La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

27/10/2020 | FRANCE | N°19/06660

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 1, 27 octobre 2020, 19/06660


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 1 - Chambre 1



ARRET DU 27 OCTOBRE 2020



(n° , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/06660 - N° Portalis 35L7-V-B7D-B7TG5



Décision déférée à la Cour : Arrêt du 29 Janvier 2013 rendu par le Pôle 1 chambre 1 de la Cour d'Appel de PARIS - RG n° 11/19398





DEMANDEUR AU RECOURS EN RÉVISION :



LE MINISTÈRE PUBLIC pris en la personne de MADA

ME LE PROCUREUR GENERAL - SERVICE CIVIL

[Adresse 2]

[Localité 4]



représenté à l'audience par Mme Anne BOUCHET, substitut général





DÉFENDERESSE AU RECOURS EN REVISION :



Madam...

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 1

ARRET DU 27 OCTOBRE 2020

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/06660 - N° Portalis 35L7-V-B7D-B7TG5

Décision déférée à la Cour : Arrêt du 29 Janvier 2013 rendu par le Pôle 1 chambre 1 de la Cour d'Appel de PARIS - RG n° 11/19398

DEMANDEUR AU RECOURS EN RÉVISION :

LE MINISTÈRE PUBLIC pris en la personne de MADAME LE PROCUREUR GENERAL - SERVICE CIVIL

[Adresse 2]

[Localité 4]

représenté à l'audience par Mme Anne BOUCHET, substitut général

DÉFENDERESSE AU RECOURS EN REVISION :

Madame [N] [V] [X] née le [Date naissance 3] 1972 à Antahla (Madagascar)

chez Monsieur [W] [D]

[Adresse 5]

[Adresse 1]

représentée par Me Luca DE MARIA de la SELARL PELLERIN - DE MARIA - GUERRE, avocat postulant du barreau de PARIS, toque : L0018

assistée de Me Frédéric GEORGES, avocat plaidant du barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 29 septembre 2020, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme Anne BEAUVOIS, présidente de chambre

M. François MELIN, conseiller

Mme Marie-Catherine GAFFINEL, conseillère

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Mme Mélanie PATE

ARRET :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme Anne BEAUVOIS, présidente de chambre et par Mme Mélanie PATE, greffière présente lors du prononcé.

Par arrêt en date du 29 janvier 2013, la cour d'appel de Paris a infirmé le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Paris du 22 septembre 2011, statuant à nouveau, a dit que Mme [N] [V] [X] née le [Date naissance 3] 1972 à Antalaha (Madagascar) est française, ordonné la mention prévue à l'article 28 du code civil, dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile et laissé les dépens à la charge du Trésor public. Cet arrêt a été signifié le 7 juin 2013 à Mme [X].

Le procureur général près la cour d'appel de Paris a fait citer Mme [X] le 19 mars 2019 devant cette cour, aux fins de révision de l'arrêt rendu le 29 janvier 2013. Il a saisi la cour d'appel le 4 avril 2019.

Par dernières conclusions notifiées le 21 février 2020, le ministère public demande à la cour de constater que le récépissé prévu par l'article 1043 du code de procédure civile a été délivré, de rétracter l'arrêt rendu le 29 janvier 2013 et statuant à nouveau, de constater l'extranéité de l'intéressée et d'ordonner la mention de l'article 28 du code civil.

Par dernières conclusions notifiées le 5 février 2020, Mme [N] [V] [X] demande à la cour de :

dire que le recours en révision est irrecevable pour forclusion ;

dire que la demande du procureur général est irrecevable en raison d'absence de fraude ;

subsidiairement sur le fond, rejeter la demande du procureur général comme étant infondée, aucune fraude n'ayant été commise par Madame [X] et aucun élément probant n'étant produit aux débats permettant de remettre en cause la nationalité française de celle-ci ;

confirmer en conséquence l'arrêt rendu le 29 janvier 2013 par la cour d'appel de Paris qui a dit que [N] [V] [X], née le [Date naissance 3] 1972 à Antalaha (Madagascar) est française et ordonné la mention prévue à l'article 28 du code civil ;

condamner l'Agent judiciaire de l'Etat à lui payer la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens dont distraction.

MOTIFS :

Sur la recevabilité du recours en révision

Mme [X] invoque deux moyens d'irrecevabilité du recours tirés de sa tardiveté et de l'absence de fraude.

Sur le moyen tiré de la tardiveté du recours

Mme [X] soutient que le ministère public est irrecevable pour n'avoir pas formé son recours en révision dans le délai de deux mois de la connaissance de la cause de révision en application de l'article 596 du code de procédure civile, les nouvelles vérifications invoquées par le ministère public qui auraient révélé la fraude étant intervenues le 18 juin 2018 et ayant fait l'objet d'un compte-rendu par le consulat général de France à Tananarive, à la demande du procureur général lui-même.

Il résulte de l'article 596 du code de procédure civile que le délai du recours en révision est de deux mois et qu'il court à compter du jour où la partie a eu connaissance de la cause de révision qu'elle invoque.  C'est au demandeur en révision qu'il incombe d'apporter la preuve de la date à laquelle il a eu connaissance du fait qu'il invoque.

Le procureur général près la cour d'appel de Paris fonde son recours en révision sur la découverte de la fraude qui résulterait des vérifications effectuées in situ par le consulat général de France à Tananarive (Madagascar) dans les registres d'état civil le 18 juin 2018. Ces vérifications ont fait l'objet d'un compte-rendu daté du 16 novembre 2018 et d'une transmission le 6 février 2019 par le bureau de la nationalité de la direction des affaires civiles et du Sceau du ministère de la Justice au procureur de la République près le tribunal de grande instance de Paris.

Ainsi, le procureur général près la cour d'appel de Paris, dont il n'est pas établi qu'il ait été à l'initiative de ces vérifications in situ, et seul à pouvoir former un recours en révision contre l'arrêt rendu le 29 janvier 2013 par la cour d'appel de Paris, n'a pu avoir connaissance de ces observations avant le 6 février 2019, date de la transmission par le ministère de la Justice au procureur de la République près le tribunal de grande instance de Paris.

Or, il a fait citer Mme [X] aux fins de révision de l'arrêt rendu le 29 janvier 2013 par acte d'huissier de justice en date du 19 mars 2019 et saisi la cour le 4 avril 2019.

Le recours en révision a donc bien été introduit dans les deux mois de la découverte par le procureur général, partie à l'instance, de la connaissance de la cause de révision qu'il invoque.

Sur la fraude

Mme [X] soutient que le recours en révision est irrecevable dès lors qu'elle n'a pas commis de fraude. Elle fait valoir que l'agent du consulat général de France à Tananarive avait lui-même constaté au cours d'une enquête en 2006 qu'il ne pouvait vérifier l'acte de reconnaissance n°1484 au motif que le 'registre était introuvable', que c'est donc l'agent consulaire qui a procédé à cette affirmation et non elle-même, qu'elle a sollicité la reconstitution de l'acte de reconnaissance établissant sa filiation paternelle par jugement du tribunal de première instance d'Antalaha (Madagascar) du 17 décembre 2008 pour le motif mis en évidence par l'agent consulaire lui-même et non par le fait d'une fraude qu'elle aurait commise.

Le ministère public réplique que la fraude de Mme [X] résulte de ce qu'elle a fait reconstituer son acte de reconnaissance par jugement au motif que 'le registre dans lequel a été transcrit l'acte est partiellement détruit'et que selon la Mairie, 'l'acte est introuvable' alors que les vérifications effectuées in situ ont démontré que l'acte de reconnaissance était un faux puisqu'il ne figurait pas dans le duplicata du registre de l'état civil censé contenir les mêmes actes que le registre d'origine. Il estime donc que Mme [X] a obtenu par fraude en trompant la religion du tribunal la reconstitution de son acte faux, lequel n'a jamais existé et n'a pas été détruit, que la fraude est constituée également par la production devant cette cour de l'acte n°91 de reconnaissance établi sur transcription du jugement lui-même obtenu par fraude.

En application de l'article 595 du code de procédure civile, « Le recours en révision n'est ouvert que pour l'une des causes suivantes :

1. S'il se révèle, après le jugement, que la décision a été surprise par la fraude de la partie au profit de laquelle elle a été rendue ; [...]

Dans tous ces cas, le recours n'est recevable que si son auteur n'a pu, sans faute de sa part, faire valoir la cause qu'il invoque avant que la décision ne soit passée en force de chose jugée. »

Il a été constaté par des vérifications consulaires menées in situ dès 2006 et destinées à vérifier l'authenticité de l'acte de naissance et de l'acte de reconnaissance de l'intéressée (pièce n°4 du ministère public), sur la demande du greffier en chef du service de la nationalité des Français nés et établis hors de France et non à l'initiative de l'intéressée elle-même, que l'acte de naissance de celle-ci était authentique et que le registre contenant son acte de reconnaissance n°1484 était introuvable.

Dès lors, comme le soutient à juste titre Mme [X], alors que l'agent consulaire avait lui-même indiqué dans le compte-rendu que le registre était introuvable, la circonstance qu'elle ait sollicité la reconstitution de son acte de reconnaissance en produisant un certificat de recherches infructueuses du 11 octobre 2008 établi par la mairie de la commune urbaine d'Antalaha attestant que « l'acte de reconnaissance était introuvable dans leurs archives dus aux diverses intempéries qu'a subi la ville » et obtenu cet acte par jugement du 17 décembre 2008, puis fait dresser un acte de reconnaissance en vertu de ce jugement, ne manifeste de sa part ni l'intention de tromper ni une dissimulation de nature à caractériser une fraude qui lui serait imputable.

Au surplus, s'agissant l'acte de mariage n°67 de l'année 1997 de Mme [X], la fraude alléguée à l'encontre de l'intéressée qui consisterait à avoir produit un tel acte mentionnant sa filiation paternelle alors qu'en réalité, cette filiation ne figurerait pas dans ledit acte, à la supposer même établie, n'a pas été décisive. En effet, les actes d'état civil ne faisant que la preuve des faits constatés par l'officier d'état civil, l'acte de mariage de l'intéressée n'est pas de nature à apporter la preuve de l'établissement légal de sa filiation paternelle du temps de sa minorité. L'arrêt rendu par la cour d'appel le 29 janvier 2013 ne fait pas même mention de cet acte de mariage.

Enfin, le bureau de la nationalité de la direction des affaires civiles et du Sceau du ministère de la Justice ou le ministère public disposait de toutes les informations nécessaires dès 2008 pour se convaincre de la fraude aujourd'hui alléguée à l'encontre de Mme [X], en vérifiant notamment par la consultation du double du registre détenu au greffe du tribunal, la présence de l'acte de reconnaissance n° 1484 dont il est prétendu qu'il n'existe pas, et en mettant en évidence les nombreuses irrégularités alléguées affectant la tenue des registres du centre d'Etat civil d'Antalaha, lesquelles ne sont pas néanmoins le fait de Mme [X]. L'auteur du recours en révision pouvait en conséquence faire valoir la cause qu'il invoque dans le présent recours avant même que l'arrêt de la cour d'appel ne soit rendu le 29 janvier 2013.

Le recours en révision doit en conséquence être déclaré irrecevable.

Sur les dépens et l'indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile

Les dépens seront laissés à la charge du Trésor public. L'équité commande de faire droit à la demande de Mme [X] au titre de l'article 700 du code de procédure civile et de condamner l'Agent judiciaire de l'Etat à lui payer une indemnité de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

Déclare irrecevable le recours en révision du ministère public à l'encontre de l'arrêt rendu le 29 janvier 2013 par la cour d'appel de Paris qui a dit que Mme [N] [V] [X], née le [Date naissance 3] 1972 à Antalaha (Madagascar), est française.

Condamne l'Agent judiciaire de l'Etat à payer à Mme [N] [V] [X] une indemnité de 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Laisse les dépens à la charge du Trésor public.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 1
Numéro d'arrêt : 19/06660
Date de la décision : 27/10/2020
Sens de l'arrêt : Irrecevabilité

Références :

Cour d'appel de Paris A1, arrêt n°19/06660 : Déclare la demande ou le recours irrecevable


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-10-27;19.06660 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award