La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

18/11/2020 | FRANCE | N°18/17641

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 2 - chambre 1, 18 novembre 2020, 18/17641


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS





COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 2 - Chambre 1



ARRET DU 18 NOVEMBRE 2020



(n° , 12 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/17641 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B6BYW



Décision déférée à la cour : décision du 5 juin 2018 - Bâtonnier de l'ordre des avocats de PARIS





APPELANTS



Monsieur [R] [F]

[Adresse 2]

[Localité 4]



Représenté par et ayant pour avocat pl

aidant Me Pierre BREGOU de la SELASU CARAVAGE AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : P0093





Madame [Y] [W]

[Adresse 1]

[Localité 3]



Monsieur [E] [M] [U]

[Adresse 1]

[Localité 3]



Repré...

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 2 - Chambre 1

ARRET DU 18 NOVEMBRE 2020

(n° , 12 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/17641 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B6BYW

Décision déférée à la cour : décision du 5 juin 2018 - Bâtonnier de l'ordre des avocats de PARIS

APPELANTS

Monsieur [R] [F]

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représenté par et ayant pour avocat plaidant Me Pierre BREGOU de la SELASU CARAVAGE AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : P0093

Madame [Y] [W]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Monsieur [E] [M] [U]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentés par et ayant pour avocat plaidant Me Eric DEUBEL de l'ASSOCIATION VEIL JOURDE, avocat au barreau de PARIS, toque : T06

INTIMES

Monsieur [R] [F]

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représenté par et ayant pour avocat plaidant Me Pierre BREGOU de la SELASU CARAVAGE AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : P0093

Madame [Y] [W]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Monsieur [E] [U]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentés par et ayant pour avocat plaidant Me Eric DEUBEL de l'ASSOCIATION VEIL JOURDE, avocat au barreau de PARIS, toque : T06

SELARL ALTANA

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représenté par et ayant pour avocat plaidant Me Francis TEITGEN, avocat au barreau de PARIS, toque : R011

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 16 septembre 2020, en audience publique, devant la cour composée de :

Mme Nicole COCHET, Première présidente de chambre

Mme Marie-Françoise D'ARDAILHON MIRAMON, Présidente

Mme Estelle MOREAU, Conseillère

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Mme [A] [J] [L] dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Mme Djamila DJAMA

ARRET :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Nicole COCHET, Première présidente de chambre, et par Djamila DJAMA, Greffier présent lors du prononcé.

*****

Le 15 avril 2009,M. [E] [U], Mme [Y] [W] et M. [X] [O] ont créé l'association d'avocats à responsabilité professionnelle individuelle (AARPI) [U].

En avril 2010, M. [U] a quitté l'AARPI [U] et le 29 juin 2011, suite au retrait de M. [O], M.[R] [F] a été nommé associé de l'AARPI [U] dont Mme [W] était la gérante. En janvier 2015, M. [U] a réintégré l'AARPI en qualité d'associé.

Le 27 juillet 2017, M. [F] a notifié sa décision de retrait de l'AARPI, laquelle ouvrait un délai de préavis de six mois, en application de l'article 15 des statuts.

M. [F] a sollicité l'assistance du bâtonnier de l'ordre des avocats au barreau de Paris le 27 septembre 2016.

Par lettre datée du 28 septembre 2016, la société Sanofi a informé l'AARPI qu'elle chargeait M. [F] de la défense de ses intérêts dans les dossiers de 'responsabilité civile (RC) produits' en cours au cabinet.

Le 6 octobre 2016, la commission de régulation des conditions d'exercice en groupe a pris acte de l'accord des parties, tous droits et moyens réservés, pour fixer la date de retrait de M. [F] au 30 septembre 2016.

M. [F] a intégré la SELARL Altana qui l'avait agréé en qualité d'associé selon vote de ses associés du 6 septembre 2016.

Saisi par Mme [W] et M. [U], le bâtonnier de l'ordre des avocats du barreau de Paris a, par décision du 5 juin 2018 :

- dit que M. [F] a commis une faute à l'égard de Mme [W] et M. [U] en organisant son retrait de l'AARPI [U] dans des conditions déloyales à l'égard de ses associés,

- dit que M. [F] a rompu unilatéralement le préavis prévu par l'article 15 des statuts, à effet du 27 septembre 2016,

- condamné M. [F] à régler la somme de187 500 €à Mme [W] et M. [U] à titre de dommages et intérêts pour préjudice économique,

- condamné M. [F] à régler la somme de 20 000 € à Mme [Y] [W] à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral,

- mis hors de cause la SELARL Altana,

- condamné M. [F] à régler la somme de 8 000 € à Mme [W] et M. [U] en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné M. [F] aux dépens de l'instance,

- débouté les parties de toutes leurs autres demandes.

Le bâtonnier a considéré que M. [F] a manqué de loyauté à l'égard de ses associés en rejetant le 30 août 2016 une proposition de rapprochement avec un confrère spécialisé en droit pharmaceutique avec la volonté d'empêcher l'AARPI [U] de présenter à la société Sanofi une solution alternative au départ de M. [F] et en avisant la société Sanofi de son départ dès la fin septembre 2016 sans en avoir informé ses associés, alors que cette société était un client historique attaché à la personne de Mme [W]. Elle a conclu qu'il a ainsi créé des conditions qui ont favorisé le dessaisissement soudain de l'AARPI par son client le plus important, sans que les associés de l'AARPI, qui n'avaient pas connaissance de la situation, n'aient eu la possibilité de proposer une organisation alternative à ce client ni même d'aviser eux-mêmes le client du départ de leur associé.

En revanche, il a estimé qu'il n'est pas démontré que M. [F] ait désorganisé l'AARPI [U] ni que la SELARL Altana ait joué un rôle quelconque dans la façon dont M. [F] s'est conduit lors de son retrait de l'AARPI ni qu'elle ait eu un comportement déloyal.

Il a retenu que dès le 27 septembre 2016, M. [F], choisissant une stratégie de départ brusque, s'est placé 'en dehors de l'AARPI', interrompant ainsi le préavis avant son terme.

Il a considéré que le préjudice de l'AARPI, à ce titre, est constitué d'une perte de chance de facturer des honoraires à la société Sanofi jusqu'à la date de fin du préavis le 27 janvier 2017, sous déduction des charges de l'AARPI et de la rémunération non versée à M. [F].

Il a rejeté la demande au titre du détournement de clientèle, en considérant que la volonté de la société Sanofi de suivre M. [F] n'est pas liée à son comportement déloyal mais à des considérations objectives, celle-ci ayant à plusieurs reprises fait part à l'AARPI de son souhait de voir son équipe de défense étoffée et renforcée, ainsi que la demande au titre de l'atteinte à l'image, estimant celle-ci non démontrée.

Enfin, il a retenu un préjudice moral au profit de Mme [W] en raison de l'ancienneté de ses relations avec M. [F] et des circonstances de la rupture.

Mme [W] et M. [U] ont formé un recours contre cette décision par déclaration au greffe du 5 juillet 2018.

Par déclaration au greffe du 6 juillet 2018, M. [F] a également formé appel contre cette décision.

Les affaires enrôlées sous les numéros RG 18/17641 et 18/18171 ont été jointes par mention au dossier à l'audience du 12 février 2020.

Selon conclusions déposées le 11 septembre 2020 et soutenues oralement à l'audience, Mme [Y] [W] et M. [E] [U] demandent à la cour de :

- confirmer la décision en ce qu'elle a :

- dit que M. [F] a commis une faute à l'égard de Mme [W] et M. [U] en organisant son retrait de l'AARPI [U] dans des conditions déloyales à l'égard de ses associés,

-dit que M. [F] a rompu unilatéralement le préavis prévu par l'article 15 des statuts, à effet du 27 septembre 2016,

- infirmer la décision pour le surplus,

statuant de nouveau,

- condamner in solidum M. [F] et la SELARL Altana à leur payer au titre de leur préjudice économique :

-la somme de 400 000 € au titre du préjudice résultant de la rupture du préavis,

-la somme de 2 800 000 € au titre du préjudice résultant du détournement déloyal de clientèle,

- la somme de 500 000 € au titre du préjudice résultant de l'atteinte à l'image du cabinet et à sa pérennité,

Subsidiairement, si la cour devait considérer qu'il y a lieu de diviser leurs demandes,

- condamner in solidum M. [F] et la SELARL Altana à payer à Mme [W] au titre de son préjudice économique :

-la somme de 280 000 € au titre du préjudice résultant de la rupture du préavis,

-la somme de 1 960 000 € au titre du préjudice résultant du détournement déloyal de clientèle,

- la somme de 350 000 € au titre du préjudice résultant de l'atteinte à l'image du cabinet et à sa pérennité,

- condamner in solidum M. [F] et la SELARL Altana à payer à M. [U] au titre de son préjudice économique :

-la somme de 120 000 € au titre du préjudice résultant de la rupture du préavis,

-la somme de 840 000 € au titre du préjudice résultant du détournement déloyal de clientèle,

- la somme de 150 000 € au titre du préjudice résultant de l'atteinte à l'image du cabinet et à sa pérennité,

- condamner in solidum M. [F] et la SELARL Altana à payer à Mme [W] la somme de 300 000 € au titre de son préjudice moral,

- débouter M. [F] et la SELARL Altana de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,

- les condamner in solidum à leur payer la somme de 50 000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Selon conclusions déposées le 16 septembre 2020 et soutenues oralement à l'audience, M. [R] [F] demande à la cour de :

à titre principal,

- prononcer l'annulation de la décision rendue parle bâtonnier le 5 juin 2018 et débouter Mme [W] et M. [U] de l'ensemble de leurs demandes,

statuant à nouveau compte tenu du caractère dévolutif de la procédure,

- jugerque le droit à l'avocat de son choix est consubstantiel au droit à un procès équitable au sens de l'article 6 § 1 de la CEDH,

- juger que la charge de la preuve de la faute et des man'uvres déloyales alléguées incombe exclusivement à Mme [W] et à M. [U],

- juger que Mme [W] et M. [U] ne rapportent pas cette preuve,

- débouter Mme [W] et M. [U] de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,

- condamner Mme [W] et M. [U] à payer chacun à M. [F] une somme de 50 000 €,sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner Mme [W] et M. [U] aux entiers dépens,

à titre subsidiaire,

- confirmer la décision rendue le 5 juin2018 en ce qu'elle a retenu qu'aucun détournement de clientèle ne saurait être imputé à M. [F],

-infirmer la décision rendue le 5 juin 2018 en ce qu'elle a retenu que M. [F] avait commis des fautes à l'égard de Mme [W] et M. [U],

statuant nouveau,

- juger que Mme [W] et M. [U] ne rapportent pas la preuve d'une faute commise par M. [F] lors de son retrait et de son départ de l'AARPI,

- juger que Mme [W] et M. [U] ne peuvent se prévaloir d'aucun préjudice,

- débouter Mme [W] et M. [U] de l'ensemble de leurs demandes,

à titre infiniment subsidiaire,

- infirmer la décision rendue le 5 juin 2018 en ce qu'elle a condamné M. [F] au titre de dommages et intérêts pour préjudice économique et pour préjudice moral,

en tout état de cause,

- condamner Mme [W] et M. [U] à payer chacun à M. [F] une somme de 50 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner Mme [W] et M. [U] aux entiers dépens.

Selon conclusions déposées le 16 septembre 2020 et reprises oralement à l'audience, la SELARL Altana demande à la cour de :

- débouter Mme [W] et M.[U]tdel'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,

à titre reconventionnel,

- condamner Mme [W] et M [U] à lui payer la somme de 100 000 € à titre de dommages et intérêts en réparation des préjudice nés de l'exercice d'une procédure abusive, des préjudices de réputation et d'image ainsi que des préjudices liés à la perturbation apportée à la bonne marche du cabinet Altana,

- condamner Mme [W] et M. [U] à lui payer la somme de 50 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner Mme[W] et M. [U] à l'ensemble des dépens de première instance et d'appel.

SUR CE

Sur la nullité de la sentence arbitrale

M. [F] soulève en appel, sur le fondement de l'article 6 de la convention européenne des droits de l'homme et du règlement intérieur du barreau de Paris, la nullité de la sentence arbitrale prononcée par M. [T], délégué du bâtonnier, qui défendait la banque suisse UBS aux côtés de M. [H] [P], conseil de Mme [W] et de M. [U] dans le présent litige.

Mme [W] et M. [U] justifient qu'il était notoire dès octobre 2017, lorsque M. [T] a effectué sa déclaration d'acceptation et d'indépendance, que MM. [C] [T] et [H] [P] faisaient partie des avocats représentant la banque UBS renvoyée devant le tribunal correctionnel de Paris pour démarchage bancaire et blanchiment aggravé selon ordonnance du 17 mars 2017 et soutiennent avec pertinence que M. [F] aurait pu se prévaloir d'un manque d'impartialité avant que le délégué du bâtonnier ne rende sa décision.

Surtout, M. [F] ne rapporte pas la preuve qui lui incombe d'un doute raisonnable quant à l'indépendance et l'impartialité de M. [T] aux seuls motifs que la société UBS qui est un tiers à la présente procédure l'a nommé conjointement avec son confrère [P] pour représenter ses intérêts et que le délégué du bâtonnier aurait procédé par affirmations pour conclure à sa déloyauté.

La demande de nullité est rejetée.

Sur les fautes reprochées à M. [F] et à la SELARL Altana

Mme [W] et M. [U] font valoir que :

- alors que l'affaire de la Dépakine prend de l'ampleur en 2016 et que le cabinet accepte à la demande de la société Sanofi de renforcer son équipe, M. [F] devient prétendument dépressif au cours de l'été 2016,

- lorsqu'il notifie son retrait le 27 juillet 2016, il avait pris sa décision bien avant cette date et était entré en contact avec la SELARL Altana,

- à son retour de vacances, il prend tous les prétextes pour ne plus être présent au cabinet et ne pas répondre ni aux demandes urgentes de la société Sanofi ni à celles de ses associés qui le sollicitent pour les recrutement ou rapprochement ou collaboration avec d'autres structures et ce, alors que le cabinet doit préparer avec la société Sanofi une rencontre cruciale le 6 septembre 2016 avec deux magistrats nommés par le ministère de la Santé en vue de réfléchir à l'indemnisation des victimes,

- M. [F] a été agréé comme nouvel associé de la société Altana et 'hébergé' dans ses locaux dès le 6 septembre 2016 et a rompu toute relation avec l'AARPI [U] avant l'expiration du préavis, ce qui n'a pas permis à cette dernière de se retourner alors que la société Sanofi avait manifesté le désir dès le printemps 2016 que l'AARPI en charge de la totalité des dossiers RC produits de Sanofi renforce son équipe et que cette dernière s'est efforcée de répondre à cette demande en trouvant de nouveaux locaux et en recrutant,

- il était déterminé à bloquer le développement de l'AARPI pour servir ses intérêts en refusant de participer au processus de recrutement ou de coopérer avec un avocat spécialiste de la responsabilité des produits de santé et a délibérément désorganisé son fonctionnement,

- il a mis en scène un surmenage menant à sa démission alors que, dans le même temps, la société Altana était 'pressentie' par la société Sanofi,

- il a négocié sa nouvelle association dès juillet 2016 et commencé à exercer dans une autre structure pendant la durée de son préavis,

- la rupture du préavis lui est imputable dans la mesure où il a mis l'AARPI devant le fait accompli d'un départ du client historique pour le suivre,

- il a manqué au principe de loyauté et détourné avec préméditation en quelques semaines le client principal et historique de l'AARPI [U],

- la responsabilité de la société Altana est tout aussi établie puisque M. [F] n'aurait pas pu agir seul et qu'elle est la bénéficiaire directe du fruit de ces manquements,

- M. [F] n'a pas travaillé chez lui après son départ de l'AARPI et la société Altana a associé M. [F] alors qu'il était encore tenu d'exécuter le préavis, ce qu'elle ne pouvait ignorer,

- les statuts ont été modifiés le jour même de l'AG des associés soit dès le 6 septembre 2016 pour dire que M. [F] faisait un apport en industrie et qu'il lui était attribué des parts,

- la convention du 19 octobre 2016 prévoit une entrée en vigueur rétroactive au 1er octobre,

- la société Altana n'aurait jamais attribué des parts en industrie à M. [F] si elle n'avait pas déjà su que la clientèle de Sanofi était détournée à son profit.

M. [F] répond que :

- aucune faute ne peut lui être reprochée au titre du non respect du préavis alors que les parties ont convenu que l'association se terminait le 30 septembre 2016 après que Mme [W] et M. [U] l'ont sommé le 27 septembre de quitter immédiatement l'association,

- le bâtonnier a statué ultra petita en retenant un manque de loyauté de sa part à l'égard de ses associés alors que ceux-ci lui reprochaient un détournement de clientèle,

- un client est libre de choisir de suivre un avocat qui change de structure du moment que ce transfert a eu lieu loyalement,

- il appartenait à Mme [W], gérante de l'AARPI, d'informer elle-même sa cliente la société Sanofi qui s'inquiétait de l'absence de structuration de l'AARPI suffisante à la défense de ses intérêts, du retrait de M. [F] et il ne peut lui être reproché d'avoir dit la vérité à la société Sanofi deux mois après son retrait,

- la société Sanofi le connaissait depuis dix ans et il travaillait pour elle à titre principal depuis 2012, celle-ci ayant décidé de confier au cabinet l'ensemble de ses dossiers RC produits autrefois attribués à d'autres cabinets,

- lorsqu'en 2015, le dossier de la Dépakine dont il avait la charge a pris de l'ampleur par la multiplication des procédures et alors qu'il travaillait seul, il a cherché à recruter des collaborateurs comme le souhaitait la société Sanofi elle même et a proposé la candidature d'un avocat particulièrement expérimenté à laquelle Mme [W] n'a pas donné suite,

- en février 2016, la sortie du rapport de l'IGAS sur la Dépakine a marqué encore plus nettement l'inadéquation de la structure de l'AARPI ne comprenant que deux avocats sans collaborateur et la société Sanofi a demandé expressément à l'AARPI de procéder à des recrutements,

- en mai 2016, la gérante de l'AARPI n'a pas donné suite, sans explication, à sa proposition de location de bureaux disponibles dans leur immeuble,

- lors d'une réunion tenue en juin 2016, la société Sanofi a réitéré ses inquiétudes et demandé l'élaboration d'un plan de restructuration de l'AARPI mais les CV reçus après l'annonce effectuée à son initiative n'ont pas reçu de suite,

- Mme [W] n'a jamais mis en oeuvre les moyens indispensables à l'évolution de l'AARPI malgré ses demandes et celles de la société Sanofi, ce qui a justifié sa décision de retrait,

- la société Sanofiqui avait sollicité sa présence seule pour des réunions de première importance dans le dossier de la Dépakine, lui a fait part de son souhait de le voir poursuivre sa défense, ce qui ne peut lui être reproché,

- il n'a accepté l'offre de la société Altana que le 19 octobre 2016 et a exercé à titre individuel du 1er au 19 octobre.

La SELARL Altana rétorque que :

- lui reprocher d'avoir associé M. [F] alors qu'il n'avait pas terminé son préavis est une contre-vérité,

- elle n'a fait que donner son agrément à l'association le 6 septembre 2016,

- ce n'est que le 19 octobre 2016 que les parts d'industrie sont créées et qu'il deviendra associé,

- la société Sanofi a confié la poursuite de la gestion du dossier Dépakine à M. [F] et non à la SELARL Altana,

- elle n'a pas réservé au seul M. [F] l'intégration par le biais de l'attribution de parts d'industrie.

Par lettre recommandée et courriel adressés le 27 juillet 2016, M. [F] a informé ses associés de sa décision de se retirer de l'association en ces termes :

' Comme vous le savez, je consacre l'intégralité de mon temps au profit de l'AARPI sans réelle contrepartie équivalente ni aucune perspective de développement ou de pérennisation de la structure.

Dans ces conditions et au regard notamment de l'importance des dossiers traités, il me semble que l'absence de moyens matériels et humains et de pérennité de la structure ne permet plus d'assurer la prise en charge des dossiers dans les conditions optimales et sécurisées et risquent de nous exposer, à terme à des difficultés.

Je ferai tout mon possible pour que mon départ se passe dans les meilleurs conditions dans l'intérêt de tous et reste à votre disposition pour discuter des modalités pratiques de ce départ.'

Par courriel du 27 septembre 2016, M. [F] a sollicité l'assistance du bâtonnier de l'ordre des avocats au barreau de Paris dans le cadre de son retrait de l'AARPI afin que 'sa sortie puisse se dérouler dans les meilleures conditions' en précisant qu'un client important venait de lui faire savoir qu'il entendait qu'il poursuive la défense de ses intérêts en dehors de l'AARPI [U], souhaitant que 'sa sortie et le transfert des dossiers se fassent dans la plus grande transparence et délicatesse envers son associée et consoeur [Y] [W].'

Mme [W] et M. [U] écrivaient à leur associé le 30 septembre :

' A la suite de votre courrier du 27 septembre 2016, adressé à l'ordre des avocats et de notre demande de recevoir de Sanofi un courrier nous faisant part de ses instructions de vous transférer immédiatement les dossiers Dépakine, il nous a été demandé par Sanofi de vous transférer l'ensemble des dossiers ' responsabilité produits' de Sanofi-Aventis France dans les plus brefs délais.

Dans ces conditions,

Nous vous demandons formellement de ne plus utiliser à partir de ce jour le nom de la firme [U] et ce, de quelques manière que ce soit.

Nous vous demandons de faire immédiatement le nécessaire pour vous constituer aux lieux et places de [U]/[Y] [W] dans tous les dossiers de RC Produits que Sanofi avait confié à [Y] [W]...

Le dessaisissement brutal d'[U] des dossiers RC Produits auxquels vous consacriez la totalité de votre activité constitue une rupture brutale de notre contrat d'association, voire du préavis que vous prétendez nous avoir donné, contredit par les échanges que nous avons eus au cours des deux derniers mois.

Nous prenons acte de cet état de fait et nous vous demandons de déménager immédiatement la totalité de vos affaires du cabinet et nous restituer vos carte de crédit et badge.'

M. [F] avisait le bâtonnier, avec copie à ses confrères, le jour même du contenu de ce courriel en indiquant que ces demandes le mettaient en grande difficulté et en situation de risque pour la défense des intérêts des clients, devant notamment signifier différents actes et rappelant qu'il était toujours membre de l'AARPI [U].

Mme [W] adressait à la commission et à M. [F] un courriel en réponse dans ces termes:

' Nous avons demandé au GC de Sanofi que nous connaissons depuis près de trente ans de nous donner ses instructions formelles sur ce transfert de dossiers.

- Ces instructions écrites nous ont été transmises en mains propres de le 29 septembre et il nous a été demandé d'assurer le transfert des dossiers dans 'les plus brefs délais'.

- Nos seuls contacts avec Sanofi depuis le 27 septembre ont consisté en l'envoi du courrier précédemment évoqué et la participation à la demande de Sanofi à une réunion au cours de laquelle il nous a été demandé si nous étions toujours, malgré le départ d'[R] [F] en mesure d'assurer le suivi des autres dossiers.

- Cette question étonnante nous a fait comprendre qu'il avait probablement indiqué au client que tel n'était pas le cas. Nous avons répondu que nous étions opérationnels.'

La commission règlement des difficultés d'exercice en groupe a pris acte le 6 octobre 2016 de l'accord des parties, tous droits et moyens réservés, pour fixer la date de retrait de M. [F] de l'AARPI au 30 septembre 2016.

Il est établi que Mme [W] était l'avocat de la société Sanofi depuis une trentaine d'années et que le volume des affaires confiées a augmenté considérablement, à compter de2012 après le retrait d'un des autres avocats de la société Sanofi et surtout en 2016 lorsque les révélations sur les méfaits de la Dépakine sur le foetus ont été rendus publiques avec le dépôt du rapport de l'IGAS.

Il est également admis que ces affaires constituaient l'essentiel de l'activité de M. [F] au moins depuis son association et que si M. [U] avait réintégré l'AARPI portant son nom en 2015, il avait continué de travailler à temps plein pour le cabinet Mayer Brown ainsi qu'il résultait de la convention signée en janvier 2015, de sorte que le cabinet d'avocats reposait sur le travail des deux associés restants qui n'avaient pas de collaborateurs.

M. [F] justifie qu'il a proposé d'engager en mai 2015 un collaborateur déjà expérimenté en produits de santé pour avoir travaillé pendant deux ans au sein du cabinet Simmons & Simmonschargé du dossier du Médiator et qu'après un rendez-vous en présence de Mme [W], celle-ci, en sa qualité de gérante de l'AARPI, n'y adonné aucune suite.

En parallèle, ses démarches en vue de louer des bureaux supplémentaires ont débuté en juin 2015 et n'ont pas obtenu de réponse de la part de Mme [W].

Par ailleurs, il est avéré que la société Sanofi avait fait part, à tout le moins au cours du mois de juin 2016, aux associés de l'AARPI de son inquiétude sur la capacité de leur structure professionnelle à gérer l'accroissement du contentieux confié.

M. [F] a entrepris des démarches en vue de recrutement et les candidatures qu'il a reçues après avoir fait publier une annonce fin juin 2016 et transmises à son associée le 4 juillet n'ont appelé une réponse de sa part que le jour où celui-ci a annoncé officiellement son retrait, Mme [W] indiquant qu'elle allait revoir les CV adressés.

Le 28 août 2016, M. [U] a écrit à M. [F] pour l'informer que son épouse souhaiterait qu'ils rencontrent une jeune collaboratrice qui lui avait fait bonne impression et celui-ci lui a répondu le soir même à 19h40, de manière logique que, vu son retrait de l'AARPI, sa présence à l'entretien d'embauche d'une collaboratrice ne lui paraissait pas nécessaire mais qu'il pouvait si elle le souhaitait regarder son CV pour donner un avis.

Mme [B] [I], directrice juridique de la société Sanofi France, a rappelé à l'AARPI dans un courriel du 29 août 2016 qu'elle devait organiser à la demande de M. [N] [Z], vice-président juridique opérations du groupe Sanofi, deux réunions sur le sujet Dépakine dont ' une réunion dans la suite de notre réunion début juin au cours de laquelle nos avons discuté des actions de groupe et vous avons demandé de définir à titre préventif les moyens nécessaires pour assurer la bonne gestion des dossiers contentieux dans l'hypothèse où ils viendraient à se multiplier de façon substantielle ou si la charge de travail nécessaire à leur bonne gestion devenait elle-même significativement plus importante qu'actuellement. [N] souhaite que vous présentiez une proposition d'organisation qui puisse répondre à notre attente' et une réunion sur le fond du dossier.

Répondant à la conversation qu'il avait eue, à la suite de ce courriel, avec Mme [W] qui proposait un partenariat avec le cabinet Viguier Schmidt où exerçait M. [D] [K], déjà en charge de dossiers de RC Produits pour la filiale vaccins de Sanofi, M. [F] a écrit le 30 août :

' Après réflexion, je ne suis pas certain au regard de la situation du cabinet que contacter [D] a été une bonne idée.

Il pourrait informer Sanofi de la situation avec qui il est en contact direct (sic).

Il ne me semble pas que son support ponctuel sur les dossiers puissent répondre aux besoins de pérennisation de la structure attendue par le client.

Cela risque de plus de fragiliser la position du cabinet vis à vis de Sanofi qui pourrait décider de lui confier les dossiers...

Un partenariat avec le cabinet d'[D] limitera également les possibilités de développement (multiplication des conflits d'intérêts).'

Cet avis particulièrement motivé ne manifeste pas la volonté de M. [F] de bloquer le développement de l'AARPI pour servir ses intérêts mais incite son associé à réfléchir sur les risques de ce partenariat avec un confrère spécialisé en droit pharmaceutique qui pourrait nuire au cabinet.

De même, M. [F] a entrepris de nouvelles démarches en vue de l'extension des bureaux en avril 2016 lesquelles visaient la location de locaux situés dans le même immeuble mais Mme [W] ne justifie pas avoir donné une quelconque réponse à cette proposition avant le 13 septembre 2016 soit après la réunion exigée par la société Sanofi au sujet de l'accroissement des moyens du cabinet qui s'est tenue le 7 septembre.

Par courriel du 24 septembre 2016,Mme [W] répond aux demandes de M. [F] en ces termes :

' je suis très concernée (aussi) par le fait que certains dossiers n'avancent pas alors que nous recevons de nouvelles assignations.

Comme vous le savez, [N] [Z] a demandé qu'[U] recrute.

J'ai donc déjà recruté une jeune collaboratrice. Nous avons la possibilité d'avoir des locaux supplémentaires. J'ai également approché [D] [K] en qui nous pouvons avoir confiance. Enfin, j'ai rencontré une collaboratrice senior qui a le profil idéal et qui est prête à démissionner pour nous rejoindre.

Tout cela va dans le sens des demandes de [N] [Z] et de celles que vous même avez exprimées dans une logique de pérennisation.

La situation de flou dans laquelle nous sommes, votre absence prolongée du bureau et votre refus de nous parler nous mettent dans une situation intenable et potentiellement dangereuse qui ne peut durer.

Ainsi, nous vous demandons de nous faire connaître clairement vos intentions réelles, définitives, d'ici 48 heures.'

M. [F] a répondu le lendemain :

' Malgré la complexité de la situation, je fais le nécessaire pour que les dossiers soient tous en l'état dans la mesure de mes moyens et des urgences qui se présentent. Je participe à l'ensemble des réunions où ma présence est nécessaire ainsi que les audiences et réunions d'expertise.

Je ne suis pas maître du tempo imposé par les adversaires qui saisissent différentes juridictions en quelques jours sur des dossiers complexes, stratégie qui vise, selon moi, à nous déstabiliser au regard des capacités limitées du cabinet...

Je me concentre ce dimanche sur les deux dossiers que nous devons plaider demain et je répondrai par la suite aux autres questions soulevées dans votre mail.'

Dans une lettre datée du 28 novembre 2017 adressée à M. [F], la directrice juridique de la société Sanofi France fait état de la tardiveté de la réaction de l'AARPI [U] à répondre à ses inquiétudes quant à sa capacité à défendre ses intérêts en ces termes :

' Au regard de l'ampleur et des enjeux majeurs du dossier Dépakine ainsi que du nombre croissant des autres dossiers en matière de responsabilité civile produits constatés en 2016, nous avions à plusieurs reprises sollicité et organisé des réunions avec votre associée Me [W] afin de faire part de notre souhait qu'une équipe structurée et pérenne puisse intervenir sur nos dossiers....

Ces demandes étant restées sans effet, nous avons organisé début septembre 2016 une ultime réunion sur ce point avec Me [W] et vous-même. A l'issue de cette réunion, nous avons fait le constat qu'aucune mesure concrète n'avait encore été prise concernant la structuration du cabinet [U], ce qui devenait préoccupant.

Fin septembre 2016, à l'issue de la seconde réunion qui s'est tenue au ministère de la santé avec les magistrats, nous vous avons fait part de nos inquiétudes sur la fragilité persistante du cabinet [U].

C'est alors que nous avons appris que vous aviez pris la décision de quitter le cabinet [U] depuis le mois de juillet 2016. Or, cette information ne nous a pas été donnée lors de notre réunion début septembre relative à la restructuration du cabinet.'

M. [Z] a confirmé dans une lettre du 12 juillet 2019 qu'il avait fait part de ses inquiétudes dès 2015 aux deux associés sur la nécessité de renforcer de manière significative les ressources du cabinet sur les dossiers du groupe et qu'informé début octobre 2016 du souhait de M. [F] de rejoindre le cabinet Altana, le groupe Sanofi a décidé de rencontrer cette société d'avocats et de la retenir pour la prise en charge des dossiers de responsabilité civile produits.

Il ressort de l'ensemble de ces éléments que, d'une part et bien qu'ayant annoncé son retrait, M. [F] a continué pendant le préavis à répondre efficacement et quels que soient les jours et heures, aux demandes urgentes de la société Sanofi et que, d'autre part, conscient de la charge importante que constituaient les dossiers confiés, de son évolution grandissante très prévisible et de l'inadéquation de la structure professionnelle constituée de deux associés sans aucun collaborateur et soucieux de satisfaire aux exigences légitimes du client majeur que constituait la société Sanofi, il a tenté de développer le cabinet d'avocat afin d'assurer sa pérennité mais s'est heurté à l'inertie de son associée seule gérante de l'AARPI, jusqu'à la fin du mois de juillet 2016.

Sa décision de retrait de l'association est uniquement motivée par ce constat et son inquiétude face aux risques qu'il engendrait après qu'il a tenté vainement de développer les moyens humains et matériels nécessaires à l'accroissement de l'activité du cabinet.

Par ailleurs et s'agissant de l'information de la société Sanofi au sujet du retrait de M. [F], il convient de relever qu'en réponse au courriel reçu de la société Sanofi le 29 août 2016 relatif à la nécessité d'une réunion au sujet de la proposition d'organisation de l'AARPI afin de faire face à une bonne gestion des dossiers confiés, M. [F] a écrit le lendemain à son associée :

'Suite à notre conversation, je ne vois pas ce qui pourrait me conduire à changer d'avis. Les derniers événements concernant le dossier dpk et les questions posées par [N] me confortent dans mes inquiétudes et dans le sentiment que la structure n'est plus adaptée à la prise en charge de ces dossiers.

Je pense comme vous que nous leur devons la vérité sur la situation notamment au regard des prochaines échéances.'

Cette vérité concernait à l'évidence le retrait de M. [F] de l'AARPI et face au silence de Mme [W] pendant deux mois alors qu'elle avait elle-même estimé nécessaire d'en informer la société Sanofi, il ne peut être reproché à M. [F] d'en avoir pris l'initiative, de sorte qu'aucun comportement déloyal ni aucun détournement de clientèle ne peuvent lui être reprochés puisque ce n'est qu'après une réunion organisée entre Mme [W] et la société Sanofi le 29 septembre 2016 que celle-ci a décidé de confier la défense de ses intérêts dans les dossiers de responsabilité civile produits à M. [F], cette décision étant motivée par des considérations objectives, celle-ci ayant à plusieurs reprises fait part à l'AARPI de son souhait de voir son équipe de défense étoffée et renforcée.

Alors que M. [F] avait saisi le 27 septembre 2016 le bâtonnier afin que son retrait de l'AARPI et le transfert des dossiers se fassent dans les meilleurs conditions possibles avec son associée et que le jour même, les avocats étaient convoqués devant la commission de règlement des difficultés d'exercice en groupe pour une tentative de conciliation le 6 octobre, Mme [W] a, de manière unilatérale, mis fin au préavis à compter du 30 septembre suivant puisqu'elle a interdit à M. [F] de se rendre au cabinet, lui imposant de rendre badge et carte de crédit, et d'utiliser le nom de l'AARPI [U] alors qu'il en était membre.

Contrairement à ce qu'a pu juger le bâtonnier, cette rupture ne peut être imputée à M. [F] puisqu'il apparaît qu'elle fait suite à la décision de la société Sanofi de transférer des dossiers importants à M. [F], sachant que le client est libre de choisir son avocat notamment lorsque des avocats d'un même cabinet se séparent et qu'aucun détournement de clientèle ou manque de loyauté n'est retenu à son encontre.

Enfin, il ne peut être reproché ni à M. [F] ni à la société Altana dans le contexte précité d'avoir entrepris une négociation en vue d'une nouvelle association avant l'annonce par M. [F] de son retrait fin juillet 2016.

Si ladite société l'a agréé en qualité d'associé selon procès verbal de décision collective des associés du 6 septembre 2016, ce que le bâtonnier a qualifié à juste titre de classique dans les mouvements d'associés entre cabinets, il est établi qu'il a continué à travailler pour le compte de l'AARPI jusqu'au 30 septembre 2020 et la convention d'apport en industrie entre M. [F] et la société Altana permettant la création et l'attribution de parts en industrie n'a été signée que le 19 octobre suivant.

M. [F] s'est vu interdire l'accès aux locaux de l'AARPI [U] à compter du 30 septembre, ce qui explique qu'il ait été hébergé à compter du 5 octobre par ladite société, qu'il ait utilisé sa messagerie privée jusqu'au 19 octobre 2016 et fait envoyer début octobre son courrier professionnel à son domicile personnel, et rapporte la preuve d'un exercice individuel de la profession pendant cette période.

Il ne peut être reproché à la société Altana aucune complicité dans le détournement de clientèle puisque celui-ci n'a pas été retenu à l'encontre de M. [F] et que la société Sanofi a indiqué n'avoir rencontré le cabinet Altana que le 10 octobre 2016.

Aucune faute ne peut être reprochée à la société Altana.

Sur la demande de dommages et intérêts formée par la SELARL Altana pour procédure abusive et préjudice de réputation et d'image

En saisissant le bâtonnier puis la cour d'appel, Mme [W] et M. [U] ont exercé un droit qui n'a pas dégénéré en abus.

Par ailleurs, la société Altana ne justifie pas de ses allégations selon lesquelles cette procédure a fragilisé ses équipes et de nombreux potentiels associés talentueux ont été dissuadés d'intégrer la structure compte tenu des menaces que l'existence de cette action faisait peser sur sa pérennité.

Le demande de dommages et intérêts est rejetée.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Les dépens de première instance et d'appel doivent incomber à Mme [W] et M. [U], partie perdante.

Ils serontégalement condamnés à payer à M. [F] la somme de 20 000 € et à la SELARL Altanala somme de 10 000 €, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Rejette la demande d'annulation de la décision du bâtonnier,

Infirme la décision du bâtonnier en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau,,

Déboute Mme [Y] [W] et M. [E] [U] de l'ensemble de leurs demandes,

Les condamne aux dépens de première instance,

Dit que les avocats en la cause en ayant fait la demande, pourront, chacun en ce qui le concerne, recouvrer sur la partie condamnée ceux des dépens dont ils auraient fait l'avance sans avoir reçu provision en application de l'article 699 du code de procédure civile,

Condamne in solidum Mme [Y] [W] et M. [E] [U] à payer à M. [R] [F] la somme de 20 000 € et à la SELARL Altana la somme de 10 000 €, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 2 - chambre 1
Numéro d'arrêt : 18/17641
Date de la décision : 18/11/2020

Références :

Cour d'appel de Paris C1, arrêt n°18/17641 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-11-18;18.17641 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award