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01/07/2020 | FRANCE | N°17/21498

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 4, 01 juillet 2020, 17/21498


Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 4



ARRÊT DU 01 JUILLET 2020



(n° , 12 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 17/21498 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B4QIZ



Décision déférée à la Cour : Jugement du 08 Septembre 2017 - Tribunal de Commerce de NANCY - RG n° 2015 010351





APPELANTE



SA HYPROMAT FRANCE

Ayant son siège social : [Adresse 8]r>
[Adresse 8]

[Localité 2]

N° SIRET : 738 504 448 ([Localité 7])

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège



Représentée par Me Fréd...

Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 4

ARRÊT DU 01 JUILLET 2020

(n° , 12 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 17/21498 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B4QIZ

Décision déférée à la Cour : Jugement du 08 Septembre 2017 - Tribunal de Commerce de NANCY - RG n° 2015 010351

APPELANTE

SA HYPROMAT FRANCE

Ayant son siège social : [Adresse 8]

[Adresse 8]

[Localité 2]

N° SIRET : 738 504 448 ([Localité 7])

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentée par Me Frédéric LALLEMENT de la SELARL BDL Avocats, avocat au barreau de PARIS, toque : P0480

Ayant pour avocat plaidant : Me Sandra INGLESE, substituant Me Bernard LEVY, de la SCP ALKB, avocats au barreau de STRASBOURG

INTIMÉES

- SARL AULNOY LAVAGE

Ayant son siège social : [Adresse 5]

[Localité 1]

N° SIRET : 409 054 194 (VALENCIENNES)

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

- SCI JEUMONT LAVAGE

Ayant son siège social : [Adresse 3]

[Localité 6]

N° SIRET : 479 972 754 ([Localité 6])

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentées par Me Nicolas PINTO, avocat au barreau de PARIS, toque : C1408

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 18 Février 2020, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Monsieur Dominique GILLES, Conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Marie-Laure DALLERY, Présidente de chambre

Madame Agnès BODARD-HERMANT, Conseillère

Monsieur Dominique GILLES, Conseiller

qui en ont délibéré.

Un rapport a été présenté à l'audience par Monsieur Dominique GILLES dans les conditions prévues par l'article 785 du Code de Procédure Civile.

Greffier, lors des débats : Madame Cécile PENG

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Marie-Laure DALLERY, Présidente de chambre, et par Madame Cécile PENG, greffier auquel la minute de la présente décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE

La société Hypromat France a pour activité la conception, l'implantation et l'exploitation de centres de lavage rapide en self-service pour véhicules. Elle est la tête de réseau de franchisés à l'enseigne « Eléphant Bleu ».

La SARL Aulnoy Lavage, établie à [Localité 4], exploitait un centre de nettoyages de véhicules automobiles à l'enseigne « Eléphant Bleu ».

La SARL Jeumont Lavage a également exploité à Jeumont un centre de nettoyages de véhicules automobiles à l'enseigne « Elephant Bleu ».

Ces deux sociétés ont le même gérant, M. [V].

Les contrats de franchise n'ont pas été renouvelés à leur terme.

Considérant que le non-renouvellement du contrat de franchise s'analysait en une rupture brutale des relations commerciales établies imputable au franchiseur, la société Aulnoy Lavage a assigné en responsabilité, par acte en date du 21 mars 2011, la société Hypromat France devant le tribunal de commerce de Nancy en vue de la voir condamnée en réparation du préjudice subi.

La société Jeumont Lavage est intervenue volontairement à l'instance.

C'est dans ces conditions que le tribunal de commerce de Nancy, par jugement du 8 septembre 2017, a :

- déclaré recevable l'intervention volontaire de la SARL Jeumont Lavage,

- déclaré la SARL Aulnoy Lavage mal fondée en ses demandes au titre de l'article L.442-6, I 5° du code de commerce, et l'en a déboutée,

- dit que la clause du contrat de franchise de la SAS Hypromat France, obligeant le franchisé à ne plus utiliser les couleurs bleue et blanche et à faire repeindre son centre dans d'autres couleurs que bleu et blanc dans les 6 mois à compter de la cessation du contrat, figurant à l'article 14 du contrat de franchise, est réputée non écrite,

- déclaré la SARL Aulnoy Lavage et la SARL Jeumont Lavage mal fondées en leurs demandes en réparation des travaux engagés, et les en a déboutées,

- condamné la SARL Aulnoy Lavage à payer à la SAS Hypromat France la somme de 5 000 euros à titre d'indemnité contractuelle pour utilisation des signes de la franchise après la fin du contrat,

- déclaré la SAS Hypromat France mal fondée en ses demandes complémentaires, et l'en a déboutée,

- autorisé l'exécution provisoire,

- dit n'y avoir lieu à appliquer les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la SARL Aulnoy Lavage aux dépens.

Par dernières conclusions notifiées le 1er juin 2018, la société Hypromat France, appelante, demande à la Cour de :

- infirmer le jugement entrepris en ce que :

* il a dit que la clause du contrat de franchise obligeant le franchisé à ne plus utiliser les couleurs bleu et blanc et à faire repeindre son centre dans d'autres couleurs dans les six mois à compter de la cessation du contrat est réputé non écrite ;

* il ne lui pas accordé l'ensemble de ses réclamations chiffrées ;

- confirmer tous autres chefs du jugement entrepris ;

en conséquence :

- condamner la société Aulnoy Lavage à lui payer la somme de 20 000 euros à titre de dommages et intérêts pour abus de procédure ;

- condamner la société Aulnoy Lavage à lui payer la somme de 15 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, montant identique à celui réclamé dans l'assignation ;

- condamner la société Aulnoy Lavage aux entiers frais et dépens ;

- condamner la société Aulnoy Lavage SARL à lui payer la somme de 100 000 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter de la présente demande ;

- condamner la société Aulnoy Lavage à procéder à la modification contractuelle de ses monnayeurs sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter du 8èmejour qui suivra la signification du "jugement à intervenir" ;

- débouter la société Aulnoy Lavage de l'ensemble de ses fins et conclusions ;

- condamner la société Aulnoy Lavage à payer à lui payer :

* la somme de 15 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, montant identique à celui réclamé dans l'assignation

- condamner la société Jeumont Lavage à lui payer la somme de 20 000 euros à titre de dommages et intérêts pour abus de procédure ;

- condamner la société Jeumont Lavage à lui payer la somme de 15 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, montant identique à celui réclamé dans l'assignation.

- condamner la société Jeumont Lavage aux entiers frais et dépens des deux instances.

Par dernières conclusions notifiées le 3 mai 2018, la société Aulnoy Lavage demande à la Cour de :

vu l'article L.442-6 du code de commerce ;

vu l'article 1134 du code civil ;

vu les articles 1131 à133 du code civil ;

vu l'article 1147 du code civil ;

vu le principe d'ordre public de prohibition des engagements perpétuels ;

vu l'article 5.3.D du Règlement de l'Union Européenne N°330/2010 sur les accords verticaux et ses lignes directrices et notamment le paragraphe 65 ;

vu les articles L.341-1 et L.341-2 du code de commerce ;

- confirmer la décision déférée en ce qu'elle a jugée non-écrite la clause prohibant sans limite de durée l'utilisation des couleurs blanc et bleu ;

statuant à nouveau ;

- sur la rupture des relations contractuelles :

- dire que le non-renouvellement du contrat de franchise par la société Hypromat est intervenu de manière brutale et abusive ;

en conséquence :

- condamner la société Hypromat à lui payer la somme de 50 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de la rupture abusive du contrat de franchise ;

sur les obligations post-contractuelles :

à titre subsidiaire :

- dire qu'elle n'a pas contrevenu à son obligation de modifier l'aspect extérieur de la station en y apposant des fanions et des drapeaux ;

en conséquence :

- condamner la société Hypromat à lui payer la somme de 15 000 euros en réparation des travaux superflus qu'elle a été contrainte de réaliser ;

- sur la demande reconventionnelle de la société Hypromat :

- dire qu'elle n'utilise aucun signe distinctif de la franchise Elephant Bleu et que l'aspect extérieur de son centre a été suffisamment modifié pour éviter tout risque de confusion dans l'esprit du public ;

en conséquence :

- dire qu'il n'y a pas lieu d'appliquer la clause pénale prévue au contrat de franchise ;

- débouter la société Hypromat de sa demande reconventionnelle de condamnation à hauteur de 10 000 euros et de l'astreinte pour la prétendue absence de modification des monnayeurs ;

- débouter la société Hypromat de sa demande reconventionnelle de condamnation à hauteur de 100 000 euros au titre de la clause pénale ;

subsidiairement :

- moduler le montant de la condamnation au titre de la clause pénale en le ramenant à un montant symbolique ;

en tout état de cause :

- débouter la société Hypromat de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions.

- "condamner la société Hypromat à lui payer la somme de 20 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ; ainsi qu'aux dépens des procédures de référé, dont les frais d'huissier nécessaires aux constats réalisés".

Par dernières conclusions notifiées le 3 mai 2018, la société Jeumont Lavage demande à la Cour de :

vu l'article 1134 du code civil ;

vu les articles 1131 à133 du code civil ;

vu l'article 1147 du code civil ;

vu le principe d'ordre public de prohibition des engagements perpétuels ;

vu l'article 5.3.D du Règlement de l'Union Européenne N°330/2010 sur les accords verticaux et ses lignes directrices et notamment le paragraphe 65 ;

vu les articles L.341-1 et L.341-2 du code de commerce ;

sur l'intervention volontaire à l'instance :

- dire "qu'il existe un lien suffisant entre les prétentions de la société Jeumont Lavage et les prétentions soulevées par la société Aulnoy Lavage dans le cadre de l'instance principale enrôlée sous le numéro 11/00218. En conséquence,

Confirmer le jugement en ce qu'il a déclaré recevable l'intervention volontaire de la société Jeumont Lavage" ;

sur les obligations post-contractuelles :

- à titre principal :

* confirmer le jugement déféré en ce qu'il a dit réputée non écrite la clause interdisant l'usage des couleurs blanche et bleue sans limite de durée aux anciens franchisés du réseau Eléphant bleu ;

en conséquence :

* "ordonner à la société Hypromat de restituer à la société Jeumont Lavage toutes sommes payées à titre d'astreinte en vertu de l'arrêt à venir de la Cour d'appel de Douai" ;

- à titre subsidiaire :

* dire que la société Jeumont Lavage n'a pas contrevenu à son obligation de modifier l'aspect extérieur de la station en y apposant des fanions et des drapeaux ;

en tout état de cause :

* condamner la société Hypromat à lui rembourser la somme de 5 000 euros qu'elle a versée au titre de l'astreinte liquidée par l'arrêt de la Cour d'Appel de Douai du 6 juin 2013 ;

* condamner la société Hypromat à lui rembourser la somme de 3 000 euros qu'elle a versée au titre de la provision sur l'indemnité contractuelle prononcée par l'ordonnance de référé du 20 octobre 2009 ;

* condamner la société Hypromat à rembourser à la société Jeumont Lavage la somme de 3 600 euros qu'elle a versée au titre des frais irrépétibles ;

* condamner la société Hypromat à payer à la société Jeumont Lavage la somme de 15 000 euros en réparation des travaux superflus qu'elle a été contrainte de réaliser ;

* condamner la société Hypromat à payer à la société Jeumont Lavage la somme de 8 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, dépens en sus.

SUR CE, LA COUR

Sur la responsabilité contractuelle des franchisés

Les moyens soutenus par la SAS Hypromat France au soutien de leur appel relatif à la validité de l'article 14 du contrat de franchise, ne font que réitérer sous une forme nouvelle, mais sans justification complémentaire utile, ceux dont le premier juge a connu et auxquels il a répondu par des motifs exacts que la Cour adopte, sans qu'il soit nécessaire de suivre les parties dans le détail d'une discussion se situant au niveau d'une simple argumentation.

A ces justes motifs, il sera ajouté ce qui suit.

A supposer que ne soient pas applicables les dispositions de l'article 5.3 D du règlement de l'UE n° 330/2010, qui prohibe les clauses de non-concurrence post-contractuelles d'une durée supérieure à un an, ce faute de pouvoir caractériser en l'espèce que la clause litigieuse est susceptible d'affecter le commerce entre Etats membres au sens de l'article 101 § 1 du TFUE, le tribunal doit être approuvé d'avoir appliqué l'article L.341-2 du code de commerce.

En effet, créé par la loi du 7 août 2016, l'article L.341-2 du code de commerce répute en principe non écrite toute clause ayant pour effet, après l'échéance ou la résiliation d'un contrat tel le contrat de franchise, de restreindre la liberté d'exercice de l'activité commerciale de l'exploitant qui l'a précédemment souscrite ; échappent à une telle sanction les clauses dont la durée n'excède pas un an après l'échéance ou la résiliation du contrat.

Or, l'article 14 des contrats de franchise litigieux, tant celui concernant la SARL Aulnoy Lavage que celui concernant la SARL Jeumont Lavage, fait notamment obligation aux franchisés, dès la cessation du contrat, en plus de ne plus utiliser la marque ni aucun élément distinctif lié à la franchise, "de ne plus utiliser les couleurs blanc et bleu et de faire repeindre [le] centre dans d'autres couleurs que bleu et blanc dans les 6 mois [...]".

Le tribunal de commerce a réputé cette clause non écrite, aux motifs qu'elle ne précise aucune limite dans le temps pour l'interdiction d'utiliser les couleurs bleue et blanche et qu'elle peut avoir pour effet de restreindre la liberté d'exercice de l'activité commerciale de l'ex-franchisé, en l'empêchant de rejoindre un réseau concurrent utilisant les mêmes couleurs.

Pour soutenir que ces dispositions législatives sont inapplicables dans le temps à la présente espèce, la SAS Hypromat France explique que la loi ne peut avoir d'effet rétroactif pour sanctionner un contrat arrivé à terme le 19 juin 2008 et qui n'a pas été renouvelé. La SAS Hypromat France fait grief au jugement entrepris d'avoir appliqué la "limitation d'un an rétroactivement à un contrat signé en 2005 et qui est venu à terme en 2008" et affirme que, "tout au plus, le tribunal aurait-il pu considérer que la durée d'un an s'appliquait à partir de l'entrée en vigueur de la loi."

Toutefois, la Cour retient que l'article 31 II de la loi du 7 août 2016 dispose que le I de cet article, qui crée l'article L.341-2 du code de commerce, s'applique à l'expiration d'un délai d'un an à compter de la promulgation de la loi.

Il s'en déduit qu'un an après la promulgation de la loi, est réputée non écrite toute clause ayant pour effet, après l'échéance ou la résiliation d'un contrat tel le contrat de franchise, de restreindre la liberté d'exercice de l'activité commerciale de l'exploitant qui l'a précédemment souscrit, et ce peu important que le contrat soit arrivé à son terme le 19 juin 2008 sans avoir été renouvelé.

Les dispositions de l'article L.341-2 du code de commerce ne peuvent donc pas être écartées pour un motif tiré de l'application dans le temps de la loi nouvelle.

En outre, si la SAS Hypromat France conteste formellement l'existence d'un réseau utilisant les mêmes couleurs que les siennes, les sociétés Aulnoy Lavage et Jeumont Lavage justifient en appel de l'existence de stations de lavage auto haute pression Aquabloo, qui utilisent également les couleurs blanche et bleue, de sorte qu'il est ainsi confirmé, s'il en était besoin - tant le blanc, symbole de propreté et le bleu, symbole de l'eau, s'associent naturellement à des activités de lavage, tel le lavage de véhicules - que la clause litigieuse, interdisant pour plus d'une année à compter de l'échéance du contrat non renouvelé d'utiliser ces mêmes couleurs, est bien de nature à restreindre la liberté d'exercice de l'activité commerciale de l'exploitant qui l'a précédemment souscrite.

Il n'est pas valablement soutenu que le tribunal de commerce a statué par des dispositions générales au lieu de se limiter à juger dans les rapports entre les parties au litige.

En effet, le contrat litigieux conclu entre les parties au litige s'intitule lui-même "Contrat de franchise/ de renouvellement hypromat", et c'est sans encourir le grief qui lui est fait que le tribunal de commerce a : "dit que la clause du contrat de franchise de la SAS Hypromat France, obligeant le franchisé à ne plus utiliser les couleurs bleue et blanche et à faire repeindre son centre dans d'autres couleurs que bleu et blanc dans les 6 mois à compter de la cessation du contrat, figurant à l'article 14 du contrat de franchise, est réputée non écrite".

Le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu'il a dit que la clause litigieuse était réputée non écrite ; il sera seulement explicité que cette nullité n'intervient qu'entre les parties aux contrats de franchise litigieux.

S'agissant de la responsabilité de la SARL Aulnoy Lavage, le jugement entrepris doit également être approuvé d'avoir retenu que ce franchisé qui devait, dès le 19 juin 2008, cesser immédiatement toute utilisation de la marque Hypromat Eléphant Bleu, a maintenu les signes distinctifs de la franchise, à savoir le logo et le nom "éléphant bleu" plus de 10 mois après la fin du contrat, de sorte que la clientèle du centre de lavage, habituée à trouver une station de ce réseau à cet endroit, pouvait être induite en erreur.

Si la SAS Hypromat France chiffre sa demande indemnitaire, en référence à la clause pénale de 1 524 euros par jour, à 100 000 euros, pour la période allant du 21 septembre 2008, au 11 décembre 2009, date du dernier constat produit par les anciens franchisés et constatant que les obligations auraient enfin été intégralement remplies, en ce compris l'utilisation des couleurs, il découle de ce qui précède que la SARL Aulnoy Lavage n'est redevable d'aucuns dommages-intérêts pour la période postérieure à l'enlèvement des signes distinctifs de la marque, qui ne comprennent précisément pas les couleurs blanc et bleu.

Le préjudice allégué par la SAS Hypromat France n'est donc pas établi pour la période postérieure au 22 juillet 2009, date du constat établi par la SARL Aulnoy Lavage démontrant que la marque nominative et le logo Eléphant bleu avaient été retirées.

Le tribunal doit être approuvé d'avoir considéré que la clause pénale était manifestement excessive.

La Cour précise à cet égard que la clause pénale apparaît manifestement excessive, non seulement parce que la SAS Hypromat France elle-même divise par plus de 6 le montant de sa demande par rapport au calcul de la peine stipulée qu'elle allègue, pris du nombre de jours multiplié par le taux journalier de la peine, mais encore parce que, au regard, d'une part, du caractère très limité en l'espèce de l'atteinte à l'image de la marque résultant du retard à enlever ses signes distinctifs et, d'autre part, du montant de la redevance permanente mensuelle stipulée, soit hors indexation, 108,30 euros HT par piste de lavage, il est établi une disproportion manifeste entre le montant de la peine conventionnellement fixé et le préjudice effectivement subi.

En fonction de ces éléments, les premiers juges doivent être approuvés d'avoir réduit le montant de la peine à la somme de 5 000 euros.

La SAS Hypromat France, qui demande à la SARL Aulnoy Lavage de procéder à la modification contractuelle de ses monnayeurs, n'a saisi la Cour d'aucun moyen en ce sens dans ses conclusions ; le jugement sera donc confirmé sur ce point, en ce qu'il a rejeté la demande.

S'agissant des demandes en indemnisation et en dommages-intérêts des anciens franchisés, la Cour retiendra ce qui suit.

La SARL Jeumont Lavage, dont la recevabilité de l'intervention volontaire n'est plus contestée en appel, a été condamnée à payer à la SAS Hypromat :

- une astreinte provisoire assortissant son obligation de remplacer les couleurs bleue et blanche et 3 000 euros de provision à valoir sur l'indemnité contractuelle, par le juge des référés du tribunal de grande instance de Strasbourg, aux termes d'une ordonnance irrévocable du 20 octobre 2009 ;

- 5 000 euros au titre de la liquidation de l'astreinte ci-dessus, pour la période allant du 3 décembre 2009 au 13 juillet 2010, aux termes d'un arrêt du 6 juin 2013 de la cour d'appel de Douai en matière du juge de l'exécution ;

- 3 600 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile (1 300 euros en exécution de l'ordonnance de référé déjà mentionnée, 1 500 euros en exécution de l'arrêt d'appel rendu en matière de liquidation d'astreinte et 800 euros en exécution de l'ordonnance du juge de l'exécution objet de ce dernier appel).

La SARL Jeumont Lavage demande dans le cadre de la présente instance "la restitution des frais irrépétibles" payés à hauteur de la somme totale de 3 600 euros ci-dessus.

Toutefois, si la SARL Jeumont Lavage demande à la SAS Hypromat France la restitution de sommes payées au titre de l'article 700 du code de procédure civile en exécution de décisions de justice exécutoires qu'elles estime préjudiciables, il ne peut y être fait droit.

En effet, concernant l'ordonnance de référé, la restitution des sommes payées pour son exécution n'est due sans la faute du bénéficiaire de l'exécution provisoire que si celui-ci l'a poursuivie à ses risques et périls, malgré l'appel. Or, en l'occurrence, les sommes ont été payées par la SARL Jeumont Lavage en vertu de l'ordonnance de référé dont elle s'est abstenue de faire appel.

Concernant les sommes acquittées par la SARL Jeumont Lavage en vertu de l'arrêt d'appel, qui n'était pas susceptible de recours suspensif, la preuve de l'exécution fautive par la SAS Hypromat France - exigée pour leur restitution - n'est pas rapportée.

A cet égard, il ne peut être retenu que le fait pour la SAS Hypromat France d'avoir initié des procédures judiciaires sur le fondement d'une clause nulle a causé par sa faute les condamnations en vertu de l'article 700 du code de procédure civile, objets de la demande en restitution.

La demande à hauteur de 3 600 euros sera donc rejetée.

Le jugement entrepris sera donc confirmé sur ce point.

Cependant, la Cour retient en l'espèce que la responsabilité contractuelle de la SARL Jeumont Lavage à l'égard de la SAS Hypromat France n'est pas établie, alors que la recevabilité de l'action de cet ex-franchisé n'est plus contestée en appel.

Par conséquent, dès lors que l'ordonnance de référé comme l'arrêt d'appel ayant liquidé l'astreinte ne sont pas revêtus de l'autorité de chose jugée, et dès lors que le présent arrêt retient la nullité de la clause en vertu de laquelle la SAS Hypromat a bénéficié d'une provision sur une indemnité contractuelle et d'une astreinte, la Cour doit également, par infirmation du jugement entrepris, ordonner la restitution des sommes ainsi versées à titre provisoire.

S'agissant de la demande en dommages-intérêts formée à hauteur de 15 000 euros par la SARL Jeumont Lavage, il est établi en l'espèce que celle-ci a dû réaliser sous la contrainte des travaux exigés par la SAS Hypromat qui n'en avait pas le droit, dans le but de modifier les couleurs arborées par son centre de lavage à l'issue de la durée de validité du contrat.

La SARL Jeumont Lavage ne produit pas d'autres factures de travaux afférentes à cette modification des couleurs qu'une facture du 22 juin 2009 de 124,69 euros, comprenant notamment la pose d'un bandeau jaune sur la façade de la station de lavage. La SARL Jeumont Lavage produit également une facture de peinture grise pour 177,56 euros annexée à un constat d'huissier qui établit que ces fournitures ont été employées pour la station de lavage, à cause de l'exigence de l'ex-franchiseur. Une autre facture pour le même produit est fournie, à l'adresse de la SARL Jeumont Lavage et d'un montant de 88,78 euros.

Compte tenu de ces coûts facturés, auxquels il convient de rajouter le temps passé pour les fournitures non appliquées par le peintre, la Cour dispose des moyens de d'évaluer le préjudice matériel à la somme de 800 euros.

Si la SARL Jeumont Lavage invoque un préjudice d'exploitation en lien avec ces travaux, elle ne le prouve en rien.

La Cour allouera donc à la SARL Jeumont Lavage une somme de 800 euros à titre de dommages-intérêts pour travaux superflus. Le surplus de la demande formée à ce titre sera rejeté.

Sur la responsabilité du franchiseur pour rupture brutale des relations commerciales établies

Le tribunal de commerce a retenu l'existence d'une relation commerciale établie depuis septembre 1996, mais encore que la SAS Hypromat France avait pu rompre sans faute cette relation après avoir fait établir le 6 février 2008 un plan d'engagement de remise en conformité de la station de lavage d'[Localité 4], document signé par le gérant du franchisé et qui rappelle le retard de celui-ci à mettre en oeuvre les exigences du standard qualitatif, qui énonce conditionner le renouvellement du partenariat au respect de ce plan, et qui annonce une réunion de vérification sur place pour la semaine 24 de 2008, soit quelques jours avant l'échéance du contrat (19 juin 2008).

Alors que la SAS Hypromat n'a pas motivé sa décision de refus de renouvellement notifiée par lettre recommandée du 4 avril 2008, et alors qu'il n'est pas reproché à la SARL Aulnoy Lavage d'avoir manqué à ses obligations contractuelles pour n'avoir pas procédé aux travaux décrits dans l'engagement du 6 février 2008, la Cour retient néanmoins que la SARL Aulnoy Lavage ne pouvait pas raisonnablement anticiper un renouvellement du contrat à son échéance du 19 juin 2008, dès lors qu'elle n'avait pas même avisé le franchiseur de sa volonté de le renouveler ; or, bien qu'il fasse suite à un précédent contrat conclu en 1996, le contrat à durée déterminée litigieux, qui exclut tout renouvellement par tacite reconduction, a également imposé à la partie qui aurait voulu le renouveler d'en aviser l'autre partie 3 mois au moins avant l'arrivée du terme, soit en l'espèce avant le 19 mars 2008.

Il s'en déduit que lorsque la SAS Hypromat a notifié sa décision de non renouvellement, le 4 avril 2008, la SARL Aulnoy Lavage s'était délibérément abstenue d'aviser le franchiseur qu'elle souhaitait obtenir le renouvellement du contrat.

Il s'en déduit également qu'au jour où elle a reçu notification de la décision du franchiseur de ne pas renouveler le contrat à durée déterminée, la SARL Aulnoy Lavage ne s'attendait pas à un renouvellement de ce contrat à son échéance.

Par conséquent, la lettre du 4 avril 2008, qui se borne à notifier la décision du franchiseur de ne pas renouveler le contrat et à rappeler des obligations du franchisé pour après l'échéance de non renouvellement, ne caractérise aucune rupture brutale de la relation commerciale établie.

C'est pourquoi le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a débouté la SARL Aulnoy Lavage de sa demande fondée sur les dispositions de l'article L.442-6, I, 5° du code de commerce.

L'abus du droit de ne pas renouveler le contrat à son échéance n'est pas caractérisé non plus, de sorte que la demande en dommages-intérêts de la SARL Aulnoy Lavage sera rejetée.

Sur les autres prétentions, les frais et les dépens

La SAS Hypromat France ne justifie d'aucun abus du droit commis par la société Aulnoy Lavage à son préjudice en intentant la présente action en justice.

Le jugement sera confirmé sur ce point et la demande de dommages-intérêts pour abus de procédure de la SAS Hypromat France sera rejetée.

Pour les mêmes motifs, la demande en dommages-intérêts de la SAS Hypromat Lavage contre la SARL Jeumont Lavage pour abus de procédure n'est pas mieux fondée et doit être rejetée ; le jugement doit être également confirmé sur ce point.

Le jugement entrepris doit cependant être réformé en ce qu'il a condamné la SARL Aulnoy Lavage aux dépens et en ce qu'il a dit n'y avoir lieu à appliquer les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Le sens du présent arrêt conduit, en effet, à condamner la SAS Hypromat France, qui succombe au moins partiellement contre chacun de ses anciens franchisés, aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Ces dépens ne peuvent comprendre ceux des instances en référé, dès lors que le juge des référés a déjà statué sur les dépens, ni ceux afférents à toute autre instance que celle ayant fait l'objet du présent appel, dès lors que ces décisions ont également statué sur les dépens.

Par ailleurs les demandes afférentes aux constats d'huissier, dont il est demandé de les inclure dans les dépens de la présente instance, ne peuvent être accueillies dès lors que ces actes n'ont pas été nécessaires dans le cadre de la présente procédure au fond.

La SAS Hypromat versera, en équité, à la SARL Jeumont Lavage une somme globale de 7 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en première instance et en appel.

La SARL Aulnoy Lavage, en équité, ne recevra aucune indemnité de procédure de la SAS Hypromat.

La SAS Hypromat France sera en conséquence déboutée de toute demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

RÉFORME le jugement entrepris, mais seulement en ce qu'il a statué sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile et en ce qu'il a débouté la SARL Jeumont Lavage :

* de ses demandes en restitution, d'une part, de la somme de 3 000 euros versée à titre de provision sur indemnité contractuelle, mise à sa charge par l'ordonnance de référé du 20 octobre 2009 et, d'autre part, de la somme de 5 000 euros versée au titre de l'astreinte prononcée par l'ordonnance de référé du 20 octobre 2009 et liquidée par l'arrêt de la cour d'appel de Douai du 6 juin 2013,

* de sa demande en dommages-intérêts pour compensation du coût de travaux superflus,

Pour le surplus,

CONFIRME le jugement entrepris, précisant que l'article 14 des contrats de franchises conclus entre la SAS Hypromat France d'une part et chacune des SARL Aulnoy Lavage et Jeumont Lavage d'autrre part, est réputée non écrite entre les parties,

Statuant à nouveau sur les chefs réformés et y ajoutant :

CONDAMNE la SAS Hypromat France à restituer à la SARL Jeumont Lavage la somme de 3 000 euros versée à titre de provision sur indemnité contractuelle, mise à sa charge par l'ordonnance de référé du 20 octobre 2009,

CONDAMNE la SAS Hypromat France à restituer à la SARL Jeumont Lavage la somme de 5 000 euros versée au titre de l'astreinte prononcée par l'ordonnance de référé du 20 octobre 2009 et liquidée par l'arrêt de la cour d'appel de Douai du 6 juin 2013,

CONDAMNE la SAS Hypromat France à payer à la SARL Jeumont Lavage une somme de 800 euros à titre de dommages-intérêts pour compensation du coût des travaux superflus, et déboute cette société du surplus de la demande formée à ce titre,

CONDAMNE la SAS Hypromat France à payer à la SARL Jeumont Lavage une somme globale de 7 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en première instance et en appel,

DÉBOUTE la SAS Hypromat France de ses demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE la SAS Hypromat aux dépens de première instance et d'appel, hors ceux du référé, qui pourront être recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile,

REJETTE toute autre demande.

Le Greffier Le Président

Cécile PENG Marie-Laure DALLERY


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 4
Numéro d'arrêt : 17/21498
Date de la décision : 01/07/2020

Références :

Cour d'appel de Paris I4, arrêt n°17/21498 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-07-01;17.21498 ?
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