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07/10/2020 | FRANCE | N°20/02986

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 3, 07 octobre 2020, 20/02986


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE


délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS











COUR D'APPEL DE PARIS


Pôle 1 - Chambre 3





ARRET DU 07 OCTOBRE 2020





(n° 295 , 5 pages)





Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/02986 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CBOX7





Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 31 Janvier 2020 -Président du TJ de PARIS - RG n° 19/60634








APPELANTE
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SCI DE LA RUE DU POTEAU agissant poursuites et diligences de son Gérant domicilié en cette qualité audit siège [...]


[...]


[...]





Représentée par Me Marie-Catherine VIGNES de la SCP SCP GALLAND VIGNES, avocat...

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 3

ARRET DU 07 OCTOBRE 2020

(n° 295 , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/02986 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CBOX7

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 31 Janvier 2020 -Président du TJ de PARIS - RG n° 19/60634

APPELANTE

SCI DE LA RUE DU POTEAU agissant poursuites et diligences de son Gérant domicilié en cette qualité audit siège [...]

[...]

[...]

Représentée par Me Marie-Catherine VIGNES de la SCP SCP GALLAND VIGNES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0010

Assistée par Me Lauriane MARRACHE substituant Me Yann COLIN, du cabinet FRANKLIN,

INTIMEE

S.A.R.L. THAGASTE prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège, [...]

[...]

Représentée et assistée par Me Kathleen TAIEB, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 08 Septembre 2020, en audience publique, rapport ayant été fait par Edmée BONGRAND, Conseillère conformément aux articles 804, 805 et 905 du CPC, les avocats ne s'y étant pas opposés.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Patrick BIROLLEAU, Premier Président de chambre

Carole CHEGARAY, Conseillère

Edmée BONGRAND, Conseillère

Greffier, lors des débats : Lauranne VOLPI

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Patrick BIROLLEAU, Premier Président de chambre et par Marie GOIN, Greffier présent lors de la mise à disposition.

Par acte sous seing privé du 23 novembre 2004, la SCI de la rue du Poteau a consenti à la société Thagaste un bail commercial portant sur un local à usage de restauration et de café, outre un logement d'habitation, situé [...] .

Par exploit d'huissier du 22 mars 2013, la SCI de la rue du Poteau a signifié à la société Thagaste un congé avec refus de renouvellement sans offre de paiement d'une indemnité d'éviction pour le 30 septembre 2013.

Contestant ce congé sans offre de paiement d'une indemnité d'éviction, la société Thagaste a, par acte du 21 mars 2014, fait assigner la bailleresse afin de voir déclarer nul le congé délivré.

Par jugement en date du 31 août 2015, le tribunal de grande instance de Paris a notamment débouté la société Thagaste de sa demande en nullité du congé, condamné la SCI de la rue du Poteau au paiement d'une indemnité d'éviction, la société Thagaste au paiement d'une indemnité provisionnelle d'occupation , dit que la locataire avait droit au maintien dans les lieux jusqu'au paiement de l'indemnité d'éviction et a ordonné une expertise aux fins d'évaluation du montant de l'indemnité d'éviction et celui de l'indemnité d'occupation.

L'expert a déposé son rapport le 17 juillet 2017.

Par jugement en date du 18 juin 2019, le Tribunal de Grande instance a fixé à la somme de 191.000 euros le montant de l'indemnité d'éviction due par la SCI de la rue du Poteau, à la somme annuelle de 31.149 euros l'indemnité d'occupation due par la société Thagaste outre les charges et taxes prévues au bail, dit que la compensation entre le montant de l'indemnité d'éviction et de l'indemnité d'occupation s'opérera de plein droit.

Par déclaration en date du 13 août 2019, appel a été interjeté de cette décision par la SCI de la rue du Poteau, qui conteste les montants retenus par le tribunal de grande instance.

La procédure est actuellement pendante devant la cour d'appel de Paris (RG 19/16703).

Par acte d'huissier du 25 octobre 2019, la société SCI de la rue du Poteau a assigné la société SARL Thagaste devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Paris aux fins notamment de voir prononcer la déchéance de la société Thagaste de son droit à indemnité d'éviction et de son droit au maintien dans les lieux et de voir ordonner son expulsion.

Par ordonnance contradictoire rendue le 31 janvier 2020, le juge des référés du tribunal judiciaire de Paris a :- dit n'y avoir lieu à référé ;

- condamné la société SCI de la rue du Poteau à payer à la société Thagaste la somme de 2.000 suros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné la société SCI de la rue du Poteau aux entiers dépens ;

- rappelé que la présente ordonnance bénéficie de plein droit de l'exécution provisoire.

Par déclaration du 7 février 2020, la SCI de la rue du Poteau a interjeté appel de l'ensemble des chefs expressément énoncés de cette ordonnance .

Aux termes de ses conclusions communiquées par voie électronique le 3 juin 2020, l'appelante demande à la cour de :

- infirmer l'ordonnance rendue le 31 janvier 2020 par le juge des référés du tribunal judiciaire de Paris en ce qu'elle a jugé qu'aucun trouble manifestement illicite n'était démontré par la SCI de la Rue du Poteau ;

- infirmer l'ordonnance rendue le 31 janvier 2020 par le juge des référés du tribunal judiciaire en ce qu'il a rejeté les demandes de la SCI de la rue du Poteau comme ne relevant pas de ses attributions ;

Statuant à nouveau,

- dire et juger que la SCI de la rue du Poteau a subi un trouble manifestement illicite résultant du défaut de paiement grave et caractérisé de l'indemnité d'occupation due par la société Thagaste aux termes du jugement du tribunal de grande instance de Paris du 31 août 2015 ;

En conséquence,

- ordonner la déchéance de la société Thagaste de son droit à indemnité d'éviction ;

- ordonner la déchéance de la société Thagaste de son droit au maintien dans les lieux aux clauses et conditions du bail expiré ;

- ordonner l'expulsion de la société Thagaste et de tout occupant de son chef du local sis [...] , au besoin avec le concours de la force publique et l'assistance d'un serrurier, à compter du prononcé de l'ordonnance à intervenir ;

- dire et juger que les meubles et objets mobiliers se trouvant sur place donneront lieu à l'application des dispositions des articles L. 433-1 et R. 433-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution ;

en toute hypothèse,

- condamner la société Thagaste au paiement de la somme de 10.000 suros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la société Thagaste à régler les entiers dépens de l'instance.

Elle fait valoir :

- que la carence de la locataire qui n'a pas réglé la moindre mensualité aux échéances prévues depuis septembre 2018 constitue un trouble manifestement illicite et porte atteinte au droit de propriété du bailleur;

- que sa demande ne nécessite aucune analyse détaillée des obligations réciproques des parties comme l'a retenu le premier juge puisque ce trouble manifestement illicite résulte de la carence de la locataire à ses obligations de paiement du loyer et des charges alors même qu'elle n'en conteste pas le montant ;

- qu'à supposer même retenu le critère du trouble manifestement illicite , sa demande n'est pas sérieusement contestable puisque la dette n'est pas contestée par la locataire;

-que le défaut de paiement de l'indemnité d'occupation , par son ampleur et son caractère répétitif constitue un motif grave et légitime justifiant sa déchéance de son droit au paiement de l'indemnité d'éviction;

- que le jugement du tribunal du 31 août 2015 ne peut faire échec à cette sanction, puisque la déchéance du droit à indemnité d'éviction est encourue même en présence d'une décision irrévocable ayant reconnu le droit du locataire à indemnité d'éviction;

-qu'elle est donc fondée à demander à la cour d'appel d'ordonner l'expulsion de la société Thagaste.

La société Thagaste, par conclusions transmises par voie électronique le 30 juin 2020, demande à la cour de :

- confirmer en toutes ses dispositions l'ordonnance de référé rendue en date du 31 janvier 2020 par le juge des référés du tribunal judiciaire de Paris ;

en conséquence et à titre principal :

- confirmer l'absence de trouble manifestement illicite ou de dommage imminent de nature à fonder l'action devant le juge des référés ;

- confirmer le rejet des demandes de la SCI de la rue du Poteau en raison du fait que celles-ci ne relèvent pas des attributions du juge des référés ;

A titre subsidiaire et statuant à nouveau :

- débouter la SCI de la rue du Poteau de sa demande de déchéance de la société Thagaste de son droit à l'indemnité d'éviction ;

- débouter la SCI de la rue du Poteau de sa demande de déchéance de la société Thagaste de son droit au maintien dans les lieux aux clauses et conditions du bail expiré ;

- débouter la SCI de la rue du Poteau de sa demande d'expulsion de la société Thagaste et de tout occupant de son chef ;

En tout état de cause,

- condamner la SCI de la rue du Poteau à payer à la société Thagaste, la somme 10.000 suros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Elle fait valoir :

-qu'en matière d'indemnité d'éviction et par application des dispositions de l'article L 145-28 du code de commerce ,aucun locataire pouvant prétendre à une indemnité d'éviction ne peut être obligé de quitter les lieux avant de l'avoir reçue et qu'il a droit au maintien dans les lieux aux conditions du bail expiré jusqu'au paiement de cette indemnité;

- qu'aux termes de son assignation en référé, la bailleresse se fonde sur l'alinéa 1er de l'article 809 du code de procédure civile, dans sa version antérieure à la réforme du 11 décembre 2019 et sollicite sur ce fondement la déchéance du droit à l'indemnité d'éviction et le droit du locataire au maintien dans les lieux;

-que l'appelante vise donc le trouble manifestement illicite qui peut se définir comme toute perturbation résultant d'un fait matériel ou juridique qui directement ou indirectement constitue une violation évidente de la règle de droit;

-que l'octroi de l'indemnité d'éviction a été tranchée par jugement du 31 août 2015 et qu'en conséquence la bailleresse qui ne souhaite payer cette indemnité , ne peut à nouveau soulever cette question devant le juge des référés;

-qu'au surplus le tribunal ayant dit que le versement de l'indemnité d'occupation et celui de l'indemnité d'éviction s'opérerait de plein droit par compensation ,il est impossible de déduire de l'absence de versement de l'indemnité d'occupation un trouble manifestement illicite

-que la bailleresse fait preuve de mauvaise foi en affirmant ne pas être payée de ses loyers depuis septembre 2018 puisque la dette locative s'élève maintenant à la somme de 29732,19 euros alors qu'elle s'élevait à la somme de 48067,89 euros en première instance, la bailleresse ne justifiant pas même le montant de la somme qu'elle réclame

-que l'appel formé contre le jugement du tribunal du 31 août 2019 étant toujours en cours d'appel, condamner la locataire pour le non paiement de l'indemnité d'occupation provisionnelle reviendrait à violer les dispositions de l'article L 145-28 du code de commerce;

-qu'enfin la dette locative est soldée

-que l'ordonnance critiquée doit donc être confirmée

que subsidiairement si la cour retenait l'existence d'un trouble manifestement illicite justifiant sa compétence, elle ne pourra en statuant à nouveau que maintenir le droit à indemnité d'éviction de la locataire sur le fondement des dispositions de l'article L145-28 du code de commerce dès lors que la juridiction d'appel n'a pas encore tranché la question du montant de l'indemnité d'éviction mise à la charge de bailleresse et qu'aucune faute ne peut lui être imputée , le défaut de paiement résultant de son impossibilité d'exploiter le fonds consécutivement aux désordres causés par l'intrusion d'un camion dans le fond.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Aux termes de l'article 835 du code de procédure civile (ancien article 809 du même code) le président du tribunal judiciaire ou le juge du contentieux de la protection dans les limites de sa compétence peuvent toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

Dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, ils peuvent accorder une provision au créancier ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.

La société bailleresse se prévaut du trouble manifestement illicite résultant du défaut de paiement par la locataire de l'indemnisé d'occupation mise à sa charge par jugement du tribunal susvisé.

Or, d'une part , le tribunal a dit que les sommes dues respectivement par la bailleresse au titre de l'indemnité d'éviction au paiement de laquelle elle a été condamnée et par la locataire au titre de l'indemnité d'occupation se compenseraient de plein droit , d'autre part il est constant que l'indemnité d'éviction supérieure au montant de l'indemnité d'occupation n'a pas été réglée par la bailleresse, enfin le défaut de paiement des loyers depuis septembre 2018 allégué par la bailleresse à hauteur de 91522,65 euros ne ressort pas à l'évidence des pièces qu'elle verse aux débats, la locataire rapportant la preuve du paiement de la somme de 20311,83 euros, qui ne figure pas cependant pas dans le décompte que la bailleresse s'est établi à elle même .

Ni le trouble manifestement illicite allégué ni le caractère non sérieusement contestable de l'obligation de la locataire ne sont caractérisés .C'est donc à juste titre que le premier juge a dit n'y avoir lieu à référé.

L'ordonnance entreprise sera confirmée en ce qu'elle a dit n'y avoir lieu à référé.

Le sort des dépens et l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure de première instance ont été exactement réglés par le premier juge.

Il convient de confirmer l'ordonnance entreprise de ces chefs.

La SCI de la rue du Poteau succombant en son appel en supportera les dépens ainsi que la charge d'une indemnité, au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit de la société Thagaste qu'il est équitable de fixer à la somme de 4000 euros.

PAR CES MOTIFS

Confirme l'ordonnance entreprise ;

et y ajoutant,

Condamne la SCI rue du Poteau aux dépens de l'appel ;

Condamne la SCI rue du Poteau à payer à la société Thagaste la somme de 4000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 3
Numéro d'arrêt : 20/02986
Date de la décision : 07/10/2020

Références :

Cour d'appel de Paris A3, arrêt n°20/02986 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-10-07;20.02986 ?
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