Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 5
ARRÊT DU 10 SEPTEMBRE 2020
(n° , 6 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/00162 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B4WXA
Décision déférée à la cour : jugement du 30 novembre 2017 -tribunal de grande instance de Créteil - RG n° 16/06957
APPELANTE
SOCIÉTÉ D'EXPLOITATION ET DE DISTRIBUTION D'ENERGIE PARISIENNE (S.E.D.E.P)
Ayant son siège social [Adresse 3]
[Adresse 3]
N° SIRET : 351 481 080
Prise en la perspnne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Représentée par Me Julien SERVADIO de la SELARL S & L, avocat au barreau de PARIS, toque : J129
INTIMÉ
SYNDICAT DES COPROPRIÉTAIRES DU [Adresse 2] représenté par son syndic en exercice la SOCIÉTÉ BALMA GESTION ayant son siège social [Adresse 1]
Ayant son siège social [Adresse 2]
[Adresse 2]
Représenté par Me Vincent RIBAUT de la SCP SCP GALLAND VIGNES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0010
COMPOSITION DE LA COUR :
En application :
- de l'article 4 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19 ;
- de l'ordonnance n° 2020-304 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables aux juridictions de l'ordre judiciaire statuant en matière non pénale et aux contrats de syndic de copropriété, notamment ses articles 1er et 8 ;
- de l'ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020 modifiée relative à la prorogation des délais échus pendant la période d'urgence sanitaire et à l'adaptation des procédures pendant cette même période ;
L'affaire a été retenue selon la procédure sans audience, les avocats y ayant consenti expressément ou ne s'y étant pas opposés dans le délai de 15 jours de la proposition qui leur a été faite de recourir à cette procédure ;
La cour composée comme suit en a délibéré :
Mme Marie-Annick PRIGENT, présidente de chambre
Mme Christine SOUDRY, conseillère
Mme Camille LIGNIERES, conseillère chargée du rapport
ARRÊT :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Mme Marie-Annick PRIGENT, Présidente de chambre et par Mme Hortense VITELA-GASPAR, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
FAITS ET PROCÉDURE :
Par acte sous seing privé en date du 1ernovembre 2002, la Société d'Exploitation et de Distribution d'Energie Parisienne (ci-après dénommée société S.E.D.E.P ), spécialisée dans la maîtrise de l'énergie, et le Syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 2] (ci-après dénommé le syndicat des copropriétaires) ont conclu un contrat dit « d'entretien et de garantie d'installations thermiques ».
Ce contrat était conclu pour une durée de 8 ans renouvelable par tacite reconduction prévoyant deux types de prestations, à savoir les prestations dites de « type P2 », relatives à l'entretien, au contrôle et aux réglages des installations et les prestations dites de « type 03 », relatives à la réparation ou au remplacement à l'identique des matériels.
A la suite d'un rapport d'audit relatif à la chaufferie et au contrat d'exploitation établi par la société RSAP Consulting en date du 25 octobre 2011, un appel d'offres « travaux et contrat de garantie de résultat » pour la copropriété a été lancé par le biais de la société Rsap Consulting. Cet appel d'offre a donné lieu au remplacement de la chaudière à fioul.
Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 30 juillet 2015, le Syndicat, par l'intermédiaire de son syndic, la société Balma Gestion, a informé la société S.E.D.E.P de sa décision de mettre un terme au contrat de maintenance P2-P3 de la chaufferie, précisant que cette résiliation du contrat prendrait effet à compter du 30 septembre 2015.
Suivant courrier en réponse en date du 4 septembre 2015, la société S.E.D.E.P a contesté cette rupture contractuelle en faisant valoir que le terme du contrat devait être fixé le 1erdécembre 2018, en application de la reconduction tacite.
En date du 26 janvier 2016, la société S.E.D.E.P a adressé une mise en demeure à la société Balma Gestion, syndic de la copropriété, d'avoir à payer la somme de 34.515,79 euros correspondant aux livraisons de fioul effectuées mais non réglées et aux sommes dues au titre de la résiliation du contrat d'entretien.
Par lettre en réponse en date du 2 février 2016, le Syndicat n'a pas fait droit aux demandes formulées par la société S.E.D.E.P, invoquant à ce titre une méconnaissance des dispositions de la loi Chatel et divers manquements.
N'obtenant pas satisfaction et s'estimant dans son bon droit, la société S.E.D.E.P a, par acte d'huissier en date du 25 juillet 2016, fait assigner le syndicat des copropriétaires, devant le tribunal de grande instance de Créteil aux fins d'obtenir le paiement des soldes des factures susvisées.
C'est dans ce contexte qu'est intervenu, en date du 12 août 2016, un règlement de la part du syndic de la copropriété d'une somme de 15.360,24 euros en faveur de la société S.E.D.E.P au titre des factures relatives au fioul.
Par jugement contradictoire rendu le 30 novembre 2017, le tribunal de grande instance de Créteil a :
-constaté la résiliation du contrat conclu le 1ernovembre 2002 entre la société S.E.D.E.P et le Syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 2], à effet du 30 septembre 2015 ;
-débouté la société S.E.D.E.P de sa demande formée à l'encontre du Syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 2] tendant au paiement de la somme de 19.140,55 euros au titre des factures relatives au contrat d'entretien et de garantie des installations thermiques ;
-condamné le Syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 2] à payer à la société S.E.D.E.P, en deniers ou quittance et sans tenir compte de l'encaissement éventuel du chèque de 15.360,24 euros émis le 12 août 2016 et tiré sur le compte de Balma Gestion ouvert à la banque Palatine, la somme de 15.360,24 euros au titre des factures relatives aux livraisons de fioul ;
-dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
-dit que chaque partie supportera à la charge de ses propres dépens ;
-ordonné l'exécution provisoire ;
Par déclaration du 12 décembre 2017, la société S.E.D.E.P a interjeté un appel partiel de cette décision en ce qu'elle a :
-constaté la résiliation du contrat conclu le 1ernovembre 2002 entre la société S.E.D.E.P et le Syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 2], à effet du 30 septembre 2015 ;
-débouté la société S.E.D.E.P de sa demande formée à l'encontre du Syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 2] tendant au paiement de la somme de 19.140,55 euros au titre des factures relatives au contrat d'entretien et de garantie des installations thermiques ;
-dit n'y avoir lieu à l'application de l'article 700 du code de procédure civile ;
-dit que chaque partie supportera la charge de ses propres dépens ;
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 16 mars 2018, la société S.E.D.E.P, appelante, demande à la cour de :
Vu les dispositions des articles 1134 et 1583 du code civil,
Vu l'article 700 du code de procédure civile,
Vu la jurisprudence et les pièces versées aux débats ;
-recevoir la société S.E.D.E.P en ses conclusions et l'y déclarer bien fondée ;
-infirmer le jugement du 30 novembre 2017 en ce qu'il a débouté la société S.E.D.E.P de sa demande en paiement de 19.140,55 euros au titre des factures relatives au contrat d'entretien et de garantie des installations thermiques ;
-confirmer le jugement du 30 novembre 2017 en ce qu'il a condamné le Syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 2] au paiement de la somme de 15.360,24 euros au titre des factures de fioul livré ;
En conséquence,
-condamner le Syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 2] à verser à la société S.E.D.E.P la somme de 19.140,55 euros TTC au titre des factures impayées relatives aux garanties P2 et P3 du contrat de maintenance ;
-condamner le Syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 2] à verser à la société S.E.D.E.P la somme de 4.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens de l'instance qui pourront être recouvrés directement par Maître Servadio en vertu de l'article 699 du code de procédure civile ;
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 30 mai 2018, le syndicat des copropriétaires , intimé, demande à la cour de :
Vu les articles 1103, 1217, 1232-1 et 1231-5 du code civil,
Vu l'article L.136-1 du code de la consommation,
-confirmer le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Créteil le 30 novembre 2017 en ce qu'il a :
'constaté la résiliation du contrat conclu le 1ernovembre 2002 entre la société S.E.D.E.P et le Syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 2], à effet du 30 septembre 2015 ;
'débouté la société S.E.D.E.P de sa demande formée à l'encontre du Syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 2] tendant au paiement de la somme de 19.140,55 euros au titre des factures relatives au contrat d'entretien et de garantie des installations thermiques ;
-juger qu'il n'y a pas lieu de statuer sur la demande de la société S.E.D.E.P visant la confirmation de la condamnation du syndicat des copropriétaires au paiement des factures de livraison de fioul pour un total de 15.360,24 euros, cette demande étant sans objet du fait de l'extinction de la dette, et au besoin, réformer la décision sur ce point ;
-débouter la société S.E.D.E.P de toutes ses demandes, fins et prétentions ;
-condamner la société S.E.D.E.P à payer au Syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 2] une somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
A titre subsidiaire,
-réduire substantiellement le montant des sommes réclamées par la société S.E.D.E.P.
La clôture a été prononcée par ordonnance rendue le 26 mars 2020.
***
MOTIFS
La facture de fioul de 15.360,24 euros émanant de l'appelante n'est pas contestée par le syndicat des copropriétaires qui l'a d'ailleurs réglée.
L'appelante conteste le jugement entrepris sur le débouté de la somme de 19.140,55 euros correspondant à une période postérieure à la résiliation du contrat d'entretien au 30 septembre 2015 qu'elle estime nulle du fait que le formalisme prévu par l'article XIII du contrat n'a pas été respecté. Elle critique le jugement de première instance en ce qu'il a appliqué l'article L.136-1 du code de consommation issu de la loi du 3 janvier 2008 alors que, s'agissant d'un contrat conclu le 1er novembre 2002 qui s'est poursuivi en 2010 par tacite reconduction, les textes de 2008 n'avaient pas vocation à s'appliquer.
L'intimée demande la confirmation du jugement entrepris.
Sur ce ;
Le contrat du 1er novembre 2002 a été reconduit tacitement au terme de la durée de 8 ans prévue, soit depuis le 1er novembre 2010 pour un autre terme de 8 ans. Il été résilié unilatéralement par le syndicat des copropriétaires à effet au 30 septembre 2015.
Le point de discussion porte sur le fait de savoir si la loi du 3 janvier 2008 (article L.136-1 du code de consommation) prévoyant l'obligation pour le prestataire de services, avant la reconduction du contrat, d' informer le client non professionnel de sa possibilité de s'opposer à la reconduction du contrat, s'appliquait au dit contrat lors de sa reconduction en 2010, et qu'à défaut d'information, le contrat pouvait être interrompu à tout moment et sans tort par le client.
Aux termes de l'article L.136-1 du code de la consommation dans sa rédaction issue de la loi n° 2008-3 du 3 janvier 2008 (abrogée au 1er juillet 2016),
« Le professionnel prestataire de services informe le consommateur par écrit, par lettre nominative ou courrier électronique dédiés, au plus tôt trois mois et au plus tard un mois avant le terme de la période autorisant le rejet de la reconduction, de la possibilité de ne pas reconduire le contrat qu'il a conclu avec une clause de reconduction tacite. Cette information, délivrée dans des termes clairs et compréhensibles, mentionne, dans un encadré apparent, la date limite de résiliation.
Lorsque cette information ne lui a pas été adressée conformément aux dispositions du premier alinéa, le consommateur peut mettre gratuitement un terme au contrat, à tout moment à compter de la date de reconduction. Les avances effectuées après la dernière date de reconduction ou, s'agissant des contrats à durée indéterminée, après la date de transformation du contrat initial à durée déterminée, sont dans ce cas remboursées dans un délai de trente jours à compter de la date de résiliation, déduction faite des sommes correspondant, jusqu'à celle-ci, à l'exécution du contrat. A défaut de remboursement dans les conditions prévues ci-dessus, les sommes dues sont productives d'intérêts au taux légal.
Les dispositions du présent article s'appliquent sans préjudice de celles qui soumettent légalement certains contrats à des règles particulières en ce qui concerne l'information du consommateur.
Les trois alinéas précédents ne sont pas applicables aux exploitants des services d'eau potable et d'assainissement. Ils sont applicables aux consommateurs et aux non-professionnels. »
Il est établi que les personnes morales ne sont pas exclues de la catégorie des non-professionnels bénéficiant des dispositions susvisées. En l'espèce, le syndicat des copropriétaires, n'étant pas un professionnel dans le secteur du chauffage, doit être considéré comme un non-professionnel au sens de la loi du 3 janvier 2008.
Il est également établi que dès lors que le délai imparti au prestataire de services par le 1er alinéa pour donner l'information requise n'avait pas commencé à courir à la date d'entrée en vigueur de l'article 33 de la loi du 3 janvier 2008, cette obligation incombait à la société S.E.D.E.P dès le 1er août 2010, soit 3 mois avant le 1er novembre 2010, date de la reconduction tacite.
En l'espèce, l'appelante ne conteste pas avoir omis d' adresser l'information requise au syndicat des copropriétaires trois mois avant le terme du 1er novembre 2010, ce dernier était donc en droit de mettre un terme gratuitement au contrat reconduit dans ces conditions, et ce à tout moment à compter de la date de reconduction.
Par conséquent, il ne restait dû que les sommes correspondant à l'exécution effective du contrat en cours c'est à dire jusqu'au 30 septembre 2015.
C'est donc à bon droit que les premiers juges ont débouté la société S.E.D.E.P de sa demande en paiement pour des services qui ne correspondent pas à une exécution effective dudit contrat, soit pour la période après le 30 septembre 2015.
Le moyen soutenu par l'appelante tiré du non respect du formalisme prévu pour la résiliation selon l'article XIII du contrat liant les parties n'est donc pas pertinent en l'espèce.
Il convient de confirmer le jugement entrepris dans toutes ses dispositions, y compris dans ses dispositions sur les frais et dépens de première instance.
La société S.E.D.E.P succombant sera condamnée à payer les entiers dépens de l'appel et sera également condamnée à payer la somme de 4.000 euros au syndicat des copropriétaires pour participer aux frais irrépétibles que ce dernier a dû engager pour se défendre en cause d'appel.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Statuant publiquement et contradictoirement,
CONFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
CONDAMNE la Société d'Exploitation et de Distribution d'Energie Parisienne à payer au syndicat des copropriétaires du [Adresse 2] la somme de 4.000 euros au titre des frais irrépétibles engagés en cause d'appel sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE la Société d'Exploitation et de Distribution d'Energie Parisienne aux entiers dépens de l'appel.
Hortense VITELA-GASPAR Marie-Annick PRIGENT
Greffière Présidente