La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

29/10/2020 | FRANCE | N°19/07913

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 9, 29 octobre 2020, 19/07913


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 9



ARRET DU 29 OCTOBRE 2020



(n° , 8 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/07913 - N° Portalis 35L7-V-B7D-B7XBQ



Décision déférée à la Cour : Jugement du 02 Avril 2019 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 2017048307





APPELANTS



SAS LA FOURMI

[Adresse 16]

[Localité 13]



SELAFA MJA, en la personne de Me [N] [Y], en

qualité de mandataire judiciaire de la SAS LA FOURMI

[Adresse 2]

[Localité 15]



SCP CBF ASSOCIES, en la personne de Me [G], en qualité de commissaire à l'exécution du plan de la SAS LA FOURM...

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 9

ARRET DU 29 OCTOBRE 2020

(n° , 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/07913 - N° Portalis 35L7-V-B7D-B7XBQ

Décision déférée à la Cour : Jugement du 02 Avril 2019 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 2017048307

APPELANTS

SAS LA FOURMI

[Adresse 16]

[Localité 13]

SELAFA MJA, en la personne de Me [N] [Y], en qualité de mandataire judiciaire de la SAS LA FOURMI

[Adresse 2]

[Localité 15]

SCP CBF ASSOCIES, en la personne de Me [G], en qualité de commissaire à l'exécution du plan de la SAS LA FOURMI

[Adresse 11]

[Localité 14]

Représentées par Me Luca DE MARIA de la SELARL PELLERIN - DE MARIA - GUERRE, avocat au barreau de PARIS, toque : L0018, avocat postulant

Représentées par Me Paul LAFUSTE, avocat au barreau de PARIS, toque T.06, avocat plaidant

INTIMEE

SA BANQUE LAYDERNIER

N° SIRET : 325 520 385

[Adresse 1]

[Localité 12]

Représentée par Me Julie CHALUMEAU, avocat au barreau de PARIS, toque : E1285, avocat postulant

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 24 septembre 2020, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Michèle PICARD, Présidente

Madame Isabelle ROHART-MESSAGER, Conseillère

Madame Déborah CORICON, Conseillère

qui en ont délibéré

GREFFIER : Madame FOULON, lors des débats

ARRET :

- contradictoire

- rendu par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Michèle PICARD, Présidente et par Madame FOULON, Greffière .

**********

La société La Fourmi, qui exerce une activité de marchand de biens, a acquis en 2008 un bien immobilier à [Localité 19] (Haute-Savoie), au moyen d'un prêt de 700.000 euros assorti d'un privilège de prêteur de deniers consenti par la banque Laydernier. Compte tenu de difficultés de remboursement, la banque a initié une procédure de saisie immobilière.

Par jugement du 22 mai 2015, confirmé par arrêt de la cour d'appel de Chambéry du 29 octobre 2015, le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Thonon-les-Bains a fixé la créance de la banque Laydernier à la somme de 731.097,07 euros et a ordonné la vente du bien.

Par jugement du 22 janvier 2016, le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Thonon-les-Bains a adjugé l'immeuble au prix de 286.000 euros, somme séquestrée entre les mains du Bâtonnier.

Par jugement du 2 février 2016, le tribunal de commerce de Paris a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'égard de la société La Fourmi, désigné la Selasu [X], prise en la personne de Me [X] en qualité d'administrateur judiciaire et la Selafa MJA, prise en la personne de Me [Y], en qualité de mandataire judiciaire. La somme provenant de la vente a été transmise à la Selafa MJA ès qualités.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 24 mars 2016 la banque Laydernier a déclaré trois créances au passif de la société La Fourmi :

-une créance de 4 598,10 euros à titre chirographaire,

-une créance de 731 097,07 euros à titre hypothécaire, garantie par une inscription de privilège de prêteur de denier sur le bien situé à [Localité 19] et par une hypothèque sur des parcelles de terrain sises au [Localité 17],

-une créance de 220 787,98 euros à titre hypothécaire outre intérêts du 19 octobre 2010 au 2 février 2016 pour 52 019,64 euros garantie par hypothèque sur des parcelles de terrain sises au [Localité 17].

Par une ordonnance du 20 juin 2017, le juge-commissaire a constaté que la contestation de la créance de 731 097,07 euros ne relevait pas de sa compétence et a imparti un délai d'un mois à la banque Laydernier pour saisir la juridiction compétente.

Le 17 juillet 2017, la banque Laydernier a assigné la société La Fourmi et les organes de la procédure devant le tribunal de commerce de Paris aux fins de voir prononcer l'admission de la créance de 731 097,07 euros à titre privilégié.

Par jugement du 11 octobre 2017, le tribunal de commerce de Paris a arrêté un plan de redressement sur 8 ans au bénéfice de la société La Fourmi, maintenu la Selafa MJA, prise en la personne de Me [Y], en qualité de mandataire judiciaire et désigné la Selasu [X], prise en la personne de Me [X] en qualité de commissaire à l'exécution du plan. Le 1er décembre 2017, la SCP CBP Associés, prise en la personne de Me [G] a été désignée en qualité de commissaire à l'exécution du plan en remplacement de la Selasu [X].

Par jugement du 2 avril 2019, le tribunal de commerce de Paris a débouté la société La Fourmi et les organes de la procédure de leur fin de non recevoir de la demande d'admission de la créance, admis la créance de 731 097,07 euros à titre privilégié au passif de la société La Fourmi en vertu du privilège de prêteur de deniers inscrit à l'hypothèque de Thonon-les-Bains, privilège reporté sur le prix d'adjudication des biens immobiliers, soit la somme de 286 000 euros, débouté la banque Laydernier de sa demande de garantie additionnelle de la créance contestée par l'hypothèque conventionnelle prise sur des biens immobiliers sis au [Localité 17] et condamné la société La Fourmi à payer à la banque Laydernier la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La société La Fourmi et les organes de la procédure ont relevé appel de cette décision le 12 avril 2019.

Par ailleurs, le 6 janvier 2020, la banque Laydernier a saisi le juge-commissaire d'une requête en rectification d'erreur matérielle de l'ordonnance du 17 juin 2017 au motif invoqué que la contestation de la créance ne relevait pas du pouvoir juridictionnel du juge-commissaire et que la contestation ne relevait pas de sa compétence. Par ordonnance du 4 mars 2020 le juge-commissaire a dit la banque mal fondée en sa demande qui tendait à modifier le sens et la portée de la décision.

*****

Dans leurs dernières conclusions notifiées et remises au greffe le 30 mars 2020, la SAS La Fourmi, la Selafa MJA, prise en la personne de Me [Y], ès qualités de mandataire judiciaire de la société La Fourmi et la SCP CBF, prise en la personne de Me [G], ès qualités de commissaire à l'exécution du plan de la société La Fourmi demandent à la cour :

- d'infirmer le jugement critiqué en ce qu'il les a déboutées de leur fin de non recevoir, a admis la créance de 731 097,07 euros à titre privilégié et les a condamnées à payer

3 000 euros à la banque Laydernier au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- le confirmer pour le surplus,

Statuant à nouveau :

- déclarer la banque Laydernier irrecevable en sa demande d'admission à titre privilégié de la créance de 731 097,07 euros déclaré au passif,

- déclarer inopposable à la procédure le privilège de prêteur de deniers,

- dire que la créance de la banque Laydernier est chirographaire,

- débouter la banque Laydernier de ses demandes,

- la condamner à lui payer la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

*****

Dans ses dernières conclusions notifiées et remises au greffe le 30 mars 2020, la Banque Laydernier demande à la cour de confirmer le jugement critiqué en ce qu'il a rejeté les exceptions d'irrecevabilité soulevées par les appelants, admis sa créance de

731 097,07 euros à titre privilégié en vertu du privilège de prêteur de deniers inscrit à la conservation des hypothèques et reporté sur le prix d'adjudication des biens immobiliers,

Réformant pour le surplus et faisant droit à l'appel incident de la Banque Laydernier,

- Dire et juger que la créance dont s'agit est également garantie par l'hypothèque conventionnelle prise sur différents biens immobiliers sis sur le territoire de la Commune du [Localité 17] (73) en vertu d'un acte authentique reçu par Me [D] [H], notaire associé à [Localité 18] le 19 novembre 2009, ladite inscription publiée et enregistrée le 6 janvier 2010 à la Conservation des Hypothèques de [Localité 18] avec effet jusqu'au 21 décembre 2019, pour garantie de la somme de

260 000 euros,

- Subsidiairement, dire et juger que la créance déclarée par la banque est hypothécaire et renvoyer les parties devant le Juge Commissaire pour qu'il soit statué sur son admission,

- Condamner in solidum les appelants à lui payer la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

SUR CE

Sur la recevabilité de la demande d'admission de créance

La SAS La Fourmi, la Selafa MJA, prise en la personne de Me [Y], ès qualités de mandataire judiciaire de la société La Fourmi et la SCP CBF, prise en la personne de Me [G], ès qualités de commissaire à l'exécution du plan de la société La Fourmi exposent qu'en application de l'article L. 624-2 du code de commerce, le juge-commissaire est seul compétent pour prononcer l'admission d'une créance et que le tribunal qui devait se contenter de trancher la contestation n'avait pas compétence pour se prononcer sur l'admission.

Elles soutiennent que le défaut de pouvoir juridictionnel est une fin de non-recevoir qui doit être soulevée d'office. Elles précisent qu'il n'y a pas lieu de distinguer entre la contestation portant sur la régularité de la déclaration et la contestation portant sur le fond de la créance, que l'admission de la créance appartient au seul juge-commissaire sauf l'existence d'une instance en cours. Elles concluent que la demande d'admission de la créance est irrecevable.

La banque Laydernier soutient que par une interprétation a contrario de l'article L. 624-2, le juge-commissaire est incompétent pour statuer sur tout moyen opposé à la demande d'admission dès lors qu'il existe une contestation sérieuse.

Elle expose qu'il faut distinguer la discussion portant sur la régularité de la déclaration de créance de celle portant sur la contestation de fond de la créance. Dans ce dernier cas, elle estime qu'il peut rendre une décision de dépassement de son office juridictionnel lorsque, tout en ne se déclarant pas incompétent, il constate que la discussion soulevée devant lui est sérieuse, de sorte qu'il ne pourrait la trancher comme le ferait un Juge des Référés, c'est-à-dire en juge de l'évidence.

Aux termes de l'article L. 624-2 du code de commerce : « Au vu des propositions du mandataire judiciaire, le juge-commissaire décide de l'admission ou du rejet des créances ou constate soit qu'une instance est en cours, soit que la contestation ne relève pas de sa compétence. En l'absence de contestation sérieuse, le juge-commissaire a également compétence, dans les limites de la compétence matérielle de la juridiction qui l'a désigné, pour statuer sur tout moyen opposé à la demande d'admission ».

Aux termes du premier alinéa de l'article R. 624-5 du même code, dans sa rédaction applicable au cas d'espèce : « Lorsque le juge-commissaire se déclare incompétent, il renvoie, par ordonnance spécialement motivée, les parties à mieux se pourvoir et invite, selon le cas, le créancier, le débiteur ou le mandataire judiciaire à saisir la juridiction compétente dans un délai d'un mois à compter de la notification ou de la réception de l'avis délivré à cette fin, à peine de forclusion à moins de contredit dans les cas où cette voie de recours est ouverte ».

Il résulte de ces dispositions que le juge-commissaire dispose d'une compétence exclusive pour décider de l'admission ou du rejet des créances déclarées. Après une décision d'incompétence du juge-commissaire pour trancher une contestation relative à une créance, les pouvoirs du juge compétent régulièrement saisi se limitent à l'examen de cette contestation.

Ainsi, en l'espèce, le tribunal de commerce de paris ne pouvait, après avoir été saisi par la banque Laydernier suite à une ordonnance du juge-commissaire se déclarant incompétent pour trancher la contestation de sa créance, et après avoir tranché ladite contestation, admettre la créance au passif de la société La fourmi.

Le jugement sera infirmé sur ce point.

Sur le caractère privilégié de la créance

La SAS La Fourmi, la Selafa MJA, prise en la personne de Me [Y], ès qualités de mandataire judiciaire de la société La Fourmi et la SCP CBF, prise en la personne de Me [G], ès qualités de commissaire à l'exécution du plan de la société La Fourmi soutiennent que le privilège de prêteur de deniers est inopposable à la procédure.

Elles font valoir que l'inscription doit faire l'objet d'un renouvellement jusqu'à la consignation du prix mais qu'elle doit être poursuivie en cas d'ouverture d'une procédure collective même après l'admission de la créance au passif sous peine de perdre son caractère privilégié. Elles rappellent que le prix a été consigné alors que l'inscription était encore valable mais qu'il a été transféré, du fait du redressement judiciaire et de la caducité subséquente de la procédure de distribution du prix de vente, dans les mains du mandataire judiciaire puis du commissaire à l'exécution du plan, remise qui ne peut être assimilée à une consignation au sens de l'article 2435 du code civil à défaut d'affectation d'une quote-part du prix à la banque.

Elles ajoutent que faute d'avoir renouvelé son privilège après le 31 décembre 2016, la banque Laydernier est désormais créancier chirographaire. Elles précisent que l'affectation spéciale invoquée par la banque est limitée au cas du paiement du prix dans le cadre d'un plan de cession, procédure pour laquelle la loi le prévoit expressément, que le paiement du prix invoqué par la banque s'entend, aux termes de l'article 2435 du code civil, du paiement dans les mains du créancier et que la publication du jugement d'adjudication s'il interdit toute nouvelle inscription ne mentionne pas le renouvellement des inscriptions précédentes.

La banque Laydernier soutient que sa créance est assortie du privilège de prêteur de deniers dès lors que sa créance a été fixée par décision de justice devenue définitive, que l'adjudication a été publiée et que le prix a été consigné sur le compte séquestre du Barreau de Thonon-les-Bains, que le privilège s'est reporté sur le prix d'adjudication et que son obligation de renouvellement prenait fin avec le paiement ou la consignation du prix en application de l'article 2435 du code civil. Elle ajoute que la consignation du prix a purgé de plein droit l'immeuble de tout privilège du chef du débiteur à compter de la publication de la vente, que l'affectation spéciale aux droits des créanciers inscrits d'une quote-part du prix résulte de la loi elle-même, qu'ainsi le dépôt à la Caisse des Dépôts vaut consignation et la dispense de renouveler l'inscription, et que l'article 2427 du code civil dispose que les créancier privilégiés ou hypothécaires ne peuvent prendre utilement inscription sur le précédent propriétaire à partir de la publication de la mutation opérée au profit d'un tiers.

Elle précise que l'hypothèse avancée par les appelants ne concerne que la vente par adjudication opérée par le commissaire à l'exécution du plan d'un bien immobilier non compris dans le plan et pour lequel aucune affectation du prix n'avait été prévue par le tribunal ou le cas de vente de l'ensemble des actifs d'exploitation d'une liquidation judiciaire. Elle insiste sur l'effet découlant de la publication du jugement d'adjudication qui dispense les créanciers de renouveler leurs inscriptions hypothécaires.

Aux termes de l'article 2435 du code civil : « L'inscription cesse de produire effet si elle n'a pas été renouvelée au plus tard à la date visée au premier alinéa de l'article 2434. Chaque renouvellement est requis jusqu'à une date déterminée. Cette date est fixée comme il est dit à l'article 2434 en distinguant suivant que l'échéance ou la dernière échéance, même si elle résulte d'une prorogation de délai, est ou non déterminée et qu'elle est ou non postérieure au jour du renouvellement. Le renouvellement est obligatoire, dans le cas où l'inscription a produit son effet légal, notamment en cas de réalisation du gage, jusqu'au paiement ou à la consignation du prix ».

Il est constant que la banque Laydernier est créancière de la société La Fourmi à hauteur de 731 097, 07 euros au titre du prêt consenti selon acte authentique du 29 juillet 2008, en vertu de la décision du juge de l'exécution des peines du tribunal de grande instance de Thonon les Bains le 22 mai 2015, confirmée par un arrêt de la cour d'appel de Chambéry en date du 29 octobre 2015, et que la société lui avait consenti, en garantie du paiement de ce prêt, un privilège de prêteur de deniers inscrit à la conservation des hypothèques de Thonon les Bains le 3 septembre 2008. L'immeuble acquis par la société La Fourmi à l'aide du prêt en litige a été adjugé aux époux [K] le 22 janvier 2016, par décision du juge de l'exécution du Tribunal de Grande Instance de Thonon-les-Bains, pour un prix de 286 000 euros, prix qui a été séquestré entre les mains du Bâtonnier du Barreau de Thonon-les-Bains afin qu'il soit procédé à sa distribution.

Le jugement d'adjudication a été régulièrement publié au service de la publicité foncière de [Localité 20] le 27 juin 2016 volume 2016 p n°3979 (pièce 17). L'inscription a ainsi produit son effet légal, en transformant le droit réel accessoire du créancier garanti sur l'immeuble en un droit préférentiel sur le prix.

Le dernier alinéa de l'article 2435 précité exige, dans cette hypothèse de réalisation de l'effet légal de la sûreté, une obligation de renouvellement de son inscription jusqu'au paiement du prix entre les mains du créancier, ou jusqu'à la consignation du prix entre les mains d'un tiers.

En l'espèce, les parties s'accordent pour considérer que la consignation du prix résultant de la vente par adjudication de l'immeuble garanti entre les mains du bâtonnier de [Localité 20] vaut consignation au sens de cet alinéa.

En application des articles L. 622-21 et R. 622-19 du code de commerce, le jugement d'ouverture de la procédure collective arrête toute procédure d'exécution, tant sur les meubles que sur les immeubles, de la part de tous les créanciers dont la créance n'est pas mentionnée au I de l'article L. 622-17 du code de commerce. Cette caducité ne concerne cependant pas les procédures de distribution de prix qui ont, antérieurement au jugement d'ouverture, produit leur effet attributif, car, dans cette hypothèse, les biens vendus étaient sortis du patrimoine du débiteur à la date de l'ouverture de la procédure collective.

En l'espèce, les conditions exigées par le dernier alinéa de l'article 2435 précité ont été réalisées antérieurement à l'ouverture de la procédure collective, de sorte que la banque n'était plus tenue de procéder au renouvellement de son inscription puisque sa sûreté avait produit son effet attributif. Dès lors, le jugement d'ouverture de la procédure collective n'a pu remettre en cause cet effet attributif antérieur, dont les effets perdurent.

Il y a donc lieu de constater le caractère privilégié de la créance de la banque Laydernier et de confirmer le jugement sur ce point.

Sur le caractère hypothécaire de la créance

La banque Laydernier relève appel incident du jugement et soutient que par acte authentique du 19 novembre 2008, la société La Fourmi a hypothéqué en premier rang, à son profit, différentes parcelles sises au [Localité 17] (73) cadastrées section AZ sous les numéros [Cadastre 10], [Cadastre 4], [Cadastre 5], [Cadastre 6], [Cadastre 7], [Cadastre 8] et [Cadastre 9], jusqu'au 21 décembre 2019. Elle précise que l'acte prévoyait que cette hypothèque garantissait le débiteur des comptes courant n°[XXXXXXXXXX03] et n°[XXXXXXXXXX03] ouverts dans les livres de la banque, mais également de toutes les sommes que le client pouvait redevable à l'égard de la banque à quelque titre que ce soit. Ainsi, selon elle, cette affectation hypothécaire ne concernait pas seulement les comptes courants mais également la créance qu'elle détenait sur la société à raison du prêt consenti le 29 juillet 2008 à hauteur de 731 097, 07 euros, qui était déterminable et même déterminée.

La SAS La Fourmi, la Selafa MJA, prise en la personne de Me [Y], ès qualités de mandataire judiciaire de la société La Fourmi et la SCP CBF, prise en la personne de Me [G], ès qualités de commissaire à l'exécution du plan de la société La Fourmi contestent la garantie de la créance par l'hypothèque conventionnelle consentie par acte authentique du 19 novembre 2009, en soutenant qu'elle était limitée à la garantie des soldes débiteurs des comptes courants, et que la formule générale prévoyant la garantie « en tant que de besoin ['] à la garantie de tout ce sont le Client pourra être redevable à la banque à quelque titre et pour quelque cause que ce soit » contrevient au principe de spécialité des sûretés édicté par l'article 2421 du code civil.

Aux termes de cet article, « l'hypothèque peut être consentie pour sûreté d'une ou plusieurs créances, présentes ou futures. Si elles sont futures, elles doivent être déterminables. / La cause en est déterminée dans l'acte ».

Il ressort de l'acte authentique du 19 novembre 2008 sur lequel s'appuie la banque que le non-paiement du prêt immobilier n'est pas visé par l'acte comme l'une des causes pouvant actionner l'hypothèque conventionnelle.

Dès lors, il y a lieu de débouter la banque Laydernier de son appel incident et de confirmer le jugement sur ce point.

Sur l'article 700 du code de procédure civile

La SAS La Fourmi, la Selafa MJA, prise en la personne de Me [Y], ès qualités de mandataire judiciaire de la société La Fourmi et la SCP CBF, prise en la personne de Me [G], ès qualités de commissaire à l'exécution du plan de la société La Fourmi contestent leur condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile au motif que la banque a partiellement succombé dans ses demandes, elles sollicitent l'infirmation du jugement sur ce point et la condamnation de la banque à leur payer 10 000 euros sur le même fondement.

La banque Laydernier sollicite la somme de 10 000 euros à ce titre.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a é la société La Fourmi et les organes de la procédure au paiement d'une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et y ajoutant, les condamne à une indemnité complémentaire de 2 000 euros pour frais hors dépens exposés en appel.

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement du tribunal de commerce de Paris en ce qu'il a prononcé l'admission de la créance de la banque Laydernier au passif de la procédure collective ouverte à l'encontre de la société La Fourmi,

Statuant à nouveau,

Fixe la créance de la banque Laydernier à la somme de 731 097,07 euros,

Dit que cette créance est privilégiée,

Confirme le jugement en ce qu'il a rejeté la demande de garantie additionnelle de la créance en litige par l'hypothèque conventionnelle prise sur différents bien immobiliers sis sur le territoire de la commune du [Localité 17] cadastrés section AZ sous les numéros [Cadastre 10], [Cadastre 4], [Cadastre 5], [Cadastre 6], [Cadastre 7], [Cadastre 8] et [Cadastre 9], jusqu'au 21 décembre 2019, et déboute, en conséquence, la banque Laydernier de son appel incident,

Rejette le surplus des demande de la société La Fourmi, de Me [Y], ès qualités de mandataire judiciaire de la société La Fourmi et de Me [G], ès qualités de commissaire à l'exécution du plan de la société La Fourmi,

Y ajoutant,

Condamne la société La Fourmi à payer à la banque Laydernier une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Dit que les dépens seront employés en frais privilégiés de procédure collective.

La greffière La présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 9
Numéro d'arrêt : 19/07913
Date de la décision : 29/10/2020

Références :

Cour d'appel de Paris I9, arrêt n°19/07913 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-10-29;19.07913 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award