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02/07/2020 | FRANCE | N°18/04148

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 7, 02 juillet 2020, 18/04148


Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux partiesAU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 6 - Chambre 7



ARRÊT DU 02 JUILLET 2020



(n° , 13 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/04148 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B5KKR



Décision déférée à la Cour : Jugement du 16 Février 2018 -Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de PARIS - RG n° 13/16704







APPELANTES



SA ATTIJARIWAFA BANK EUROPE


[Adresse 2]

[Localité 3]



SA ATTIJARIWAFA BANK MAROC

[Adresse 1]

[Localité 6] (Maroc)



Toutes deux représentées par Me Cédric GUYADER, avocat au barreau de PARIS, toque: E1227



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Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux partiesAU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 7

ARRÊT DU 02 JUILLET 2020

(n° , 13 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/04148 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B5KKR

Décision déférée à la Cour : Jugement du 16 Février 2018 -Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de PARIS - RG n° 13/16704

APPELANTES

SA ATTIJARIWAFA BANK EUROPE

[Adresse 2]

[Localité 3]

SA ATTIJARIWAFA BANK MAROC

[Adresse 1]

[Localité 6] (Maroc)

Toutes deux représentées par Me Cédric GUYADER, avocat au barreau de PARIS, toque: E1227

INTIMEE

Mme [L] [F]

[Adresse 4]

[Localité 5]

Représentée par Me Michèle UZAN FALLOT, avocat au barreau de PARIS, toque : C1095

COMPOSITION DE LA COUR :

En application :

- de l'article 4 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19;

- de l'ordonnance n° 2020-304 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables aux juridictions de l'ordre judiciaire statuant en matière non pénale et aux contrats de syndic de copropriété, notamment ses articles 1er et 8 ;

- de l'ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020 modifiée relative à la prorogation des délais échus pendant la période d'urgence sanitaire et à l'adaptation des procédures pendant cette même période ;

   L'affaire a été retenue selon la procédure sans audience le 20 mai 2020, les avocats y ayant consenti expressément ou ne s'y étant pas opposés dans le délai de 15 jours de la proposition qui leur a été faite de recourir à cette procédure;

La cour composée comme suit en a délibéré :

Madame Brigitte DELAPIERREGROSSE, Présidente de Chambre,

Madame Marie-Hélène DELTORT, Présidente de Chambre,

Monsieur François MELIN, Conseiller.

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE,

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

- signé par Madame Brigitte DELAPIERREGROSSE, Présidente de chambre et par Madame Lucile MOEGLIN, Greffière présente lors de la mise à disposition.

EXPOSÉ DU LITIGE :

Mme [F] a été engagée en qualité d'ingénieur études et développement dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée à compter du 1er novembre 2007 par la société Attijariwafa Bank Maroc, membre d'un groupe financier du Maghreb présent dans 24 pays.

Par trois ordres de mission successifs à l'étranger, signés avec la société Attijariwafa Bank Maroc, Mme [F] a été détachée chaque mois au sein de la société Attijariwafa Bank Europe basée à [Localité 8], du 1er novembre 2008 au 31 janvier 2009.

Un contrat de détachement auprès de la société Attijariwafa Bank Europe a été signé le 16 janvier 2009 à effet du 1er février 2009, entre Mme [F] et la société Attijariwafa Bank Maroc pour une durée d'une année renouvelable par tacite reconduction. Le 27 février 2009, un avenant au contrat a été régularisé modifiant la rémunération de la salariée. De nouveaux ordres de mission à l'étranger ont été régularisés pour les mois de mars, juillet et août 2009.

Par courrier du 18 juin 2013, la société Attijariwafa Bank Maroc a informé la salariée que son détachement auprès de la société Attijariwafa Bank Europe prendrait fin le 30 septembre 2013 et qu'elle serait réintégrée au siège marocain à compter du 1er octobre 2013. Mme [F] a contesté cette décision par courrier du 2 juillet 2013, faisant valoir qu'elle était salariée de la société Attijariwafa Bank Europe.

Par courrier du 15 juillet 2013, la société Attijariwafa Bank Europe a pris acte de la fin du détachement de la salariée au 30 septembre 2013.

Le 24 octobre 2013, la société Attijariwafa Bank Maroc a notifié à Mme [F] son licenciement pour abandon de poste.

Mme [F] a saisi le conseil de prud'hommes de Paris le 18 novembre 2013 pour faire constater l'existence d'un contrat de travail avec la société Attijariwafa Bank Europe et voir dire que la rupture de son contrat de travail s'analysait en un licenciement sans cause réelle et sérisue.

Par jugement en date du 16 février 2018, le conseil de prud'hommes en sa formation de départage a sous le bénéfice de l'exécution provisoire':

-rejeté l'exception d'incompétence soulevée par la société Attijariwafa Bank Maroc et la société Attijariwafa Bank Europe,

-constaté l'existence d'un contrat de travail entre Mme [F] et la société Attijariwafa Bank Europe,

-dit que la rupture s'analysait en un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

-condamné solidairement la société Attijariwafa Bank Maroc et la société Attijariwafa Bank Europe au paiement des sommes suivantes':

*9. 367, 80 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis et 936, 78 € au titre des congés payés y afférent,

*3. 302, 07 € au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement,

*25. 000 € de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

*8. 870, 90 € au titre du rappel du 13ème mois,

*21. 163, 48 € au titre des rappels de bonus et 2. 116, 34 € au titre des congés payés afférents,

-dit que ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter de la réception par l'employeur de la convocation en bureau de conciliation et celles à caractère indemnitaire à compter de la présente décision et que les intérêts dus pour une année entière se capitaliseront,

-débouté Mme [F] de ses demandes de dommages et intérêts pour irrégularité de procédure et inégalité de traitement,

-débouté Mme [F] de sa demande de restitution au titre des cotisations chômage,

-débouté la société Attijariwafa Bank Maroc de sa demande de restitution de la somme de 21040,29 € au titre des salaires versés,

-condamné les sociétés au paiement de 1. 500 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Les sociétés Attijariwafa Bank Europe et Attijariwafa Bank ont interjeté appel de ce jugement par déclaration du 13 mars 2018.

Suivant conclusions transmises par la voie électronique le 13 février 2020, la société Attijariwafa Bank et la société Attijariwafa Bank Europe demandent à la cour de :

A titre principal :

- infirmer le jugement et demande à la cour de :

-dire que Mme [F] n'était pas salariée de la société Attijariwafa Bank Europe ,

-mettre hors de cause la société Attijariwafa Bank Europe,

-débouter Mme [F] de l'ensemble de ses demandes d'indemnités liées à la rupture d'un prétendu contrat de travail avec la société Attijariwafa Bank Europe, dirigées contre les deux sociétés,

-débouter Mme [F] de sa demande de paiement d'un bonus et des congés payés afférents, dirigée contre les deux sociétés,

-prendre acte de ce que la société Attijariwafa Bank Europe s'engage à rembourser à Mme [F] la somme de 2.201,25 € au titre des cotisations chômage prélevées sur ses rémunérations dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt,

A titre subsidiaire,

-fixer le salaire de reférence de Mme [F] à 2556,16 € bruts,

-calculer les indemnités de préavis et de licenciement sur cette base,

-confirmer le jugement en ce qu'il a débouté Mme [F] de sa demande de remboursement des cotisations chômage,

-infirmer le jugement en ce qu'il a débouté la société Attijariwafa Bank Maroc de sa demande de remboursement de 21049,29 € au titre des rémunérations perçues au Maroc, et condamner Mme [F] au paiement de cette somme,

-infirmer le jugement quant à la condamnation solidaire des deux sociétés à verser à Mme [F] 21163,48 € de bonus outre les congés payés afférents, la débouter de cette demande,

A titre infiniment subsidiaire:

-infirmer le jugement sur le montant du bonus et le limiter à la somme de 17.018,48 € bruts et de 1.701,84 € bruts de congés payés afférents,

En tout état de cause,

-confirmer le jugement en ce qu'il a rejeté la demande d'indemnité pour procédure irrégulière, la demande de dommages et intérêts pour inégalité de traitement et discrimination,

-infirmer le jugement en ce qu'il a condamné solidairement les sociétés au paiement de 8.870,90 € au titre du rappel de 13ème mois, et rejeter cette demande,

-condamner Mme [F] au versement de 3. 000 € à chacune des sociétés au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi que les dépens de l'instance.

Pour contester l'existence d'un contrat de travail entre l'intimée et la société Attijariwafa Bank Europe, les sociétés font valoir que Mme [F] a été temporairement détachée par la société Attijariwafa Bank Maroc, son employeur, auprès de sa filiale, exerçant en France. Elles soulignent que dans ce cadre, le salarié d'une entreprise établie hors de France se voit appliquer certaines dispositions légales et conventionnelles françaises et est soumis à un double lien de subordination, à l'égard de son employeur titulaire du pouvoir de direction et à l'égard de l'entreprise d'accueil, titulaire d'un pouvoir de direction subsidiaire et d'une autorité déléguée et temporaire.

Les sociétés appelantes relèvent que le contrat de détachement est très précis sur l'identification de l'employeur, sa durée et la persistance du lien de subordination avec la société Attijariwafa Bank Maroc pendant toute la période de détachement, comme en témoignent le pouvoir d'affectation, le droit de fixer sa rémunération, le droit de gérer la carrière et le droit de sanction dont la société Attijariwafa Bank Maroc a usé en détachant Mme [F]. Les appelantes ajoutent que la mission de l'intimée avait un caractère temporaire et bien défini puisqu'elle était en lien avec le développement du projet Delta. Elles observent qu'à supposer que les règles relatives au détachement n'aient pas été respectées, cette situation ne suffit pas à caractériser un contrat de travail avec l'entité d'accueil.

A cet égard, elles relèvent que la société Attijariwafa Bank Maroc a toujours continué à régler le salaire, à le revaloriser et à établir les bulletins de paie de Mme [D] durant toute la période de détachement, que le paiement d'une partie de son salaire en France résulte de l'avenant au contrat conclu sans intervention de la filiale, entre la salariée et la société marocaine et donc sur instruction de la société Attijariwafa Bank Maroc.

En dernier lieu, les sociétés font valoir que les démarches administratives accomplies par la société Attijariwafa Bank Europe ne sont que des formalités liées au détachement temporaire de Mme [F] et que la déclaration unique d'embauche émise par la société Attijariwafa Bank Europe résulte d'une erreur administrative de la banque ne justifiant en rien l'existence d'un contrat de travail entre cette société et Mme [D], qu'il en est de même de la participation aux élections des représentant du personnel, qui est possible pour les salariés détachés sous réserve de conditions remplies par l'intimée. Elles ajoutent qu'elle ne peut se prévaloir de l'attestation de la DRH de la société filiale qui en fait a été établie dans le cadre de la demande de naturalisation de la salariée, et est contredite par les attestations qu'elles produisent. Elles en déduisent que la rupture de la relation contractuelle suite au refus de la salariée de rejoindre le siège social au Maroc ne peut constituer un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Les appelantes estiment que Mme [F] ne peut solliciter un rappel de salaire au titre du bonus visé dans son contrat de détachement, puisque le juge prud'homal n'est pas compétent pour se prononcer sur l'exécution d'un contrat de droit marocain, soumis à la compétence exclusive des juridictions marocaines, que la salariée ne peut raisonner en appliquant à ce bonus les règles du droit français. Subsidiairement, elles estiment que la société Attijariwafa Bank Europe ne peut en être tenue et que les calculs de la salariée sont erronés. Elles ajoutent pareillement qu'elle ne peut invoquer la convention collective de la banque au soutien de sa demande de paiement d'un treizième mois, qu'en outre la société filiale rémunère les salariés sur 12 mois comme le permet la convention collective.

Concernant l'allégation d'une discrimination salariale, les appelantes observent que les pièces n'établissement pas la réalité des salaires évoqués par l'intimée, qu'elle ne présente pas d'éléments pertinents sur ce point.

Enfin, si l'existence d'un contrat de travail était retenu entre la société d'accueil et la salariée, la société marocaine estime que les rémunérations versées à compter d'octobre 2009 sont sans fondement.

Selon conclusions transmises par la voie électronique le 28 décembre 2018, Mme [F] conclut à la confirmation du jugement sauf en ce qui concerne le rejet de sa demande de dommages et intérêts pour inégalité de traitement et demande à la cour de':

-constater que les présentes conclusions comportement sommation à la société Attijariwafa Bank Europe de justifier des salaires payés':

au 3 septembre 2012, à M. [Z],

au 18 mars 2013, à M. [X],

au 8 avril 2013, à M. [K],

au 8 avril 2013 à M. [I],

-condamner les sociétés au paiement des sommes suivantes':

*20. 000 € pour inégalité de traitement,

*1. 500 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi que les entiers dépens.

A titre subsidiaire,

- condamner la société Attijariwafa Bank Europe au paiement de 2. 201, 25 € prélevées au titre des cotisations chômage sur ses rémunérations,

A titre infiniment subsidiaire,

-donner acte à la société Attijariwafa Bank Europe de ce qu'elle s'engage à lui rembourser la somme de 2. 201, 25 € au titre des cotisations chômage versées par Mme [F] et tant que de besoin la condamner à la payer.

Concernant le détachement, Mme [F] fait observer qu'ayant décidé de s'établir en France où elle a effectué ses études et organisé sa vie familiale, elle avait donné sa démission de la société Attijariwafa Bank Maroc en septembre 2008 ; qu'afin de la retenir cette dernière lui a donné des assurances sur la possibilité de lui trouver un poste permanent au sein de sa filiale européenne, installée à [Localité 8], dans le cadre d'un détachement dans un premier temps, situation provisoire avant un transfert au sein de la société Attijariwafa Bank Europe. Elle explique la signature du contrat de détachement du 16 janvier 2009 par les difficultés administratives imputables à son employeur rencontrées à son arrivée en France.

Se fondant sur les dispositions des articles L 1262-1 et suivants du code du travail relatives au détachement, elle rappelle que cette opération doit être temporaire et sa durée déterminée à l'avance, que le droit français n'a vocation à s'appliquer au salarié que dans des matières limitativement énumérés par l'article L 1262-4, que son activité au sein de la société en France ne se situe pas dans ce cadre.

L'intimée soutient qu'elle n'était pas intégrée à un simple projet, consistant en la refonte des systèmes d'information , le projet Delta, mais bien à la société exerçant en France, son retour au Maroc n'ayant jamais été envisagé.

Elle relève à cet égard, qu'à son arrivée, elle a été placée sous l'autorité de M.[C], cadre de la filiale, seul responsable du projet Delta ce jusqu'en 2010, puis sous la responsabilité de M.[G], salarié détaché à la succursale française pour trois ans en qualité de directeur des services et de l'organisation informatique Europe. Elle ajoute que ses fonctions ont évolué, le projet DELTA étant achevé en juin 2009, sans qu'il lui soit demandé de revenir au Maroc et qu'elle a été affectée à des tâches de responsable support dépendant de l'activité normale et permanente de la société française et sous sa subordination, que les relations de travail n'étaient donc plus régies dans le cadre d'un détachement.

L'intimée fait observer qu'à compter du 1er octobre 2009, la société Attijariwafa Bank Europe l' a intégrée dans ses effectifs, a payé son salaire et établi ses bulletins de salaires, lui donnait des ordres et consignes, contrôlait et évaluait l'exécution de son travail et décidait de ses promotions. Elle relève qu'à compter de cette date ne lui a plus été payée d'indemnité de détachement. Enfin, la salariée fait observer qu'elle participait aux élections des représentants du personnels, qu'elle bénéficiait des dispositions du droit du travail français concernant la formation professionnelle, qu'elle avait participé à la journée de solidarité en 2013, que la banque française avait effectué les démarches pour qu'elle obtienne une autorisation de travail en France et que sa déclaration unique d'embauche avait été effectuée par la banque française, autant d'indice d'un contrat de travail. Elle ajoute qu'elle n'avait plus de contact avec la société marocaine.

Elle déduit de l'existence du contrat de travail avec la société française que cette dernière ne pouvait mettre fin à son contrat, sans engager une procédure de licenciement au motif d'une cause réelle et sérieuse ; qu'à défaut, elle a droit aux indemnités de rupture calculées sur la base d'un salaire mensuel de 3122,60 € et à des dommages et intérêts. Elle ajoute que la relation contractuelle étant soumise à la convention collective de la banque, elle peut prétendre au paiement d'un 13ème mois, sans qui puisse lui être opposé un accord du 24 juin 2014, postérieur à son licenciement et à un rappel de bonus.

Elle impute à la société une politique salariale inégalitaire voire discriminatoire au bénéfice des salariés masculins, dont témoignent les pièces qu'elle produit et qui justifie l'indemnisation deu préjudice subi de ce fait.

Elle estime que la société Attijariwafa Bank Maroc a manqué à son engagement et contribué à la réalisation de son préjudice, ce qui justifie la condamnation in solidum.

Pour un plus ample exposé des moyens des parties, la cour se réfère expressément aux conclusions transmises par la voie électronique.

L'instruction a été déclarée close le 20 mai 2020.

La cour a fait connaître aux parties qu'elle avait décidé d'appliquer au dossier la procédure sans audience prévue par l'article 8 de l'ordonnance 2020-304 du 25 mars 2020. Les parties ne s'y sont pas opposées.

MOTIFS :

- Sur l'existence d'un contrat de travail entre la société Attijariwafa Bank Europe et Mme [F] :

L'article L 1262-1 du code du travail permet à un employeur établi hors de France de détacher temporairement des salariés sur le territoire national, à condition qu'il existe un contrat de travail entre cet employeur et le salarié et que leur relation subsiste pendant la période de détachement. Cette opération peut notamment être réalisée entre entreprises d'un même groupe.

Le détachement intra-groupe est donc par essence temporaire et la mission du salarié détaché doit en conséquence être précisément définie dans son objet comme dans sa durée.

Il est toutefois constant que le non-respect par l'employeur étranger de ces règles n'a pas pour effet de conférer automatiquement la qualité d'employeur à l'entreprise établie en France, accueillant le salarié. A cet égard, dès lors que le contrat de travail ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties, ni de la dénomination de leur convention, mais des conditions de fait dans lesquelles est exercée la prestation de travail, il appartient au salarié détaché qui revendique le bénéfice d'un contrat de travail avec la société d'accueil de rapporter la preuve de ce contrat et plus particulièrement de sa caractéristique principale, à savoir l'existence d'un lien de subordination à l'égard de cette société. Ce lien de subordination est lui-même caractérisé par l'exécution du travail rémunéré sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné.

Les pièces produites par la salariée révèlent que le détachement de Mme [F] au sein de la société Attijariwafa Bank Europe établie à [Localité 8], à compter du 1er novembre 2008 fait suite à sa démission en octobre précédent en raison de sa volonté de s'installer à [Localité 8] avec son époux qui y résidait déjà, ce qui n'est pas réellement discuté par les appelantes et résultent des échanges par mails de cette époque.

Le détachement de Mme [F] a été organisé dans un premier temps du 1er novembre 2008 au 31 janvier 2009, par le biais de trois ordres de mission de la société marocaine d'une durée d'un mois chacun, décrivant précisément la mission de la salariée, à savoir l'accompagnement de la mise en place de la solution Delta à la succursale de [Localité 8]. Les parties ont ensuite régularisé un contrat de détachement à compter du 1er février 2009 (et non 2008 comme mentionné par erreur). Au titre de la mission, article 2, ce contrat indiquait que la salariée était détachée en qualité d'ingénieur en informatique, ce qui de fait caractérise un emploi ou une fonction et non une mission, sans précision complémentaire sur le contenu de son affectation. La durée du détachement était prévue initialement pour une année, avec une possibilité de renouvellement à l'initiative de la société Attijariwafa Bank Maroc et par tacite de reconduction par période d'un an jusqu'à l'achèvement de la mission confiée.

Ainsi que l'a relevé le premier juge, cette formulation ne permettait pas une détermination précise indiscutable la durée convenue du détachement. Par ailleurs, le compte rendu du comité de pilotage n° 4 du 8 octobre 2008 versé aux débats montre que le déploiement du progiciel Delta au sein de la filiale Attijariwafa Bank Europe et des agences européennes devait être achevé au plus tard fin 2009 et les appelantes ne démontrent pas de retard dans la mise en oeuvre de ce planning, ne justifiant d'aucune notification du renouvellement du détachement à Mme [F] pour ce motif, à l'initiative de la société marocaine, seule habilitée à prendre cette décision au terme du contrat de détachement. A cet égard, les seules pièces produites sur ce dernier point émanent sous forme d'attestations de travail de juillet 2010 et 2011 de la société française, tiers au contrat de détachement sans qu'aucune pièce n'établisse que cette décision ait été transmise initialement par la société mère. Cette dernière ne démontre pas plus que la mission de déploiement du système informatique Delta a pris fin seulement en 2013 avant l'envoi de la lettre du 18 juin 2013 prescrivant le retour de la salariée au Maroc. Elle ne peut prétendre, sans au surplus en justifier que le suivi du fonctionnement de ce logiciel a nécessité la mobilisation d'un salarié à plein temps pendant quatre ans.

Il s'en déduit que les appelantes ne peuvent invoquer un contrat de détachement jusqu'en juin 2013 répondant aux exigences de l'article 1262-1 du code du travail.

Si les sociétés observent justement que le détachement d'un salarié conduit à la création d'un double lien de subordination à l'égard de ce dernier, l'entreprise d'accueil exerçant un contrôle de fait et bénéficiant d'une autorité déléguée par la société d'origine, encore faut-il que l'employeur initial ait conservé un pouvoir de direction et de contrôle du salarié.

Or, en l'espèce, il ne résulte pas des pièces produites aux débats que la société Attijariwafa Bank Maroc avait conservé un contrôle sur la définition et le contenu du poste confié à Mme [F], sur la qualité de son travail et l'évolution de sa rémunération.

La convention de détachement prévoyait en effet une rémunération annuelle brute à la seule charge de la société marocaine, servie en France de 24000 € portée à 26000 € par l'avenant du 27 février 2009 et une rémunération annuelle brute servie au Maroc de 73000 dirhams (6165 € environ). Les bulletins de paie de la salariée montrent que la société Attijariwafa Bank Maroc a cessé de s'acquitter du paiement de la rémunération servie en France d'environ 2166€ par mois, à compter du mois d'octobre 2009. Celle-ci a alors été réglée directement sur un compte BNP par la société française qui a établi ses bulletins de salaire mentionnant une entrée dans la société le 1er octobre 2009, sans qu'il ne soit justifié par les appelantes d'une instruction de la société mère en ce sens à sa filiale ou d'un versement d'une somme équivalente à cette dernière. Par la production de son extrait de compte détenu à la banque Attijariwafa bank Europe, Mme [F] justifie également qu'une somme de 2700 à 2790 € (90 € par jour) versée au titre du détachement (pièces 31 et 32) a cessé d'être réglée par la société marocaine également en octobre 2009, laquelle a conservé uniquement le paiement d'une somme mensuelle de l'ordre de 400 à 500 €.

Il est par ailleurs établi que le montant de la rémunération de Mme [F] a, en mars 2010 et 2011, ainsi qu' en mai 2012 fait l'objet d'une revalorisation à l'initiative déclarée de la société française sous la signature de son Directeur des ressources humaines et de son Directeur général adjoint, qui lui ont également indiqué le montant des primes accordées en raison de la qualité de son travail, sans faire la moindre référence à une décision de la société mère, laquelle ne produit pas de pièce accréditant qu'elle soit à l'origine de cette revalorisation.

Les échanges de mails produits par la salariée avec M. [G], salarié détaché d'une filiale du groupe pour occuper à compter d' avril 2010 le poste de directeur des systèmes d'information et organisation Europe au sein de la société française témoignent de ce qu'elle a été intégrée à ce service jusqu'à son départ de la société, qu'elle y accomplissait des tâches de support informatique en qualité de responsable support, pour le compte de la société filiale. Comme le montre la fiche de poste annexée à son évaluation en 2013, son activité comportait le suivi, le traitement et le compte rendu des incidents, l'assistance aux utilisateurs, le support technique et fonctionnel, la continuité de service et la participation aux projets en amont, outre une veille technologique . Elle impliquait également des compétences managériales et était donc sans lien avec le déploiement du logiciel Delta achevé fin 2009 et beaucoup plus vaste que le suivi de seul logiciel, évoqués par les appelantes, ce que confirment les comptes rendus effectués à son supérieur (pièces 40). Cette fonction correspondait en fait à un emploi permanent de la direction des systèmes d'information de la société établie en France, dont atteste l'organigramme versé aux débats qui n'est pas discuté par les appelantes

A cet égard, il apparaît que l'évaluation de Mme [F] était effectuée par son responsable au sein de la société Attijariwafa bank Europe, lequel lui adressait également les remarques et critiques sur son travail et son comportement comme en témoignent les échanges de mails , sans qu'aucune pièce produite par les banques ne mettent en évidence, une communication à la société mère des évaluations de la salariée; du suivi de ses compétences et de ses besoins en formation ou à tout le moins un contrôle partagé de son activité.

Ces seuls éléments suffisent à établir qu'à compter d'octobre 2009, Mme [F] n'a plus travaillé dans la cadre d'un détachement de la société marocaine, mais a exercé les fonctions qui lui étaient confiées sous la subordination exclusive de la société Attijariwafa bank Europe dans le cadre d'un emploi permanent de cette société et par suite l'existence d'un contrat de travail de droit français avec celle-ci. Le jugement sera confirmé sur ce point.

-Sur les demandes de Mme [F] :

* Sur les demandes relatives à la rupture du contrat de travail:

Il n'est pas discuté que la société Attijariwafa bank Europe à la suite de la décision de la société mère a par courrier du 15 juillet 2013 notifié à Mme [F] la fin de son activité à [Localité 8] au 30 septembre suivant. Cette rupture imputable à l'employeur s'analyse en un licenciement qui ne pouvait être mis en oeuvre sans appliquer la procédure prévue par le code du travail et invoquer une cause réelle et sérieuse. Le jugement qui a estimé que le licenciement était sans cause réelle et sérieuse doit être confirmé.

Mme [F] bénéficiait au sein de la société Attijariwafa bank Europe d'une ancienneté supérieure à deux ans en tant que cadre, conformément aux dispositions de l'article 30 de la convention collective de la banque, mentionnée sur ses bulletins de salaire et conforme à l'activité de l'entreprise, elle a droit à une indemnité compensatrice de préavis égale à trois mois de salaire. Concernant le montant de son salaire, les appelantes observent à juste titre, que son calcul ne peut intégrer les indemnités compensatrices de congés payés versées avec le salaire de septembre 2013 qui indemnisent des congés que le salarié n'a pu prendre. Son salaire moyen mensuel doit donc être fixé à 2556,17 €. L'indemnité compensatrice est en conséquence égale à 7668,51 €, outre 766,85 € de congés payés afférents. Le jugement sera réformé en ce sens.

En application de l'article 26 de la convention collective, la mensualité qui sert de base à l'assiette de calcul de l'indemnité de licenciement est égale à 1/13 du salaire de base annuel que le salarié a ou aurait perçu au cours des deux derniers mois précédant la rupture du contrat de travail, ce qui implique à partir du montant annuel retenu par la salariée de déduire les indemnités compensatrices de congés payés et la prime exceptionnelle perçue en avril 2013, soit une mensualité calculée sur la base de 25159,37 € égale à 1935,37 €. Compte tenu du nombre de semestres complets d'ancienneté d'octobre 2009 à septembre 2013, est due à Mme [F] la somme de 2709,52 €. Le jugement doit être réformé en ce sens.

Bénéficiant d'une ancienneté supérieure à deux ans au sein d'une société dont il n'est pas discuté que l'effectif est au moins égal à onze salariés, l'intimée a droit à une indemnité qui conformément à l'article L 1235-3 du code du travail dans sa rédaction applicable au litige ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois. Mme [F] a perdu une ancienneté de quatre ans. Au regard de la particularité de sa situation à l'égard des deux entreprises qui l'ont employée successivement , elle s'est trouvée dans l'impossibilité de justifier d'une fin de contrat lui permettant d'ouvrir droit aux allocations chômage et s'est donc trouvée brutalement sans ressources, ayant sollicité sans succès de son employeur la délivrance d'une attestation Pôle Emploi. Ces éléments liés au préjudice occasionné par un licenciement infondé justifient le montant de l'indemnité qui lui a été accordé et qui sera confirmé.

*Sur les demandes relatives à l'exécution du contrat:

S'agissant du rappel de 13éme mois, l'article 39 de la convention collective de la banque dispose que les salaires de base annuels sont versés en treize mensualités égales. Le 13éme mois calculé prorata temporis est versé en même temps que le salaire du mois de décembre sauf dispositions différentes d'entreprise. Le salaire de base annuel est le salaire y compris le treizième mois mais à l'exclusion de toute prime fixe ou exceptionnelle ainsi que de tout élément variable.

Pour s'opposer à cette demande, les appelantes se prévalent des dispositions de l'article 47 de la convention collective qui prévoient par dérogation à l'article 39, la possibilité pour l'employeur d'opter pour un versement sur une base annuelle de 12 mensualités égales après consultation du comité d'entreprise, choix opéré par la société Attijariwafa bank Europe selon elles et qui constitue uniquement une modalité de paiement du treizième mois.

Elles versent aux débats un procès-verbal du comité d'entreprise du 24 juin 2014 relatif à l'unification des modalités de paiement de la rémunération après la fusion de la société française et de la compagnie internationale des banques de [Localité 8] (CIBP), qui rappelle un versement de la rémunération sur douze mois au sein de la société Attijariwafa bank Europe. Toutefois, ce procès verbal est postérieur au départ de Mme [F] et ne mentionne pas la date de la décision initiale de verser la rémunération en douze mensualités égales, de sorte qu'il n'est pas démontré que cette modalité de paiement était applicable pendant la période de travail de la salariée et que la rémunération versée représentait treize mois, respectant au surplus la rémunération conventionnelle annuelle minimale fixée par la convention collective. En conséquence, sur la base du calcul présenté par l'intimée, qui déduit les primes accordées conformément à l'article 39, lui est dû un rappel de salaire de 8870,90 €. Le jugement sera confirmé sur ce point.

Mme [F] demande également un rappel de salaire au titre d'un bonus pouvant varier de 0 à 30% de son salaire annuel brut de référence en fonction de la réalisation des objectifs qui lui sont fixés annuellement. Or, ainsi que le relèvent les appelantes, ce bonus était prévu dans le contrat de détachement conclu entre la société mère marocaine et la salariée, convention qui n'a d'effet qu'entre ses signataires et ne peut imposer d'obligation à la société française, à défaut pour cette dernière d'avoir sans équivoque fait connaître son intention d'appliquer cette disposition dans ses relations avec l'intimée. Une telle intention n'est démontrée par aucune pièce, de sorte que cette demande ne peut être accueillie et le jugement qui y a fait droit doit être réformé.

Concernant le remboursement des allocations chômage d'un montant de 2201,25€ prélevées par la société Attijariwafa bank Europe, Mme [F] présente devant la cour cette demande à titre subsidiaire en cas de réduction de l'indemnisation de son licenciement sans cause réelle et sérieuse, ce qui n'est pas le cas. Par ailleurs, les appelantes observent avec raison qu'en qualité de salariée de cette société , ces déductions étaient justifiées. Le remboursement est donc infondé.

*Sur l'inégalité de traitement et la discrimination salariale :

Il est de principe que pour un même travail ou un travail de valeur égale, l'employeur doit assurer une égalité de traitement entre tous les salariés placés dans une situation identique ou comparable au regard de la rémunération comme de tout avantage, sauf à ce que la différence de traitement repose sur des raisons objectives dont le juge doit contrôler la réalité et la pertinence.

En outre en application de l'article L1132-1 du code du travail, aucune personne, faire l'objet d'une mesure discriminatoire directe ou indirecte telle que définie à l'article 1 de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation du droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations , notamment en matière de rémunération, en raison de son sexe. En cas de litige, il appartient au salarié de présenter des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte. Au vu de ces éléments, l'employeur est tenu de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.

En l'espèce, Mme [F] justifie du recrutement au sein de la direction des services informations auquel elle appartenait également, en octobre 2012 d'un chef de projet et d'études développement, M. [Z], en mars 2013 d'un ingénieur support, M. [X] et en avril 2013 de deux chargés de mise en oeuvre de projets informatiques, MM [I] et [K]. Elle même y assurait la fonction de responsable support. Elle établit de l'obtention d'un diplôme d'ingénieur de l'école polytechnique de l'université de [Localité 7] en 2005/2006.

En revanche, elle ne verse aux débats aucune pièce de nature à démontrer une égalité de valeur de son travail par rapport à celui des salariés recrutés, ni qu'elle était placée dans une situation identique ou à tout le moins comparable avec ces salariés notamment en terme de compétences, ne produisant pas d'organigramme détaillé de la direction à l'époque de ces recrutements, d'élément relatif à la classification de ces postes. Si elle indique que M. [X] était sous sa responsabilité, cette situation n'est confirmée par aucune pièce, tout comme les niveaux de rémunération qu'elle évoque.

Elle ne justifie donc pas d'éléments de fait susceptibles d'accréditer une disparité de situation par rapport aux recrutements masculins, opérés par la société Attijariwafa bank Europe et une inégalité de traitement hommes-femmes ou de laisser supposer une discrimination liée au sexe, ne pouvant solliciter de l'employeur qu'il pallie cette carence. En conséquence, le jugement qui a rejeté sa demande indemnitaire doit être confirmé.

-Sur la demande de condamnation solidaire contre la société Attijariwafa bank Maroc :

La solidarité est légale et conventionnelle et ne se présume pas. Aucun engagement solidaire n'est démontré par l'intimée à son bénéfice de la part de deux sociétés. Sa demande s'analyse donc nécessairement en une demande de condamnation in solidum.

Par son courrier du 18 juin 2013 lui notifiant son retour au Maroc sur la base d'un contrat de détachement dont elle ne pouvait plus se prévaloir en l'absence maintien d'un lien de subordination à l'égard de l'intimée et alors que les pièces produites démontrent qu'elle était parfaitement avisée de ce que celle-ci s'était installée de façon pérenne en France, la société Attijariwafa bank Maroc a entraîné la rupture de la relation contractuelle avec la société Attijariwafa bank Europe, sa filiale, devenue l'employeur de Mme [F]. Cette décision illégitime a donc contribué à la réalisation du dommage subi par l'intimée, ce qui justifie la condamnation de la société in solidum avec l'employeur à indemniser Mme [F] , laquelle doit être toutefois limitée aux indemnités de rupture et dommages et intérêts, conséquences directes de la rupture du contrat avec la société Française.

-Sur la demande reconventionnelle de la société Attijariwafa bank Maroc :

La société soutient que dès lors qu'il est considéré que Mme [F] est devenue salariée de la société française à compter d'octobre 2009, les sommes qui lui ont été versées au Maroc en application du contrat de détachement sont indues. Devant la cour, Mme [F] qui demande la confirmation du jugement qui a rejeté cette prétention, n'argumente pas précisément sur cette demande mais relève toutefois en page 17 de ses écritures que ces paiements étaient destinés à permettre son rattachement aux régimes de sécurité sociale et de prévoyance marocains.

Or, l'examen des bulletins de paie établi par la société marocaine à compter d'octobre 2009 démontre que les sommes en cause sont supérieures aux seules cotisations retraite, maladie et prévoyance et prélèvements de l'impôt sur le revenu puisqu'elles conduisent au versement d'une somme d'environ 400€ à l'intimée qui n'en conteste pas le paiement. Par ailleurs, dans la mesure où le détachement avait pris fin, où Mme [F] était salariée d'une société française et indique clairement qu'elle ne souhaitait pas retourner vivre et travailler au Maroc, n'était pas justifiée son adhésion à un régime de cotisations sociales dans ce pays en application de l'article 5-2 de la convention de sécurité sociale entre le gouvernement de la République française et le gouvernement du Royaume du Maroc. Il s'en déduit que le paiement erroné de cette somme par la société Attijariwafa bank Maroc justifie sa restitution par Mme [F], ce qui représente une somme non discutée de 21041€. Le jugement sera réformé en ce sens.

En application de l'article L 1235-4 du code du travail dans sa rédaction applicable au litige, la société Attijariwafa bank Europe sera tenue de rembourser à Pôle Emploi les indemnités chômage versées à Mme [F] à compter du licenciement dans la limite de trois mois.

Les sociétés appelantes seront condamnées à verser à Mme [F] une indemnité de 1500 € en sus de celle accordée par le premier juge et supportera les dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS :

La Cour, statuant publiquement, en dernier ressort, contradictoirement par mise à disposition au greffe, dans les limites de l'appel,

CONFIRME le jugement en ce qu'il a :

-retenu l'existence d'un contrat de travail entre la société Attijariwafa bank Europe et Mme [F],

-dit que la rupture du contrat s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

-condamné la société Attijariwafa Bank Europe et la société Attijariwafa Bank Maroc à verser à Mme [F] la somme de 25000 € les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, sauf à préciser que le condamnation n'est pas solidaire mais in solidum,

-condamné la société Attijariwafa bank Europe à verser à Mme [F] une somme de 8870,90 € au titre du treizième mois,

- rejeté la demande indemnitaire de Mme [F] au titre de l'inégalité de traitement et la discrimination salariale,

-dit que ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter de la réception par l'employeur de la convocation en bureau de conciliation et celles à caractère indemnitaire à compter de la présente décision et que les intérêts dus pour une année entière se capitaliseront,

-débouté Mme [F] de sa demande de restitution au titre des cotisations chômage,

-condamné les sociétés au paiement de 1. 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens ;

RÉFORME pour le surplus ;

Statuant à nouveau,

CONDAMNE la société Attijariwafa Bank Maroc et la société Attijariwafa Bank Europe in solidum à verser à Mme [F] les sommes suivantes :

*7668,51 € d'indemnité compensatrice de préavis outre 766,85 € de congés payés afférents,

*2709,52 € d'indemnité conventionnelle de licenciement ;

DÉBOUTE Mme [F] de sa demande au titre du bonus ;

CONDAMNE Mme [F] à verser à la société Attijariwafa Bank Maroc la somme de 21041€ de salaires indus ;

Y ajoutant,

DIT que la société Attijariwafa Bank Europe sera tenue de rembourser à Pôle Emploi les indemnités versées à Mme [F] dans la limite de trois mois ;

CONDAMNE les sociétés Attijariwafa Bank Europe et Attijariwafa Bank Maroc à verser à Mme [F] une indemnité de 1500 € de frais irrépétibles d'appel et à supporter les dépens d'appel.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 7
Numéro d'arrêt : 18/04148
Date de la décision : 02/07/2020

Références :

Cour d'appel de Paris K7, arrêt n°18/04148 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-07-02;18.04148 ?
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