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30/06/2020 | FRANCE | N°17/21674

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 2 - chambre 1, 30 juin 2020, 17/21674


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 2 - Chambre 1



ARRÊT DU 30 JUIN 2020



(n° , 2 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/21674 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B4QZT



Décision déférée à la Cour : Jugement du 18 Octobre 2017 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 16/11219





APPELANTE



SA HSBC représentée par ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siè

ge

N° SIRET : 775 670 284

[Adresse 1]

[Localité 8]



Représentée par Me Olivier PLACIER, avocat au barreau de PARIS, toque : D0319





INTIMÉ



Monsieur [V] [L]

Né le [Date naissance ...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 2 - Chambre 1

ARRÊT DU 30 JUIN 2020

(n° , 2 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/21674 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B4QZT

Décision déférée à la Cour : Jugement du 18 Octobre 2017 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 16/11219

APPELANTE

SA HSBC représentée par ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

N° SIRET : 775 670 284

[Adresse 1]

[Localité 8]

Représentée par Me Olivier PLACIER, avocat au barreau de PARIS, toque : D0319

INTIMÉ

Monsieur [V] [L]

Né le [Date naissance 2] 1970 à [Localité 12]

[Adresse 4]

[Localité 16]

Représenté par Me Francis RAIMON de la SCP A.K.P.R., avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : PC 112

PARTIE INTERVENANTE

Maître [Z] [H]

[Adresse 9]

[Adresse 9]

[Localité 13]

Représentée par Me Herve-bernard KUHN de la SCP KUHN, avocat au barreau de PARIS, toque : P0090, substitué par Me Gérard SALLABERRY de la SCP KUHN, avocat au barreau de PARIS, toque : E379

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 19 Février 2020, en audience publique, devant la Cour composée de :

M. Christian HOURS, Président de chambre

Mme Marie-Claude HERVE, Conseillère

Mme Anne DE LACAUSSADE, Conseillère

qui en ont délibéré, un rapport ayant été fait à l'audience par Madame Anne de LACAUSSADE, Conseillère, dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Mme Séphora LOUIS-FERDINAND

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par M. Christian HOURS, Président de chambre et par Mme Séphora LOUIS-FERDINAND, Greffière présente lors du prononcé.

* * * * *

La SCI Athos a pour objet social l'acquisition de biens et droits immobiliers, la construction, la location.

Par acte reçu le 26 septembre 2006 par Me [E] [D], notaire à [Localité 13], elle a acquis un terrain situé [Adresse 7], financé par un prêt consenti par la société HSBC France à hauteur de 160 110 euros.

En garantie du remboursement, Mme [S] [N] et M. [V] [L], associés, se sont portés cautions personnelles et solidaires de cet engagement à hauteur de la somme maximum de 192 132 euros.

M. [V] [L] a consenti à cette fin, au profit de Mme [S] [N], une procuration authentique suivant acte reçu le 25 septembre 2006 par Me [E] [D], notaire.

A la suite de la défaillance de la société Athos dans le remboursement du prêt, la société HSBC France a poursuivi la saisie immobilière :

- du terrain appartenant à la SCI Athos que le prêt avait servi à financer, lequel a été adjugé au prix de 33 000 euros, le 1er décembre 2011,

- d'un immeuble propriété de M. [L], situé [Adresse 5] et [Adresse 4].

S'agissant de cette dernière procédure, le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Paris a, par jugement du 12 mai 2016, débouté M. [V] [L] de sa demande de nullité de la procuration signée le 25 septembre 2006 et autorisé la vente amiable au prix minimum de 100 000 euros.

Par arrêt du 27 octobre 2016, la cour d'appel de Paris, saisie de l'appel formé par M. [L], a sursis à statuer dans l'attente de la décision du tribunal de grande instance de Paris sur l'inscription de faux pendante devant lui.

En effet, entre-temps, le 7 juillet 2016, M. [V] [L] avait procédé à une déclaration d'inscription de faux à l'encontre de la dite procuration auprès du greffe du tribunal du grande instance de Paris.

Le 13 juillet suivant, il a fait assigner la société HSBC France devant le tribunal de grande instance de Paris aux fins, notamment, de voir déclarer fausse la procuration annexée à l'acte authentique du 26 septembre 2006, sauf à ce que la société défenderesse déclare ne pas vouloir s'en servir.

Par jugement du 18 octobre 2017, le tribunal de grande instance de Paris a notamment :

- déclaré fausse la procuration authentique établie le 25 septembre 2006 par Me [E] [D], notaire à [Localité 13] ;

- dit qu'en application de l'article 310 du code de procédure civile, il sera fait mention de ce jugement en marge de 1'acte ainsi reconnu faux dont la minute sera conservée au greffe ;

- dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné la société HSBC France aux dépens ;

- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

Le tribunal a notamment considéré :

- qu'il disposait des éléments suffisants pour se prononcer sur la demande principale d'inscription de faux, sans qu'i1 soit nécessaire de procéder à l'audition de MM. [D], notaire, et [Y], clerc de notaire,

- que si aucun des éléments produits ne permettait, en soi, d'établir avec certitude le caractère erroné de la mention du lieu où l'acte a été dressé, pris en leur ensemble, ils permettaient de retenir qu'il l'avait été à [Localité 14],

- que, dès lors, la mauvaise indication du lieu de passation de l'acte constituait une mention fausse portant atteinte à la foi attachée à l'acte authentique, ayant pour effet de celer les conditions de sa préparation,

- que la preuve était en conséquence suffisamment rapportée du caractère fallacieux des constatations personnelles de l'officier ministériel ayant instrumenté, privant l'acte de toute force probante et de force exécutoire.

La SA HSBC France a relevé appel de cette décision le 24 novembre 2017.

Le 9 février 2018, elle a assigné en intervention forcée Me [H], successeur de Me [D].

Par ordonnance du 03 juillet 2018, le conseiller chargé de la mise en état a notamment rejeté les demandes de M. [L] tendant à voir déclarer irrecevables les conclusions de l'appelante et caduc son appel.

Par conclusions n° 2 notifiées par voie électronique le 16 mai 2018, la SA HSBC France demande à la cour :

- de constater qu'elle entend faire usage dans le cadre de la procédure de saisie immobilière de la procuration authentique, du 25 septembre 2006, annexée à l'acte reçu le 26 septembre 2006 par Me [E] [D], notaire à [Localité 13], contenant mandat donné par M. [V] [L] à Mme [S] [N] ou tout clerc de l'étude, de se constituer caution à titre personnel et solidaire de la société Athos,

- d'ordonner l'audition du notaire qui a dressé l'acte du 25 septembre 2006 ou de M. [I] [Y], clerc de l'étude de Me [E] [D], conformément à l'article 304 du code de procédure civile,

- d'acter qu'elle s'en rapporte à justice sur la demande de M. [V] [L] de voir ordonner à Me [Z] [H] de verser aux débats l'original du document correspondant à sa pièce numéro 5 et toutes annexes s'y rapportant,

- d'infirmer le jugement, en ce qu'il a déclaré fausse en application de l'article 310 du code de procédure civile la procuration authentique avec mention en marge, débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires et l'a condamné aux dépens,

- de juger opposable l'arrêt à intervenir à Me [Z] [H],

- de la débouter ainsi que M. [V] [L] de toutes leurs prétentions,

- de condamner M. [V] [L] à lui payer la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens dont le recouvrement pourra être poursuivi par Me Placier, avocat, conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

Par conclusions n° 1 notifiées par voie électronique le 19 avril 2018, M. [L] demande à la cour :

- à titre principal, de confirmer le jugement, en ce qu'il a déclaré fausse la procuration authentique établie le 25 septembre 2006 par Me [E] [D], notaire à [Localité 13], dit qu'en application de l'article 310 du code de procédure civile il sera fait mention de ce jugement en marge de l'acte ainsi reconnu faux dont la minute sera conservée au greffe et condamné la société HSBC France aux dépens,

- à titre subsidiaire, d'acter qu'il s'associe à la demande d'audition de Me [D] ainsi qu'à celle du clerc en charge de la rédaction de la procuration, M. [Y], d'ordonner à Me [D] et/ou son successeur de verser aux débats l'original du document correspondant à sa pièce numéro 5 et toutes annexes s'y rapportant,

- en tout état de cause, d'infirmer le jugement, en ce qu'il l'a débouté de sa demande de remboursement de ses frais irrépétibles et de condamner la société HSBC France à lui verser la somme de 3 000 euros à ce titre.

Par dernières conclusions notifiées par voie électronique le 09 décembre 2019, Me [H] demande à la cour de :

- dire irrecevable et mal fondés l'appel en intervention forcée fait à son égard ainsi que les demandes de M. [L] formées à son encontre et à l'encontre de Me [D],

- condamner la société HSBC France à lui payer la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- la condamner en tous les dépens qui seront recouvrés par la SCP Kuhn conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Dans un avis du 03 octobre 2019, le ministère public a demandé que la cour :

- ordonne l'audition de Me [D],

- ordonne à Me [Z] [H] que soit versé aux débats l'original de la couverture recto verso de la procuration litigieuse (pièce numérotée 5 versée par M. [L]).

SUR CE,

La SA HSBC soutient que l'intervention forcée de Me [H], successeur de Me [D], est recevable et bien fondée, alors que l'audition de ce dernier est demandée par l'ensemble des parties et peut être estimée nécessaire par le tribunal. La SA HSBC précise, sans s'y opposer de même qu'à la production de pièce, que l'audition de M. [Y] n'apparaît pas d'une utilité évidente, sauf à considérer, comme M. [L], que ce serait le clerc qui lui aurait soumis la procuration pour signature. Elle ajoute que l'arrêt devra, en tout état de cause, lui être déclaré opposable.

La SA HSBC, qui entend se prévaloir et faire usage de la procuration, rappelle que ses mentions selon lesquelles Me [D] l'a reçue en son étude font foi par application de l'article 1319 du code civil et que rien ne permet d'affirmer qu'elle aurait été signée dans un café dénommé "Bistrot des [Adresse 11]" situé [Adresse 6], tout près du lieu de travail de M. [L] situé au 14 de la rue. Elle estime que les éléments retenus par le tribunal, même pris dans leur ensemble, ne peuvent permettre d'aboutir à la conclusion que l'acte aurait été dressé à [Localité 14]. Elle conteste, en outre, toute autre irrégularité de l'acte.

M. [L] indique faire sienne l'argumentation des premiers juges sur la fausseté de la procuration et rappelle, en outre, son argumentation de première instance selon laquelle, contrairement aux mentions qu'elle comporte, la procuration a été signée à [Localité 15], dans un café de la [Adresse 11] proche de son lieu de travail et lui a été soumise par M. [Y], clerc de notaire, qui n'était pas habilité pour ce faire. Il ajoute que l'imperfection de la procuration confirme ce qui précède et que le fait que Mme [N] ait accepté le mandat en signant l'acte de vente ne couvre pas la nullité de la procuration.

M. [L] soutient, à titre subsidiaire, la comparution de Me [D] et/ou de son successeur mais surtout de son clerc, qui lui a soumis la procuration pour signature à [Localité 14] sans être habilité pour ce faire et qui l'a signée. Il sollicite la production par Me [H] de l'original de ses annexes et de la cote notariée de la procuration dont l'annotation manuscrite sur le verso est de la main du clerc, ce que ce dernier et/ou une vérification d'écriture ou une expertise graphologique pourra établir sans conteste. Il ajoute se tenir à la disposition de la cour si son audition est souhaitée.

Me [H] réplique que l'acte litigieux a été reçu par Me [D] dont elle n'est que le successeur, de sorte que la demande d'audition et de production de pièces le concernant est irrecevable à son encontre et souligne que Me [D] n'est pas partie à la présente instance. Elle estime que la demande de production de pièces formée contre elle est également irrecevable, alors qu'elle ne peut être concernée par une procédure dont le contradicteur légitime de la banque et de M. [L] est Me [D]. Elle ajoute que la demande est également irrecevable sur le fondement de l'article 555 du code de procédure civile, aucune évolution du litige ne pouvant justifier de sa recevabilité et de son bien fondée.

Le ministère public estime nécessaire d'entendre Me [D], officier public ministériel ayant instrumenté l'acte, eu égard à la force probante attachée à l'acte authentique de par la loi mais pas M. [Y], qui n'est pas le signataire de l'acte authentique de procuration, objet du présent litige, l'audition du notaire étant propre à éclairer la cour sur les circonstances de la formation et de la signature de l'acte. Il estime également nécessaire, eu égard au mode d'administration de la preuve en matière de faux et à la force probante conférée à l'acte authentique de par la loi, que soit versée au débat l'original de la couverture recto verso de l'acte de procuration dont la copie scannée a participé à forger la conviction des premiers juges et indique que ces formalités sont attendues afin que la preuve puisse être utilement administrée.

* * *

Sur l'intervention forcée de Me [H]

Aux termes de l'article 554 du code de procédure civile : "Peuvent intervenir en cause d'appel dès lors qu'elles y ont intérêt les personnes qui n'ont été ni parties, ni représentées en première instance ou qui y ont figuré sous une autre qualité." Aux termes de l'article 555 du code de procédure civile : "Ces mêmes personnes peuvent être appelées devant la cour, même aux fins de condamnation, quand l'évolution du litige implique leur mise en cause."

En l'espèce, Me [H] a été assignée en intervention forcée en appel. Elle n'était pas partie en première instance. L'évolution du litige au sens du texte susvisé suppose la révélation d'une circonstance de fait ou de droit, née du jugement ou postérieure à celui-ci, modifiant les données juridiques du litige. En outre, l'article 555 sus visé est également applicable aux assignations en déclaration d'arrêt commun.

La SA HSBC, pas plus d'ailleurs que M. [L] qui forme des demandes à son encontre, ne s'expliquent sur l'évolution du litige qu'ils ne caractérisent pas, alors que les mêmes demandes d'audition de MM. [D] et [Y] et de production de pièces ont été formées en première instance. Me [D] avait déjà fait valoir ses droits à la retraite lors de la procédure de première instance, Me [H] ayant, au vu des pièces produites, déjà été contactée par M. [L] en 2015.

Dès lors, l'intervention forcée de Me [H] à la procédure sera déclarée irrecevable.

Sur le faux et les demandes d'audition de MM. [D] et [Y] et de production de l'original de la couverture de la procuration

Aux termes de l'article 1319 du code civil dans sa version applicable au litige : "L'acte authentique fait pleine foi de la convention qu'il renferme entre les parties contractantes et leurs héritiers ou ayants cause. Néanmoins, en cas de plaintes en faux principal, l'exécution de l'acte argué de faux sera suspendue par la mise en accusation ; et, en cas d'inscription de faux faite incidemment, les tribunaux pourront, suivant les circonstances, suspendre provisoirement l'exécution de l'acte." Aux termes de l'article 304 du code de procédure civile : "Le juge peut ordonner l'audition de celui qui a dressé l'acte litigieux".

Un acte authentique fait foi jusqu'à inscription de faux de ce que l'officier public dit avoir personnellement accompli ou constaté. Dès lors, les mentions de l'acte selon lesquelles il a été dressé par Me [D] en son étude, située à [Localité 13] font foi jusqu'à inscription de faux. Il appartient à celui qui s'est inscrit en faux contre un acte authentique d'établir l'inexactitude des énonciations litigieuses qu'il comporte.

Pour établir que la procuration litigieuse n'a pas été dressé par Me [D] en son étude de [Localité 13] mais par le clerc de l'étude, M. [Y], dans un café du [Adresse 11], M. [L] produit :

- une attestation en la forme légale de Mme [N], datée du 17 février 2015,

- ses bulletins de salaire des mois de septembre 2006 et janvier 2007,

- la copie recto-verso de la couverture de l'acte de procuration.

L'attestation de Mme [N], caution solidaire du prêt mais également associée dans la SCI, est ainsi rédigée : "M. [V] [L], en vue de l'acquisition par la SCI Athos d'un terrain situé sur la commune d'[Localité 10] (95).... a été obligé de signer dans l'urgence, le 25 septembre 2006, une procuration dans un café situé [Adresse 11], à côté de son lieu de travail, auquel Maître [Y], clerc de l'Etude Notariale de Maître [D] à [Localité 13], dans l'Eure, l'avait expressément convié. Je certifie par la présente que M. [V] [L] ne s'est jamais rendu à aucun moment dans l'Etude de Maître [D], celle-ci étant bien trop éloignée de son lieu de résidence et de travail (plus de 150 km) ce qui a justifié la signature de la procuration à [Localité 14]. J'ai été seule présente à la signature de l'acte authentique à [Localité 13] le 26 septembre 2006."

Il convient de rappeler qu'une attestation doit, par application de l'article 202 du code de procédure civile, contenir la relation des faits auxquels son auteur a assisté ou qu'il a personnellement constaté.

Or, son contenu, qui n'est absolument pas circonstancié et dont seule la dernière phrase est écrite à la première personne, ne permet nullement de s'en assurer.

Il n'est d'ailleurs à aucun moment prétendu dans les écritures de M. [L] que Mme [N] était présente au moment de la signature de cette procuration. Il est permis d'ailleurs de s'interroger sur les raisons pour lesquelles elle l'aurait été, alors qu'elle se rendait le lendemain à l'étude du notaire à [Localité 13], que sa présence n'était pas nécessaire à l'acte le 25 septembre 2006 et qu'il n'est pas non plus allégué qu'elle travaillait avec M. [L] dans son bureau de la [Adresse 11]. Il ne résulte pas davantage des termes de l'attestation que Mme [N] a été personnellement contactée par M. [Y] afin d'être informée de ce qu'il avait "expressément convié M. [L] dans un café pour la signature de la procuration". Il est également permis de s'interroger sur les raisons pour lesquelles elle l'aurait été à cette fin. Il n'est pas non plus explicité comment Mme [N] peut être le témoin direct de ce que M. [L] "ne s'est jamais rendu à aucun moment dans l'étude de Me [D], trop éloignée de son lieu de résidence et de travail (plus de 150 km)" sauf à prétendre, ce qui n'est pas le cas, être sans cesse à ses côtés.

Ainsi, le seul élément de l'attestation constitutif d'un témoignage direct est la mention rédigée à la première personne, corroborée par l'acte authentique de vente reçu le lendemain et non contesté, de la présence de Mme [N] à l'étude pour la signature de celui-ci.

Il résulte de ce qui précède que cette attestation ne peut, en aucune manière, faire la preuve de la fausseté des mentions querellées par M. [L].

M. [L] verse également aux débats, en copie, le recto-verso de la couverture de l'acte de procuration dont le verso porte la mention manuscrite "[Adresse 3]."

Alors que M. [L] ne soutient pas avoir signé l'acte à son bureau, situé [Adresse 3] et qu'au surplus il n'indique ni ne justifie à quelle adresse il a reçu son exemplaire original de l'acte, cette mention manuscrite, quand bien même serait-elle du notaire ou du clerc, n'établit en rien la fausseté des mentions querellées. La demande de production de la pièce en original n'apparaît ainsi pas nécessaire aux débats et sera rejetée.

Enfin, son bulletin de salaire du mois de septembre 2006 fait mention de droits acquis au titre des congés payés de 14,50 jours et d'un solde non renseigné. Celui du mois de janvier 2007 fait mention de droits acquis au titre des congés payés de 2,5 jours et d'un solde de 23 jours.

Pour autant, le 25 septembre 2006 est un lundi et son emploi du temps du week-end précédent n'est pas précisé ni justifié. En tout état de cause, son domicile parisien et son bureau sont à [Localité 16] et l'étude du notaire est située à [Localité 13] en Eure et Loir à 150 km de [Localité 14] et M. [L] est, au vu de ses bulletins de salaire et des mentions portées dans les actes authentiques des 25 et 26 septembre 2006, cadre et consultant, ce qui lui laisse une certaine flexibilité dans ses horaires de travail. A toutes fins, il sera observé qu'aucune précision n'est apportée sur ses jours de réduction de temps de travail.

Dès lors, l'absence de prise de congés en septembre 2006 ne lui interdisait pas d'être présent à l'étude le 25 septembre 2006.

M. [L] soutient enfin que M. [Y] serait le signataire de la procuration.

Cependant, par comparaison avec les signatures portées sur l'acte authentique reçu le 26 septembre 2006, en page 31, il apparaît que la procuration authentique a été paraphée à chaque page par M. [L] et Me [D] et, en outre, signée par les mêmes en dernière page et en aucun cas par M. [Y].

Il résulte de ce qui précède, que pris ensemble ou séparément, les éléments susvisés n'établissent pas la fausseté des mentions querellées.

Pour le reste, M. [L] fait enfin état d'irrégularités de l'acte venant renforcer la fausseté de celles-ci.

Il relève ainsi que la procuration n'est pas signée par Mme [N] mais celle-ci n'est pas partie à l'acte, M. [L] seul donnant procuration.

Il soulève l'irrégularité de certaines des mentions de l'acte au regard des articles 8 et 14 du décret n°71-941 du 26 novembre 1971, qui disposent que les sommes sont énoncées en lettres et qui prévoit les règles applicables aux "renvois" et aux "blancs."

Cependant, les mentions en cause, à les supposer irrégulières, ne relèvent pas de ce que l'officier public a personnellement accompli ou constaté, s'agissant d'énonciations relatives aux conditions du prêt. Un défaut de forme n'est pas une mention irrégulière déclarée fausse et les articles susvisés entraînent, le cas échéant, la seule nullité des mentions irrégulières, en application de l'article 41 du décret. Il en résulte que les irrégularités alléguées ne peuvent venir au soutien de la fausseté des mentions contestées.

A toutes fins, il sera précisé que le montant du prêt et de l'engagement de caution est porté en toutes lettres, qu'il n'est pas justifié de renvois au sens du texte et que le blanc dont il est fait état porte sur une mention complétée plus haut dans l'acte.

Compte tenu de ce qui précède et alors que l'audition de celui qui a dressé l'acte litigieux est une simple faculté pour le juge, il n'y a pas lieu de faire droit aux demandes d'audition, lesquelles n'apparaissent pas utiles à la résolution du litige.

Le jugement sera dès lors infirmé et M. [L] sera débouté de sa demande tendant à voir déclarer fausse la procuration dressée le 25 septembre 2006 par Me [D], notaire à [Localité 13] et de sa demande subséquente de mention de l'arrêt en marge de l'acte reconnu faux.

Par application de l'article 305 du code de procédure civile, il convient de le condamner au paiement d'une amende civile de 3 000 euros.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

Le jugement déféré sera infirmé en ce qu'il a condamné la SA HSBC aux dépens de première instance et confirmé du chef des frais irrépétibles.

M. [L] sera condamné aux dépens de première instance et d'appel ainsi qu'à verser à la SA HSBC la somme de 3 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

La SA HSBC, qui a assigné en intervention forcée Me [H], sera condamnée à lui verser la somme de 1 500 euros au titre des frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

la cour,

Déclare irrecevable l'intervention forcée de Me [H], notaire, à la présente procédure ;

Infirme le jugement du 18 octobre 2017 du tribunal de grande instance de Paris, sauf en ce qu'il a rejeté les demandes d'audition de MM. [D] et [Y], de production de l'original de la couverture de la procuration et dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Statuant à nouveau,

Déboute M. [V] [L] de sa demande tendant à voir déclarer fausse la procuration authentique établie le 25 septembre 2006 par Me [D], notaire à [Localité 13] et de sa demande subséquente de mention de l'arrêt en marge de l'acte reconnu faux ;

Y ajoutant,

Déboute M. [V] [L] de sa demande formée au titre des frais irrépétibles ;

Le condamne au paiement de la somme de 3 000 euros à titre d'amende civile ;

Le condamne à verser à la SA HSBC la somme de 3 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;

Condamne la SA HSBC à verser à Me [H], notaire, la somme de 1 500 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;

Condamne M. [V] [L] aux dépens de première instance et d'appel qui pourront être recouvrés par Me Placier et la SCP Kuhn, avocats, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIERLE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 2 - chambre 1
Numéro d'arrêt : 17/21674
Date de la décision : 30/06/2020

Références :

Cour d'appel de Paris C1, arrêt n°17/21674 : Statue à nouveau en faisant droit à la demande en tout ou partie


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-06-30;17.21674 ?
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