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24/11/2020 | FRANCE | N°19/09268

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 1, 24 novembre 2020, 19/09268


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 1 - Chambre 1



ARRET DU 24 NOVEMBRE 2020



(n° , 10 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/09268 - N° Portalis 35L7-V-B7D-B73XP



Décision déférée à la Cour : Jugement du 02 Mai 2017 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 14/14209





APPELANT



Monsieur [E] [J] né le [Date naissance 1] 1976 à [Localité 10] ([Localité 10])


r>[Adresse 12]

[Localité 5]



représenté par Me Bénédicte FLORY de l'AARPI DIXHUIT BOETIE, avocat au barreau de PARIS, toque : A0756

assisté de Me Mary PLARD, avocat au barreau de NANTES





IN...

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 1

ARRET DU 24 NOVEMBRE 2020

(n° , 10 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/09268 - N° Portalis 35L7-V-B7D-B73XP

Décision déférée à la Cour : Jugement du 02 Mai 2017 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 14/14209

APPELANT

Monsieur [E] [J] né le [Date naissance 1] 1976 à [Localité 10] ([Localité 10])

[Adresse 12]

[Localité 5]

représenté par Me Bénédicte FLORY de l'AARPI DIXHUIT BOETIE, avocat au barreau de PARIS, toque : A0756

assisté de Me Mary PLARD, avocat au barreau de NANTES

INTIMEE

Madame [N] [I] née le [Date naissance 4] 1974 à [Localité 9] (Grèce)

[Adresse 3]

[Localité 7]

représentée par Me Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 15 octobre 2020, en chambre du conseil, devant la Cour composée de :

M. François MELIN, conseiller, faisant fonction de président lors des débats

Mme Marie-Catherine GAFFINEL, conseillère

Mme Laure ALDEBERT, conseillère, magistrate appelée pour compléter la cour

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Mme Mélanie PATE

LE MINISTERE PUBLIC pris en la personne de MADAME LE PROCUREUR GENERAL près la cour d'appel de PARIS

[Adresse 6]

[Localité 7]

représenté par Mme de CHOISEUL PRASLIN, avocat général qui a visé le dossier le 26 novembre 2019

ARRET :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par M. François MELIN, conseiller, faisant fonction de président et par Mme Mélanie PATE, greffière présente lors de la mise à disposition.

Le 11 août 2014, l'enfant [V], [E], [L] [I] a été inscrit sur les registres d'état civil de la mairie de [Localité 7] comme étant né le [Date naissance 8] 2014 de Mme [N] [I] qui l'a reconnu le 7 août 2014 à la mairie de [Localité 7].

Par acte d'huissier du 16 septembre 2014, Mme [N] [I], agissant en sa qualité de représentante légale de l'enfant mineur, a fait assigner M. [E] [J] devant le tribunal de grande instance de Paris en établissement judiciaire de sa paternité envers l'enfant.

Par jugement 2 mai 2017, le tribunal de grande instance de Paris a :

-dit que M. [E] [J] est le père de [V], [E], [L] [I], né [Date naissance 2] 2014 à [Localité 7] ;

- dit que [V], [E], [L] [I] se nommera désormais [J];

-fixé la résidence de l'enfant chez sa mère ;

- condamné M. [E] [J] à payer à Mme [N] [I] une contribution pour l'entretien et l'éducation de l'enfant [V] d'un montant de mille euros (1000 €) par mois, et ce rétroactivement à compter du [Date naissance 8] 2014, date de naissance de l'enfant ;

- condamné M. [E] [J] à payer Mme [N] [I], en sa qualité de représentante légale de [V], la somme de 1500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné M. [E] [J] aux entiers dépens, comprenant les frais d'expertise et d'incident.

Pour dire que M. [E] [J] était le père de l'enfant, le tribunal a retenu que M. [E] [J] avait refusé de se présenter aux opérations d'expertise, sans motif légitime, qu'une telle attitude devait s'analyser en un aveu, corroboré par les différents échanges entre les parties aux termes desquels M. [E] [J], informé de la grossesse de Mme [N] [I] avait pris position sur les suites à donner à celle-ci.

M. [J] a interjeté appel de ce jugement par déclaration du 26 avril 2019 des chefs suivants :

-dit que M. [E] [J] est le père de [V], [E], [L] [I], né [Date naissance 2] 2014 à [Localité 7] ;

- dit que [V], [E], [L] [I] se nommera désormais [J];

- condamné M. [E] [J] à payer à Mme [N] [I] une contribution pour l'entretien et l'éducation de l'enfant [V] d'un montant de mille euros (1000 €) par mois, et ce rétroactivement à compter du [Date naissance 8] 2014, date de naissance de l'enfant ;

- condamné M. [E] [J] à payer Mme [N] [I], en sa qualité de représentante légale de [V], la somme de 1500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné M. [E] [J] aux entiers dépens, comprenant les frais d'expertise et d'incident.

Le 22 juillet 2019, Mme [N] [I] a notifié des conclusions d'incident demandant au conseiller de la mise en état de déclarer l'appel irrecevable, comme tardif.

Par une ordonnance rendue le 7 novembre 2019, le conseiller de la mise en état a rejeté la demande de M. [E] [J] de nullité de la signification faite à parquet le 10 mai 2017, rejeté la fin de non-recevoir tirée de la tardiveté de l'appel invoquée par Mme [N] [I], déclaré M. [E] [J] recevable en son appel, condamné Mme [N] [I] aux dépens de l'incident et rejeté sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Mme [N] [I] a formé une requête en déféré le 21 novembre 2019. Par arrêt du 15 septembre 2020, cette cour a confirmé l'ordonnance précitée.

Par dernières conclusions notifiées le 7 octobre 2020, M. [E] [J] demande à la cour d'infirmer la décision entreprise en ce qu'elle a

- dit que [V], [E], [L] [I] se nommera désormais [J] ;

- condamné M. [E] [J] à payer à Mme [N] [I] une contribution pour l'entretien et l'éducation de l'enfant [V] d'un montant de mille euros (1000 €) par mois, et ce rétroactivement à compter du [Date naissance 8] 2014, date de naissance de l'enfant ;

- condamné M. [E] [J] à payer à Mme [N] [I], en sa qualité de représentante légale de [V], la somme de 1500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile;

- condamné M. [E] [J] aux entiers dépens, comprenant les frais d'expertise et d'incident.

Statuant à nouveau,

-dire que l'enfant se nommera [I],

-maintenir l'exercice exclusif de l'autorité parentale par Mme [N] [I],

-dire que M. [E] [J] bénéficiera d'un droit de communication libre avec [V] à raison de quatre fois par an, par téléphone ou par Skype.

- dire que M. [E] [J] bénéficiera d'un droit de visite libre en France pendant une journée trois fois par an, en respectant un délai de prévenance de quinze jours.

- fixer à la somme de 300 € mensuelle, le montant de la contribution à l'entretien et l'éducation de l'enfant [V] [I], devant être servie depuis sa naissance.

-dire que les arriérés de contribution, pour la période du jour de la naissance à l'assignation seront versés sur un compte ouvert au nom de l'enfant dont il pourra seul disposer à sa majorité.

- condamner Mme [N] [I] à rembourser l'éventuel trop perçu.

- déclarer Mme [N] [I] responsable du préjudice psychique et moral subi par M. [E] [J] du fait des circonstances de la conception de l'enfant.

- condamner Mme [N] [I] au paiement de la somme de 1 € symbolique en réparation du dommage subi, toutes causes de préjudices confondues.

- débouter Mme [N] [I] de sa demande d'indemnisation sur le fondement de la procédure abusive.

- dire n'y avoir lieu à indemnisation sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, chacune des parties conservant les frais exposés pour sa défense.

Par dernières conclusions du 8 octobre 2020, Mme [N] [I] demande à la cour de :

- déclarer irrecevable l'appel principal interjeté par M. [E] [J],

A titre subsidiaire,

- déclarer mal fondé l'appel de M. [E] [J],

- débouter M. [E] [J] de l'ensemble de ses demandes fins et conclusions,

- déclarer recevable et fondé l'appel incident de Mme [N] [I],

- réformer la décision entreprise en ce qu'elle a limité à 1.000 € (mille euros) par mois le montant de la contribution à l'entretien et l'éducation de l'enfant [V], mise à la charge de M. [E] [J],

Statuant à nouveau de ce chef,

- fixer la contribution à l'entretien et l'éducation de l'enfant [V] due par M. [E] [J] à la somme mensuelle de 2.500 €,

- réformer la décision entreprise en ce qu'elle a dit que Mme [N] [I] exercera seule l'autorité parentale sur l'enfant [V],

Statuant à nouveau de ce chef,

- dire et juger que l'autorité parentale sera exercée conjointement par les deux parents de l'enfant [V],

En tout état de cause,

- donner acte à Mme [N] [I] de sa proposition pour l'exercice par M. [E] [J] de son droit de visite et d'hébergement à raison de : la totalité des petites et la moitié des grandes vacances scolaires,

- donner acte à Mme [N] [I] de sa proposition de communication de M. [E] [J] avec l'enfant [V] de manière tri-hébdomadaire,

- condamner M. [E] [J] à payer à Mme [N] [I] la somme de 10.000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure d'appel abusive,

- condamner M. [E] [J] à payer à la concluante la somme de 5.000 € par application de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamner M. [E] [J] aux dépens,

- dire qu'ils pourront être recouvrés directement par la Selarl LEXAVOUÉ PARIS-VERSAILLES, dans les conditions prévues par les dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

MOTIFS

Sur l'irrecevabilité de l'appel

Mme [N] [I] a maintenu dans ses conclusions sa demande d'irrecevabilité de l'appel alors qu'elle l'avait soulevé devant le conseiller de la mise en état lequel a rendu une ordonnance le 7 novembre 2019 rejetant sa fin de non recevoir, confirmée par arrêt sur déféré du 15 septembre 2020.

En conséquence, la demande maintenue par Mme [N] [I] dans ses conclusions est irrecevable, la cour ayant déjà statué.

Sur les demandes au fond

M. [E] [J] ne conteste plus sa paternité à l'égard de [V]. Les parties s'opposent désormais sur les seules conséquences de l'établissement de la paternité.

Selon l'article 331 du code civil, lorsqu'une action en établissement de paternité est exercée, le tribunal statue, s'il y a lieu, sur l'exercice de l'autorité parentale, la contribution à l'entretien et l'éducation de l'enfant et l'attribution du nom.

Sur l'exercice de l'autorité parentale et l'attribution du nom

S'agissant de l'exercice de l'autorité parentale et des droits de visite et d'hébergement, M. [E] [J] souhaite pouvoir entretenir des relations avec [V] avec des droits de visite conformes à la réalité de sa vie actuelle, à savoir qu'il vit en famille à Singapour.

Dans la mesure où il n'a pas de lien avec [V] et ne souhaite pas exercer l'autorité parentale, il estime être dans l'intérêt de l'enfant de porter le nom de sa mère.

Mme [N] [I] soutient au contraire qu'il est dans l'intérêt de l'enfant que l'exercice de l'autorité parentale soit exercée conjointement avec M. [E] [J], lequel vient régulièrement en France. Elle considère que l'enfant doit porter le nom de son père afin de s'inscrire dans sa famille paternelle et de porter le même nom que ses deux autres enfants.

Il résulte de l'article 372 du code civil, que lorsque la filiation est judiciairement déclarée à l'égard du second parent de l'enfant, le parent à l'égard duquel la filiation a été établie en premier lieu demeure seul investi de l'exercice de l'autorité parentale. L'autorité peut néanmoins être exercée en commun en cas de déclaration conjointe des père et mère adressée au greffier en chef du tribunal de grande instance, ou sur décision du juge aux affaires familiales.

M. [E] [J] qui vit à Singapour avec son épouse et ses deux enfants indique, sans être contredit, n'avoir rencontré [V] qu'à une reprise en août 2018. Compte tenu de la distance et de l'absence de relation établie et suivie actuellement, il n'est pas dans l'intérêt de l'enfant que l'autorité parentale soit exercée conjointement par les deux parents. Le jugement est confirmé sur ce point.

[V] est âgé de 6 ans. Mme [N] [I] soutient que l'enfant porte le nom de son père depuis la décision du 2 mai 2017 et est ainsi connu des tiers sous ce patronyme. Toutefois, dès lors que le jugement de première instance est dépourvu de force exécutoire et n'a pas été transcrit sur l'acte de naissance de l'enfant, Mme [N] [I], qui a fait le choix de modifier le nom de l'enfant dans la vie courante, ne peut se prévaloir de cet usage pour son fils dont le nom demeure depuis sa naissance celui inscrit sur son acte, à savoir [I].

Contrairement à ce que soutient Mme [N] [I], il n'est pas dans l'intérêt de l'enfant de porter le nom de M. [E] [J] avec lequel il n'a tissé aucun lien, ce dernier souhaitant seulement, pour l'instant apprendre à le connaître. Il est au contraire dans son intérêt de porter le nom du parent qui s'occupe de lui au quotidien et est son seul référent. Mme [N] [I] ne démontre nullement en quoi il serait préjudiciable à l'enfant de porter le nom de sa mère y compris au regard des us et coutumes de son pays d'origine, la Grèce.

Par conséquent, le jugement est infirmé en ce qu'il a dit que l'enfant porterait le nom de [J].

Sur les droits de visite et d'hébergement

L'article 373-2-9 du code civil dispose que lorsque la résidence de l'enfant est fixée au domicile de l'un des parents, le juge aux affaires familiales statue sur les modalités du droit de visite de l'autre parent.

Aux termes de l'article 373-2-11 du code civil, lorsqu'il se prononce sur les modalités d'exercice de l'autorité parentale, le juge prend notamment en considération :

1° La pratique que les parents avaient précédemment suivie ou les accord qu'ils avaient pu antérieurement conclure,

2° Les sentiments exprimés par l'enfant mineur dans les conditions prévues à l'article 388-1,

3° L'aptitude de chacun des parents à assumer ses devoirs et respecter les droits de l'autre,

4° Le résultats des expertises éventuellement effectuées, tenant compte notamment de l'âge de l'enfant,

5° Les renseignements qui ont été recueillis dans les éventuelles enquêtes et contre-enquêtes-sociales prévues à l'article 373-2-12,

6° Les pressions ou violences, à caractère physique ou psychologique, exercée par l'un des parents sur la personne de l'autre.

[V] ne connaît pas son père biologique avec lequel il n'a tissé aucun lien. Contrairement à ce que demande Mme [N] [I], l'organisation des droits de visite et d'hébergement de M. [E] [J] doit tenir compte non seulement de l'éloignement géographique mais également de l'absence de relation suivie jusqu'à présent, du contexte de la naissance de [V] et de la nécessaire progressivité de la construction d'un lien affectif entre [V] et son père. Il serait contraire à l'intérêt de l'enfant, seulement âgé de 6 ans de se rendre à Singapour chez son père qu'il ne connaît pas et dans une famille encore inconnue. Par conséquent, il convient d'organiser un droit de visite lorsque M. [E] [J] sera en France, à raison de trois jours par an avec un délai de prévenance, et un droit de correspondance qui aura vocation à s'élargir au fil du temps.

Il est rappelé que les parents, dans l'intérêt de [V], peuvent librement faire évoluer les droits de visite de M. [E] [J].

Sur la contribution à l'entretien et l'éducation de l'enfant

Les parties s'opposent sur le montant de la contribution à l'entretien et l'éducation de l'enfant pour le passé et l'avenir.

Selon l'article 371-2 du code civil, chacun des parents contribue à l'entretien et l'éducation des enfants à proportion de ses ressources, de celles de l'autre parent, ainsi que des besoins des enfants. Cette obligation ne cesse pas de plein droit à la majorité des enfants.

Par ailleurs, il résulte des articles 310, 310-1 et 371-2 du code civil, que les effets d'une paternité légalement établie remontent à la naissance de l'enfant et que la règle "aliments ne s'arréragent pas" ne s'applique pas à la contribution d'un parent à l'entretien et à l'éducation de son enfant.

Le tribunal a fixé la contribution à l'entretien et l'éducation de l'enfant à 1000 euros au regard des deux bulletins de salaire de M. [E] [J] 2015 qu'il produisait mentionnant une rémunération d'environ 7525 dollars de Singapour (SGD) par mois, de la rémunération de son épouse de 500 dollars SGP par mois et des charges du couple comprenant notamment un loyer de 5800 dollars SGP qu'il a considéré comme manifestement excessives par rapport aux revenus du couple.

M. [E] [J] justifie avoir été salarié de la société RevSquare en 2015 et produit les mêmes bulletins de salaire qu'en première instance mentionnant un salaire mensuel de 7604 dollars SGP. Il indique avoir travaillé de 2016 à 2019 au sein de la société Pentalog qui avait racheté la société RevSquare puis au sein de la société EKINO Singapour.

Pour la période de janvier à avril 2020, il justifie d'une rémunération mensuelle de 12610 dollars SGP équivalent à 7875 euros pour son emploi au sein de la société Ekino.

Il ressort des avis d'imposition singapourien que M. [E] [J] a déclaré au titre de sa rémunération en 2017,129 000 dollars SGP soit 80 992 euros, en 2018 et 2019, 120 000 dollars SGP, équivalent à 75329 euros, soit un revenu mensuel d'environ 6277 euros. Il s'est acquitté d'un impôt annuel compris entre 6751 dollars et 7950 dollars SGP soit en moyenne 4614 euros (348 euros mensuels).

Contrairement à ce qu'allègue Mme [N] [I], il est établi que M. [E] [J] ne perçoit aucun revenu pour le bien, [Adresse 11] dont il est nu propriétaire, pour un quart, sa mère l'occupant en qualité d'usufruitière.

Mme [N] [I] prétend que M. [E] [J] perçoit des dividendes. Toutefois, M. [E] [J] justifie que la société SSO active était déficitaire en 2016 de 51 006 euros et que si en 2019 le résultat de l'exercice s'est élevé à 10794 euros, le report à nouveau était toujours déficitaire de 65 578 euros, étant relevé que le résultat de l'année 2019 avait été réinvesti afin de diminuer le report à nouveau. Pour la société Tetris, dont M. [E] [J] produit le compte de résultat simplifié, il apparaît qu'elle a dégagé un bénéfice de 15 921 euros. M. [E] [J] indique ne pas avoir perçu de dividendes.

Les différents extraits issus de site internet, pas toujours datés, produits par Mme [N] [I] ne suffisent pas à établir que M. [E] [J] dispose d'autres revenus que ceux déclarés à Singapour. En revanche, Mme [N] [I] démontre que M. [E] [J] et sa famille disposent d'un train de vie confortable, partant régulièrement en vacances et rentrant en France plusieurs fois par an.

Depuis le mois de juillet 2020, M. [E] [J] travaille au sein de la société Standart Chartered Ventures et perçoit une rémunération mensuelle de 15 000 dollars SGP soit 9380 euros. Cependant, il est attesté que son épouse a été licenciée en juin 2020.

Le fait que les deux enfants de M. [E] [J] et son épouse soient propriétaires indivis d'un bien à [Localité 7] (une chambre de bonne) ne saurait préjuger des revenus de M. [E] [J].

S'agissant des charges, M. [E] [J] justifie d'un loyer de 5600 dollars SGP, soit 3500 euros, de charges courantes fixes de 573 euros et d'impôts de 348 euros. Il élève avec son épouse deux enfants. S'il produit une fiche de tarification des frais de scolarité, il ne justifie pas s'en être acquitté et s'en acquitter encore de sorte qu'il n'y a pas lieu de prendre en compte cette charge alléguée.

Mme [N] [I] a travaillé au sein de la société Money Gram juqu'en 2018 et percevait un revenu annuel de 88 213 euros, soit un revenu mensuel de 7351 euros.

Depuis le 1er avril 2018, elle est Général Counsel de la société OpenClassrooms. Elle a ainsi perçu en 2019 un revenu annuel de 90 730 euros, soit un revenu mensuel de 7561 euros avant prélèvement de l'impôt et de 6357 euros après prélèvement de l'impôt à la source. Elle justifie qu'elle ne perçoit aucun revenu de la société DPO+ dont elle est associée.

Elle justifie régler des charges de copropriété de 949 euros par trimestre soit 316 euros par mois, des taxes foncière et d'habitation représentant la somme mensuelle de 220 euros et des charges courantes fixes mensuelles (électricité') de 366 euros.

S'agissant des besoins de [V], elle justifie des frais mensuels suivants pour l'année 2019/2020 :

-école privée :1232 euros

-cantine : 160 euros,

-frais de garde : 1000 euros,

-cours de football 2019/2020: 28 euros

-cours de tennis 2019/2020 : 57 euros

Elle justifie également des frais de stage pendant chaque vacance, relativement élevé ou même de frais d'anniversaire à hauteur de 400 euros. Il ressort ainsi du tableau récapitulatif de ses dépenses figurant dans ses conclusions que Mme [N] [I] règle des frais à hauteur de 32989 euros par an pour les seuls besoins de son fils (scolarité, vacances, activité para scolaires') soit une charge mensuelle de 2749euros.

Toutefois, les dépenses supportées par Mme [N] [I] pour [V] résultent de ses choix personnels d'éducation pour lui au regard de sa situation financière confortable, lesquels ne sauraient s'imposer à M. [E] [J] dans leur intégralité. En revanche, M. [E] [J] ne recevant pas son fils à son domicile, Mme [N] [I] a la charge permanente de l'enfant toute l'année, ce qui doit être pris en compte pour l'évaluation de la contribution due par M. [E] [J].

Compte tenu des besoins de l'enfant, ramenés à de plus juste proportion compte tenu de son âge et de la situation financière des parties, la contribution à l'entretien et l'éducation de l'enfant est fixée à la somme de 800 euros par mois à compter du présent arrêt.

S'agissant de la contribution due pour le passé, M. [E] [J] ne conteste pas le principe de la rétroactivité de l'obligation alimentaire mais sollicite que son quantum soit révisé à la baisse au regard des besoins d'un jeune enfant et qu'elle soit versée directement à l'enfant sur un compte ouvert à son nom.

Contrairement à ce que soutient M. [E] [J], le créancier de la contribution à l'entretien et l'éducation de l'enfant n' est pas l'enfant mais le parent chez qui il réside principalement, de sorte, que M. [E] [J] doit s'acquitter de son obligation en réglant les arriérés de pensions alimentaires à Mme [N] [I] et non sur un compte ouvert au nom de l'enfant.

Sur le quantum, la cour relève que Mme [N] [I] ne produit pas de pièce justificative des frais qu'elle a supportés pour son fils chaque année depuis sa naissance. Au regard des besoins de l'enfant, et de la situation financière des parties entre 2015 et 2020 évoquée précédemment, la contribution à l'entretien et l'éducation due par M. [E] [J] est ramenée à 600 euros.

Le jugement est infirmé sur ce point.

Sur les dommages-intérêts

Aux termes de l'article 1240 du code civil, tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé, à le réparer.

Sur la demande formée par M. [E] [J]

M. [E] [J] sollicite un euro symbolique à titre de dommages intérêts. Il estime que Mme [N] [I] a commis une faute en décidant seule de la conception d'un enfant au mépris de son consentement.

S'il ressort des échanges SMS que M. [E] [J] ne souhaitait pas fonder une famille avec Mme [N] [I], il n'est pas démontré que cette dernière soit seule responsable de la conception de l'enfant. M. [E] [J] est débouté de sa demande.

Sur la demande formée par Mme [N] [I]

Mme [N] [I] demande quant à elle des dommages-intérêts pour procédure abusive, estimant que M. [E] [J] s'est désintéressé de la procédure pendant deux ans et a interjeté appel du jugement tardivement, que son attitude a évolué au fil du temps et que son appel est manifestement abusif.

Le droit d'agir en justice ne dégénère en abus qu'en cas de faute équipollente au dol. Comme l'a déjà relevé cette cour dans son arrêt du 15 septembre 2020, Mme [N] [I] ne démontre aucune faute dans l'exercice par M. [E] [J] de son droit d'agir en justice en faisant appel du jugement du 2 mai 2017, ce dernier ne sollicitant de surcroit la réformation du jugement que sur les conséquences de l'établissement de sa paternité. Mme [N] [I] est déboutée de sa demande.

M. [E] [J] est condamné aux dépens. En équité il convient de le condamner à verser à Mme [N] [I] la somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Statuant dans les limites de l'appel de M. [E] [J],

Confirme le jugement en ce qu'il a dit que M. [E] [J] est le père de [V] [E] [L] [I], né le [Date naissance 8] 2014 à [Localité 7], confié l'exercice de l'autorité parentale à la mère, condamné M. [E] [J] à payer Mme [N] [I], en sa qualité de représentante légale de [V], la somme de 1500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, condamné M. [E] [J] aux entiers dépens, comprenant les frais d'expertise et d'incident.

Infirme le jugement en ce qu'il a dit que l'enfant se nommerait [J], et en ce qu'il a fixé la contribution mensuelle à l'entretien et l'éducation de l'enfant due par M. [E] [J] à 1000 euros,

statuant à nouveau,

Dit que [V] [E] [L] [I], né le [Date naissance 8] 2014 à [Localité 7], s'appellera [I],

Ordonne la transcription du présent arrêt sur l'acte de naissance n° 4166 de [V] [E] [L] [I] dressé par l'officier d'état civil de la mairie de [Localité 7],

Dit que sauf meilleur accord des parties, M. [E] [J] bénéficiera d'un droit de visite en France trois jours par an, en respectant un délai de prévenance de quinze jours,

Dit que sauf meilleur accord des parties, M. [E] [J] bénéficiera d'un droit de communication libre avec [V] à raison de quatre fois par an, par téléphone ou par Skype.

Condamne M.[E] [J] à payer à Mme [N] [I] la somme de 800 euros au titre de la contribution rétroactive à l'entretien et l'éducation de [V] à compter du présent arrêt,

Fixe à compter de la naissance de l'enfant jusqu'au présent arrêt à 600 euros par mois la contribution que doit verser M. [E] [J] à Mme [N] [I] pour contribuer à l'entretien et l'éducation de [V] [I],

Condamne M. [E] [J] au paiement de ladite pension,

Dit qu'elle est due même au delà de la majorité de l'enfant tant qu'il poursuit des études ou est à la charge des parents,

Dit que cette pension sera indexée chaque année le 1er jour du mois du prononcé du présent jugement sur l'indice INSEE des prix à la consommation ' ensemble des ménages- France- base 2015( ' Ensemble hors tabac , l'indice de base étant celui du mois précédant le mois de prononcé du présent jugement et l'indice de revalorisation étant celui du mois de précédant la revalorisation ;

Rappelle au débiteur de la contribution qu'il lui appartient de calculer et d'appliquer l'indexation et qu'il pourra avoir connaissance de cet indice ou calculer directement le nouveau montant en consultant le site : www.insee.fr. ou www.servicepublic.fr

Rappelle aux parties qu'en cas de défaillance dans le règlement des pensions alimentaires, y compris l'indexation, le créancier peut obtenir le paiement forcé en utilisant à son choix une ou plusieurs des voies d'exécution et que des sanctions pénales sont encourues,

Déboute Mme [N] [I] et M. [E] [J] de leur demande de dommages-intérêts,

Condamne M. [E] [J] à verser à Mme [N] [I] la somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne M. [E] [J] aux dépens.

LA GREFFIERE LE MAGISTRAT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 1
Numéro d'arrêt : 19/09268
Date de la décision : 24/11/2020

Références :

Cour d'appel de Paris A1, arrêt n°19/09268 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-11-24;19.09268 ?
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