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17/11/2020 | FRANCE | N°17/06549

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 2 - chambre 1, 17 novembre 2020, 17/06549


Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 2 - Chambre 1



ARRÊT DU 17 NOVEMBRE 2020



(n° , 7 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/06549 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B26HI



Décision déférée à la Cour : Jugement du 27 Février 2017 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 15/01404





APPELANT



Monsieur [M] [X]

Né le [Date naissance 2] 1990 à

[Localité 8]

[Adresse 3]

[Localité 1]



Représenté par Me Alexandre LUC-WALTON, avocat au barreau de PARIS, toque : C230





INTIMÉ



L'AGENT JUDICIAIRE DE L'ETAT

[Adresse 5]

...

Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 2 - Chambre 1

ARRÊT DU 17 NOVEMBRE 2020

(n° , 7 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/06549 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B26HI

Décision déférée à la Cour : Jugement du 27 Février 2017 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 15/01404

APPELANT

Monsieur [M] [X]

Né le [Date naissance 2] 1990 à [Localité 8]

[Adresse 3]

[Localité 1]

Représenté par Me Alexandre LUC-WALTON, avocat au barreau de PARIS, toque : C230

INTIMÉ

L'AGENT JUDICIAIRE DE L'ETAT

[Adresse 5]

[Localité 7]

Représenté par Me Bernard GRELON de L'AARPI LIBRA AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : E0445

M. LE PROCUREUR GENERAL PRES LA COUR D'APPEL DE PARIS

[Adresse 4]

[Localité 6]

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 23 Septembre 2020, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, Mme Nicole COCHET, Première présidente de chambre, et Mme Marie-Françoise D'ARDAILHON MIRAMON, Présidente.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Nicole COCHET, Première présidente de chambre

Mme Marie-Françoise D'ARDAILHON MIRAMON, Présidente

Mme Estelle MOREAU, Conseillère

Greffier, lors des débats : Mme Séphora LOUIS-FERDINAND

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Nicole COCHET, Première présidente de chambre et par Djamila DJAMA, Greffière présente lors du prononcé.

* * * * *

Interpellé le 7 septembre 2011 à [Localité 9] dans le cadre d'un contrôle de sécurité routière, M. [X] a fait l'objet d'un contrôle positif au cannabis.

Entendu le même jour par les services de police, il a subi une rétention administrative de son permis de conduire pendant 72 heures, suivie d'une suspension de 6 mois ordonnée par le préfet du Var.

M. [X], suivant courriers des 24 et 29 novembre 2011, a sollicité auprès de Mme le procureur de la République près le tribunal de Draguignan l'organisation d' une contre expertise à partir du second flacon de sang.

Une ordonnance pénale rendue le 12 décembre 2011 l'a condamné au paiement d'une amende de 400 euros et à un stage de sensibilisation à la sécurité routière, ainsi qu'à une suspension de permis de conduire de 6 mois. Elle a été notifiée le 4 janvier 2012 à M.[X], qui l'a frappée d'opposition.

M. [X] a été informé, le 18 avril 2012 lors de l'audience où il comparaissait sur son opposition devant le tribunal correctionnel de Draguignan, de ce que la contre-expertise, réalisée le 9 février 2012, avait donné un résultat négatif. La décision rendue le jour même a mis l'ordonnance pénale à néant, et prononcé sa relaxe.

Par la suite, M. [X] a formulé plusieurs réclamations auprès du préfet des Alpes maritimes, et du procureur de la République de Draguignan, puis a fait attraire devant le tribunal judiciaire de Paris l'Agent judiciaire de l'Etat, sur le fondement de l'article L.141-1du code de l'organisation judiciaire, réclamant la reconnaissance d'une faute lourde commise à son encontre par le service public de la justice, et sa réparation à hauteur de 100 000 euros au titre de son préjudice moral, et de 100 000 euros au titre de son préjudice matériel et économique, outre 3500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement du 27 février 2017, le tribunal, rejetant l'exception d'incompétence invoquée par l'Agent judiciaire de l' Etat , a débouté M.[X] de ses demandes, au constat de ce que

- les circonstances ne révèlent aucune faute lourde de l'Etat dans le fonctionnement du service public de la justice,

- le préjudice dont M.[X] demande réparation résulte de la rétention de son permis de conduire qu'il impute à un dysfonctionnement du système judiciaire, dont la mesure ne peut cependant relever, puisqu'elle procède d'une décision administrative,

- il n'est pas démontré que le ministère public n'aurait pas requis l'effacement du STIC des données personnelles de M. [X], ni d'ailleurs que cet effacement ne soit pas réalisé.

Suivant déclaration du 27 mars 2017, M.[X] a interjeté appel de cette décision.

Dans le cadre de la procédure d'appel, l'Agent judiciaire de l'Etat a de nouveau soumis au conseiller de la mise en état l'exception d'incompétence qu'il avait vainement présentée en première instance, tendant au renvoi devant le juge administratif de l'examen des griefs tenant à la rétention puis à la suspension du permis de conduire de M. [X], puis au non effacement de ses données personnelles du fichier STIC, ces mesures procédant de décisions administratives.

Cette exception a été rejetée par ordonnance du 22 septembre 2020.

Dans ses dernières conclusions signifiées par RPVA le 3 octobre 2019, M.[X] demande à la cour - hors les 'dire et juger' qui ne constituent pas des demandes

de déclarer son appel recevable,

d'infirmer le jugement du 27 février 2017,

de condamner l' Agent judiciaire de l'Etat à lui payer la somme de 100 000 € au titre de son préjudice moral,

de condamner l'Agent Judiciaire de l'Etat à lui payer la somme de 100 000 au titre du préjudice matériel et économique,

de le condamner enfin aux entiers dépens et à lui payer la somme de 3500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Au soutien de son appel, M.[X] fait d'abord grief au tribunal de plusieurs erreurs de droit et omissions de statuer, invoquant ensemble plusieurs dysfonctionnements de l'enquête préliminaire, non examinés par les premiers juges, qui se sont succédé sans que les personnes en charge du service public de la justice n' interviennent pour y mettre un terme.

Il reproche également au tribunal de n'avoir rien dit sur la décision injustifiée prise par le Parquet de lancer une poursuite pénale, alors qu'il était informé des anomalies au niveau de la conduite des analyses et qu'une contre-expertise, qui n'a été mise en oeuvre qu' avec quatre mois de retard, était sollicitée, le tribunal s'étant limité sur ce point à constater, à tort, 'qu'il ne suffit pas que la procédure administrative repose sur les poursuites pénales pour engager la responsabilité de l'Etat pour fonctionnement défectueux du service public de la justice'.

Il ajoute que contrairement à ce qu'énonce l'Agent judiciaire, le renvoi devant le tribunal n'a nullement permis d'assurer la contradiction, si l'on veut bien remarquer que ni la demande de contre-expertise, ni ses résultats n'ont été versés aux débats.

Il considère que la réponse apportée le 24 janvier 2013 par le Procureur de la République de Draguignan au courrier qu'il lui a adressé le 12 novembre 2012 comme un aveu judiciaire, l'enquête interne qui aurait été réalisée n'ayant pas été produite au débat.

C'est du fait de ces errements du système judiciaire que les autorités administratives ont pris les mesures qui sont l'accessoire des poursuites pénales, à savoir la rétention de son permis pour 72 heures d'abord, puis sa suspension, peine complémentaire à l'action engagée par le Ministère public. Il a également dû subir des évaluations médicales obligatoires, étant observé que tous les contrôles sanguins qu'il a dû effectuer ont été négatifs au cannabis.

S'il n'a pas formé de recours contre ces mesures administratives consécutives à l'ouverture de la procédure, c'est que les délais en étaient expirés lorsqu'il a obtenu la décision de relaxe qui lui permettaient d'en justifier.

Enfin, il reproche au Procureur de la République de ne pas justifier avoir pris les mesures utiles pour effacer du fichier STIC tant ses données personnelles que la mention de la condamnation, celle-ci s'effectuant pourtant de plein droit en cas de relaxe.

Quant à son préjudice, il tient à l'importante dégradation de son état de santé du fait de cette procédure injustifiée, et à la perte de son emploi du fait de sa privation de permis de conduire, puis de son état de santé déficient.

Dans ses dernières conclusions signifiées le 21 août 2017 - abstraction étant faite ici des réserves exprimées sur une éventuelle incompétence partielle au profit de la juridiction administrative, devenues sans objet du fait de l'ordonnance du conseiller de la mise en état sus citée - , l'Agent judiciaire de l'Etat demande la confirmation du jugement entrepris et la condamnation de M.[X] à lui payer la somme de 2000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Il fait liminairement remarquer que l'appelant, s'il souligne que le tribunal a manqué de répondre à certains de ses arguments, ne démontre pas pour autant que le jugement attaqué serait entaché d'une erreur de droit ou de fait susceptible d'en justifier la réformation, alors qu'en l'occurrence le tribunal a parfaitement motivé sa décision.

Il récuse l'ensemble des griefs articulés à l'encontre de la conduite de la procédure, soutenant en particulier que c'est pour éviter une atteinte aux droits du requérant que le Procureur de la République a décidé de ne pas procéder à l'exécution de l'ordonnance pénale et a fait convoquer M.[X] devant le tribunal pour qu'il puisse s'expliquer, cette décision, suivie du jugement de relaxe, ayant réparé l'erreur commise sur l'analyse sanguine, ce qui fait au contraire la démonstration du bon fonctionnement du service public de la justice.

Sur les décisions administratives critiquées, aussi bien la rétention qu'ultérieurement la suspension du permis de conduire de M.[X] sont intervenues dans les conditions prévues par les textes, et si l'on peut admettre que la suspension reposait effectivement sur l'analyse sanguine qui s'est révélée erronée, cette mesure administrative, contre laquelle M.[X] aurait pu former un recours gracieux ou hiérarchique, ne relève pas d'un fonctionnement défectueux du service public de la justice, ni par conséquent de la responsabilité de l'Etat qui s'y rattache en application des dispositions de l'article 141-1 du code de l'organisation judiciaire.

De la même façon, l'absence de réponse et le maintien injustifié des mentions au fichier STIC ne peuvent non plus relever de ce régime, les décisions d'effacement ou de rectification des informations de ce fichier étant des actes détachables de la procédure judiciaire.

Il ajoute en ce qui concerne le préjudice que la relation causale entre la procédure et la dégradation de l'état de santé de M. [X] n'est pas établie, les nombreuses difficultés auxquelles il rapporte lui même avoir dû faire face depuis 2010 les expliquant largement. Quant au préjudice matériel invoqué, il n'est pas non plus établi que son absence d'activité professionnelle de septembre 2011 à mai 2012 découle de la procédure, l'attestation de son employeur établissant qu'il s'est présenté au travail le 4 mai 2012, et que sa présence s'est poursuivie à compter du 16 mai suivant. Ainsi le montant des réparations demandées, qui sont extravagantes, n'est en rien justifié.

Le dossier a été communiqué au ministère public, qui l'a visé sans observations le 23 mai 2020.

SUR CE,

L'article 141-1 du code de l'organisation judiciaire oblige l'Etat à réparer le dommage résultant du fonctionnement défectueux du service public de la justice, qui suppose le constat d'une faute lourde ou d'un déni de justice, la faute lourde consistant en une déficience caractérisée par un fait ou une série de faits traduisant l'inaptitude du service public de la justice à remplir la mission dont il est investi.

C'est sous ce regard qu'il convient d'examiner la décision attaquée et les critiques élevées à son encontre par M.[X].

Sur l'omission de considérer les anomalies de l'enquête préliminaire

Le contrôle qui a donné lieu à la procédure résulte d'une réquisition du Procureur de la République de Draguignan, adressée le 1er septembre 2011 à l'escadron départemental de sécurité routière du Var, agent effectif du contrôle à l'une des trois dates fixées par cette réquisition. Il n'apparaît donc entaché d'aucune irrégularité.

La mauvaise interprétation de l'analyse salivaire initiale, aujourd'hui suspectée par l'appelant, ne peut, même si elle est avérée, constituer une faute lourde des agents qui l'ont effectuée, le résultat positif qu'elle a révélé ayant d'autant moins de raison d'être mis en doute que M. [X], selon le procès verbal de son audition dressé le 7 septembre 2011 après cette analyse et la réalisation du prélèvement sanguin, l'a accréditée en déclarant reconnaître l'infraction, et avoir consommé un joint dix jours auparavant.

Le rapport sur l'analyse du prélèvement sanguin de M.[X], établi le 8 septembre 2011par le docteur [D] qui l'a effectuée, fait certes apparaître une anomalie, tenant à sa réalisation sur un échantillon contenu dans un tube 'sans aucune identité'.

Si cette anomalie apparaît de nature à expliquer a posteriori une possible inversion d'échantillon au détriment de M. [X], l'impossibilité d'en déterminer l'origine et l'imputabilité, et le fait qu'elle ait légitimement pu être négligée, dès lors que le tube provenait d'un scellé intact, ne permettent pas d'en faire raisonnablement une faute lourde, ou un élément de celle-ci.

Enfin c'est manifestement à tort que M. [X] invoque un défaut de notification de ses droits. En effet, d'une part, le procès verbal de son audition du 7 septembre 2011 mentionne qu'il a été informé tant de son droit de ne pas demeurer à disposition du service et de quitter à tout moment les locaux, que de sa faculté de demander à tous les stades de la procédure qu'il soit procédé à un examen technique ou à une expertise . D'autre part, la notification des résultats de l'expertise sanguine, établie dans un procès verbal du 9 septembre 2011, fait également mention de ce qu'il a été de nouveau informé à ce stade de sa faculté de saisir le Procureur de la République d'une demande de nouvelle expertise.

Les griefs formulés par M.[X] à l'encontre de la conduite de l'enquête préliminaire, qu'il reproche au tribunal, partiellement à tort, de n'avoir pas pris en considération, ne peuvent donc ni séparément, ni pris ensemble, constituer les éléments d'une faute lourde susceptible d'engager la responsabilité de l'Etat.

Sur les conditions de l'engagement de la poursuite pénale

Par son courrier adressé à Mme le Procureur de la République de Draguignan en date du 7 octobre 2020, M. [X] a fait expressément état de ses doutes certains sur la réalité de l'infraction qui lui était reprochée, mais n'a cependant sollicité qu' 'une révision de la nature de la verbalisation qui a été appliquée par le gendarme le 7 septembre 2011".

Contrairement à ce qu'il indique dans ses écritures, la demande de contre-expertise avec l'échantillon sanguin du second flacon issu du prélèvement n'a donc pas été formalisée à cette date mais seulement dans sa deuxième lettre du 24 novembre 2011, date à laquelle la décision de poursuite était déjà prise, sa convocation devant le tribunal correctionnel pour le 18 avril 2012, précédant l'ordonnance pénale prise le 12 décembre 2011, lui ayant été notifiée le lendemain 25 novembre 2011.

Cette chronologie établit que la poursuite - tant celle procédant de la convocation que celle résultant de l'ordonnance pénale, ce doublon s'étant résolu par l'audiencement de l'opposition à la date de la convocation initialement notifiée - n'a pas été engagée en connaissance de la demande de contre-expertise, ni, par conséquent, au mépris des droits de M. [X], ainsi qu'il le soutient.

Ainsi que l'a exactement jugé le tribunal, le déroulement de la suite de la procédure apparaît, dans ce contexte, exempt de toute anomalie, la contre-expertise ayant été réalisée dans un délai d'un peu plus de deux mois, permettant que le tribunal en dispose pour juger de l'affaire le 18 avril 2012. A cette date, c'est à dire dans un délai qui ne peut être raisonnablement considéré comme anormalement long, il a tiré toutes les conséquences du résultat négatif de cette seconde analyse sanguine, en relaxant M.[X] des fins de la poursuite.

Quant enfin au courrier reçu par M.[X] du Procureur de la République de Draguignan le 24 janvier 2013, auquel il n'a pas répondu, il traduit une préoccupation louable de prendre en compte les réclamations formulées par M.[X] mais ne saurait constituer une reconnaissance a priori de l'existence des erreurs éventuellement détectées ni, en toute hypothèse, celle d'une faute lourde inexistante en l'espèce.

Sur la rétention, puis la suspension du permis de conduire de M. [X]

Aux termes de l'article L 224-1 du code de la route, les officiers et agents de police judiciaire peuvent retenir à titre conservatoire le permis d'un conducteur dont il existe une ou plusieurs raisons de soupçonner qu'il a fait usage de stupéfiants.

L'analyse salivaire , dont il vient d'être rappelé qu'il n'existait au moment où elle a été effectuée aucune raison d'en mettre en doute le résultat, suffisant à constituer cette raison sérieuse, la rétention du permis de M. [X] opérée le 7 septembre 2011 ne peut être critiquée.

Elle est certes la source de la suspension préfectorale de six mois prononcée par le préfet du Var en application des dispositions de l'article L 224-2 du même code, lequel prévoit 'la possibilité pour le représentant de l'Etat de prononcer, dans les soixante douze heures de sa rétention, une suspension du permis pour une durée maximale de six mois dans le cas où les analyses et examens ...établissent qu'il conduisait après avoir fait usage de stupéfiants'.

Contrairement toutefois à ce que soutient M.[X] par une interprétation erronée des termes de l'article 224-7 du code de la route, la suspension préfectorale du permis de conduire n'est pas une peine complémentaire à l'action engagée par le ministère public : selon ce texte, elle peut être décidée par le représentant de l' Etat dans le département où l'infraction a été commise lorsqu'il est 'saisi d'un procès-verbal constatant une infraction punie par le présent code de la peine complémentaire de suspension du permis de conduire': il s'agit donc d'une décision administrative autonome qui, bien qu'elle repose sur les poursuites pénales, n'en est pas l'effet direct, et ne peut donc, comme l'a déjà souligné le tribunal, engager la responsabilité de l'Etat pour un fonctionnement défectueux du service public de la justice auquel elle est étrangère, alors au surplus que M.[X] aurait pu la contester devant l'autorité ou le juge administratif compétents sans avoir à attendre la décision de relaxe du 18 avril 2012. Se trouve donc de la sorte également exclue son allégation d'un déni de justice qui procéderait d'une impossibilité d'exercer un recours effectif contre cette décision de suspension.

La conclusion des premiers juges, refusant d'imputer à un fonctionnement défectueux du service public de la justice tant la suspension du permis de conduire de M.[X], que les examens médicaux qu'il a dû subir dans les conditions pénibles qu'il relate, ou le retard dans la restitution de ce document, apparaît ainsi parfaitement justifiée.

Sur le non effacement des mentions au fichier STIC

Le tribunal a relevé que M.[X] justifiait l'avoir sollicité du Procureur de la République le 8 juin 2012, puis à nouveau le 10 novembre 2012 et encore une fois le 16 avril 2013 mais ne démontrait ni que le ministère public n'aurait pas demandé cet effacement, ni que les données litigieuses figuraient toujours au fichier Stic.

Si cette affirmation n'est pas exempte de critique au moins quant à son premier élément, qui revient à demander à M.[X] la preuve impossible d'un fait négatif, force est de constater que n'est en l'état établi que le défaut de réponse du parquet de Draguignan. Or, d'une part, il n'en résulte pas que celui-ci n'ait pas accompli la démarche prescrite par les dispositions de l'article 230-8 du code de procédure pénale, les supputations de M.[X] sur le maintien de ces mentions, et sur son incidence sur sa candidature à un emploi à l'aéroport de [Localité 8], n'étant étayées d'aucune élément concret ; d'autre part, comme le rappelle l'Agent judiciaire de l'Etat, les décisions relatives à la tenue du fichier STIC, détachables de la procédure judiciaire, ne mettent pas en jeu le fonctionnement du service public de la justice, et ne peuvent dès lors fonder la responsabilité de l'Etat au titre de l'article 141-1 du code de l'organisation judiciaire.

De ce qui précède résulte que la décision du 27 février 2017 rejetant la demande de M.[X] doit être confirmée.

Aucune considération tirée de l'équité ne justifiant la condamnation de M.[X] au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, la demande de l'Agent judiciaire de l'Etat de ce chef sera rejetée.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme la décision du 27 février 2017,

Rejette la demande formée par l'Agent judiciaire de l'Etat au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne M.[X] aux dépens, avec la possibilité pour les avocats qui en ont fait la demande, de recouvrer sur la partie condamnée ceux des dépens dont ils auraient fait l'avance sans avoir reçu provision en application de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIERLE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 2 - chambre 1
Numéro d'arrêt : 17/06549
Date de la décision : 17/11/2020

Références :

Cour d'appel de Paris C1, arrêt n°17/06549 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-11-17;17.06549 ?
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