La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

30/09/2020 | FRANCE | N°18/07337

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 4, 30 septembre 2020, 18/07337


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS





COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 6 - Chambre 4



ARRET DU 30 SEPTEMBRE 2020



(n° , 8 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/07337 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B524W



Décision déférée à la Cour : Jugement du 16 Avril 2018 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - RG n° F17/04746



APPELANTS



Madame [U] [B] veuve [E] en qualité d'ayant droit de [V] [E]

[Adresse 3]

[Lo

calité 2]

née le [Date naissance 6] 1957 à [Localité 15]

Représentée par Me Delphine ZOUGHEBI de l'AARPI MHISSEN & ZOUGHEBI ASSOCIEES, avocat au barreau de PARIS, toque : G0445



...

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 4

ARRET DU 30 SEPTEMBRE 2020

(n° , 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/07337 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B524W

Décision déférée à la Cour : Jugement du 16 Avril 2018 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - RG n° F17/04746

APPELANTS

Madame [U] [B] veuve [E] en qualité d'ayant droit de [V] [E]

[Adresse 3]

[Localité 2]

née le [Date naissance 6] 1957 à [Localité 15]

Représentée par Me Delphine ZOUGHEBI de l'AARPI MHISSEN & ZOUGHEBI ASSOCIEES, avocat au barreau de PARIS, toque : G0445

Monsieur [W] [E] en qualité d'ayant droit de [V] [E]

[Adresse 5]

[Localité 14]

né le [Date naissance 8] 1978 à [Localité 16]

Représenté par Me Delphine ZOUGHEBI de l'AARPI MHISSEN & ZOUGHEBI ASSOCIEES, avocat au barreau de PARIS, toque : G0445

Monsieur [X] [E] en qualité d'ayant droit de [V] [E]

[Adresse 4]

[Localité 13]

né le [Date naissance 1] 1984 à [Localité 16]

Représenté par Me Delphine ZOUGHEBI de l'AARPI MHISSEN & ZOUGHEBI ASSOCIEES, avocat au barreau de PARIS, toque : G0445

INTIMEE

SAS VANEAU

[Adresse 10]

[Localité 12]

N° SIRET : 450 623 103

Représentée par Me Arnaud TEISSIER de la SELARL CAPSTAN LMS, avocat au barreau de PARIS, toque : K0020

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 01 Septembre 2020, en audience publique, devant la Cour composée de :

M. Bruno BLANC, Président

M. Olivier MANSION, Conseiller

Mme Anne-Gaël BLANC, Conseillère

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Monsieur Bruno BLANC, Président dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Mme Victoria RENARD

ARRET :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Bruno BLANC, Président et par Victoria RENARD, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

EXPOSÉ DU LITIGE :

La Société Vaneau est spécialisée dans l'immobilier. Elle a pour activité les transactions immobilières.

Elle applique, à ce titre, les dispositions de la Convention collective nationale de l'Immobilier.

Elle employait, au 30 septembre 2018, 79 salariés.

Le 1er janvier 2001, Monsieur [V] [E] a été embauché, par contrat de travail à durée indéterminée, par la Société GTF (alors dénommée « La Fayette Conseil Immobilier » et faisant partie du Groupe [R], dirigé par Monsieur [R]), avec une reprise d'ancienneté au 2 mars 1987.

Le 1 er juillet 2014, l'activité de la transaction immobilière de la Société GTF a été transférée à une autre Société du Groupe [R] : la Société Vaneau, dirigée par Monsieur [R].

Le contrat de travail de Monsieur [E] a donc été transféré à la Société Vaneau, à cette même date, dans le cadre de l'article 1224-1 du Code du travail. Monsieur [E] a continué d'exercer ses fonctions de Négociateur immobilier au sein de l'agence située [Adresse 11].

Le 28 avril 2016, son employeur lui adresse une lettre RAR lui notifiant sa mutation dans une autre agence et à compter du 17 mai 2016.

Le 22 juin 2017, Monsieur [V] [E] a saisi le Conseil de Prud'hommes de Paris des chefs de demandes suivants :

- 100.000 euros au titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice financier intervenu du fait d'un changement d'agence intervenu en mai 2016 ;

- 50.000 euros au titre de dommages pour discrimination ;

- 100.000 euros au titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral ;

- 10.000 euros au titre de dommages et intérêts pour mauvaise exécution du contrat de travail ;

- 17.270,34 euros pour indemnité compensatrice de préavis ;

- 1.727,03 euros pour congés payés afférents ;

- 50.851,55 euros au titre de l'indemnité de licenciement ;

- 207.244,08 euros à titre d'indemnité sans cause réelle et sérieuse de licenciement.

Un avertissement à été délivré au salarié le 6 décembre 2017.

Le Médecin du travail a estimé que Monsieur [V] [E] était inapte, le 21 janvier 2019, en précisant que :

« Tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé. A vu de son état de santé, le salarié ne peut pas suivre de formation dans l'entreprise ».

Monsieur [V] [E], après avoir été convoqué à un entretien préalable qui s'est tenu le 7 mars 2019, a été licencié par courrier du 12 mars 2019 pour inaptitude.

La cour statue sur l'appel régulièrement interjeté par Monsieur [V] [E] du jugement rendu par le Conseil de Prud'hommes de Paris le 16 avril 2018 qui l'a débouté de l'ensemble de ses demandes et condamné aux dépens.

Monsieur [V] [E] est décédé le [Date décès 7] 2020.

Le 5 juin 2020, Maître [G] [L], notaire, a dressé une attestation de dévolution de succession de laquelle il ressort que les ayants-droits à la succession de Monsieur [V] [E] sont sa veuve Madame [U] [B] et ses deux fils [W] [E] et [X] [E].

Par conclusions déposées sur le RPVA le 26 juin 2020, Madame [U] [B], monsieur [W] [E] et monsieur [X] [E] demandent à la cour de :

Sur l'intervention volontaire :

- Prendre acte de l'intervention volontaire de de Madame [U] [B], Messieurs [W] [E] et [X] [E]

En conséquence :

- Permettre l'intervention et la participation de de Madame [U] [B], Messieurs [W] [E] et [X] [E] es qualité d'ayants-droit de Monsieur [V] [E] à la procédure principale en cours es qualité d'intervenants volontaires,

Sur le fond du dossier :

- Constater, dire et juger Madame [U] [B], Messieurs [W] [E] et [X] [E] es qualité d'ayants-droit de Monsieur [V] [E] recevables et bien fondés en l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,

- Infirmer le jugement entrepris

Et statuant à nouveau :

- Fixer le salaire de référence de Monsieur [E] à la somme de 5.756,78 euros ;

- Constater les manquements graves de la société VANEAU IMMOBILIER ;

- Annuler la mutation intervenue ;

- Ordonner la production par la société VANEAU IMMOBILIER des documents suivants :

' Registre du personnel

' Panel de salariés correspondant à la catégorie professionnelle de Monsieur

[E], c'est à dire négociateur immobilier sur 32 ans.

- Annuler l'avertissement du 6 décembre 2017

- Prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail de Monsieur [E]

A titre principal :

- Dire et juger que cette résiliation judiciaire produira les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse au 12 mars 2019

Par conséquent :

' 17.270,34 euros au titre d'indemnité compensatrice de préavis;

' 1.727,03 euros au titre des congés payés y afférents ;

' 10.206,71 euros au titre de reliquat du sur l'indemnité légale de licenciement;

' 207.244,08 euros à titre d'indemnité sans cause réelle et sérieuse de licenciement ;

A titre subsidiaire :

- Dire et juger que la société VANEAU est à l'origine de la déclaration d'inaptitude ;

- Dire et juger que l'employeur n'a pas respecté son obligation de reclassement;

- Dire et juger que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

Par conséquent :

' 17.270,34 euros au titre d'indemnité compensatrice de préavis;

' 1.727,03 euros au titre des congés payés y afférents ;

' 10.206,71 euros au titre de reliquat du sur l'indemnité légale de licenciement ;

' 207.244,08 euros à titre d'indemnité sans cause réelle et sérieuse de licenciement ;

En tout état de cause :

- Condamner la société VANEAU IMMOBILIER à verser les sommes suivantes à Madame [U] [B], Messieurs [W] [E] et [X] [E] es qualité

d'ayants-droit :

' 100.000 euros au titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice financier intervenu du fait de la mutation disciplinaire injustifiée ;

' 50.000 euros au titre de dommages-intérêts pour discrimination;

' 500 euros à titre de dommages-intérêts pour avertissement injustifié ;

' 100.000 euros au titre de dommages-intérêts pour harcèlement moral ;

' 10.000 euros au titre de dommages-intérêts pour mauvaise exécution du contrat ;

- Remise d'une attestation Pôle emploi conforme sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter du prononcé de la décision à intervenir ;

- Remise de bulletins de salaire conformes sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter du prononcé de la décision à intervenir ;

- Remise de bulletins de paie conformes, d'un certificat de travail conforme et d'une attestation Pôle emploi conforme sous astreinte de 50 € par jour de retard par document à compter du prononcé de la décision à intervenir ;

- 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Dire que les éventuels frais d'exécution forcée seront à la charge de la société VANEAU notamment ceux découlant des dispositions de l'article 444-31 du code commerce ;

- Intérêt au taux légal à compter de la saisine du Conseil de Prud'hommes ;

- Capitalisation des intérêts ;

- Débouter la société VANEAU IMMOBILIER de sa demande reconventionnelle au titre de la procédure abusive ;

- Débouter la société VANEAU IMMOBILIER de sa demande reconventionnelle au titre de l'article 700 du code de procédure civile .

Par conclusions déposées sur le RPVA le 23 novembre 2018, la société VANEAU demande à la cour de :

A TITRE PRINCIPAL

- Confirmer la décision rendue par le Conseil de prud'hommes de Paris, en ce qu'elle a :

* Constaté que Monsieur [E] n'apportait pas le moindre élément à l'appui de son action et que les prétendus manquements allégués n'avaient pas empêchés la poursuite de la relation de travail ;

* Dit et jugé que la demande de résiliation judiciaire infondée ;

* Débouté Monsieur [E] de l'ensemble de ses demandes ;

- Condamner Monsieur [E] à verser 10.000 euros à la Société en raison du caractère abusif de son action ;

A TITRE SUBSIDAIRE, Si par extraordinaire, la Cour d'appel devait estimer que la résiliation judiciaire du contrat de travail est justifiée ;

- Réduire le quantum de la demande au regard de l'ancienneté du salarié et de l'absence de justification d'un préjudice à son strict minimum soit 3 mois de salaire, soit 17.270,34 euros ;

En tout état de cause,

- Débouter Monsieur [E] de ses autres demandes ;

- Condamner Monsieur [E] au paiement de 2.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile

Par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est expressément fait référence aux conclusions sus visées .

L'ordonnance de clôture a été rendue le 1er septembre 2020.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur la rupture du contrat de travail :

Lorsqu'un salarié demande la résiliation de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur, tout en continuant à travailler à son service, et que ce dernier le licencie ultérieurement pour d'autres faits survenus au cours de la poursuite du contrat, le juge doit d'abord rechercher si la demande de résiliation du contrat de travail était justifiée .

C'est seulement dans le cas contraire qu'il doit se prononcer sur le licenciement notifié par l'employeur ;

Constitue une sanction toute mesure, autre que les observations verbales, prises par l'employeur à la suite d'un agissement du salarié considéré par l'employeur comme fautif, que cette mesure soit de nature à affecter immédiatement ou non la présence du salarié dans l'entreprise, sa fonction, sa carrière où sa rémunération.

Cette sanction disciplinaire est soumise aux dispositions de l'article L 1331-1 et suivants du code du travail.

L'article. L. 1332-2 du code du travail dispose en effet :

« Lorsque l'employeur envisage de prendre une sanction, il convoque le salarié en lui précisant l'objet de la convocation, sauf si la sanction envisagée est un avertissement ou une sanction de même nature n'ayant pas d'incidence, immédiate ou non, sur la

présence dans l'entreprise, la fonction, la carrière ou la rémunération du salarié.

Lors de son audition, le salarié peut se faire assister par une personne de son choix appartenant au personnel de l'entreprise.

Au cours de l'entretien, l'employeur indique le motif de la sanction envisagée et recueille les explications du salarié.

La sanction ne peut intervenir moins de deux jours ouvrables, ni plus d'un mois après

le jour fixé pour l'entretien. Elle est motivée et notifiée à l'intéressé ».

En l'espèce, l'employeur a adressé à Monsieur [V] [E] le 28 avril 2016 un courrier ainsi rédigé :

'Encore une fois, je dois déplorer votre comportement lors de la réunion du 26 avril 2016 au sein de l'agence VANEAU 9.

En effet, vous avez manqué de respect et de considération à l'égard de vos collègues et du directeur de l' agence, Monsieur [Z] [O]. Vous avez porté des accusations, s'en sont suivis des échanges musclés qui ont mis fin prématurément à la réunion.

Monsieur [K] [J] ,Directeur Commercial du Groupe, est contraint d'intervenir fréquemment pour calmer les esprits et régler les conflits répétitifs entre vous et Monsieur [O], cette situation va finir par impacter les résultats de l'agence et ne peut plus durer.

Lors de la réunion que nous avions eue dans mon bureau le le 16 décembre 20155, vous aviez reconnu que vousvous emportiez facilement et que vous ne devriez pas dire certaines choses. Vous vous étiez engagé à ne plus

recommencer, force est de constater que votre caractère reprend à chaque fois le dessus.

En conséquence, j'ai décidé de vous muter dans une autre agence. Vous serez affecté à compter du mardi 17 mai 2016 à l'agence DENFERT ROCHEREAU, au [Adresse 9].

Je vous demande à l'avenir d'adopter une conduite correcte à l'égard de tous vos interlocuteurs, quels qu'ils soient, et notamment lorsqu'il s'agit d'un supérieur. Vous devez apprendre une fois pour toutes à maîtriser votre caractère et lorsque vous n'êtes pas d'accord sur le fond d'une question, vous devez pouvoir vous exprimer normalement, sans insultes et irrespect.

Je compte sur vous pour que vous retrouviez la sérénité qu'il l convient et j'espère que ce nouvel environnement y sera propice.'.

Force est de constater que le 28 avril 2016, la société VANEAU IMMOBILIER a adressé une lettre RAR à Monsieur [E] lui notifiant sa mutation dans une autre agence et à compter du 17 mai 2016.

La motivation de la lettre laisse apparaître qu'il s'agit d'une sanction disciplinaire qui n'a pas été précédée d'un entretien préalable.

La procédure n'a donc pas été respectée.

Cette sanction sera annulée. En outre, les appelants établissent que la mutation a causé à Monsieur [V] [E] un important préjudice.

Alors qu'en 2013, il gagnait 75.145 €, 8.072 euros en 2015, 69.837,58 euros en 2016, sa rémunération a chuté en 2017 à 27.500 euros.

Cette sanction et ses conséquences constituent en soi un manquement grave de l'employeur à ses obligations contractuelles justifiant la résiliation judiciaire du contrat de travail qui prendra effet au jour du licenciement. Le jugement sera infirmé. Il sera alloué aux ayant droits de Monsieur [E] la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts.

Sur la demande d'annulation de l'avertissement en date du 06 décembre 2017 :

L'avertissement constitue une sanction soumise aux dispositions de l'article L 1331-1 et suivants du code du travail.

Le retard reconnu, en son temps, par Monsieur [E] justifie l'avertissement.

Sur les conséquences de la rupture du contrat de travail :

Les ayants droit de Monsieur [V] [E] sont fondés à obtenir le paiement de l'indemnité compensatrice de préavis, des congés payés afférents, de l'indemnité légale dont les montants ne sont pas critiqués par la société VANEAU.

S'agissant de la demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse , la cour dispose dans les éléments de la cause, des éléments pour fixer celle ci, compte tenu notamment de l'ancienneté du salarié (18 ans) à la somme de 104.000 euros .

Sur le harcèlement moral , la discrimination et la mauvaise exécution du contrat de travail :

Aux termes de l'article L.1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel .

L'article L.1154-1 du même code prévoit qu'en cas de litige, lorsque le salarié établit la matérialité de faits précis et concordants constituant selon lui un harcèlement, le juge doit apprécier si ces éléments pris dans leur ensemble permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral et, dans l'affirmative, il appartient à l'employeur de prouver que les faits en cause ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et sont justifiés par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement .

Par ailleurs, en application des dispositions de l'article L. 1132-1 du Code du travail :

« Aucune personne ne peut être écartée d'une procédure de recrutement ou de l'accès à un stage ou à une période de formation en entreprise, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire , directe ou indirecte, telle que définie à l'article 1erde la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, notamment en matière de rémunération, au sens de l'article L. 3221-3, de mesures d'intéressement ou de distribution d'actions, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de son origine, de son sexe, de ses m'urs, de son orientation sexuelle, de son âge, de sa situation de famille ou de sa grossesse, de ses caractéristiques génétiques, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son nom de famille ou en raison de son état de santé ou de son handicap. »

En application des dispositions de l'article L. 1134-1 du Code du travail, lorsque survient un litige en raison d'une méconnaissance des dispositions relatives au principe de non-discrimination, le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte définie ci-dessus.

Au vu de ces éléments, il incombe à l'employeur de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ;

Selon les ayants droits de Monsieur [E], le harcèlement moral et la discrimination salariale se traduiraient par :

- Des salaires différents ,

- Une absence de reconnaissance salariale ;

- Une mutation injuste ;

- Un dénigrement répété de la part de son employeur ;

- Une dégradation de ses conditions de travail liée à sa mutation ;

- L'absence de store dans son nouveau bureau ;

- La perte d'estimation qu'il avait faite pour des biens du 9 ème arrondissement ;

- Une altération de sa santé.

Force est de constater que les ayants droit n'établissent pas la matérialité de faits pouvant, pris dans leur ensemble, constituer des éléments de nature harcelante. Il s'agit de faits mineurs tels les difficultés informatiques provisoires à l'occasion de la mutation ou encore des courriers qui ne sont que des réponses de l'employeur aux courriers propres du salarié. Il est certes constant qu'une détérioration des relations de travail a eu lieu mais le ressenti de Monsieur [E] ne peut se substituer aux exigences probatoires en la matière.

Par ailleurs, l'employeur établit, au vu de pièces compatibles, que Monsieur [E] n'était pas dans une situation de discrimination par rapport à des salariés de l'entreprise placés dans des conditions comparables.

Le jugement sera confirmé en ce qu'i la débouté le salarié de ses demandes au titre du harcèlement moral ou encore de la mauvaise exécution du contrat de travail ou de la discrimination.

La demande de remise de documents sociaux conformes est fondée ; qu'il y sera fait droit dans les termes du dispositif ci-dessous ;

Sur les autres demandes :

La cour accueillant des demandes des ayants droits, la procédure ne saurait avoir de caractère abusif.

L'équité et la situation économique respective des parties justifient qu'il soit fait application de l'article 700 du code de procédure civile dans la mesure énoncée au dispositif .

PAR CES MOTIFS :

La Cour statuant par mise à disposition et contradictoirement,

INFIRME le jugement entrepris, sauf en ce qu'il a débouté le salarié de ses demandes au titre de l'annulation de l'avertissement du 6 décembre 2017, du harcèlement moral, de la discrimination, de la mauvaise exécution du contrat de travail ;

et statuant à nouveau :

Annule la sanction disciplinaire prononcée le 28 avril 2016 ;

Prononce la résiliation de contrat de travail de Monsieur [V] [E] à effet du 12 mars 2019 ;

Condamne la société VANEAU à payer, sous la même solidarité, à Madame [U] [B] , Monsieur [W] [E] et Monsieur [X] [E] les sommes suivantes :

- 5.000 euros à titre de dommages et intérêts au titre de la sanction disciplinaire allouée ,

- 17.270,34 euros au titre d'indemnité compensatrice de préavis;

- 1.727,03 euros au titre des congés payés y afférents ;

- 10.206,71 euros au titre de reliquat du sur l'indemnité légale de licenciement;

- 104.000 euros à titre d'indemnité sans cause réelle et sérieuse de licenciement ;

- 2.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Dit que les sommes à caractère salarial porteront intérêt au taux légal à compter du jour où l'employeur a eu connaissance de leur demande, et les sommes à caractère indemnitaire, à compter et dans la proportion de la décision qui les a prononcées ;

Condamne la société VANEAU à remettre aux ayants droits un certificat de travail, des bulletins de salaire et une attestation destinée à PÔLE EMPLOI conformes ;

 

Condamne la société VANEAU aux entiers dépens de première instance et d'appel.

LA GREFFI'RE LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 4
Numéro d'arrêt : 18/07337
Date de la décision : 30/09/2020

Références :

Cour d'appel de Paris K4, arrêt n°18/07337 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-09-30;18.07337 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award