant les voies publiques constituent des propriétés riveraines ;
-Enfin, l'article L322-2 alinéa 3 du Code de l'expropriation dispose que doivent être prises en compte les servitudes et restrictions administratives «'sauf si leur institution révèle, de la part de l'expropriant, une intention dolosive'», cette dernière étant évidente étant donné les graves anomalies de l'arrêté du 12 octobre 2018 (absence de plan établi par un géomètre-expert, de la prise en compte du remembrement rural de 1988 [Pièces 24, 25, 26], de publication au recueil des actes administratifs du département, de mentions légales, de création de parcelle comprenant l'alignement, et du projet municipal de construction d'une caserne de gendarmerie [Pièce 19] sur la parcelle cadastrée ZC [Cadastre 12]) ;
Concernant les servitudes temporaires pesant sur la parcelle :
-L'expropriant fait une erreur d'appréciation dans son application de l'article L.322-6 du Code de l'expropriation, de l'article 123-2 du Code de l'urbanisme, car la servitude de constructibilité instaurée dans son périmètre et la limitation de superficie à 12m² s'y attachant ne dure que 5 années, une durée limitée dans le temps donc, elle n'est pas d'une durée permanente. Or l'article L322-2 du Code de l'expropriation dispose qu'«'il est tenu compte des servitudes et des restrictions administratives affectant de façon permanente'» ce qui n'est pas le cas en l'espèce, et ce qu'a considéré le premier juge ;
Concernant les termes de comparaison présentés par Madame [R] [S] devant le tribunal de grande instance :
-Les huit termes proposés sont situés dans le centre de la commune à environ 400 mètre de la parcelle, classés en zone Uaa [Pièce 28 et 29] à défaut de termes de comparaison en zones AU ; premier terme à 624 euros/m² [Pièce 30], second à 249,72 euros/m² [31], troisième de 312,46 euros/m²[32], quatrième à 372,34m²[33], cinquième à 322,19 euros/m² [34], sixième à 514,02 euros/m²[35], septième à 425,53 euros/m² [38], huitième à 440,75 euros/m² [37] ;
-La moyenne qui en ressort est de 384,54 euros /m² pour des superficies moyennes de 258m² ; selon l'arret de la cour de cassation du 07 janvier 2016 14-25597, il est possible d'estimer le prix d'un terrain AU en situation privilégiée en se fondant sur le prix moyen de terrain à bâtir en zone UA par la pratique d'un abattement de 60% [Pièce 40] ;
-La cour de Cassation par un arrêt du 10 mai 2011 n°10-15262 admet la situation privilégiée pour seulement deux avantages : la desserte par une rue et desserte par des réseaux insuffisants pour la qualification de terrain à bâtir [Pièce 39] ;
Concernant l'estimation de la valeur vénale de la parcelle selon les premiers juges, elle n'est pas remise en cause pour une valeur de 76euros /m² ;
Concernant la critique du jugement par l'appelante ;
-Les quatre termes du commissaire du gouvernement doivent être écartés car ils sont sans indication quant à leurs consistances et leurs localisations ;
-Deux termes de comparaison de l'appelante proviennent de [Localité 39] qui est bien moins attractive que [Localité 48], ce dernier ayant gardé un aspect village tout en étant à proximité des grandes centres économiques. Le troisième terme de l'appelante est ancien, il concerne une zone AU2 et est d'une très grande superficie, et le quatrième est ancien et manque de précision concernant sa consistance ;
-La méthode des premiers juges est valide ayant appliqué un abattement de 80% ;
-Les deux arrêts d'appel cités concernent pour le premier un terrain agricole et un terrain constructible et le second une promesse de vente et devront être écartés ;
Concernant le nouveau terme de comparaison présenté par l'intimée devant la cour d'appel :
-il provient du logiciel des Services de la Publicité Foncière (ETALAB) et concerne une transaction immobilière à 1000 mètres de la parcelle le 20 décembre 2017 avec un prix de 166,17 euros/m² pour 2,981m² en zone 1AUV, donc avec une certaine proximité avec la parcelle en l'occurrence notamment si l'on applique un abattement de 45% soit 75euros/m² ;
Dans les conclusions responsives et récapitulatives du 25 février 2020 :
-Concernant une projection future de la zone ; il faut souligner que s'il y a un futur, il y a aussi et surtout un passé comme le prouvent les données démographiques et que la situation privilégiée de la parcelle est patente en 2015 par son usage effectif d'une terre libre d'occupation ;
-La photographie de l'appelante en page 10 et 11 est orientée vers le Nord-est pour maquiller la réalité alors que la parcelle est incluse dans une zone 1AUb et est proche directement en son sud d'une zone UAb ;
-L'argument considérant la parcelle comme excentrée, dans une distance excessive du centre ville et des infrastructures ne tient pas à la lecture de la délibération du 19 mars 2016 où il y était inscrit le projet d'y construire un équipement public... que serait dès lors excessivement excentré des autres selon l'appelant ;
-La volonté d'écarter la qualification de situation privilégiée en se fondant sur des réseaux insuffisants ne tient pas car cette qualification a justement été créée pour rendre compte d'un terrain avec des réseaux insuffisants pour être à bâtir mais qui ont des caractéristiques au-delà du simple terrain agricole ;
-Il n'y a pas de parcelle cadastrée séparant la parcelle en l'occurrence de la voie publique, et ce même si alignement il y a, il ne peut appartenir à la commune. L'argument de la commune va à l'encontre de l'article L1 du Code de l'expropriation où il faut avant tout déterminer les parcelles à exproprier et rechercher les propriétaires, la commune en revendiquant la propriété d'aucune parcelle se borne juste à revendiquer une certaine superficie à définir par elle-même sur la base d'un «'plan d'alignement'» de 1879 pratiquement illisible. Ensuite, par le jugement du 18 avril 2019, la propriété totale de la parcelle en l'occurrence a été transférée à la commune ; la demande d'alignement s'avère sans objet ;
-L'intention dolosive de la commune est manifeste ;
-Le plan d'alignement est illisible, le nom de la voie n'est pas indiqué, sans indication des quatre points cardinaux [Pièce adverse 23], sans légende ;
-Il revient au géomètre-expert du remembrement de signaler l'ensemble des servitudes d'utilité publique. Une partie des terres remembrées est prélevée par la collectivité, et le Maire de la commune fait partie de la Commission de remembrement. Ainsi, ladite Commission est parfaitement informée des éventuels problèmes d'alignement ;
-Le périmètre d'attente a été instauré au PLU du 18 novembre 2014 et la servitude de constructibilité a disparu le 18 novembre 2019, les servitudes n'étant donc pas permanentes ;
-Il convient de rejeter les termes de l'appelante pas seulement dus à leurs ancienneté, mais aussi du manque de similitudes ; le terme de [Localité 33] est bien moins attractif, le terme de [Localité 45] est inconstructible et est donc un mauvais terme ; comme déjà dit, le terme de [Localité 39] est moins attractif ; ces termes sont moins bien intégrés au centre économique du [Adresse 47] et sont moins bien desservis et plus excentrés des centres urbains que la parcelle en cause ;
-L'appelante ne précise jamais que les premiers juges ont appliqué un abattement de 80% rendant la méthode toute à fait adéquate au cas d'espèce ;
-Avec raison la commune signale l'erreur commise par le Conseil de l'intimée concernant le nouveau terme de comparaison ; toutefois, les unités foncières distinctes sont de consistance différente et donc la moyenne de 15,95 euros/m² n'est pas pertinente, étant de consistance fort différente de la parcelle en cause, la cour d'appel doit écarter le terme
-Il est indéniable que la présence d'un centre touristique à 1000 mètres de la parcelle est un avantage alors que l'appelante en avait omis l'existence, ainsi, l'erreur de conclusion ci-dessus amena la partie adverse à concéder l'avantage de la présence d'un proche centre touristique dans la valorisation de la parcelle ZC [Cadastre 12] ;
-La partie adverse ajoute deux nouveaux termes issus du site cadastre.gouv.fr, parcelles non bâties à l'époque le 15 novembre ZC [Cadastre 16] et ZC [Cadastre 18] en zone Uab vendus à bas coût dû à l'extrême étroitesse de leur largeur et de la contiguïté avec le cimetière, elles n'ont pas été vendues durant 20 ans ; ces termes doivent être écartés ;
Le Commissaire du gouvernement soutient que':
-Sur l'absence de prise en compte de l'arrêté d'alignement produit par l'expropriant ; si l'on se réfère au plan cadastral actuellement en vigueur, il apparaît que la parcelle ZC [Cadastre 12] présente une façade directement sur le domaine public routier départemental, sans qu'une parcelle de terrain départemental (matérialisée au plan) ne vienne l'enclaver ; l'arrêté d'alignement n'apparaît pas probant pour soutenir que la parcelle ZC [Cadastre 12] est enclavée. En conséquence, la parcelle sera valorisée pour sa superficie totale soit 41 139 m² sans déduction de la bande de 104 m²(4 x 26) revendiquée par l'expropriant ;
- Sur le caractère privilégié de la parcelle ; la notion de situation privilégiée pour la parcelle ZC [Cadastre 12] est retenue ;
-Il est proposé de retenir une indemnité principale calculée sur une valeur unitaire de 32 euros/m² donnant 4139 m² x 32 €/m² = 132 448 € .
SUR CE, LA COUR,
- Sur la recevabilité de l'appel
Le jugement ayant été notifié par voie d'huissier par Mme [Y] veuve [S] à la commune de [Localité 48] le 10 mai 2019 (pièce N°17), l'appel a régulièrement été interjeté par la commune de [Localité 48] dans le délai d'un mois prévu par l'article 311-26 du code de l'expropriation, à savoir le 16 mai 2019( piéce N°18).
- Sur la recevabilité des conclusions
Aux termes de l'article R311-26 du code de l'expropriation modifié par décret N°2017-891 du 6 mai 2017-article 41 en vigueur au 1 septembre 2017, l'appel étant du 16 mai 2019, à peine de caducité de la déclaration d'appel, relevée d'office, l'appelant dépose ou adresse au greffe de la cour ses conclusions et les documents qu'il entend produire dans un délai de trois mois à compter de la déclaration d'appel.
À peine d'irrecevabilité, relevée d'office, l'intimé dépose ou adresse au greffe de la cour ses conclusions et les documents qu'il entend produire dans un délai de trois mois à compter de la notification des conclusions de l'appelant. Le cas échéant, il forme appel incident dans le même délai et sous la même sanction.
L'intimé à un appel incident ou un appel provoqué dispose, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, d'un délai de trois mois à compter de la notification qui en est faite pour conclure.
Le commissaire du gouvernement dépose ou adresse au greffe de la cour ses conclusions et l'ensemble des pièces sur lesquelles il fonde son évaluation dans le même délai et sous la même sanction que celle prévue au deuxième alinéa.
Les conclusions et documents sont produits en autant d'exemplaires qu'il y a de parties, plus un.
Le greffe notifie à chaque intéressé et au commissaire du gouvernement, dès leur réception, une copie des pièces qui lui sont transmises.
En l'espèce, les conclusions de la commune de [Localité 48] du 21 mai 2019 , de Mme [Y] du 28 octobre 2019 et du commissaire du gouvernement du 10 octobre 2019 adressées dans les délais légaux sont recevables.
Les conclusions de la commune de [Localité 48] du 12 novembre 2019, du 3 décembre 2019 et du 12 mars 2020 sont de pure réplique à celles de Mme [Y] et à celles du commissaire du gouvernement appelant incident, ne formulent pas de demandes nouvelles ou de moyens nouveaux, sont donc recevables au delà des délais initiaux.
Les conclusions de Mme [Y] du 25 février 2020 sont de pure réplique à celles de la commune de [Localité 48] du 3 décembre 2019, ne formulent pas de demandes nouvelles ou de moyens nouveaux et sont donc recevables au delà des délais nouveaux.
Les documents produits viennent uniquement au soutien des mémoires complémentaires.
- Sur le fond
Aux termes de l'article 17 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen, la propriété est un droit inviolable et sacré, dont nul ne peut être privé si ce n'est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l'exige évidemment, et sous la réserve d'une juste et préalable indemnité.
L'article 545 du code civil dispose que nul ne peut être contraint de céder sa propriété , si ce n'est pour cause d'utilité publique, et moyennant une juste et préalable indemnité.
Aux termes de l'article L123-17 du code de l'urbanisme, le propriétaire d'un terrain bâti ou non bâti réservé par un plan local d'urbanisme pour un ouvrage public, une voie publique, une installation d'intérêt général ou un espace vert peut, dès que ce plan est opposable aux tiers, et même si une décision de sursis à statuer qui lui a été opposée est en cours de validité, exiger de la collectivité ou du service public au bénéfice duquel le terrain a été réservé qu'il soit procédé à son acquisition dans les conditions et délais mentionnés aux articles L230'1 et suivants.
L'article L230'3 du code de l'urbanisme en ses alinéas 1 et 2 dispose que la collectivité ou le service public qui fait l'objet de la mise en demeure doit se prononcer dans le délai d'un an à compter de la réception en mairie de la demande du propriétaire.
À défaut d'accord amiable à l'expiration d'un délai d'un an mentionné au premier alinéa, le juge de l'expropriation, saisi par le propriétaire, soit par la collectivité ou le service public qui a fait l'objet de la mise en demeure, prononce le transfert de propriété et fixe le prix de l'immeuble. Ce prix, y compris l'indemnité de remploi, est fixé et payé comme en matière d'expropriation , sans qu'il soit tenu compte des dispositions qui ont justifié le droit de délaissement.
La régularité de cette procédure de délaissement n'est pas contestée en l'espèce, ainsi que le transfert de la propriété de la parcelle ZC [Cadastre 12] sur la commune de [Localité 48] au profit de celle ' ci ; le jugement sera donc confirmé en ce sens.
Aux termes de l'article L321-1 du code de l'expropriation, les indemnités allouées couvrent l'intégralité du préjudice direct, matériel et certain causé par l'expropriation.
Conformément aux dispositions de l'article L322-2, du code de l'expropriation, les biens sont estimés à la date de la décision de première instance, seul étant pris en considération - sous réserve de l'application des articles L322-3 à L322-6 dudit code - leur usage effectif à la date définie par ce texte.
L'appel de la commune de [Localité 48] porte sur la qualification juridique de la parcelle, sur l'absence de prise en compte d'un arrêté d'alignements privant la parcelle d'un accès sur la voie, sur l'absence de prise en compte du périmètre d'attente dans lequel il inclut la parcelle et sur la valeur unitaire de la parcelle ; l'appel incident du commissaire du gouverment porte sur la valeur unitaire à réduire à 32 euros/m² à titre principal et à 38 euros/m² à titre subsidiaire.
S'agissant de la date de référence, les parties s'accordent toutes à la situer au 15 décembre 2015 en application de l'article L230-3 du code de l'urbanisme, le PLU de la commune de [Localité 48] ayant par délibération à cette date modifié la zone dans laquelle se trouve la parcelle.
Le jugement sera donc confirmé sur ce point.
S'agissant des données d'urbanisme, à la date de référence la parcelle ZC [Cadastre 12] se trouvait en zone 1AUb, incluse dans l'emplacement réservé numéro 6 institué au bénéfice de la commune de [Localité 48] pour la réalisation d'un équipement public (gendarmerie) ; le 27 novembre 2015, Madame [Y] veuve [S] a mis en demeure la commune de [Localité 48] de procéder à l'acquisition de cette parcelle sur la base de l'article L 123'17 du code de l'urbanisme sur l'exercice du droit de délaissement ; par délibération du 29 mars 2016, le conseil municipal a décidé d'approuver le principe de l'acquisition totale de celle-ci.
La zone 1AU correspond à une zone à urbaniser, faisant l'objet d'orientation d'aménagement et de programmation (orientations numéro 2 et numéro 3), et de 2 périmètres datant d'un projet d'aménagement global délimité en application du a) de l'article L123'2 du code de l'urbanisme ; le secteur 1AUb autorise la construction de locaux d'habitation ou d'activité (artisanale ou industrielle), remarque étant faite que dans les « périmètres datant d'un projet d'aménagement global » délimité en application du a) de l'article L123'2 du code de l'urbanisme, les constructions sont autorisées à condition que leur superficie soit inférieure à 12 m² de surface de plancher, et ce pour une durée de 5 ans à partir de la date d'approbation du PLU, dans l'attente de l'approbation par la commune d'un projet d'aménagement global.
Pour ce qui est de la nature du bien, de son usage effectif et de sa consistance, il s'agit d'un terrain nu, classé en nature de « terre » dans la documentation cadastrale, libre d'occupation, situé au nord du bourg et jouxtant une zone urbanisée, de configuration rectangulaire, d'une superficie de 4 139 m² pour une profondeur d'environ 155 m et une largeur d'environ 26 m, présentant une façade (environ 26 m) sur la [Adresse 42].
S'agissant de la date à laquelle le bien exproprié doit être estimé, il s'agit de celle du jugement de première instance, soit le 18 avril 2019.
- Sur l'indemnité principale
A) Sur la qualification juridique
1° Sur la qualification de terrain à bâtir
Les parties s'accordent pour écarter comme le premier juge la qualification de terrain à bâtir de la parcelle qui ne remplit pas les conditions de l'article L322'3 du code de l'expropriation.
Le jugement sera donc confirmé sur ce point.
2°Sur la qualification de situation privilégiée
Le premier juge a retenu que la parcelle bénéficie d'une situation privilégiée.
La commune de [Localité 48] conteste cette qualification ; Mme [Y] et le commissaire du gouvernement demandent la confirmation.
Un bien exproprié qui ne peut être qualifié de terrain à batir peut en effet bénéficier d'une situation privilégiée au regard de sa situation dans la région et dans le tissu urbain et de ses conditions de desserte par les voies de circulation et les réseaux divers à la date de référence.
La commune de [Localité 48] indique en premier lieu que le juge de l'expropriation ne peut tenir compte des perspectives d'aménagement du site dans la mesure où c'est à la date de référence que doit être apprécié l'usage effectif du bien et qu'en l'espèce il ne pouvait donc en aucun cas prendre en compte le développement au sein du secteur 4 de [Localité 37] pour apprécier le caractère ou non privilégié de la parcelle ; cependant, le premier juge s'est contenté d'indiquer que le village de [Localité 48] est un village Bastide entouré de plaine agricole et de bois classé, situé à quelques kilomètres au sud de la N4 qui délimite un secteur à forte progression économique, touristique et démographique et le secteur 4 de [Localité 37] est compris dans l'opération d'intérêt national Les villages nature et n'a donc pas motivé sa décision sur la vocation future, mais uniquement sur la progression passée .
En second lieu, la commune de [Localité 48] indique que le premier juge a pris en compte le fait que la parcelle était longée par une route départementale, ce qui est insuffisant pour retenir une situation privilégiée ; le premier juge a indiqué que la parcelle se trouve à 10 km du centre de [Adresse 47] et de Disneyland [Localité 40], qu 'elle est longée par la RD 96 et facilement accessible par la RD 231 aux axes importants que sont l'autoroute A4, la francilienne, la gare TGV [Localité 37] internationale ; en conséquence, l'existence de voies de circulations telles que décrites est de nature à conférer une plus-value à la parcelle par rapport au prix d'une terre à vocation agricole dépourvue de spécificités particulières.
En troisième lieu, la commune de [Localité 48] indique qu'il est plus contestable encore que le premier juge ait indiqué que la parcelle se situe en « limite de la zone urbanisée sur ses 2 côtés », donnant ainsi à penser que la parcelle se situerait en continuité directe de la zone urbaine, alors qu'en réalité elle est précisément à la sortie du bourg et qu'elle se situe dans un plus vaste ensemble de terrains agricoles et de prairies et que c'est pour cette raison qu'elle est exclusivement entourée de zones 1AUb, A, 1AUa et 2AU ; le premier juge a indiqué que la parcelle se trouve en limite de la zone urbanisée sur deux de ses côtés, au Sud et à l'est, qu'elle est distante de 390 m du centre bourg, à proximité des équipements publics, scolaires, sportifs et commodités ; il ressort des photographies aériennes de Madame [Y] veuve [S] non contestées (page 28 et 29 des conclusions), que la parcelle est située dans le prolongement immédiat des espaces urbanisés, qu'elle jouxte au nord de la parcelle ZC numéro [Cadastre 27] incluse également dans l'emplacement réservé et dans l'orientation d'aménagement et de programmation numéro 2 , est classée en zone 1AUb (à urbaniser) et au sud, la zone urbanisée UAb comprenant de nombreuses habitations, qu'elle ne jouxte pas de zones A (agricole), ni de zones 1AUa, et la zone 2AU est séparée de la parcelle par la RD numéro 96 ; en outre, se trouve à 1100 m de la parcelle, le centre touristique international villages nature au nord-ouest (page 31 des conclusions de Madame [Y]).
En quatrième lieu, la commune de [Localité 48] indique qu'il est contestable que le premier juge ait indiqué que la parcelle se situe à 390 m de la place de la mairie, et à proximité des équipements publics, scolaires, sportifs et autres commodités, les infrastructures étant situées à près de 800 m à vol d'oiseau de la parcelle ; cependant, il n'est pas contesté que la parcelle se trouve en limite de la zone urbanisée sur deux de ses côtés, au sud et à l'est, et que si elle se trouve effectivement à 800 m à vol d'oiseau des équipements publics, il est admis qu'elle est distante uniquement de 390 m du centre bourg ; Madame [Y] souligne que dans la délibération du 29 mars 2016 du conseil municipal, il est rapporté que le maire déclarait : ' que l'acquisition de cette parcelle au vu de sa localisation représente une réelle opportunité pour la collectivité qui envisage la création d'un équipement public ' (pièce numéro 19).
En cinquième lieu, la commune de [Localité 48] indique que le jugement précise que la parcelle serait située à proximité des réseaux, alors que les réseaux existants sont insuffisants pour accueillir l'opération d'aménagement d'ensemble à la date de référence ; le premier juge a indiqué que la parcelle est desservie par les réseaux existants d'électricité, d'assainissement et d'eau potable ; il ressort des plans graphiques des réseaux (pièce numéro 15 et 16 de Madame [Y] veuve [S]) que la parcelle bénéficie de la desserte par les réseaux d'eau potable, assainissement et d'électricité :
'réseau électrique : celui-ci, en se dirigeant vers le nord, longe la [Adresse 42], en façade avec accès, desservant des habitations ;
'réseau d'assainissement : la parcelle est desservie par le réseau d'eaux usées desservant les zones urbanisées du bourg et longe la [Adresse 42]) ;
'réseau d'électricité : la parcelle est desservie par le réseau d'électricité de la zone UAB qu'elle jouxte au sud ainsi que par le réseau d'électricité longeant la RD 96 ;
'réseau d'eau potable : la parcelle est desservie par le réseau d'eau potable desservant les zones urbanisées du bourg et longe la [Adresse 42].
Il ressort de l'ensemble de ces éléments, que la parcelle est en limite de propriétés bâties sur deux de ses façades (extrait du plan cadastral page 4 des conclusions du commissaire du gouvernement), qu'elle se trouve en limite de la zone urbanisée, avec une distance de 390m du centre bourg, à proximité d'équipements publics, scolaires, sportifs et commodités, qu'elle est longée par la RD 96 et est facilement accessible par la RD 231 aux axes importants que sont l'autoroute A4, la francilienne, et la gare TGV [Localité 37] internationale et qu'elle est enfin desservie par les réseaux existants d'électricité, d'assainissement et d'eau potable.
En conséquence, le premier juge a exactement retenu la qualification de situation privilégiée. Le jugement sera donc confirmé en ce sens.
3°Sur l'arrêté d'alignement
Le premier juge indique s'agissant de sa desserte par la voie asphaltée et la [Adresse 42], que l'arrêté d'alignement du 2 octobre 2018 invoqué par la commune de [Localité 48] est postérieur la date de référence, qu'il ne résulte d'aucun document versé aux débats l'existence d'une parcelle cadastrée qui sépare la parcelle en cause de la voie et que comme le rappelle le conseil d'État dans l'arrêt cité par l'expropriant, les espaces non goudronnés longeant les voies publiques en constituent la dépendance nécessaire qui permet de desservir les propriétés riveraines.
La commune de [Localité 48] critique l'absence de prise en compte de cet arrêté d'alignement qui prive la parcelle d'un accès sur la voie.
En premier lieu, elle critique le premier juge d'avoir écarté cet arrêté d'alignement au motif qu'il est postérieur à la date de référence fixée au 15 décembre 2015 ; elle indique qu'un arrêté d'alignement est un acte purement déclaratif, qu'il a pour effet d'incorporer définitivement dans le domaine public, comme éléments de la voirie communale, seules des propriétés non bâties dans les limites qu'il détermine ; elle ajoute qu'à supposer même comme l'indique le premier juge qu'il soit non opposable, il devait déduire la bande de terrains concernés de la surface déclarée par Madame [Y] pour l'évaluation de la parcelle, que cette bande de terrains d'une largeur de plus de 4 m aboutit à priver la parcelle d'un accès direct ou suffisant sur la voie publique ; la commune ajoute qu'il ne peut être remédié à l'état d'enclave au moyen d'une servitude de passage, que l'alignement à l'endroit de la parcelle de Madame [Y] a été rappelé par un arrêté du 2 octobre 2018 (pièce numéro 9), qu'elle n'est pas l'origine de cet arrêté celui-ci émanant des services du département, que le plan a été bien évidemment réalisé par un géomètre expert et qu'en réponse au commissaire du gouvernement, la circonstance que ce plan d'alignement soit ancien, qualifié de cadastre napoléonien n'entrave en rien son opposabilité.
L'article L 322-2 du code de l'expropriation dispose que les biens sont estimés à la date de la décision de première instance.
Toutefois, et sous réserve de l'application des dispositions des articles L322-3 à L322-6, est seul pris en considération l'usage effectif des immeubles et droits réels immobiliers un an avant l'ouverture de l'enquête prévue à l'article L1, dans le cas prévu à l'article L 122'4, 1 an avant la déclaration d'utilité publique ou, dans le cas des projets ou programmes soumis au débat public prévu par l'article L 121'8 du code de l'environnement ou par l'article 3 de la loi numéro 2010'597 du 3 juin 2010 relative au [Localité 34], au jour de la mise à disposition du public du dossier de ce débat. En l'espèce, la date de référence non contestée est fixée au 15 décembre 2015.
L'alinéa 3 de cet article dispose qu'il est tenu compte des servitudes et des restrictions administratives affectant de façon permanente l'utilisation ou l'exploitation des biens à la date correspondante pour chacun des cas prévus au 2e alinéa, sauf si leur institution révèle, de la part de l'expropriant, une intention dolosive.
En conséquence c'est à la date de référence soit le 15 décembre 2015 qu'il est tenu compte des servitudes et des restrictions administratives affectant de façon permanente l'utilisation ou l'exploitation du bien ; or en l'espèce, l'arrêté d'alignement du 12 octobre 2018 est postérieur à cette date de référence ; l'expropriant a sollicité du conseil départemental de Seine-et-Marne l'adoption, en date du 12 octobre 2018, de cet arrêté d'alignements qui est valable uniquement un an , et donc non permanent, relatif aux parcelles ZC[Cadastre 12], ZC[Cadastre 26],-ZC [Cadastre 27] qui présentent une façade sur la [Adresse 42] ; cet arrêté se base sur un plan d'alignement approuvé le 22 avril 1879 (cadastre « napoléonien »), qui a été rénové comme l'indique le commissaire du gouvernement depuis 1879, les limites des parcelles reprécisées notamment par rapport aux voiries à l'occasion de cette rénovation du plan ; par ailleurs la parcelle ZC [Cadastre 12] est elle-même issue de la parcelle ZC [Cadastre 1] du plan cadastral rénové suite à une division parcellaire établie par un géomètre expert en 1988 et consignée dans un document d'arpentage produit par l'exproprié validé le 16 février 1988 et présentant les mesures précises des parcelles ; il ressort de l'extrait du plan cadastral produit par le commissaire du gouvernement (page 4), que la parcelle ZC [Cadastre 12] présente une façade directement sur le domaine public routier départemental, sans qu'une parcelle de terrain départemental ne vienne l'enclaver ; l'expropriant ne conteste d'ailleurs pas que la parcelle dispose d'une façade sur la route du [Adresse 42] ; enfin les espaces non goudronnées longeant les voies publiques en constituent la dépendance nécessaire qui permet de desservir les propriétés riveraines.
En conséquence, en application de l'article susvisé, au regard de la date de référence et de l'absence de servitude et de restrictions administratives affectant de façon permanente l'utilisation ou l'exploitation du bien à cette date, le premier juge a exactement considéré qu'il n'y avait pas lieu de prendre en compte cet arrêté d'alignement du 12 octobre 2018.
La commune de [Localité 48] conteste en outre l'absence de prise en compte par le premier juge du périmètre d'attente dans lequel est incluse la parcelle et que les dispositions de l'article L322-2 du code de l'expropriation n'ont pas vocation à s'appliquer lors de l'institution de la servitude des périmètres d'attente.
La parcelle ZC numéro [Cadastre 12] est inscrite dans le périmètre d'une zone d'orientation d'aménagement et de programmation (OAP numéro 2) ; Madame [Y] veuve [S] a exercé son droit de délaissement le 27 novembre 2015 en application de l'article L123-7 du code de l'urbanisme et L13-15 du code de l'expropriation, devenus les articles L152-2 du code de l'urbanisme et L322-6 du code de l'expropriation qui ne prévoient pas de réduction du prix du fait d'une prohibition de toute possibilité de construction d'emplacement réservé avant l'expropriation pour le délaissement ; en outre, la commune de [Localité 48] se fonde sur l'article L 151'41 du code d'urbanisme, relatif au contenu du règlement du plan local d'urbanisme qui prévoit : 'que le règlement peut délimiter des terrains sur lesquels sont instituées : cinquièmement dans les zones urbaines et urbanisées, des servitudes interdisant, sous réserve d'une justification particulière, pour une durée au plus de 5 ans dans l'attente de l'approbation par la commune d'un projet d'aménagement global, les constructions ou installations d'une superficie supérieure à un seuil défini par le règlement'. Ces servitudes ne peuvent avoir pour effet d'interdire les travaux ayant pour objet l'adaptation, changement de destination, la réfection ou l'extension limitée des constructions existantes ; la servitude de constructibilité instaurée dans le périmètre de cet article et la limitation d'une superficie à 12 m² qui s'y rattachent ne durent que 5 années, et en conséquence au sens de l'article L322'2 du code de l'expropriation il ne s'agit pas en l'espèce de restrictions administratives affectant l'acquisition de la parcelle de façon permanente ; en outre , en application de l'article L230'3 du code de l'urbanisme le prix y compris l'indemnité de remploi, est fixé et payé comme en matière d'expropriation, sans qu'il soit tenu compte des dispositions qui ont justifié le droit de délaissement.
En conséquence, il convient pour déterminer le prix, de fixer une valeur pleine de terrain en zone 1AUb de la commune de [Localité 48], sans déduction de la bande de 104m² revendiquée par l'expropriant.
B) Sur la fixation de l'indemnité
Le juge de l'expropriation dispose du pouvoir souverain d'adapter la méthode qui lui paraît la mieux appropriée à la situation des biens expropriés.
Le premier juge a écarté les références du commissaire du gouvernement, les deux avis donnés par les domaines en 2013 et 2017 versés par l'expropriant et a retenu en conséquence la méthode proposée par l'exproprié, à savoir l'affectation d'un coefficient sur le prix des terrains à bâtir pris comme référence avec un prix unitaire moyen arrondi à 380 euros/ m², en appliquant un coefficient d'abattement de 80 %, soit une valeur unitaire de 76 euros/ m².
La commune de [Localité 48] demande à titre principal de ramener l'indemnité principale de dépossession à la somme de 135 000 euros (aprés déduction de la surface correspondant au plan d'alignement), et à titre subsidiaire la somme de 138 198,75 euros ; Mme [Y] veuve [S] demande la confirmation ; le commissaire du gouvernement propose à titre principal de retenir une valeur de 32 euros/m² et à titre subsidiaire de 38 euros/m².
Il convient en conséquence d'examiner les références des parties :
1° Les référence de la commune de [Localité 48]
Elle invoque les termes du commissaire du gouvernement, quatre d'entre eux ayant des surfaces comparables, qui ne sont pas repris par le commissaire du gouvernement en appel :
T1 : TGI Melun, 2 décembre 2010, 7 020m², zone IAU, 30 euros /m²
T2 : TGI Melun, 2 décembre 2010, 3 723 m², zone IAU, 35 euros/m²
T3 : TGI Melun, 5 février 2009, zone Nab, 60 euros/m²
T4 : CA Paris, 26 novembre 2013, 5 797 euros/m², zone IIINA, 12 euros/m².
Les trois premières références trop anciennes seront écartées ; la 4° référence sera écartée en l'absence de renseignements sur les caractéristiques du bien (situation, configuration, caractéristiques).
Elle conteste ensuite la méthode de l'expropriée retenue par le premier juge, qui sera également examinée ci-après.
Elle fait état des estimations effectuées par France domaine, d'un premier avis du 19 janvier 2013 pour une valeur de 124'170 euros, et d'un deuxième avis le 21 décembre 2017 pour une valeur de 145'000 euros (pièce numéro 12) ; cependant ces estimations ne correspondant pas à des mutations effectives seront écartées.
À titre subsidiaire, elle invoque les termes du commissaire du gouvernement correspondant à des décisions de justice et les 4 termes de celui-ci.
Elle inclut dans ses conclusions (pages 45 et 47) des références émanant d'ETALAB, en faisant état d'une valeur de 34, 25 euros/m², mais qui ne mentionnent pas les dates de transaction ; ces références seront donc écartées.
2° Les références de Mme [Y] veuve [S]
Elle précise qu'il n'existe pas actuellement de véritable marché pour des terrains voués dans un futur proche et certain (zone AU) aux activités artisanales sur la commune de [Localité 48] et elle propose en conséquence des termes concernant des terrains classés en zone UAa, puisqu'il existe un marché de terrains à bâtir à vocation d'habitation principalement en centre bourg.
'T1 : 22 mars 2010, parcelle A numéro [Cadastre 15], 125 m², 78'000 euros, 624 euros/ m²
'T2 : 20 octobre 2010, parcelle A numéro [Cadastre 3], 179 m², 44'700 euros, 249,72 euros/ m²
'T3 : 20 octobre 2010 : parcelle A numéro [Cadastre 2] est à numéro 1317,456 m², 142'482 euros, 312,46 euros/ m²
'T4 : 2 mars 2011 : parcelle numéro A[Cadastre 4], 282 m², 105'000 euros, 372,34 euros/ m²
'T5 : 17 mai 2011 : parcelle à numéro A[Cadastre 5], 329 m², 106'000 euros, 322,19 euros/ m²
'T 6 : 2 août 2011, parcelle numéro A [Cadastre 6], 214 m², 110'000 euros, 514,0 2 euros/ m²
'T 7 : 6 janvier 2012, parcelle A numéro [Cadastre 7], 235 m², 100'000 EUR, 425,53 euros/ m²
'T8 : 6 janvier 2012 : parcelle numéro A [Cadastre 8], 244 m², 107'500 euros, 440,57 euros/ m²
soit une superficie totale de 2 064 m², une moyenne de 258 m², un prix total de 793'682 euros, soit un prix moyen de 384,54 euros/ m².
Ces termes également proposés par le commissaire du gouvernement seront examinés ci-après.
Mme [Y] invoque une transaction située en zone AUV de la commune de [Localité 48] du 20 décembre 2017, pour une parcelle de 2 981 m² pour un montant de 495 369 euros, soit un prix de 166, 17 euros/m² ; en réalité, comme l'indique la commune de [Localité 48], le montant de la transaction correspond à 3 parcelles, et donc à une superficie de 2 981 + 23 780 + 4 302 = 31 063 m², soit 15, 95 euros/m² ; Mme [Y] estime que cette référence doit etre écartée et il y sera donc fait droit.
3° Les références du commissaire du gouvernement
Il propose de retenir des termes de comparaisons qui sont comparables à la parcelle en cause au regard de leur situation urbanistique, de leur superficie, de la situation privilégiée des parcelles, choisis dans un périmètre étendu de 40 km autour de [Localité 48] :
'T1 : arrêt de la cour d'appel de Paris du 22 novembre 2018, commune de [Localité 39], [Adresse 51], parcelle ZB R [Cadastre 14],3 1458 m², zone AU, 37,50 euros/m²
'T2 : arrêt de la cour d'appel de Paris du 18 avril 2019, à [Localité 44],[Adresse 52]s, parcelle BH [Cadastre 22] et [Cadastre 23], 1965 m², zone 1AU, 26 EUR/m²
'T3: jugement de du 26 novembre 2015, désistement d'appel, [Adresse 52], parcelle B [Cadastre 9],[Cadastre 11], c'est [Cadastre 19],7 [Cadastre 10],[Cadastre 20] et [Cadastre 21],2 1512 m², zone 1AU, 30 euros/m²
'T4 : jugement de [Localité 24] du 6 avril 2017, commune de [Localité 33], [Adresse 50], parcelle à A [Cadastre 28], A [Cadastre 29], 3 133 m², zone 1AU, 35 euros/m².
Le commissaire du gouvernement précise que pour l'ensemble de ces références, le caractère privilégié a été reconnu aux parcelles, et la moyenne est de 32 euros/m² ; il verse à l'appui les décisions.
Il reprend également les termes proposé par Madame [Y] veuve [S], en appliquant un coefficient de réfaction de 90 %, soit une moyenne de 38 euros/ m².
Il ajoute qu'aux fins de recoupement, il a recherché des mutations réalisées en 2018 et 2019 dans un périmètre de 10 km autour de la commune de [Localité 48], en nature de jardin, de superficies comparables aux terrains à bâtir retenus comme terme de comparaison et que seuls deux termes de comparaison sont jugés pertinents et sont proposés :
'T1: commune de [Localité 31], [Adresse 36], 19 mars 2018,693 m², 36'000 euros, 51,95 euros/ m², en nature de jardin avec un garage et un passage commun ;
'T2 : [Localité 43], [Adresse 49], 3 avril 2018, 598 m², 15'000 euros, 25,0 8 euros/ m², en nature de jardin.
Il précise que la moyenne de ces termes fait ressortir une valeur de 39 euros/m², que le premier terme est sensiblement surévalué.
Il propose donc de retenir une indemnité principale sur une valeur unitaire de 32 euros/ m² et à titre subsidiaire de 38 euros/m².
Si les références de jurisprudence concernent d'autres communes, il n' y a pas de termes proposés sur la commune de [Localité 48] dans le même zonage , elles sont récentes, concernent egalement des grandes superficies et sont du même zonage ; Mme [Y] affirme que ces communes de [Localité 39], [Localité 44] et [Localité 33] sont moins attractives, mais elle n'en rapporte pas le preuve ; elles sont pertinentes et seront retenues.
Il convient par contre d'écarter les 2 termes de comparaison correspondant à des jardins dans des communes différentes, dont la valeur varie de plus du simple au double.
En l'absence de termes de comparaison émamant du marché libre, le premier juge a donc exactement retenu la méthode proposée par l'exproprié à savoir de l'affectation d'un coefficient sur le prix des 8 terrains à bâtir sur la commune de [Localité 48], dont le prix unitaire moyen est de 384,54 euros/ m² ; en effet, bien que ces références datent de plus de 5 ans, elles doivent être retenues en l'absence d'autres références, s' il convient en conséquence de tenir compte de cette ancienneté, celle- ci est compensée par le fait que la moyenne de superficie est de 258 m², alors que la parcelle en cause est de 4 139 m², ce qui est un facteur de baisse de la valeur ; au regard de ces éléments le premier juge a exactement retenu un prix unitaire de 380 euros/ m².
S'agissant du coefficient d'abattement, ces terrains de référence sont en moyenne d'une superficie de 258 m² donc beaucoup moins importante que la parcelle en cause et sont situés en plein c'ur du bourg de [Localité 48] et non comme la parcelle en cause en périphérie ; au regard du caractère privilégié de la parcelle en cause, il convient de retenir un abattement habituel de 90 % comme proposé par le commissaire du gouvernement.
La moyenne des termes de comparaison de jurisprudence est de 32 euros/m² et la moyenne des 8 termes retenus avec un abattement de 90% est de 38 euros/m² ; il convient de privilégier les références situées dans la meme commune et de retenir une valeur unitaire de 38 euros/m².
L'indemnité principale est donc de : 4 139m² x 38 euros = 157 282 euros.
Le jugement sera infirmé en ce sens.
- Sur l'indemnité de remploi
20% jusqu'à 5 000 euros = 1 000 euros
15% de 5 000 à 15 000 euros = 1 500 euros
10% au delà de 157 282 - 15 000 = 142 282 x 10% = 14 228, 20 euros
total de 16 728, 20 euros.
Le jugement sera infirmé en ce sens.
L'indemnité totale de dépossession est donc de :
157 282 euros (indemnité principale) + 16 728, 20 euros (indemnité de remploi) = 174 010,20 euros arrondis à la somme de 174 011 euros.
- Sur l'article 700 du code de procédure civile
Il convient de confirmer le jugement qui a condamné la commune de [Localité 48] à verser à Madame [R] [Y] veuve [S] la somme de 2 000 euros sur le fondement l'article 700 du code de procédure civile.
L'équité commande de débouter les parties de leurs demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile en appel.
- Sur les dépens
Il convient de confirmer le jugement pour les dépens de première instance, qui sont à la charge de l'expropriant conformément à l'article L312-1 du code de l'expropriation.
Mme [Y] veuve [S] perdant pour l'essentiel le procès sera condamnée aux dépens d'appel.
PAR CES MOTIFS,
La cour statuant publiquement par mise à disposition au greffe, contradictoirement et en dernier ressort,
Déclare recevable l'appel de la commune de [Localité 48] ;
Déclare recevables les conclusions des parties ;
Infirme partiellement le jugement entrepris ;
Statuant à nouveau ;
Fixe à la somme totale de 174 011 euros arrondis l'indemnité à payer par la commune de [Localité 48] à Mme [R] [Y] veuve [S] pour la dépossession de la parcelle cadastrée ZC [Cadastre 12] située sur la commune de [Localité 48] se décomposant comme suit :
- indemnité principale : 157 282 euros
- indemnité de remploi : 16 728, 20 euros
Confirme le jugement en ses autres dispositions ;
Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;
Déboute les parties de leurs demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne Mme [Y] veuve [S] aux dépens.
LE GREFFIERLE PRÉSIDENT