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28/10/2020 | FRANCE | N°18/04795

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 3, 28 octobre 2020, 18/04795


Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 3



ARRET DU 28 OCTOBRE 2020



(n° , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/04795 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B5NFE



Décision déférée à la Cour : Jugement du 05 Mars 2018 -Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de PARIS - RG n° F 16/08700





APPELANTE



Madame [Z] [P]

[Adresse 2]

[Adre

sse 2]

Représentée par Me Bruno REGNIER, avocat au barreau de PARIS, toque : L0050





INTIMEE



SCS C&A FRANCE Agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en...

Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 3

ARRET DU 28 OCTOBRE 2020

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/04795 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B5NFE

Décision déférée à la Cour : Jugement du 05 Mars 2018 -Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de PARIS - RG n° F 16/08700

APPELANTE

Madame [Z] [P]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par Me Bruno REGNIER, avocat au barreau de PARIS, toque : L0050

INTIMEE

SCS C&A FRANCE Agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me Cécile FOURCADE, avocat au barreau de PARIS, toque : E1815

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 15 Septembre 2020, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Fabienne ROUGE, Présidente de chambre, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Madame Fabienne ROUGE, présidente de chambre

Monsieur FONTANAUD, président de la chambre

Madame Laurence SINQUIN, conseillère

Greffière, lors des débats : Mme Joséphine USNIAK

ARRET :

- Contradictoire

- par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Fabienne ROUGE, Présidente de chambre et par Nasra ZADA, Greffière présente, lors de la mise à disposition.

EXPOSE DU LITIGE

Madame [Z] [P] a été engagée par la société MARCA FRANCE selon un CDI à temps partiel de 95 heures mensuelles à compter du 11 septembre 2005, en qualité de conseillère de vente, catégorie C, sur le magasin de Boulazac, avec horaires contractualisés.

La Convention Collective applicable est celle des maisons à succursales de vente au détail d'habillement du 30 juin 1972.

Les parties ont conclu une convention de mise à disposition le 13 décembre 2018, depuis le 1 er janvier 2019 à temps plein après de la Fédération des Employés et Cadres Force Ouvrière.

Madame [P] a effectué de nombreux mandats syndicaux:

-déléguée syndicale FO à compter de février 2010, reconduit le 14 octobre 2011,

- membre élue titulaire du Comité d'établissement ' magasin' dont elle est trésorière à compter de novembre 2011

-membre élue suppléante au CCE à compter de novembre 2011,

-membre du CHSCT n°7 ;

-délégué syndicale centrale à compter de juin 2014

-déléguée du personnel au magasin de Boulazac à compter de novembre 2015.

S'estimant discriminée au titre des évaluations professionnelles systématiquement négatives, du refus de promotion professionnelle, d'une atteinte sur le plan de sa rémunération et d'une mise à l'écart depuis le second semestre 2015, elle saisissait le conseil de prud'hommes de Paris

Par jugement du 5 mars 2018, le Conseil de Prud'hommes de PARIS a débouté Madame [P] de l'ensemble de ses demandes,débouté la société C&A FRANCE de sa demande au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile et condamné Madame [P] aux dépens.

Madame [P] en a interjeté appel.

Par conclusions récapitulatives du 5 juin 2020, auxquelles il convient de se reporter en ce qui concerne ses moyens, Madame [P] demande à la cour d'infirmer le jugement et de condamner la SCS C&A France à lui verser les sommes de

- 30.000 € à titre de dommages et intérêts pour discrimination syndicale ;

- 98 € bruts à titre de rappel de salaire outre 9,80 € bruts de congés payés y afférents ;

- 2500 € au titre des frais de première instance et 3.000 € pour les frais à hauteur d'appel au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile et aux dépens y compris ceux de première instance

Par conclusions récapitulatives du 15 juin 2020, auxquelles il convient de se reporter en ce qui concerne ses moyens, la société C&A demande à la cour de confirmer le jugement, de dire qu'elle était fondée à retenir la somme de 98 € brut au mois de février 2016 et de débouter Madame [P] de l'ensemble de ses demandes et de la condamner à lui verser la somme de 2.500 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile et aux dépens

MOTIFS

Définie à l'article L.2141-5 du code du travail, la discrimination syndicale est le fait pour l'employeur de prendre en considération l'appartenance à un syndicat ou l'exercice d'une activité syndicale pour arrêter ses décisions en matière notamment de recrutement, de conduite et de répartition du travail, de formation professionnelle, d'avancement, de rémunération et d'octroi d'avantages sociaux, de mesure de discipline et de rupture du contrat de travail.

Conformément à l'article L.1134-1 de ce code, il appartient dans un premier temps au salarié qui se prétend victime d'une discrimination de soumettre au juge les éléments de fait susceptibles de caractériser une atteinte au principe d'égalité de traitement puis, dans un second temps, à l'employeur d'établir que la disparité de situation constatée est justifiée par des critères objectifs, étrangers à toute discrimination fondée sur l'appartenance à un syndicat.

Madame [P] soutient qu'elle fait systématiquement l'objet d'évaluation négative, qu'elle a stagné pendant près de 10 ans à la catégorie D, qu'elle n'a jamais été promue, que la société ne lui a jamais proposé de faire des heures supplémentaires, qu'elle a été dépossédée de ses taches en étant notamment formée tardivement par rapport à ses collègues au nouveau logitiel de caisse et isolée .

Au soutien de sa demande en reconnaissance de discrimination syndicale Madame [P] mentionne que la cour administrative d'appel a constaté l'existence d'un lien entre la demande d'autorisation de licenciement faite en 2013 et ses fonctions représentatives.

Elle soutient que l'entrave faite à l'exercice de ses activités syndicales caractérise également la discrimination syndicale dont elle est victime .

La société C&A soutient qu'aucune autorité de la chose jugée ne s'attache à cette décision puisque l'objet et la cause de la demande sont différents .

L'autorité de la chose jugée de la décision de la juridiction administrative s'attache tant au dispositif qu'aux motifs qui en sont le soutien nécessaire. En application de l'article 1355 du code civil la chose demandée doit être la même la demande doit être fondée sur la même cause, entre les mêmes parties, formées par elles et contre elles en la même qualité.

Si,en l'espèce la demande n'est pas la même, elle est bien fondée sur l'exercice de l' activité syndicale de la salariée étant observé que la cour administrative d'appel a relevé le lien entre les activités syndicales de la salariée et la demande de licenciement.

L'arrêt de la cour administrative d'appel de Paris a indiqué que ' .Depuis l'année 2011 Madame [P] a rencontré d'importantes difficultés dans l'exercice de ses mandats, qu'elle s'est vue notament refuser à plusieurs reprises, la prise en charge de frais liés à celui-ci ainsi que l'accès à des données personnelles et qu'elle a fait l'objet d'insultes et de dénigrements réguliers de son action auprès des salariés de l'entreprise.'

Madame [P] fonde sa demande de reconnaissance de discrimination syndicale sur les mêmes éléments que ceux relevés par la cour administrative d'appel la non prise en charge de ses frais liés à l'exercice de ses mandats et les insultes et dénigrements de son action qui ont perdurés au dela de la période examinée par la Cour administrative d'appel.

La similitude des motifs fondant la demande avec les constatations qui ont conduit la cour administrative d'appel a annulé le jugement du tribunal administratif qui avait autorisé le licenciement de Madame [P] laisse supposer l'existence une discrimination syndicale qui en 2013 avait fondée une tentative de licenciement et qui porte maintenant sur ses évaluations professionnelle et sur sa rémunération .

Il appartient à la société C&A de démontrer que ces difficultés résultent de critères objectifs, étrangers à toute discrimination fondée sur l'appartenance à un syndicat.

La société C&A verse aux débats les échanges de mails entre la responsable juridique et affaires sociales et Madame [P] qui montrent des difficultés relationnelles et de compréhension ainsi que les notes de frais et leur prise en charge mais elle ne s'explique cependant pas sur le courrier de l'inspection du travail en date du 24 juillet 2017 qui rappelait les écarts constatés concernant les frais de 2016 et en demandait la régularisation, ni sur le procès verbal dresséc contre elle concernant le remboursement des frais de déplacement. Element qui au delà de l'entrave montre que Madame [P] subit une discrimination .

Le mépris auquel était confrontée Madame [P] est attesté par Madame [O], Madame [L] qui mentionne qu'avec la nouvelle directrice des ressources humaines aucun dialogue social n'est possible en raison du mépris affichée par celle-ci à l'égard des représentants du personnel et en particulier à l'égard de Madame [P] .

Madame [T] qui occupait les fonctions de manager a attesté que sa hiérarchie préparait les évaluations de Madame [P] à sa place et que l'évaluation qu'elle avait faite en 2015 avait été modifiée au détriment de la salariée. Elle précisait qu' il lui était reproché d'avoir considérée que la salariée était ponctuelle alors que la hiérarchie estimait que puisque celle-ci était souvent en délégation, elle ne pouvait être ponctuelle . La société indique seulement que les évaluations faites correspondaient à la qualité de son travail alors que Madame [T] souligne que les évaluations ne correspondaient pas à la qualité de son travail qui était bonne .

Il résulte du procès verbal de la réunion du 29 septembre 2016que le passage d'une catégorie à l'autre se fait selon les modalités suivantes : pour le passage de B à C le salarié doit avoir un an d'ancienneté , de C à D le salarié doit avoir 3 ans d'ancienneté dans la catégore C et pour le passage de la catégorie de D à E le salarié doit avoir 2 ans d'ancienneté dans la catégorie D. Le manager précisant dans sa réponse aux délégués du personnel du mois de novembre 2016 qu'il s'agissait des durées minimales n'étant pas exclusives des autres critères d'évolution. Madame [P] embauchée en 2005 en catégorie C a été classifiée à la catégorie D le 1er juillet 2010 et en catégorie E en mai 2016 .

La société n'explique pas les raisons objectives qui auraient justifié ces durées longues entre les changements de catégories.

Au vu du tableau des augmentations de salaire Madame [P] n'a fait l'objet d'aucune augmentation en 2015 et il résulte des écritures de la société C&A que le taux horaire de Madame [P] est de 10,39€ alors que celui des salariées conseillère de vente ayant la même ancienneté qu elle est de 10,61€ sans expliquer cette différence .

Si les autres griefs de discriminations soulevés sont utilement contestés par la société , il est démontré une discrimination syndicale .Il sera alloué à Madame [P] la somme de 5000€ en réparation de ce préjudice

Sur la demande de rappel de salaire

Madame [P] sollicite la paiement de la somme de 98€ correspondant à la retenue faite sur son bulletin de salaire de février 2016correspondant à une absence de 9h50 pour participation à une réunion du comité d'établissement le 26janvier 2016

La société C&A indique que cette réunion ne s'est pas tenue en raison de l'absence de la présidente du comité d'établissement qui était en arrêt de travail, ce dont Madame [P] a été informée la veille lors de la préparation de cette réunion .

Il est établi par le procès verbal de réunion du 26 janvier 2016 que le 25 janvier à 14h30 Madame [I] indiquait que la réunion du lendemain était annulée, la secrétaire et la secrétaire adjointe ont demandé à cette dernière de présider la réunion, puisqu'elle est habilitée à le faire . Celle-ci a quitté la salle, sans répondre .En l'absence de confirmation écrite de cette annulation Madame [P] comme d'autres membres se sont présentés le lendemain au siège . Sa présence est établie par l'émargement de la feuille de présence comme celle de nombreux autres membres.

Il convient comme l'a mentionné le conseil de prud'hommes de constater que l'annulation de la réunion a été verbalement indiquée aux membres à 14h30 la veille, le motif de l'annulation était légitime, et aucun élément ne permettait de supposer que cette réunion se tiendrait le lendemain , Madame [I] par son départ ayant clairement signifié qu'elle ne tiendrait pas la réunion du comité d'établissement .

Compte tenu de l'heure à laquelle l'information était donnée, de son absence d'ambiguité, Madame [P] pouvait et devait rejoindre son lieu de travail et s'y présenter le lendemain.

Madame [P] sera déboutée de sa demande et le jugement sera confirmé sur ce point .

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement sauf en ce qu'il a débouté Madame [P] de sa demande de rappel de salaire,

Statuant à nouveau,

Condamne la société C&A à payer à Madame [P] la somme de 5000€ à titre de dommages et intérêts pour discrimination syndicale .

Vu l'article 700 du code de procédure civile

CONDAMNE la société C&A à payer à Madame [P] en cause d'appel la somme de 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

DEBOUTE les parties du surplus des demandes ,

LAISSE les dépens à la charge de la société C&A .

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 3
Numéro d'arrêt : 18/04795
Date de la décision : 28/10/2020

Références :

Cour d'appel de Paris K3, arrêt n°18/04795 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-10-28;18.04795 ?
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