RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 12
ARRÊT DU 20 Novembre 2020
(n° , 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 17/11965 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B4FEJ
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 31 Août 2017 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale d'EVRY RG n° 16-01262
APPELANT
Monsieur [Y] [P]
né le [Date naissance 1] 1970 à [Localité 6]
[Adresse 3]
[Localité 5]
représenté par Me Sanja VASIC, avocat au barreau d'ESSONNE substitué par Me Charlotte CAEN, avocat au barreau d'ESSONNE
INTIMEE
Organisme LA CAISSE INTERPROFESSIONNELLE DE PRÉVOYANCE ET D' ASSURANCE VIEILLESSE (C.I.P.A.V)
[Adresse 4]
[Localité 2]
non représentée à l'audience (dispense de comparution)
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 09 Octobre 2020, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme Bathilde CHEVALIER, Conseillère, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Monsieur Pascal PEDRON, président de chambre
Monsieur Gilles REVELLES, conseiller
Madame Bathilde CHEVALIER, conseillère
qui en ont délibéré
Greffier : Mme Venusia DAMPIERRE, lors des débats
ARRET :
- CONTRADICTOIRE
- prononcé
par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
-signé par Monsieur Pascal PEDRON, président de chambre, et par Mme Venusia DAMPIERRE, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La cour statue sur l'appel interjeté par M. [Y] [P] d'un jugement rendu le 31 août 2017 par le tribunal des affaires de sécurité sociale d'Evry dans un litige l'opposant à la caisse interprofessionnelle de prévoyance et d'assurance vieillesse (la Cipav).
FAITS, PROCEDURE, PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :
Les circonstances de la cause ayant été correctement rapportées par le tribunal dans son jugement auquel la cour entend se référer pour plus ample exposé, il suffit de rappeler que M. [Y] [P] a été affilié à la caisse interprofessionnelle de prévoyance et d'assurance viellesse du 01/01/2006 au 10/06/2018 du fait de son activité libérale de formateur ; qu'il a été destinataire le 4 mai 2015 d'une mise en demeure de payer la somme de 24 042,72 euros au titre de ses cotisations sur la période du 1er janvier au 31 décembre 2014 ; qu'une contrainte du 9 décembre 2015 portant sur la somme de 3 494,14 euros lui a été signifiée par la Cipav le 29 février 2016 ; que M. [P] a saisi la commission de recours amiable le 16 janvier 2016 pour contester son affiliation et demander subsidiairement une réduction ou une exonération de ses cotisations pour les années 2007 à 2014 ; que la commission de recours amiable a rejeté son recours comme forclos le 9 août 2016 ; que M. [P] a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale d'Evry le 8 septembre 2016 et par jugement du 31 août 2017 ce tribunal l'a débouté de ses demandes, a confirmé la décision de la commission de recours amiable du 9 août 2016 et a débouté les parties de leurs demandes respectives au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
M. [Y] [P] a interjeté appel le 28 septembre 2017 de ce jugement qui lui a été notifié à une date ne résultant pas des éléments du dossier. .
Par ses conclusions écrites déposées à l'audience par son conseil qui les a oralement développées, il demande à la cour, par voie d'infirmation du jugement déféré, de :
- Dire et juger que le délai de forclusion ne lui est pas opposable ;
- Annuler la décision de la commission de recours amiable du 9 août 2016 ;
- Prononcer la réduction totale des cotisations assurance vieillesse de base, de retraite complémentaire et du régime invalidité-décès de 2007 à ce jour ;
- Débouter la Cipav de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions ;
- Condamner la Cipav à lui verser la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Il expose en substance que :
- Les deux rapports de la Cour des comptes sur la Cipav de février 2014 et février 2017 ont mis en lumière les nombreux dysfonctionnements de l'organisme ;
- Il fait partie des cotisants lésés visés dans ces rapports puisqu'il n'a jamais été informé de son affiliation, qu'il a été victime de défaillance de l'outil informatique relativement à ses données personnelles et qu'il n'a reçu aucun appel de cotisation, mise en demeure ou contrainte sur les périodes concernées ;
- Le délai de 3 mois prévu par les anciens statuts de la Cipav pour présenter une demande de réduction des cotisations n'est pas applicable aux demandes d'exonération de cotisations;
- les nouveaux statuts applicables au 1er janvier 2016 prévoient expréssement que la demande de réduction ou d'exonération doit être faite par le cotisant avant le 31 décembre de l'année de cotisation, mais encore faut-il être informé de ces statuts et des appels de cotisations au cours de l'année concernée ;
- A défaut d'être informé de la décision, les dispositions de l'article 540 du code de procédure civile applicables à la forclusion en matière d'appel d'un jugement rendu par défaut sont parfaitement transposables ;
- En ne notifiant pas à son cotisant les appels de cotisations, la Cipav l'a privé du droit de solliciter une réduction ou une exonération de ses cotisations dans les délais utiles ;
- Son activité de formateur était tout à fait secondaire à son activité salarié et ne lui a procuré aucun revenu ; il demande donc une exonération totale des cotisations mises à sa charge de 2014 à ce jour.
La Cipav a sollicité par courrier du 2 octobre 2020 d'être dispensée de comparaître à l'audience et a communiqué ses conclusions et pièces par lesquelles elle sollicite de la cour la confirmation du jugement rendu, que M. [P] soit débouté de ses demandes et condamné à lui verser la somme de 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle fait essentiellement valoir que :
- Il résulte des dispositions de l'article L. 622-2 du code de la sécurité sociale qu'en cas de cumul d'une activité salariée et d'une activité indépendante, l'adhérent doit cotiser auprès des deux régimes sociaux dont il relève ;
- Il n'existe pas à la Cipav de seuil d'affiliation en-deçà duquel l'assuré serait dispensé de cotiser en fonction de ses revenus ;
- Il résulte de l'article 3-12 des statuts de la Cipav sur le régime complémentaire que la cotisation peut, sur demande expresse de l'adhérent, être réduite de 25, 50 ou 75% en fonction du revenu d'activité non salarié de l'année précédente ;
- Cette demande devait être formée avant le 31 mars de l'année concernée jusqu'en 2016 puis avant le 31 décembre de l'année d'exigibilité à compter de 2016 ;
- M. [P] ne justifie pas avoir formé de telles demandes dans les délais statutaires et se trouve donc forclos en ses demandes de réduction ;
- Les cotisations de sécurité sociale sont portables et non quérables de sorte que c'est à l'assuré de régler ses cotisations en temps utile même s'il n'a pas reçu d'appel de cotisation.
Il est fait référence aux conclusions des parties déposées à l'audience ou en vue de l'audience du 9 octobre 2020 pour plus ample exposé des moyens développés.
SUR CE, LA COUR :
Il sera fait droit à la demande de dispense de comparution de la Cipav.
L'article L. 622-2 du code de la sécurité sociale dans sa version applicable à la cause dispose que:
"Lorsqu'une personne exerce simultanément une activité salariée et une activité non salariée , elle est affiliée à l'organisation d'assurance vieillesse dont relève son activité non salariée, même si cette activité est exercée à titre accessoire, sans préjudice de son affiliation au régime des travailleurs salariés. Lorsqu'une personne a cotisé simultanément à un régime de sécurité sociale en tant que salariée et à un autre régime en tant que non-salariée, les avantages qui lui sont dus au titre de ses cotisations se cumulent."
Aux termes de l'article R. 641-1 du code de la sécurité sociale alors en vigueur :
"La Caisse nationale d'assurance vieillesse des professions libérales comprend onze sections professionnelles :
(...) 11° La section professionnelle des architectes, agréés en architecture, ingénieurs, techniciens, géomètres, experts et conseils, artistes auteurs ne relevant pas de l'article L. 382-1, enseignants, professionnels du sport, du tourisme et des relations publiques, et de toute profession libérale non rattachée à une autre section."
L'article 1er du décret n°79-263 du 21 mars 1979 dans sa version modifiée par le décret n°2004-461 du 27 mai 2004 dispose que :
"A compter du 1er janvier 1979, il est institué un régime d'assurance invalidité-décès obligatoire commun aux architectes, agréés en architecture, ingénieurs, techniciens, géomètres, experts et conseils, artistes auteurs ne relevant pas de l'article L. 382-1 du code de la sécurité sociale, enseignants, professionnels du sport, du tourisme et des relations publiques affiliés à la section professionnelle des professions libérales mentionnée à l'article R. 641-6 (11°) du code de la sécurité sociale.
Ce régime comporte des avantages en faveur des assurés atteints d'une invalidité permanente définitive, totale ou partielle, et en faveur notamment de leur conjoint survivant et de leurs enfants à charge."
L'article 2 du même dérect, dans sa version applicable à la cause dispose que :
"Le régime d'assurance invalidité-décès institué par l'article 1er est financé par des cotisations dont les personnes mentionnées à l'article 1er sont obligatoirement redevables en sus de la cotisation du régime d'assurance vieillesse de base des professions libérales prévu au livre VIII, titre Ier, du code de la sécurité sociale et de la cotisation du régime d'assurance vieillesse complémentaire institué par le décret susvisé du 21 mars 1979.
Ces cotisations sont versées à la section professionnelle mentionnée à l'article 1er dans les mêmes formes et conditions que la cotisation du régime d'assurance vieillesse de base."
Aux termes de l'article 3.7 - Exigibilité de la cotisation - des statuts de la Cipav approuvés par arrêté du 3 octobre 2006 "La cotisation, qui est portable, est exigible pour l'année entière dès le 1er janvier."
Aux termes de l'article 3.12 - Réduction de la cotisation pour insuffisance de revenus- des mêmes statuts :
"La cotisation peut, sur demande expresse de l'adhérent, être réduite de 25, 50 ou 75 %, en fonction du revenu professionnel de l'année précédente.
Les tranches de revenus correspondant à ces taux de réduction sont déterminés chaque année par le conseil d'administration de la Cipav.
La demande de réduction doit être formulée, à peine de forclusion, dans les trois mois suivant l'exigibilité de la cotisation, telle qu'elle est définie au premier alinéa de l'article 3.7.
(...)
L'adhérent qui justifie avoir perçu, au titre de l'année précédente, un revenu professionnel inférieur à 15% du plafond de la sécurité sociale en vigueur au 1er janvier de l'année en cours, peut, à sa demande expresse, être dispensé de cette cotisation (...)."
L'article 3.12 a été modifié par arrêté du 18 décembre 2015 applicable au 1er janvier 2016 pour indiquer désormais que la demande de réduction ou de dispense de cotisation doit être formulée, à peine de forclusion, avant le 31 décembre de l'année d'exigibilité.
M. [P] fait valoir qu'avant cette modification du texte, aucun délai n'encadrait la demande de dispense de cotisation formée auprès de la Cipav et que sa demande était donc toujours recevable lorsqu'il a saisi la commission de recours amiable.
La cotisation destinée au financement du régime d'assurance vieillesse revêt cependant un caractère obligatoire pour les personnes assujetties à ce régime en application de l'article 2 du décret n°79-263 du 21 mars 1979, auxquels les statuts ne peuvent déroger, comme l'a jugé la Cour de cassation (2e Civ., 21 septembre 2017, n°16-22.220).
Il en résulte que M. [P] ne peut se prévaloir de cette omission de l'article 3.12 des anciens statuts de la Cipav pour déroger aux dispositions du décret du 21 mars 1979 et ainsi échapper au paiement des cotisations.
M. [P] ne justifie pas avoir formé auprès de l'organisme de demande expresse de réduction ou de dispense de cotisation dans les délais requis.
Il est donc forclos en sa demande de réduction et de dispense de cotisations.
M. [Y] [P] n'est pas davantage fondé à reprocher à la Cipav de ne pas lui avoir notifié d'appel de cotisations, compte tenu du caractère portable de celles-ci et du fait que leur paiement n'est pas soumis à un appel de cotisations préalable.
C'est donc à bon droit que le tribunal l'a débouté de l'ensemble de ses demandes.
Il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS :
La cour,
Dispense la caisse interprofessionnelle de prévoyance et d'assurance vieillesse de comparution ;
Déclare l'appel recevable ;
Confirme le jugement rendu en toutes ses dispositions ;
Déboute M. [Y] [P] de sa demande au titre des frais irrépétibles ;
Déboute la caisse interprofessionnelle de prévoyance et d'assurance vieillesse de sa demande au titre des frais irrépétibles ;
Condamne M. [Y] [P] aux dépens d'appel.
La greffièreLe président