Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 7
ARRÊT DU 10 SEPTEMBRE 2020
(n° , 21 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 16/09026 - N° Portalis 35L7-V-B7A-BZEUB
Décision déférée à la Cour : Jugement du 27 Juin 2016 -Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de PARIS - RG n° 11/09577
APPELANTE
Mme [K] [OL]
[Adresse 2]
[Localité 5]
Représentée par Me Emmanuelle BOUSSARD-VERRECCHIA, avocat au barreau de PARIS, toque : E1355
INTIMEE
SA BNP PARIBAS
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentée par Me Aurélie FOURNIER, avocat au barreau de PARIS, toque : L0099
INTERVENANTE VOLONTAIRE :
Syndicat CFDT DES BANQUES ET DES SOCIETES FINANCIERES agissant poursuites et diligences de son secrétaire général Monsieur [P] [L] [Z]
[Adresse 3]
[Localité 5]
Représentée par Me Jonathan CADOT de la SELARL LEPANY & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : R222
COMPOSITION DE LA COUR :
En application :
- de l'article 4 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19 ;
- de l'ordonnance n° 2020-304 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables aux juridictions de l'ordre judiciaire statuant en matière non pénale et aux contrats de syndic de copropriété, notamment ses articles 1er et 8 ;
- de l'ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020 modifiée relative à la prorogation des délais échus pendant la période d'urgence sanitaire et à l'adaptation des procédures pendant cette même période ;
L'affaire a été retenue selon la procédure sans audience le 04 Juin 2020, les avocats y ayant consenti expressément ou ne s'y étant pas opposés dans le délai de 15 jours de la proposition qui leur a été faite de recourir à cette procédure;
La cour composée comme suit en a délibéré :
Madame Hélène FILLIOL, Présidente de Chambre,
Madame Brigitte DELAPIERREGROSSE, Présidente de Chambre,
Monsieur François MELIN, Conseiller.
ARRÊT :
- CONTRADICTOIRE,
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,
- signé par Madame Hélène FILLIOL, Présidente de Chambre, et par Madame Lucile MOEGLIN, Greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE:
Mme [K] [OL] a été embauchée par la société BNP Paribas Lease Groupe, filiale à 100% de BNP Paribas le 2 mai 2001 en qualité de juriste fiscaliste, statut cadre, niveau H, moyennant une rémunération annuelle brute de 35.063,27 €, le contrat étant soumis à la convention collective de la banque.
Du 7 octobre 2005 au 7 mai 2006, elle a été placée en congé maternité, puis en congé post maternité conventionnel et du 23 octobre 2006 au 24 novembre 2008 en congé parental.
Par courrier du 13 mars 2009, la société BNP Paribas Lease Group a indiqué à Mme [OL] que son contrat était transféré à la société BNP Paribas SA à compter du 1er avril 2009, en qualité de juriste au même niveau, conformément à l'accord intervenu avec cette société et la salariée, qui a été confirmé par la société BNP Paribas, dans un courrier du 24 mars 2009, transfert auquel la salariée a donné son accord.
En octobre 2009, elle a été classée au niveau I et en 2017 au niveau J.
En 2010, 2011 et 2012, Mme [OL] a fait l'objet de plusieurs arrêts maladie pour syndrome anxio-dépressif et d'épuisement. A l'issue de deux visites de reprise des 27 septembre et 11 octobre 2012, elle a été déclarée inapte à son poste mais apte à un autre poste par le médecin du travail, lequel a précisé que devait être recherché un poste évitant les situations de sur-stress et de travail en open-space. Le 14 mai 2013, la société lui a proposé un poste de juriste de droit financier dans le service de coordination juridique groupe au sein des affaires juridiques, poste qu'elle a accepté le 30 mai suivant.
Parallèlement, Mme [OL] a été :
- élue déléguée du personnel le 17 avril 2013,
- désignée membre du CHSCT des Pôles et Fonctions BNP Paribas à compter 13 octobre 2014,
- désignée conseillère du salarié à compter de janvier 2016, mandat dont elle a démissionné en novembre 2017 à la suite de son élection en tant que conseillère prud'homme à compter du 14 décembre 2017 pour la période 2018-2022,
-défenseur syndical en octobre 2018.
Le 6 juillet 2011, elle a saisi le conseil de prud'hommes de Paris d'une demande de positionnement au niveau K ou subsidiairement au niveau J à compter du 1er janvier 2013, avec un rappel de salaire en conséquence et des dommages et intérêts pour discrimination en raison de ses maternités, son sexe, son engagement syndical et pour harcèlement discriminatoire ou subsidiairement manquement de la société à son obligation de sécurité, pour violation des accords collectifs et annulation d'un avertissement datant du 30 janvier 2015, outre une demande de communication de pièces, relative aux salaires des cadres nés entre 1966 et 1972 dépendant du service des affaires juridiques du groupe BNP Paribas.
Par jugement du 27 juin 2016, le conseil de prud'hommes en sa formation de départage a :
-déclaré irrecevables les demandes de Mme [OL] antérieures au 1er avril 2009,
-débouté Mme [OL] de l'ensemble de ses demandes,
-condamné la salariée au paiement d'une indemnité de 2000€ de frais irrépétibles et aux dépens.
Mme [OL] a interjeté appel par déclaration du 29 juin 2016.
Par arrêt du 30 janvier 2020, la cour a ordonné la réouverture des débats pour obtenir communication par la société BNP-Paribas de la liste des salariés embauchés en qualité de juristes entre 2008 et 2010, dans les pôles ITP technologies et Processus et Affaires juridiques du groupe, leurs conditions d'embauche et l'évolution de leur carrière.
La cour a fait connaître aux parties qu'elle avait décidé d'appliquer au dossier la procédure sans audience prévue par l'article 8 de l'ordonnance 2020-304 du 25 mars 2020. Les parties ne s'y sont pas opposées.
Aux termes de ses écritures soutenues dans le cadre rappelé ci-dessus, Mme [OL] demande à la cour de :
- dire qu'elle a fait l'objet d'une discrimination en raison de son sexe, de sa grossesse et de sa situation de famille, de son engagement syndical et de l'exercice d'un recours judiciaire, dans les décisions que la BNP Paribas a arrêtées à son égard, ainsi que d'un harcèlement discriminatoire,
-ordonner son repositionnement conventionnel au niveau J à compter du 1er janvier 2013 et au niveau K à compter du 1er janvier 2018,
-fixer à compter du 1er janvier 2018 sa rémunération fixe annuelle brute à 88493,68€ et à titre subsidiaire à 72429,12€,
-fixer à compter du 1er janvier 2018 sa rémunération variable annuelle brute à 30100€ et à titre subsidiaire à hauteur de 25143€,
-condamner l'employeur au rappel de salaires correspondant en tenant compte des absences pour arrêt maladie indemnisés et augmentés chaque année de la moyenne des augmentations individuelles et collectives perçues par la catégorie professionnelle;
-ordonner la délivrance des bulletins de salaire afférents, sous astreinte de 200€ par jour de retard passé le délai de quinze jours suivant l'arrêt,
-de condamner l'employeur à lui verser :
*711338,46€ au titre du préjudice économique réparant la perte de revenus et subsidiairement 454663,48€,
*88919€ au titre du préjudice économique réparant la perte d'intéressement de participation et subsidiairement 56833€,
* la somme de 100.000 € en raison du préjudice moral subi en raison de la discrimination,
* la somme de 100.000 € en réparation du préjudice résultant du harcèlement discriminatoire, et subsidiairement à la même somme sur le fondement de l'article L 4121-1 du code du travail,
* la somme de 10.000 € au titre de dommages et intérêts en raison de la violation des accords collectifs,
-annuler l'avertissement du 30/01/2015,
-ordonner la capitalisation des intérêts conformément à l'article 1343-2 du code civil,
- condamner la BNP Paribas à lui verser la somme de 4.500 € au titre de la procédure d'appel et de 4.500 € au titre de la procédure de première instance sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens.
Mme [OL] fait valoir tout d'abord que le transfert de son contrat a été organisé au titre de la mobilité intra groupe, par la voie d'une convention tripartite entre BNP Paribas Lease Group, BNP Paribas et elle-même ; que la volonté des parties de transférer les obligations de BNP Paribas Lease Group à la société BNP Paribas ressort de l'absence de formalisation de la rupture du contrat de travail avec le premier employeur, de la reprise d'ancienneté et du niveau de classification, que la société intimée est tenue de l'ensemble des obligations de son ancien employeur.
Mme [OL] soutient avoir subi une situation de discrimination en raison de son sexe, de ses grossesses et de sa situation de famille, de son engagement syndical et de son action en justice et également un harcèlement discriminatoire ayant conduit à une stagnation et un traitement inégalitaire, en terme de classification et de rémunération.
Elle fait état notamment d'une violation de la part de son employeur de ses obligations en terme de revalorisation de sa rémunération suite à un congé maternité, de réintégration dans son emploi ou un emploi similaire, comme du refus sans motif légitime de la faire bénéficier du plan de départ volontaire mis en place pendant son congés parental.
Elle invoque également une absence de formation sur son nouveau poste par son employeur ; des évaluations 2010 et 2011 réalisées de mauvaise foi par son employeur, par une personne à l'égard de laquelle elle a dénoncé une situation de harcèlement et de conflit qui apparaît dans le contenu des appréciations et qui au surplus n'étant plus sa supérieure depuis 2012 lui a cependant défini ses objectifs pour cette année. Elle relève qu'il a été fait état d'une prestation insuffisante alors qu'elle avait fait l'objet d'augmentations significatives ces mêmes années, que ses évaluations antérieures étaient excellentes et doivent être prises en compte au regard de la continuité de la relation de travail dans le cadre de son transfert. Elle estime ces évaluations défavorables en lien avec sa saisine de la juridiction prud'homale d'une discrimination dans son évolution. Elle impute à l'employeur une mauvaise foi identique dans la mise en oeuvre de sa mobilité.
Par ailleurs, l'appelante soutient qu'au regard de la dénonciation en vain des méthodes managériales de ses supérieurs, elle a été l'objet de mesures de rétorsion à l'origine d'une dégradation de son état de santé et d'un burn out, qui ont conduit à un avis d'inaptitude définitive à travailler au sein du service support juridique ITP, mais à une aptitude à travailler à un autre poste avec une limitation du sur stress en septembre 2012. Elle relève que les propositions de poste ont alors été peu nombreuses, qu'elle a été rémunérée mais sans travailler pendant plusieurs mois et que la proposition de juriste financier n'est intervenue qu'après son élection comme déléguée du personnel.
Elle estime que dès son embauche, elle a fait l'objet en raison de son sexe d'une sous-classification, étant maintenue au même niveau pendant plusieurs années, alors que l'ensemble de ses collègues parfois moins expérimentés progressait, qu'il en a été de même pour sa rémunération. Elle note que sur ce point, les pièces communiquées suite à l'arrêt avant dire droit, même si elles ne sont pas complètes sur certains points, confirment cette situation de discrimination confirmée également dans son service actuel.
Mme [OL] invoque également un harcèlement discriminatoire de la part de sa hiérarchie, en lien avec son action en justice consistant en des pressions, un dénigrement public de son travail, des menaces de licenciement pour insuffisance professionnelle , une mise à l'écart qui ont dégradé ses conditions de travail et sa santé et n'ont donné lieu à aucune action de la société et que ces comportements se sont aggravés suite à l'obtention de ses mandats, puisque la société lui a délivré un avertissement injustifié qui doit être annulé et a tenté de la licencier, lui reprochant un comportement d'abus de pouvoirs dans ses fonctions au CHSCT, demande qui n'a pas abouti à l'issue d'un contentieux adminitratif.
Elle soutient que la société n'établit pas d'éléments objectifs justifiant les décisions prises à son encontre, que les attestations et documents versés ne sont pas pertinents et que l'allégation d'insubordination de sa part n'est pas établie, ce d'autant que ses dernières évaluations sont positives.
Elle en déduit que dans le cadre de la réparation du préjudice subi du fait de cette discrimination, elle peut prétendre à son positionnement au niveau K et à l'indemnisation de son préjudice économique au titre des pertes de salaire et de l'impact sur les droits à la retraite, ainsi que de son préjudice moral du fait des conséquences sur son état de santé, sur son estime d'elle-même entraînées par la discrimination, le harcèlement et la violation des accords d'entreprise.
Aux termes de ses écritures soutenues selon les modalités rappelées ci-dessus, la société BNP Paribas demande à la cour de :
-confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
-la mettre hors de cause au titre d'une discrimination de Mme [OL] pour des faits antérieurs au 1er avril 2009,
-débouter Mme [OL] de ses demandes à l'encontre de BNP Paribas tant au titre d'une discrimination qu'au titre d'un prétendu harcèlement et de manière générale de toutes ses demandes,
-condamner Mme [OL] à verser à BNP Paribas SA la somme de 10.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile, ainsi qu'aux dépens.
La société intimée soutient que le contrat de travail de Mme [OL] a fait l'objet d'un transfert contractuel, que seul ce contrat lie les parties et ne prévoit pas de reprise automatique des obligations ou de transfert des obligations du précédent employeur, que les demandes relatives à des faits de discrimination antérieurs au 1er avril 2009 sont irrecevables.
Elle conteste que Mme [OL] ait fait l'objet d'une discrimination ou d'un harcèlement discriminatoire à l'origine d'une stagnation de sa classification et de sa rémunération.
Pour la seule période postérieure au 1er avril 2009, la société BNP Paribas soutient que la salariée, à l'égard de laquelle elle a rempli son obligation d'accompagnement dans son poste, a systématiquement généré des conflits avec tous ses supérieurs hiérarchiques depuis son arrivée dans l'entreprise, en refusant toute appréciation critique et pourtant mesurée de ses performances au regard de sa position de juriste senior. Elle relève que ces évaluations n'avaient pas pour objectif de la sanctionner mais de pointer la qualité de travail attendu après qu'ait été acceptée par la société une augmentation significative de sa rémunération annuelle peu de temps après son arrivée dans l'entreprise. Elle fait observer que les pièces produites démontrent que Mme [OL] a en permanence, sur un ton très libre, contesté le pouvoir de direction de l'employeur et tenté d'imposer à ses supérieurs comme au service des ressources humaines, un mode de fonctionnement et de communication au point que l'un d'eux a alerté sa hiérarchie sur les difficultés à communiquer et travailler avec elle.
Elle ajoute que les relations se sont apaisées récemment en raison du temps limité consacré par la salarié à son service en raison des différents mandats qu'elle détient, ce qui exclut la mise à l'écart alléguée. La société relève que de la même façon depuis son élection au CHSCT, la salariée a multiplié les conflits avec les membres de cette instance, notamment le président et le médecin du travail, que le syndicat dont elle est l'élue l'a invitée à démissionner ou à tout le moins à ne plus s'exprimer en son nom. L'intimée fait en outre valoir qu'elle a toujours instruit les alertes déclenchées par l'appelante dans le cadre de cette instance.
La société conteste la stagnation de rémunération et de carrière invoquée par l'appelante. Elle relève que sur 9 ans, elle a bénéficié d'une augmentation de 44% de son salaire fixe ; que son niveau de classification et de rémunération est conforme à son niveau de qualification et à ses performances. Elle précise que Mme [OL] se situe au niveau médian, que la qualité de son travail ne permet pas de la positionner au niveau qu'elle demande, que la comparaison avec la rémunération de ses pairs ne met pas en évidence de discrimination. Elle ajoute que l'âge ne constitue pas un critère pertinent de comparaison et que l'appelante se compare à cinq salariés dans des situations très différentes. Suite à l'arrêt avant dire droit, la société BNP Paribas estime qu'il ne peut lui être reproché de ne pas avoir communiqué les éléments relatifs à des salariés qui ont quitté l'entreprise depuis plusieurs années. Elle soutient avoir produit les éléments sollicités qui mettent en évidence une absence de situation comparable à celle de l'appelante, puisque les salariés ont un niveau de diplôme plus élevé, une expérience professionnelle significative avant leur entrée dans le groupe, à l'étranger, ou des responsabilités d'encadrement, autant d'éléments qui justifient objectivement un traitement différent. Elle ajoute que si Mme [OL] était hautement diplômée lors de son entrée dans le groupe, il apparaît que ses supérieurs ont constaté d' importantes difficultés pour délivrer un travail à la hauteur de ceux-ci comme de l'expérience dont elle se prévaut.
L'intimée relève que l'évolution de la rémunération de la salariée est conforme à celles des salariés du panel, qu'elle ne peut alléguer une discrimination par rapport à son actuel service, ces salariés se trouvant hors du champ de la réouverture des débats et ayant en tout état de cause une expérience et des responsabilités supérieures.
Elle soutient en outre que les demandes de rappels de salaire sont dénuées de fondement, ses performances lui interdisant d'être positionnée au niveau K et que les calculs opérés prennent en compte la rémunération de salariés hors classe, de membres du comité de direction du département juridique et de managers. Elle observe qu'il en est de même concernant l'évaluation de son préjudice économique et qu'elle opère son calcul à compter de 2001 donc à une période où elle n'était pas son employeur en intégrant une perte de droit à la retraite qui n'est pas certaine. Elle relève que, hormis les demandes afférentes au calcul de la réserve spéciale de participation les contestations en ce domaine relève de la compétence du tribunal judiciaire.
Elle objecte qu'elle a toujours proposé à Mme [OL] des fonctions conformes à ses compétences et que pour prendre en compte les difficultés relationnelles dès 2010, elle a proposé à la salariée une mission temporaire hors du service de support juridique qui a été validée par le médecin du travail, puis d'autres postes qu'elle n'a pas retenus ; qu'après l'avis d'inaptitude, elle lui a proposé un poste créé au sein de la direction des affaires juridiques du groupe et que la dispense d'activité est intervenue pendant la période de recherche de reclassement ce qui est admis.
Concernant l'avertissement de janvier 2015, la banque observe que la matérialité des faits est établie à savoir l'absence d'acceptation de l'autorité de son supérieur en termes vifs.
Elle ajoute que les pièces produites relativement aux supérieurs de la salariée démontrent l'absence de harcèlement à son encontre, que le médecin n'a jamais fait état de faits de cette nature, que l'existence d'une dégradation des conditions de travail de l'appelante n'est pas établie, les tensions ne pouvant suffire à caractériser un harcèlement.
La société conteste la discrimination en lien avec sa situation d'élue ayant pris soin d'adapter son travail et de redéfinir ses missions pour en tenir compte.
Elle en déduit que les demandes de repositionnement de classification ne sont pas fondées et que les demandes indemnitaires doivent être rejetées. Elle soutient que le défaut de respect des accords d'entreprise n'est pas établi alors que la société a mis en place des accords sur l'égalité hommes femmes et prévu un budget spécial pour résorber les écarts.
Aux termes de ses écritures développées selon les modalités rappelées ci-dessus, le syndicat CFDT des Banques et sociétés financières demande à la cour de :
- la recevoir en son intervention volontaire ;
- infirmer le jugement ;
Statuant à nouveau,
-juger que Mme [K] [OL] a fait l'objet de discriminations dans sa situation professionnelle en raison de son sexe, de sa maternité, de sa situation de famille
-juger qu'en tout état de cause la dégradation de ses conditions de travail constitue des manifestations de harcèlement moral au sens de l'article L 1152-1 en raison de motifs discriminatoires de la maternité, de sa situation de famille, de son engagement syndical et l'exercice d'un recours judiciaire et subsidiairement une violation de l'obligation de sécurité de résultat de l'employeur issue de l'article L 4121-1 du Code du travail ;
- condamner la société BNP Paribas à lui verser la somme de 5 000 € en application de l'article L. 2132-3 du code du travail ;
- condamner la société BNP Paribas à lui verser la somme de 1500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens.
Le syndicat fait valoir que le tribunal administratif a annulé la décision du ministre du travail au motif d'une erreur de droit concernant la procédure interne à l'entreprise de sorte que la question de la discrimination syndicale n'a pas été examinée. Il ajoute que par une nouvelle décision, le ministre a refusé le licenciement en raison d'un lien entre la demande d'autorisation de licencier et les mandats détenus.
Il fait également observer que le panel communiqué est subjectif et incomplet, ce qui induit un doute sur sa pertinence ; qu'en tout état de cause, il met en évidence un retard manifeste dans l'évolution de sa carrière qui n'est pas justifié par des éléments objectifs.
Il observe que Mme [OL] est adhérente du syndicat, lequel subit un préjudice direct du fait de cette situation qui caractérise une discrimination à raison de cette activité, outre les discriminations d'une autre nature et le harcèlement établis par les éléments versés aux débats. Il en déduit que sa demande est fondée en application de l'article L 2132-3 du code du travail.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et prétentions des parties, la cour se réfère expressément aux écritures.
MOTIFS :
- Sur le transfert du contrat de travail de Mme [OL] :
Les pièces produites par l'appelante établissent qu'elle a été avertie le 13 mars 2009 par son employeur, la société BNP Lease Groupe, que dans le cadre de la mobilité intra groupe et conformément aux dispositions convenues avec elle et la société BNP Paribas, son contrat de travail serait transféré à cette dernière à compter du 1er avril 2009 en qualité de juriste. Un courrier de l'intimée du 24 mars 2009, lui a précisé les conditions de ce transfert, à savoir la reprise de l'ancienneté acquise et de sa classification, une rémunération brute annuelle de 39398,41€ en contrepartie d'une convention de forfait de 211 jours, outre une rémunération variable éventuelle versée en fonction de la rentabilité de la société et de ses performances. Mme [OL] a donné son accord à ces conditions en apposant la mention 'bon pour accord' sur le courrier du 24 mars.
Cette opération, qui a pour effet de faire sortir la salariée des effectifs de la société BNP Paribas Lease Group comme le précise le courrier du 13 mars 2009, est analysée par la salariée elle-même dans ses écritures comme une convention tripartite permettant la poursuite du contrat de travail. Dès lors que dans cette convention régie uniquement par la volonté des parties, n'a pas prévu une application volontaire des dispositions de l'article L 1224-2 du code du travail, qui mettent à la charge du nouvel employeur les obligations de l'employeur antérieur à la date de la modification de la situation juridique, en cas de transfert légal du contrat en application de l'article L 1224-1 ; que n'est pas mentionnée une reprise par la société BNP Paribas de l'ensemble des obligations à la charge du précédent employeur au 1er avril 2009, le premier juge a justement estimé que les manquements de la société BNP Paribas Lease Group à l'égard de Mme [OL] ne pouvaient engager l'intimée et que les demandes à ce titre étaient irrecevables. Le jugement sera confirmé sur point.
-Sur la discrimination:
En application de l'article L1132-1 du code du travail, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire directe ou indirecte telle que définie à l'article 1 de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation du droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, notamment en matière de rémunération, au sens de l'article L3221-3, de mesures d'intéressement ou de distribution d'actions, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de son sexe, de ses activités syndicales.
L'article L 1134-1 du même code dispose que quand survient un litige en raison d'une méconnaissance des dispositions rappelées ci-dessus, le salarié présente des éléments de faits laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte telle que définie par l'article 1 de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008. Au vu de ces éléments, il incombe à l'employeur de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination. Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes mesures d'instruction qu'il estime utile.
Il est par ailleurs constant que la saisine de la juridiction prud'homale par un salarié afin de faire trancher un différend l'opposant à son employeur constitue un droit constitutionnellement garanti, qu'une telle action ne peut être prise en compte par l'employeur dans les décisions prises à son égard.
Les différentes violations des obligations de son employeur évoquées par Mme [OL] à la suite de ses congés maternité et parental et de son retour dans l'entreprise (absence d'augmentation de sa rémunération, de réintégration dans le précédent emploi, d'orientation et de formation, de bénéfice d'un plan de départ volontaire en juillet 2008), se situent avant son transfert au sein de la société BNP Paribas et ne peuvent lui être imputés.
A compter du 1er avril 2009, Mme [OL] invoque différents faits à l'encontre de la société intimée qu'elle estime révélateurs d'une discrimination liée à son sexe, à l'introduction d'une action en justice et à ses activités syndicales, à savoir:
-une absence de formation et d'adaptation à son poste,
- des évaluations de mauvaise foi et dénuées d'objectivité au titre des années 2010 et 2011 par une supérieure avec laquelle elle était en conflit, à une époque où elle avait engagé la procédure prud'homale afin d'obtenir une reconstitution de carrière,
-une demande de mobilité gérée de mauvaise foi par l'employeur par la communication systématique des évaluations de 2010 et 2011 contestées, la proposition de postes ne correspondant pas à son profil, des changements incessants de gestionnaires ressources humaines,
-entre octobre 2012 et avril 2013, suite à l'avis d'inaptitude, l'absence de fourniture de tout poste de travail,
-une stagnation de carrière en terme de classification et de rémunération fixe et variable, par rapport aux autres salariés parfois plus jeunes ayant une ancienneté et une expérience moindre, qui ont rapidement atteint la classification K ; des boni inférieurs à la moyenne de ses collègues, en 2014 et 2015,
-une tentative de licenciement liée à ses mandats.
Au soutien de ces allégations, l'appelante verse aux débats, notamment:
- une lettre d'embauche la positionnant au niveau H alors que le poste bénéficiait selon la fiche de poste de la classification I ou J,
-un échange de mails avec Mme [F] du service des ressources humaines d'octobre 2009 concernant son niveau de classification par rapport aux autres salariés de son service,
-un échange de mails de l'appelante avec Mme [M] (Ressources humaines) du 20 décembre 2010 au terme duquel elle dénonce une situation de conflit voire de harcèlement de la part de Mme [T], sa supérieure,
-ses évaluations de 2010 et 2011, qui mettent en évidence des insuffisances persistantes dans l'exécution des tâches et objectifs lui incombant, sa supérieure, Mme [T] concluant en 2011 sur la nécessité de faire évoluer Mme [OL] dans le cadre d'une mobilité, alors que la salariée a sollicité à plusieurs reprises une augmentation de sa classification,
-les commentaires rédigés par la salariée de ces évaluations,
- des échanges de mails entre Mme [OL] et Mme [T] de mai 2011 et février 2012, relatifs à l'absence de validation ou la critique de contrats et avenants rédigés par l'appelante,
- divers courriers et mails antérieurs et postérieurs à son arrivée dans la société BNP Paribas de collègues et de clients internes qui mettent en évidence la qualité de son travail et ses compétences,
- des échanges de mails avec le service des ressources humaines d'avril 2011 relatifs à sa demande de mobilité présentée en mars 2010 et les différentes postulations de la salariée qui n'ont pas abouti, des échanges relatifs aux conséquences de la communication systématique des évaluations 2010 et 2011, la proposition d'une mission temporaire de 6 mois en mobilité,
- un mail du service des ressources humaines du 28 septembre 2012, suite à l'avis d'inaptitude à son poste la dispensant d'activité pendant la recherche d'un reclassement, situation qui a duré jusqu'au mois de mai 2013,
-un avertissement du 31 janvier 2015 pour avoir réagi de façon très virulente à un mail de son manager du 31 octobre 2014 et porté un jugement vis à vis de sa hiérarchie dans des termes inadmissibles,
- un courrier du 12 novembre 2009 lui accordant une promotion niveau I et le maintien durant huit ans à ce niveau à la différence de salariés plus jeunes et ayant un niveau de qualification inférieure,
-ses bulletins de paie qui mettent en évidence en 2013, 2014 et 2015 une absence de variation de la partie fixe de sa rémunération, en 2013 une absence de rémunération variable au titre de 2012 en 2014 et 2015 une rémunération variable de 1200€,
- des fiches de situation de documentalistes niveau I énonçant un bonus en 2012 de 3000€ alors que la salariée n'a perçu aucune somme,
-des courriers du 24 mars 2014 et du 22 avril 2014 dans lesquels elle dénonce une rémunération variable très faible en 2013, époque son engagement syndical,
- un tableau de la rémunération fixe et variable des juristes en 2017,
-des attestations de salariés relatives à ses difficultés dans l'exercice de ses mandats depuis 2013, en lien avec l'attitude du président du CHSCT,
-la décision du ministre du travail du 10 mars 2020 de refuser son licenciement suite au jugement du tribunal administratif du 12 novembre 2019 annulant la précédente décision du ministre du 10 décembre 2018 à raison d'une erreur de droit relative à la régularité de la procédure interne.
Mme [OL] présente ainsi des éléments de fait qui pris dans leur ensemble, laissent supposer une discrimination liés à son sexe, à son action prud'homale en 2011 en contestation de sa classification et du déroulement de sa carrière et à son activité syndicale à compter de 2013. Il appartient en conséquence à la société BNP Paribas d'établir que les décisions prises à l' égard de l'appelante reposent sur des éléments objectifs, étrangers à toute discrimination.
*Sur l'adaptation à l'évolution de son emploi :
Mme [OL] a librement accepté le poste de juriste au sein du pôle ITP-Technologies et processus, service en charge de la négociation des contrats d'achat du groupe et du suivi des relations avec les fournisseurs, qui mobilisaient des connaissances juridiques spécifiques telles que le droit des logiciels et des licences. Les évaluations de Mme [OL] de 2009 mettent en évidence une bonne connaissance du droit fiscal, du droit du financement et du droit international privé, liée à son expérience antérieure au sein de BNP Paribas Lease Group, mais relèvent un besoin de formation dans les domaines spécifiques énoncés plus haut.
Or, l'employeur justifie que Mme [OL] a bénéficié de plusieurs formations en 2010 et 2011 consacrées aux contrats d'achat, demandées par la salariée dans le commentaire de son évaluation de juin 2009 et aux contrats informatiques négociés par le pôle, qu'elle a été régulièrement invitée à participer aux formations sur des thèmes précis en lien direct avec son activité, telle la contractualisation des licences. Par ailleurs, en 2013 à l'occasion de son intégration au pôle affaires juridiques groupe en tant que juriste financier, emploi consistant comme le montre la fiche de poste à assurer le suivi des nouveaux textes et leur interprétation dans le domaine du droit financier au niveau français, européen et international, Mme [OL] a bénéficié d'une formation sur les marchés financiers et a été mise en lien par son supérieur, M. [N], avec l'ensemble de ses interlocuteurs pour recevoir les informations nécessaires à la compréhension du fonctionnement du groupe.
Par ailleurs, il ne résulte d'aucune pièce que l'employeur lui ait refusé l'accès à des formations adaptées à son poste. Il s'en déduit que l'employeur justifie d'éléments objectifs étrangers à toute discrimination, au soutien des décisions prises en matière de formation et d'accompagnement de la salariée dans ses nouveaux postes en 2009 époque où aucune action n'était engagée, comme en 2013.
*Sur la mauvaise foi de l'employeur dans les évaluations 2010-2011 :
Les évaluations des années 2010 et 2011 ont été réalisées par Mme [T], supérieure de Mme [OL] pendant ces deux années, ce qui justifie qu'elle ait procédé à l'évaluation de 2011. L'évaluation de 2010 met en évidence que tous les objectifs de la salariée n'ont pas été atteints et qu'il existe des axes de progression, concernant notamment le travail en équipe, la communication, l'organisation et la rigueur sur les nouveaux domaines. L'évaluation de l'année 2011 reprend les mêmes constats en relevant un niveau insuffisant d'expertise et de compréhension des risques à encadrer, des délais de traitement des dossiers trop longs et l'absence de réalisation de missions inscrites dans les objectifs depuis 2009.
Ces évaluations sont rédigées en termes mesurés en relevant les éléments positifs de la prestation de la salariée et la société BNP Paribas verse aux débats des mails émanant de clients internes qui corroborent les difficultés énoncées, incompatibles avec un emploi de juriste senior, peu important que par ailleurs d'autres clients lui aient adressé des remerciements. Ainsi en mars 2011 (pièces 31, 32, 33) est relevée par un client interne, l'absence de détection par l'appelante en charge de ce dossier depuis juin précédent d'un point bloquant pour la signature d'un contrat, ce qui a donné lieu à une reprise par un autre salarié. Les échanges en février 2011 avec d'autres services d'ITP group, que Mme [OL] verse elle-même aux débats, attestent du rappel qui lui est fait par ceux-ci de l'urgence à finaliser certaines conventions. De la même façon, l'employeur justifie de la retransmission d'analyses critiques des conseils de la société sur les risques induits par les stipulations contractuelles prévues par l'appelante.
La dénaturation des entretiens d'évaluation par Mme [T] résulte des seules affirmations de Mme [OL], étant observé que l'évaluation de l'année 2011 a été réalisée début 2012 conjointement par Mme [T] et M. [XG], autre responsable du département services dédiés, selon l'organigramme versée aux débats.
Comme le relève la société, Mme [OL] ne peut utilement invoquer les évaluations ou les courriers de remerciements reçus lors de son activité chez son précédent employeur, dès lors que les compétences requises et les fonctions elles-mêmes étaient différentes même si elles mobilisaient pour partie un socle commun de connaissances juridiques. Par ailleurs, contrairement à ce que prétend l'appelante, ces évaluations révèlent également des points à améliorer relatifs à l'ordre et la méthode dans l'organisation du travail, la capacité à prendre position sur des questions juridiques, la fourniture dans les temps des prestations attendues, ce qui correspond aux difficultés mentionnées de façon récurrente dans les évaluations de Mme [OL] au sein de la société intimée par ses différents responsables, Mme [Y] pour l'année 2012 et M. [N] pour 2013 après l'intégration dans un nouveau pôle en mai. Ceux-ci relèvent en effet (Pièces 62, 63, 86, 155) une lenteur dans le traitement des dossiers, un manque d'autonomie dans leur gestion et des difficultés à assurer une communication apaisée, que confirme la virulence des réactions de Mme [OL] aux remarques formulées dont atteste l'ensemble des mails adressés à ses supérieurs successifs.
Ces éléments présentent un caractère objectif et dénué de mauvaise foi au soutien des évaluations du 15 novembre 2010 pour l'année 2010 et du 6 janvier 2012 pour l'année 2011 étranger à toute discrimination ou mesures de rétorsion en lien avec son sexe, son action prud'homale engagée seulement en juillet 2011 et alors qu'elle n'exerçait pas à cette époque de fonctions syndicales.
*Sur la gestion de mauvaise foi de la demande de mobilité :
Il n'est pas discuté que Mme [OL] a demandé à bénéficier d'une mobilité en mars 2010, ce que rappelle son évaluation pour cette année, avec mention d'un accueil favorable de cette démarche par Mme [T] sa supérieure, malgré une durée réduite dans son poste ne respectant les conditions de l'accord d'entreprise sur ce point. Les échanges ultérieurs de mails entre la salariée et le service des ressources humaines démontrent (pièce 59) que la société s'était engagée à réexaminer son salaire en octobre 2010, ce qui a donné lieu à une augmentation de 6000€ de la part fixe annuelle de sa rémunération. Au constat d'une situation de blocage avec sa supérieure en février 2011 dans le prolongement de son évaluation, il est établi que Mme [OL] a confirmé l'orientation vers une mobilité dans le groupe.
Les différents échanges de l'appelante avec le service des ressources humaines démontrent que celle-ci a postulé sur plusieurs postes d'avril 2011 à octobre 2012, date à laquelle a été rendu l'avis d'inaptitude du médecin du travail, ce que confirme le tableau établi par Mme [R], gestionnaire mobilité, (pièce 69) produit par l'employeur. Il résulte de ces éléments que deux candidatures n'ont pas abouti car la recherche de candidats a été abandonnée, que d'autres postes ont été pourvus par des candidats en interne et que le profil de Mme [OL] ne correspondait pas à certains postes disponibles en raison d'une spécialisation trop importante attendue, en matière de concurrence, d'OPCVM, de protection des données et des nouvelles technologies. Il apparaît que la société a proposé à la salariée une mission temporaire de six mois de juriste contrats, déclarée compatible avec son état de santé par le médecin du travail, qu'elle a refusée. Ces éléments établissent la réalité de la prise en compte et de l'accompagnement de la demande de mobilité de l'appelante.
Mme [OL] fait grief à son employeur d'avoir communiqué les évaluations annuelles 2010 et 2011 aux potentiels recruteurs affectant ainsi ses chances de succès. Toutefois, la communication d'office de ces éléments par l'employeur n'est attestée par aucune pièce, alors que les explications non sérieusement discutées, transmises par Mme [R] dans le mail du 8 avril 2011(pièce 26) produit par l'employeur, révèlent que la procédure prévoit lors de la prise en charge de la mobilité d'un salarié la transmission au gestionnaire émetteur de l'annonce du CV et d'une fiche de synthèse récapitulant les éléments de rémunération du candidat, mais que les évaluations professionnelles ne sont toutefois transmises que si l'émetteur de l'annonce en fait la demande. N'est en conséquence caractérisée aucune mauvaise foi dans la mise en oeuvre de la mobilité de la salariée en lien avec son action prud'homale, les démarches sur ce point étant engagées avant que Mme [OL] n'ait agi en justice ou ne bénéficie de la qualité d'élue.
*Sur l'absence de fourniture de poste et de tout travail suite à la déclaration d'inaptitude d'octobre 2012 à avril 2013:
Suite à deux visites médicales de reprise, à l'issue de son arrêt de travail de plusieurs mois (du 4 juin au 27 septembre 2012), le médecin du travail le 11 octobre 2012 a déclaré Mme [OL] inapte à son poste mais apte à un autre poste, spécifiant que le poste à rechercher devait éviter les situations de sur-stress et de travail en open space . Compte tenu de cet avis, la société intimée avait pour obligation en application de l'article L 1226-2 du code du travail dans sa rédaction applicable au litige, de rechercher et de proposer à la salariée un emploi approprié à ses capacités prenant en compte les préconisations du médecin du travail, ne pouvant la réaffecter à son ancien poste. Elle devait en outre en application de l'article L 1226-4, à défaut de licenciement ou de reclassement de la salariée un mois après la déclaration définitive d'inaptitude, reprendre le paiement de son salaire.
L'employeur établit que dès la transmission de l'avis du médecin du travail à l'issue de la première visite de reprise le 27 septembre 2012, concluant à une inaptitude au poste occupé, il a indiqué à Mme [OL], qu'un poste était recherché en conformité avec les préconisations du médecin, que pendant la période de recherche, elle serait dispensée d'activité tout en étant rémunérée, ce qui de fait recoupe les obligations rappelées plus haut. Il est justifié par les pièces produites par la salariée elle-même que suite à l'avis d'inaptitude, sept postes ont été identifiés par le service des ressources humaines et que si l'un des postes (Juriste CIB Trade Finance) n'était pas compatible avec les préconisations du médecin en raison d'un stress important généré par la fonction comme l'a relevé la salariée, il apparaît que les autres postes respectaient cet avis et que la candidature de la salariée n'a pas abouti après entretien comme en atteste un compte rendu de décembre 2012 (Pièce 70). Comme l'a justement relevé le premier juge, le directeur des affaires juridiques du groupe a également reçu l'appelante le 30 avril 2013, ce qui a conduit à la proposition du poste créé de juriste droit financier, qu'elle a trouvé intéressant comme en atteste son mail du 3 mai 2013 à M. [N] son responsable. Au regard de cette chronologie, la société justifie de recherches objectives de reclassement opérées sur la base des préconisations du médecin, avant même que l'appelante ne soit élue déléguée du personnel et alors que son action prud'homale était en cours.
* Sur l'évolution de la classification et de la rémunération de Mme [OL]:
Sur ces points la société BNP Paribas ne peut être tenue des manquements imputés par la salariée à son précédent employeur avant le 1er avril 2009.
Mme [OL] invoque une sous-classification dès son embauche en 2009 liée à son sexe, puis une stagnation de sa classification et de sa rémunération fixe et variable par rapport aux autres juristes.
La détermination de la réalité de cette situation suppose une comparaison avec les conditions d'embauche et l'évolution de carrière de salariés engagés également en qualité de juristes comme Mme [OL] dans les deux pôles où elle a travaillé, ITP technologies et processus et Affaires juridiques du groupe, un an avant ou après l'appelante.
Cette comparaison doit être opérée sur la base des connaissances professionnelles consacrées par un diplôme ou une pratique professionnelle, des capacités découlant de l'expérience acquise, des responsabilités et de la charge physique ou nerveuse. L'âge en revanche ne constitue pas un critère objectif de comparaison comme l'a rappelé le premier juge.
Concernant la formation, la société justifie d'une grille de salaire définie pour les écoles de commerce et les formations universitaires (commerciales, banque, finance) opérant une hiérarchisation de ces différentes formations, portées au sein de groupes numérotés selon une valorisation décroissante de 1 à 7.
La société BNP Paribas produit des éléments relatifs à neuf salariés, sept hommes et deux femmes, recrutés entre 2008 et 2010 en qualité de juristes dans les pôles où a travaillé l'appelante toujours dans le groupe en 2018. Les pièces versées, même en l'absence des évaluations de certaines années, permettent ainsi d'assurer une comparaison effective avec la situation de cette dernière.
Concernant les conditions d'embauche, il convient de rappeler que Mme [OL] a été embauchée au niveau H en tant que juriste au sein du pôle ITP en charge des contrats d'achat du groupe, moyennant une rémunération fixe brute de 39831,74€. Il n'est pas discuté qu'elle justifiait du CAPA, d'un DEA de droit fiscal, d'un DESS de juriste affaires internationales, d'une maîtrise de juriste trilingue (double maîtrise en droit des affaires et langues étrangères, anglais, espagnol). Elle détenait une expérience au sein de la société BNP Paribas Lease Group de juriste fiscaliste de 8 ans, précédée d'une expérience de 19 mois dans un cabinet d'avocat et de 14 mois au sein des sociétés Aérospatiale et Groupama, dont témoignent les certificats de travail produits, sans précision toutefois sur les fonctions occupées.
Les pièces produites par la banque établissent que parmi les sept hommes recrutés pendant la période considérée à des emplois de juristes, deux l'ont été au même niveau que Mme [OL], les cinq autres à un niveau supérieur allant de I à K.
Or, contrairement à ce que soutient Mme [OL], les pièces produites établissent que les deux salariés engagés au même niveau, MM [B] et [X], disposaient d'une formation à l'étranger et en France, plus complète et mieux valorisée que celle de l'appelante de nature à compenser une expérience limitée, étant observé qu'en tout état de cause leur rémunération était inférieure à celle de l'appelante.
De même, les pièces relatives aux cinq salariés embauchés à un niveau supérieur, mettent en évidence des diplômes et formations mieux valorisés, notamment au sein d'écoles de commerce classées dans le groupe 1 de la grille salariale, tels MM [UU], [N], [I] ou des formations centrées sur les métiers de la banque, ainsi que des expériences professionnelles, dans des sociétés du groupe ou en dehors, leur conférant une connaissance approfondie ou une maîtrise des techniques liées à plusieurs domaines d'activités, directement exploitable dans les fonctions auxquelles ils étaient recrutés et justifiant ainsi leur embauche au niveau I ou J.
Les éléments communiqués sur le parcours des deux salariés recrutés au niveau K, MM [I] et [V] confirment, outre une formation valorisée dans le secteur de la banque comme l'ESCP et l'IEP de [Localité 6], une expérience importante acquise au sein d'entreprises dépendant ou non du groupe et de cabinets d'avocats spécialisés dans des domaines spécifiques du secteur de la banque, tels les assurances et les fusions acquisitions, leur conférant une véritable expertise et leur permettant ainsi de prendre de manière autonome des décisions adaptées aux axes de la politique de la société, comme l'exige le positionnement à ce niveau.
Ces éléments démontrent que la classification égale ou supérieure à celle de Mme [OL] accordée aux hommes recrutés dans la période de 2008 à 2010 en qualité de juriste repose sur des éléments objectifs tenant à la qualité et au niveau de leur formation ainsi qu'à l'étendue de leur expérience professionnelle et à sa pertinence au regard des différents domaines dans lesquels se situaient les postes qui leur étaient confiés, critères objectifs sans lien avec le sexe de ces salariés.
L'appelante ne peut prétendre se trouver dans une situation comparable à celle de M. [A] son supérieur hiérarchique à compter de 2015, dès lors que celui-ci a été engagé en 2014 à des fonctions d'encadrement qu'il occupait déjà dans un précédent emploi au sein de la société LCH Clearnet et ainsi à un niveau de responsabilité supérieur.
Au regard du critère de discrimination à l'embauche invoqué par Mme [OL], les conditions de recrutement de Mmes [LZ] et [H] sont dénuées de pertinence, étant observée que cette dernière a été engagée en 2010 comme M. [G] à un niveau J avec une rémunération annuelle fixe brute supérieure de 2000€.
Concernant l'évolution de la classification et de la rémunération de la salariée, il apparaît que Mme [OL] a été positionnée au niveau I en octobre 2009, puis au niveau J en 2017. Comme elle le relève, les neuf salariés du panel recrutés entre 2008 et 2010 étaient en 2018 pour trois d'entre eux positionnés au niveau L (hors classification), 5 étaient au niveau K et un au niveau J avec une rémunération fixe et variable supérieure à la sienne.
Or, les évaluations de fin d'intégration, comme les évaluations ultérieures des salariés auxquels elle se compare produites aux débats par l'employeur et établies sur la base des mêmes critères en ce compris celles de Mmes [LZ] et [O], mettent en évidence une atteinte des objectifs fixés, une adaptation rapide des salariés à leur poste et une prestation dans les aspects essentiels de l'emploi conforme aux attentes voire le plus souvent supérieure. Si des axes de progrès sont identifiés lors de la prise de poste, il apparaît qu'ils sont rapidement corrigés pour atteindre le niveau attendu ou le dépasser.
Au contraire, en ce qui concerne l'appelante, si ses évaluations de juin et de novembre 2009 étaient encourageantes, ce qui a conduit sa responsable à demander un passage au niveau I avec une augmentation du salaire fixe annuel de 4000€, renouvelée en 2010 à hauteur de 6000€, ses évaluations ultérieures réalisées, par de nouveaux responsables à compter de 2012, Mme [Y], M. [N], M. [A], comme les mails produits relatifs à certains dossiers traités et le contenu même des travaux mettent en évidence la persistance de difficultés d'organisation (enlisement sur le dossier Lexmark, annulation de rendez-vous, comparaison du travail initial de la salariée sur la surveillance macro-prudentielle et après correction), d'autonomie et des difficultés majeures de communication en cas de remarques sur la qualité de ses prestations, dont témoignent les échanges versés aux débats.
Ces éléments fondés sur une compétence pérenne déployée par les salariés du panel de comparaison dans leurs emplois successifs justifient de manière objective l'évolution de leurs niveaux de classification et l'octroi de responsabilités plus importantes notamment en terme d'encadrement.
Aucune pièce produite par l'appelante n'établit qu'elle exerçait des fonctions ou présentait les compétences lui permettant d'être positionnée comme elle le demande au niveau J dès 2013 et au niveau K à compter de janvier 2018, ce dernier niveau selon la convention collective impliquant une expertise du salarié dans son domaine d'activité et une prise de décisions très autonome.
Ces éléments justifient également l'évolution de leur niveau de rémunération fixe et variable, étant observé qu'il n'existe pas de droit à bénéficier annuellement d'une augmentation individuelle, ce que confirment d'ailleurs les évolutions des rémunérations fixes des autres salariés. Selon l'accord négocié dans l'entreprise le 18 décembre 2001, est offerte aux cadres de niveau H ou I qui n'ont pas fait l'objet d'une augmentation pendant une période rémunérée de cinq ans la possibilité de saisir la commission paritaire de recours, ce que l'appelante n'a pas fait en l'absence d'augmentation individuelle entre octobre 2010 et 2016.
Toutefois, s'agissant de la part variable évaluée sur la base des résultats du groupe et des compétences du salarié, comme le rappelle la banque, il apparaît que Mme [OL] n'a perçu aucune somme à ce titre pour l'année 2012 et une somme très faible de 1200€ pour 2013 et 2014, périodes suivant la saisine de la juridiction prud'homale et l'obtention des deux mandats de représentant du personnel, alors que pour l'année 2011, qui avait donné lieu à une évaluation du 6 janvier 2012 pointant la persistance de diverses carences, elle avait perçu une part variable de 3000€. Par ailleurs, il n'apparaît pas que l'évaluation de l'année 2015 qui a donné lieu à l'octroi d'un bonus de 3000€ majoré pour les trois années suivantes ait levé les difficultés constatées en terme de communication à l'égard de ses supérieurs et de rapidité de rendu des travaux demandés. La société ne fournit dès lors aucune justification objective à l'évolution de la part variable de la salariée de 2012 à 2014 étrangère à son action et à l'exercice de ses mandats.
*Sur le harcèlement discriminatoire :
Les faits évoqués antérieurs à avril 2009 ne peuvent être imputés à la société BNP Paribas. Comme relevé plus haut, Mme [OL] ne peut se prévaloir de l'absence de travail d'octobre 2012 à avril 2013, suite à l'avis d'inaptitude du médecin du travail, ni d'agressions verbales subies lors de l'évaluation 2010, qui résultent de sa seule affirmation.
Mme [OL] invoque en revanche une dévalorisation, un dénigrement en public de son travail, un refus de communication de la part d'une de ses supérieures, Mme [T], soutenu par l'employeur, une mise à l'écart, une accusation mensongère de harcèlement d'un collègue de sa part, un avertissement injustifiée le 30 janvier 2015 délivré , des mises en difficulté à l'occasion de l'exercice de ses différents mandats, le refus de sa hiérarchie d'adapter sa charge de travail à ses mandats, ce qui confirme un lien avec son action judiciaire et sa qualité d'élue,
Elle verse aux débats notamment : un mail du 27 juin 2012 de Mme [U] déléguée du personnel relatif au climat difficile de l'appelante avec sa supérieure, Mme [T], rendant sujette à caution les évaluations, une alerte de Mme [U] du 25 avril 2014 relative à une situation de harcèlement de Mme [OL] de la part de son supérieur, M. [N],
- une attestation de Mme [J] ayant travaillé sous la responsabilité de Mme [T], qui indique que son rapprochement avec Mme [OL] n'était pas bien perçu, mentionne une absence de communication et des difficultés à travailler avec Mme [T], l'absence d'esprit d'équipe, conduisant plusieurs salariés à demander leur changement de service, ce qu'elle a elle-même fait,
-des questions de la délégation du personnel des pôles et fonctions groupe du 8 novembre 2013 relevant pour le service géré par Mme [T] un important turn over, des demandes de mutations nombreuses et des arrêts maladie de longue durée,
-des échanges de mails de l'appelante avec ses supérieurs traduisant des relations difficiles,
-un avertissement prononcé le 30 janvier 2015,
-une alerte en septembre 2015 relative à un harcèlement de sa part à l'encontre d'un autre salarié également membre du CHSCT,
-plusieurs échanges de mails avec le service des ressources humaines relatifs au décompte des heures de délégation,
-plusieurs arrêts de travail pour syndrome anxio-dépressif et d'épuisement, ainsi que l'avis d'inaptitude du médecin du travail en octobre 2012,
Autant d'éléments qui établissent des faits qui pris dans leur ensemble laissent présumer ou supposer en application de l'article L1154-1 du code du travail dans sa réaction issue de la loi du 8 août 2016, l'existence d'un harcèlement.
S'agissant de faits de harcèlement imputés à Mme [T] de 2009 à 2012, la société BNP Paribas verse aux débats plusieurs attestations de salariés ayant travaillé dans le service géré par cette dernière qui relatent une intégration facile, des relations aisées avec leur supérieure et une bonne ambiance de travail, un soutien et une écoute dans le suivi des dossiers, certains témoins engagés comme stagiaires ayant souhaité être embauchés dans ce service. Ces attestations émanent de salariés toujours présents dans l'entreprise ou le groupe, situation qui à elle seule ne suffit cependant pas à remettre en cause la sincérité et la véracité de leur témoignage. A cet égard, il convient d'observer que Mme [J] qui dans l'attestation produite par l'appelante dénonce de la part de Mme [T] des relations privilégiées avec certains salariés, des remarques dévalorisantes et une ambiance régressive, lourde et malsaine sans esprit d'équipe, lui a adressé un mail comme à M. [XG] en janvier 2012, pour les remercier d'avoir été à l'écoute de ses souhaits et de lui avoir permis d'évoluer, ce qui est contradictoire avec son attestation. Il n'est signalé aucune modification du comportement managérial de Mme [T] à l'égard de l'appelante par rapport à celui adopté vis à vis des autres membres du service comme le montre le témoignage de M. [G]. Les imputations de dénigrement public résultent uniquement des propres mails de Mme [OL] et ne sont corroborées par aucune situation concrète attestée objectivement.
Mme [OL] ne peut utilement s'emparer d'arrêts de travail de certaines salariées et notamment de Mme [Y] qui, ayant été sa responsable, avait une évaluation de ses compétences identique à celles de Mme [T], ni les départs de salariés de ce service, en l'absence de précision sur les éléments médicaux les concernant et de témoignages de leur part au soutien des imputations de la salariée. Il en est de même d'une décision de justice relative à une salariée de ce pôle dont la situation n'est pas transposable à la sienne. En outre, Mme [T] a été responsable de l'appelante avant que celle-ci ait la qualité d'élue.
Concernant M. [N], son supérieur à compter de son arrivée en 2013 dans le pôle Affaires juridiques groupe, les mails de ce dernier ne contiennent pas de termes blessants ni dévalorisants, dépassant les remarques que peut légitimement faire un responsable dans le cadre du contrôle de l'activité d'un salarié de son service. Il en est notamment ainsi des mails du 24 avril 2014 qui n'ont pas donné lieu par la CPAM à la reconnaissance demandée par la salariée d'un accident du travail .
L'ensemble de ces échanges révèle en revanche des relations conflictuelles initiées par la salariée avec ses différents supérieurs, les N+2 et les gestionnaires des ressources humaines dès lors qu'après avoir relevé un début encourageant dans les emplois successivement occupés, des carences et axes de progression au regard du niveau normalement attendu d'un juriste senior ont été énoncés par ses responsables. Ces difficultés relationnelles se manifestent de la part de Mme [OL] par une communication écrite formalisée sur la moindre remarque dont témoigne le nombre important de mails versés aux débats. En outre, cette communication s'abstient dans sa formulation virulente voire agressive de la prise en compte du lien hiérarchique, comme le lui ont fait remarquer plusieurs supérieurs qui ont mis en évidence la nécessité d'opérer une communication fluide par le biais de discussions orales. Ce comportement est d'ailleurs récurrent comme le montre l'attestation de M. [JM], responsable de Mme [OL] au sein de la société BNP Paribas Lease, personne morale distincte de la société intimée, lequel évoque une communication décalée de cet ordre et l'absence de discussions sur les travaux confiés. Ce mode de communication se manifeste également à l'égard d'autres salariés travaillant avec elle, ce qui induit comme l'indique M. [G] dans son attestation, un climat de suspicion et un manque de spontanéité des échanges avec elle.
L'employeur justifie que Mme [OL] a été invitée aux réunions de service comme aux manifestations plus conviviales organisées concernant son emploi et été rendue destinataire des comptes rendus de réunions, ce qui contredit l'existence d'une mise à l'écart de la vie du service invoquée par l'appelante.
Au regard des remarques régulièrement faites à la salariée sur le caractère inapproprié de sa communication à l'égard de ses supérieurs, notamment par Mme [E], gestionnaire des ressources humaines le 22 avril 2014, le jugement doit être confirmé en ce qu'il a considéré que l'avertissement prononcé le 30 janvier 2015 était justifié. En effet, si comme le relève l'appelante, les salariés bénéficient d'une liberté d'expression, les termes utilisés ne doivent cependant pas être excessifs, disproportionnés ou injurieux, ce qui n'est pas le cas du mail qu'elle a adressé le 9 décembre 2014 en réponse à celui du 31 octobre précédent de son supérieur, M. [N], contenant en annexe un rapport établi par un autre salarié présenté comme représentatif de ce qui est attendu d'un juriste senior en comparaison de ce qu'elle avait communiqué à un client interne. La réponse tardive (pièce 160) de l'appelante remet clairement en cause la légitimité de M. [N] à occuper un poste de son niveau hiérarchique (K ou L), son management, de même que ses compétences professionnelles comme sa capacité à apprécier la qualité du travail fourni par un salarié en réponse aux interrogations d'un client, réaction manifestement excessive et agressive, alors que M. [N] avait invité Mme [OL] à venir en discuter avec lui si elle le souhaitait, ce qu'elle n'a pas fait.
Il est par ailleurs démontré que la situation conflictuelle voire de harcèlement dénoncée à la société par Mme [OL] en 2010/2011, puis par Mme [U] en 2014 a été prise en compte par l'employeur, puisqu'au constat d'une situation de blocage en 2011, a été décidé avec l'accord de la salariée et le service des ressources humaines d'engager une procédure de mobilité malgré une ancienneté dans le poste ne respectant pas l'ancienneté minimale rappelée dans le guide de la mobilité, demande normalement instruite comme rappelé plus haut. L'alerte de Mme [U] en 2014 a donné lieu à une enquête menée par Mme [E], gestionnaire des ressources humaines, conformément à l'accord signé dans l'entreprise, laquelle après audition de Mme [OL], de trois managers et de trois salariés a conclu que la dégradation des relations ne pouvaient être imputée à son supérieur, en l'absence de sa part d'aucun mail agressif, ni d'instructions aux clients pour ne pas solliciter ou isoler la salariée.
Le médecin du travail a déclaré la salariée apte à son poste sans restriction en septembre 2011 alors qu'elle se trouvait sous la responsabilité de Mme [T] et qu'il était informé de ses difficultés relationnelles avec sa supérieure. Cet avis a été réitéré par un médecin du travail différent en avril 2014 alors qu'elle travaillait sous la responsabilité de M. [N].
S'agissant de l'exercice de ses mandats, il apparaît que les deux fonctions représentatives de la salariée exercées de 2013 à 2019, comme ses fonctions de conseillère prud'hommes à compter de 2018 et de défenseur syndical depuis 2019 entraînent un temps de délégation compris entre 70 et 90% dont témoignent les évaluations à compter de l'année 2015.
L'intimée justifie que dès le 10 octobre 2014, Mme [D] N+2 de la salariée a souhaité rencontrer Mme [OL] avec sa gestionnaire ressources humaines pour redéfinir ses missions au sein de son service, puisque sa désignation au CHSCT prenait effet le 13 octobre suivant, demande qui a été renouvelée le 15 octobre. Comme le rappelle son évaluation 2015, une organisation a été mise en place qui a évolué entre fin 2014 et août 2015, son temps de travail hebdomadaire passant de 1,5 à 0,5 jour pour prendre en compte la disponibilité énoncée chaque semaine par la salariée. L'évaluation 2017 met en évidence une redéfinition des missions confiées à la salariée, limitée à des mises à jour de note.
Une démarche identique de définition de son activité a été mise en place en 2019 (pièce 278) suite à la perte de ses mandats représentatifs et les échanges avec son responsable et son gestionnaire ressources humaines établissent que la salariée adresse mensuellement un planning prévisionnel de ses disponibilités. Ces échanges témoignent d'un suivi des disponibilités et de la charge de travail de l'appelante.
Des explications ont été effectivement demandées sur le décompte de son temps de délégation en début de mandat au CHSCT et des échanges sont intervenus entre la société et le président du CHSCT à ce sujet. Toutefois, les pièces produites par la société établissent que ces demandes d'explication concernaient également d'autres salariés, que le président a rappelé aux gestionnaires de carrière les dispositions de l'accord d'entreprise relatives au crédit d'heures, en relevant une dérive de bonne foi de l'utilisation des heures de délégation, situation qui a donné lieu lors de la réunion de CHSCT du 16 juin 2015 (pièce 205) à une définition de l'usage du crédit d'heures, qui n'a fait l'objet d'aucune remarque de ses membres. Le président du CHSCT lui a par ailleurs indiqué suite à une demande de validation des heures de délégation par la salariée qu'il lui faisait confiance.
Il est en outre attesté par les mails de la salariée et ses déclarations d'activité (pièce 226) , qu'elle a suivi les sessions de formation relatives à ses mandats représentatifs comme à ses fonctions de conseiller prud'hommes, ayant comme il a été dit plus haut, bénéficié de formations adaptées à ses prises de fonction successives.
Mme [OL] fait état d'une hostilité à son encontre de la part du président et du secrétaire du CHSCT qui ne se déduit pas des seuls mails adressés à la salariée. Elle produit également des attestations d'élus et de membres du même syndicat qui indiquent que ses interventions dans cette instance sont toujours mesurées, qu'elle sait garder son calme face aux attaques du représentant de la direction, qu'elle défend avec pertinence les droits de salariés et l'application du droit du travail, lesquelles sont contredites par les mails de l'appelante très virulents à l'égard du président, déplorant son manque de loyauté, multipliant les relances, lui reprochant de mettre obstacle à l'exercice de ses fonctions pour avoir fixé une réunion du CHSCT à la même heure qu'une réunion des délégués du personnel alors qu'elle dispose d'un suppléant. Sont également établies des remarques désobligeantes à l'égard du secrétaire. Le compte rendu du CHSCT du 26 septembre 2017 (pièce 238) témoigne d'une intervention de la salariée avant même que la séance ait été ouverte et que son objet ait été rappelé par le président, une demande aux autres membres de sortir et de quitter la séance estimant ne pas pouvoir se faire entendre, des échanges nombreux et virulents avec le président (page 31) qui contredisent le ton mesuré et calme évoqué dans les attestations.
L'employeur justifie par ailleurs de conflits avec d'autres membres élus du CHSCT, produit une attestation du médecin coordonnateur de BNP Paribas qui précise avoir remplacé le médecin du travail siégeant au CHSCT avec Mme [OL] au motif de l'ambiance délétère qui y régnait et des insinuations formulées contre lui par cette dernière. De la même façon, même si des positions divergentes peuvent s'exprimer au sein d'un syndicat, il apparaît que par un mail du 20 décembre 2017, adressé en copie à l'ensemble des élus de ce syndicat, le délégué syndical national CFDT, M. [W] a demandé à Mme [OL] de démissionner ou à tout le moins de ne plus s'exprimer au nom du syndicat en raison de ses prises de position et de son comportement en contrariété avec des décisions collectives, information également fournie au président du CHSCT, ce qui constitue une situation inhabituelle.
La société BNP Paribas démontre avoir répondu aux alertes importantes initiées par Mme [OL] et notamment celle relative à la situation de Mme [C] et adressé des éléments de réponse aux remarques de l'inspection du travail. De la même façon, si le service des ressources humaines a initié une alerte dans l'intérêt de M. [S] secrétaire adjoint du CHSCT représentant le même syndicat que l'appelante, évoquant une possible situation de harcèlement de la part de celle-ci, il est démontré que l'enquête réalisée a conclu à l'absence de situation de cette nature.
Les nombreux arrêts de travail versés aux débats par la salariée, en raison d'une anxiété, d'un état dépressif et d'un burn out comme la déclaration d'inaptitude en octobre 2012 au poste de juriste au sein du pole ITP caractérisent une dégradation de son état de santé, mais ne peuvent à eux seuls établir une situation de harcèlement discriminant en lien avec ses fonctions syndicales, ce d'autant qu'ils sont pour partie antérieurs à sa qualité d'élue. Il en est de même des documents médicaux émanant des praticiens consultés par Mme [OL] dès lors qu'ils ignorent les conditions effectives de travail de leur patiente.
Au regard de l'ensemble de ces éléments, l'existence d'une situation de harcèlement discriminatoire n'est pas caractérisée.
Mme [OL] évoque à titre subsidiaire un manquement de la société à son obligation de sécurité telle que prévue par les articles L 4121-1 et 4212-2 du code du travail. Dés lors que la réalité d'un harcèlement moral n'est pas établi, l'argumentation relative à une absence de prévention d'une situation de cette nature ne peut accueillie. En outre, il n'est pas discuté que l'appelante a été suivi régulièrement par le médecin du travail, que suite à l'avis d'inaptitude d'octobre 2012, ont été recherchés des postes prenant en compte ses préconisations ce qui a abouti à la proposition du poste de juriste financier. De la même façon, la situation de conflit avec sa supérieure peu de temps après son arrivée dans l'entreprise a été solutionnée par une mobilité et l'alerte émise sur la situation de la salariée en 2014 a été instruite. En conséquence, le manquement imputé à la société n'est pas établi.
*Sur la tentative de licenciement liée à ses mandats :
Il apparaît que la société BNP Paribas a engagé en décembre 2017 à l'encontre de Mme [OL] une procédure de licenciement fondée sur un abus de pouvoir dans l'exercice de ses mandats donc pour des faits se situant en dehors de l'exécution de son contrat de travail. Dans ce cadre, l'intimée a sollicité le 21 février 2018 l'autorisation de l'inspection du travail. L'inspection du travail après enquête a par décision du 22 juin 2018, confirmé la décision implicite de rejet du 22 avril 2016 refusant l'autorisation. Par décision du 10 décembre 2018, la ministre du travail a retiré la décision implicite de rejet du recours hiérarchique née le 22 octobre 2018, annulé la décision de l'inspectrice du travail du 22 juin 2018 et refusé le licenciement.
Par jugement du 12 novembre 2019, le tribunal administratif de Paris a annulé la décision de la ministre et lui a enjoint de procéder au réexamen de la demande d'autorisation de licenciement. La ministre par décision du 20 mars 2020 a retiré la décision implicite de rejet née le 14 janvier 2020 et refusé le licenciement de la salariée.
Il est justifié par la société BNP Paribas de la saisine de la juridiction administrative le 20 mai 2020 d'une requête aux fins d'annulation de la décision du 10 mars précédent, de sorte que la tentative de licenciement infondée en lien avec l'exercice par l'appelante de ses mandats n'est pas établie, l'analyse des motifs invoqués par l'employeur échappant au juge judiciaire.
Il s'en déduit que l'employeur manque à présenter des éléments objectifs au soutien de ses décisions uniquement en ce qui concerne l'évaluation de la part variable de la rémunération de l'appelante pour les années 2012 à 2014, années suivant immédiatement son action en justice et l'obtention de ses mandats représentatifs, de sorte que la discrimination sur ce point est établie. Le jugement sera réformé en ce sens.
- Sur le préjudice de Mme [OL] :
Comme indiqué plus haut, Mme [OL] ne peut prétendre à un positionnement au niveau J dès le 1er janvier 2013 et au niveau K à compter du 1er janvier 2018, ni invoquer une discrimination en ce qui concerne la part fixe annuelle de sa rémunération.
En ce qui concerne la part variable, au regard de ce qui précède sur ce point, celle-ci pour les années 2012 à 2014 aurait dû à tout le moins être égale pour chaque exercice à celle de 2011, soit 3000€. L'appelante peut donc prétendre à la somme de 6600€ au titre du rappel de salaire, outre une somme de 3168€ relative à l'incidence sur la retraite, soit 48%, dès lors que Mme [OL] invoque à juste titre une espérance de vie moyenne de l'ordre de 19 ans après sa prise de retraite.
La cour d'appel de Paris, juridiction d'appel du tribunal judiciaire de Paris désigné comme juridiction compétente par la société BNP Paribas, a vocation à examiner la demande de Mme [OL] au titre de l'incidence du rappel de part variable sur l'intéressement et la participation. Cependant à défaut d'éléments produit relatif à son bilan de rémunération pour les années en cause, sa demande sur ce point ne peut prospérer.
Le harcèlement discriminatoire invoqué par l'appelante n'est pas caractérisé, non plus qu'un manquement de la société à son obligation de sécurité de sorte que la demande indemnitaire relative à un préjudice moral subi à ce titre ne peut être accueillie.
En revanche, la suppression totale de la part variable de la salariée pour l'année 2012, puis l'octroi pour les deux années suivantes d'un montant uniquement symbolique, non justifiés par des éléments objectifs relatifs à la qualité de sa prestation de travail, comme rappelé plus haut, a entraîné comme l'indique l'appelante un sentiment de dévalorisation, préjudice moral qui doit être indemnisée par l'octroi d'une somme de 4000€.
Concernant sa demande indemnitaire au titre de la violation des accords collectifs, au regard de ce qui précède, Mme [OL] ne peut utilement invoquer l'accord sur l'égalité professionnelle hommes-femmes de la société BNP Paribas Lease Group, société distincte de son employeur, l'accord relatif au harcèlement et à la violence au travail du 11 juillet 2011, ni les dispositions de la convention collective de la banque se rapportant au congé de maternité.
Mme [OL] a bénéficié des entretiens de prise de mandats, d'un suivi de son activité et de sa charge de travail comme le prévoit l'accord sur le dialogue social et les instances représentatives du personnel. Elle a de même bénéficié des mesures d'examen annuel de la situation salariale prévue par l'article 3 du chapitre 1 de la section relative au parcours professionnel et à la gestion des salariés titulaires de mandat, puisqu'elle a obtenu en 2015 et en 2016 une augmentation de la part fixe de sa rémunération et depuis 2016 une réévaluation de sa part variable. En conséquence, elle sera déboutée de sa demande indemnitaire.
-Sur la demande du syndicat CFDT des banques :
Conformément aux dispositions de l'article L 2132-3 du code du travail, les syndicats professionnels ont le droit d'agir en justice afin d'exercer les droits réservés à la partie civile concernant des faits portant un préjudice direct ou indirect à l'intérêt collectif de la profession qu'ils représentent.
En l'espèce, dès lors que la société BNP Paribas se trouve dans l'impossibilité de justifier par des éléments objectifs la part variable de rémunération accordée à Mme [OL] de 2013 à 2015, ce qui correspond à la période de désignation de la salariée comme déléguée du personnel et membre du CHSCT, ce qui conduit à reconnaître une discrimination prohibée par l'article L2141-5 du code du travail, le syndicat est recevable à agir et subi un préjudice, la salariée en cause étant désignée dans ces organismes en tant que sa représentante. Doit en conséquence lui être accordée une somme de 3000€ de dommages et intérêts. Le jugement sera réformé de ce chef.
La société BNP Paribas sera condamnée à verser à Mme [OL] une indemnité de 5000€ au titre des frais de première instance et d'appel et au syndicat CFDT des banques et des sociétés financières une indemnité de 1500€ de frais irrépétibles.
Elle supportera les dépens de première instance et d'appel.
PAR CES MOTIFS :
La Cour, statuant publiquement, en dernier ressort, par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe,
CONFIRME le jugement, sauf en ce qu'il a débouté Mme [OL] au titre de la discrimination, l'a condamnée au paiement d'une indemnité des frais irrépétibles et mis à sa charge les dépens ;
Statuant à nouveau,
DIT que Mme [OL] a fait l'objet d'une discrimination dans la fixation de sa part variable de 2012 à 2014 en lien avec ses activités syndicales ;
CONDAMNE la société BNP Paribas à lui verser :
-6600 € de rappel de rémunération variable au titre de ces années,
-4000 € en réparation de son préjudice moral ;
RAPPELLE que les sommes de nature salariale produisent intérêts au taux légal à compter de la réception par le défendeur de la convocation devant le bureau de conciliation et que les autres sommes produisent intérêts au taux légal à compter de l'arrêt,
ORDONNE la capitalisation des intérêts conformément aux dispositions de l'article 1343-2 du code civil,
y ajoutant,
DÉCLARE recevable l'intervention du Syndicat CFDT des banques et des sociétés financières,
CONDAMNE la société BNP Paribas à lui verser la somme de 3000€ de dommages et intérêts,
CONDAMNE la société BNP Paribas à verser à Mme [OL] une indemnité de 5000€ d'indemnité de frais irrépétibles et au syndicat CFDT des banques et des sociétés financières une indemnité de 1500€ à ce titre,
CONDAMNE la société BNP Paribas aux dépens de première instance et d'appel.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE