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04/06/2020 | FRANCE | N°19/13704

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 2, 04 juin 2020, 19/13704


Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 2



ARRÊT DU 04 JUIN 2020



(n° 133 , 8 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/13704 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CAIV5



Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 22 Mai 2019 -Tribunal de Grande Instance de BOBIGNY - RG n° 19/00372





APPELANTE



SCI AMAZZOUGH prise en la personne de son gérant





[Adresse 1]

[Localité 2]



Représentée par Me Laurence COHEN BARRALIS, avocat au barreau de PARIS, toque : P0054

Assistée de Me Mélanie BRAUGE-BOYER, avocat au barreau de PARIS...

Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 2

ARRÊT DU 04 JUIN 2020

(n° 133 , 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/13704 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CAIV5

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 22 Mai 2019 -Tribunal de Grande Instance de BOBIGNY - RG n° 19/00372

APPELANTE

SCI AMAZZOUGH prise en la personne de son gérant

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par Me Laurence COHEN BARRALIS, avocat au barreau de PARIS, toque : P0054

Assistée de Me Mélanie BRAUGE-BOYER, avocat au barreau de PARIS, toque : K43 substituant Me Laurence COHEN BARRALIS, avocat au barreau de PARIS, toque : P0054

INTIMES

M. [V] [R]

[Adresse 2]

[Localité 1]

Représenté par Me François GUE, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, toque : 189

M. [C] [T]

[Adresse 3]

[Localité 2]

Assigné le 19 septembre 2019 à personne présente au domicile

SASU RESTO FOOD AVENUE pris en la personne de son représentant légal, Monsieur [V] [R]

[Adresse 4]

[Localité 1]

Représentée par Me François GUE, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, toque : 189

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 04 Mars 2020, en audience publique, rapport ayant été fait par Mme Hélène GUILLOU, Présidente conformément aux articles 804, 805 et 905 du code de procédure civile, les avocats ne s'y étant pas opposés.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Véronique DELLELIS, Présidente

Hélène GUILLOU, Présidente

Thomas RONDEAU, Conseiller

Greffier, lors des débats : Lauranne VOLPI

ARRÊT :

- DÉFAUT

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, initialement prévue au 2 avril 2020, et prorogée à ce jour, en raison des contraintes liées à l'état d'urgence sanitaire.

- signé par Hélène GUILLOU, Présidente pour Véronique DELLELIS, Présidente, empêchée et par Lauranne VOLPI, Greffière,

Exposé du litige :

Par acte sous seing privé en date du 23 août 2011, la SCI Amazzough a donné à bail à la SARL AMW services des locaux commerciaux situés à [Adresse 4].

Par acte du 30 mars 2018, la SARL AMW services a cédé son fonds de commerce à M. [R] [V]. Celui-ci a donné en location gérance le fonds de commerce à la SAS Resto food avenue, dont il est le président.

Se prévalant de la location-gérance irrégulière, d'une sous-location d'une partie des lieux et de leur transformation sans autorisation en deux boutiques distinctes, la SCI Amazzough a fait signifier le 17 octobre 2018 à M. [R] [V] et le 23 octobre 2018 à la société Resto food avenue, un commandement d'avoir à respecter les clauses du bail et sommation de remettre les lieux dans leur état d'origine visant la clause résolutoire prévue au contrat et le mettant en demeure de respecter les conditions du bail.

Par acte du 20 février 2019, la SCI Amazzough a fait assigner M. [R] [V] devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Bobigny aux fins de voir :

- constater que M. [R] [V] a contrevenu aux clauses du bail prohibant l'exécution de tous travaux de changement de disposition et modification du gros-'uvre, et la sous-location sans autorisation expresse préalable de la SCI,

- constater l'acquisition de la clause résolutoire par l'effet du commandement visant la clause résolutoire et contenant mise en demeure d'avoir à respecter les conditions du bail et sommation d'exécuter en date des 17 et 23 octobre 2018,

En conséquence,

- ordonner l'expulsion de M. [R] [V] ainsi que de tous occupants de son chef, avec si besoin l'assistance de la force publique et d'un serrurier, et ce sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la date de l'ordonnance à intervenir, des lieux dont s'agit sis [Adresse 4],

- ordonner la séquestration des meubles et facultés mobilières pouvant se trouver dans les lieux soit dans l'immeuble, soit dans un garde-meuble au choix du demandeur aux frais, risques et périls du preneur, en application des articles L. 433-1 et suivants, et des articles R. 433-7, R. 433-1 et R. 432-2 du code des procédures civiles d'exécution,

- condamner in solidum M. [R] [V], la société Resto food avenue et M. [T] [C], à compter du 24 novembre 2018, à titre provisionnel, une indemnité d'occupation mensuelle égale au loyer contractuel qu'ils auraient payé si le bail n'avait pas été résilié, laquelle sera perçue dans les mêmes conditions et aux mêmes dates qui étaient prévues au contrat et en subira les mêmes modifications contractuelles et ce jusqu'au libération effective des lieux ;

- dire la décision à intervenir opposable aux sous-locataires de M. [R] [V] à savoir la société Resto food avenue et M. [T] [C] ;

- rappeler que l'exécution provisoire de la présente décision est de droit en application de l'article 514 alinéa 2 du code de procédure civile ;

- condamner in solidum M. [R] [V], la société Resto food avenue et M. [T] [C] à lui régler la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner in solidum M. [R] [V], la société Resto food avenue et M. [T] [C] aux entiers dépens lesquels comprendront notamment le coût du commandement en date des 17 et 23 octobre 2018 en application de l'article 696 du code de procédure civile.

Par ordonnance de référé rendue le 22 mai 2019, le président du tribunal de grande instance a :

- débouté la SCI Amazzough de toutes ses demandes,

- condamné la SCI Amazzough à payer à M. [R] [V] la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- rejeté toute autre demande,

- condamné la SCI Amazzough aux dépens.

Le premier juge a fondé cette décision notamment sur les motifs suivants :

- selon l'acte de cession, le fonds de commerce cédé par la société AMW services à M. [R] [V] est un fonds de commerce de restauration rapide, cybercafé et salon de coiffure,

- il n'est pas justifié que M. [R] [V] ait réalisé lui-même les travaux litigieux et divisé le local en deux boutiques distinctes, celles-ci existant antérieurement à la cession,

- il ressort de l'attestation sur l'honneur de M. [T] [C] qu'il sous-louait le local antérieurement à la cession du fonds de commerce à M. [R],

- ce dernier justifie de ses tentatives de demander l'autorisation de la SCI Amazzough de sous-louer les locaux, laquelle n'a pas abouti faute d'avoir l'adresse du bailleur,

- la preuve du non-respect des dispositions du bail n'est donc pas rapportée, de sorte que le trouble manifestement illicite n'est pas caractérisé,

- la demande de dommages-intérêts pour trouble de jouissance relève de la compétence du juge du fond, et il n'y a donc pas lieu à référé.

Par déclaration en date du 5 juillet 2019, la SCI Amazzough a fait appel de cette ordonnance.

Au terme de ses conclusions communiquées par voie électronique le 7 octobre 2019, la SCI Amazzough demande à la cour, sur le fondement de l'article 809 du code de procédure civile, de :

- infirmer l'ordonnance du 22 mai 2019 en toutes ses dispositions,

Statuant de nouveau :

- constater que le locataire a réalisé des travaux dans le local commercial sans autorisation de la bailleresse,

- constater que le locataire a sous-loué une partie des locaux sans autorisation de la bailleresse,

- constater l'acquisition de la clause résolutoire à effet du 17 novembre 2018,

- ordonner l'expulsion de M. [R] [V] et celle de tous occupants de son chef notamment la société Resto food avenue et M. [T] [C], dans la huitaine de la décision à intervenir, des lieux situés [Adresse 4], avec l'assistance si besoin est de la force publique et la séquestration de ses biens mobiliers sur place ou en garde-meubles, à ses frais, risques et périls,

- dire que la somme de 3 032,88 euros correspondant au dépôt de garantie restera acquise à la SCI Amazzough et ce, conformément aux stipulations contractuelles,

- fixer l'indemnité d'occupation à la somme de 1 100 euros HT par mois et condamner in solidum M. [R] [V], la société Resto food avenue et M. [T] [C] à la régler jusqu'à libération effective des lieux,

- débouter M. [R] [V], la société Resto food avenue et M. [T] [C] de l'ensemble de leurs demandes,

- condamner M. [R] [V], la société Resto food avenue et M. [T] [C] à payer à la SCI Amazzough la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner M. [R] [V], la société Resto food avenue et M. [T] [C] aux entiers dépens y compris ceux du commandement de payer en date du 17 octobre 2018.

La SCI Amazzough a fait valoir en substance les éléments suivants :

Sur les violations du bail :

- le contrat de bail du 23 août 2011 stipule qu'aucune sous-location, totale ou partielle, ne peut avoir lieu sans le consentement exprès du bailleur, et que toute sous-location autorisée devra avoir lieu par acte notarié ou sous seing privé auquel le bailleur doit être appelé,

- aucun élément n'établit que la SCI Amazzough ait eu connaissance ou ait donné son accord exprès à la séparation du local en deux boutiques et à la sous-location,

- la renonciation du bailleur à se prévaloir d'une clause du bail ne se présume pas et implique des actes positifs manifestant de manière non équivoque l'intention de renoncer,

- l'acte de cession du 30 mars 2018 précise qu'aucun droit d'occupation n'a été consenti ni aucune infraction aux clauses et conditions du bail,

- l'ordonnance ne pouvait donc écarter la demande du bailleur en relevant que la sous-location était antérieure à la cession du fonds de commerce sauf à considérer que cet acte témoigne de la volonté délibérée des locataires successifs de dissimuler à la SCI Amazzough les travaux non autorisés et la sous-location,

- en cas de cession du bail, le dernier locataire devient débiteur envers le bailleur des obligations résultant du contrat, et est donc notamment tenu de réparer les dégradations survenues à un moment quelconque au cours du contrat,

- il ressort de l'attestation de M. [T] [C] que celui-ci a versé un droit d'entrée à la société AMW services, et à nouveau à M. [R] [V], ce qui montre qu'un nouveau contrat de sous-location a été conclu en toute connaissance de cause par ce dernier qui est donc bien débiteur envers la SCI Amazzough de l'obligation de remettre les locaux dans leur état d'origine et de mettre fin à la sous-location irrégulière,

- la violation des clauses et conditions du bail a eu pour conséquence que la SCI Amazzough n'a pas pu se prévaloir de sa faculté d'exiger une augmentation du loyer principal, comme le lui permet l'article L 145-31 du code de commerce, le loyer de la sous-location, d'un montant de 12.131,52 euros par an pour la moitié du local, étant supérieur à celui du bail principal, d'un montant de 13 200 euros par an,

- ces infractions constituent donc un trouble manifestement illicite,

- plus d'un an après la délivrance régulière du commandement visant la clause résolutoire, M. [R] [V] n'a pas mis fin aux infractions, ce qu'il ne conteste pas en première instance,

- le bail est donc résilié de plein droit conformément à la clause résolutoire qui y est insérée,

- il convient donc d'ordonner l'expulsion de M. [R] [V], de la société Resto food avenue ainsi que de tous occupants de leur chef, pour mettre fin au trouble manifestement illicite, et de fixer l'indemnité d'occupation due jusqu'à la libération effective des lieux à une somme mensuelle de 1 100 euros, égale au montant du loyer mensuel de la sous-location,

- il convient également, conformément aux stipulations du contrat de bail, dont l'application ne se heurte à aucune contestation sérieuse, de dire que la somme versée à la SCI Amazzough au titre du dépôt de garantie lui demeure acquise à titre de provision à valoir sur la réparation du dommage subi par elle ;

Par ordonnance en date du 2 décembre 2019, non frappée de recours, les conclusions d'intimés remises au greffe par M. [V] [R] et la société Resto food avenue par voie électronique le 19 novembre 2019 ont été déclarées irrecevables

La SCI Amazzough a signifié ses conclusions, la déclaration d'appel et le bulletin fixant la date de clôture à M. [T] [C] par acte d'huissier remis par dépôt à l'étude en date du 10 octobre 2019.

M. [T] [C] n'a pas constitué avocat.

SUR CE LA COUR

Sur la constatation de la résiliation du bail:

L'article 809 du code de procédure civile, devenu 835 du même code dispose que le président peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

Dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, il peut accorder une provision au créancier, ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.

Le trouble manifestement illicite désigne toute perturbation résultant d'un fait matériel ou juridique qui, directement ou indirectement, constitue une violation évidente de la règle de droit.

Pour que la mesure sollicitée soit prononcée, il doit donc nécessairement être constaté, à la date à laquelle la cour statue et avec l'évidence qui s'impose à la juridiction des référés, la méconnaissance d'un droit.

En vertu de l'article 1103 du code civil, qui reprend les dispositions de l'article 1134 en vigueur le 23 août 2011 lors de la conclusion du bail entre la SCI Amazzough et la société AMW services, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.

Le contrat de renouvellement de bail signé entre la SCI Amazzough et la société AMW services comporte une clause résolutoire aux termes de laquelle 'il est convenu qu'à défaut par le preneur d'exécuter une seule des charges et conditions du bail qui sont toutes de rigueur ou de payer exactement un seul terme de loyer à son échéance, le présent bail sera, si bon le semble au bailleur, résilié de plein droit et un mois après une simple mise en demeure d'exécuter ou 8 jours après un simple commandement de payer signifié à personne ou à domicile, contenant déclaration par le bailleur de son intention d'user de la présente clause et demeurée sans effet pendant ce délai.

Si le preneur refusait d'évacuer les lieux, il suffirait pour l'y contraindre sans délai d'une simple ordonnance de référé rendue par le président du tribunal de grande instance de Paris nonobstant opposition ou appel.

Dans ce cas, et quelque soit la cause de la résiliation, le dépôt de garantie mentionné ci avant demeurera acquis au bailleur à titre de premiers dommages-intérêts sans préjudice de tous les autres.'

Ce contrat comporte également les mentions suivantes:

- le bailleur a fait bail et donné à loyer à la société Hasya familiale pour une durée de 9 années consécutives commençant à courir le 1er mai 2002 moyennant un loyer annuel de 4 200 euros; (...) (Désignation des lieux loués, [Adresse 4])

- par acte SSP du 16 février 2006 la SARL Hasya familale a cédé son bail à la société SB,

- par acte SSP du 21 avril 2010 la société SB a cédé son bail à la société AMW services (...)

Destination des lieux loués 'le local loué aura comme destination 'téléboutique et cyber café, étendue lors de la cession du 20 février 2006 aux activités de boucherie, alimentation générale, restaurant, salon de coiffure mixte'

(...) Le présent bail est fait aux charges et conditions ordinaires et de droit et notamment à celles-ci après que le preneur s'oblige à exécuter exactement (...) À peine de tous dépens et dommages-intérêts et même de résiliation des présentes si bon semble au bailleur (...):

6) de ne pouvoir faire dans les lieux loués aucun changement de disposition ou modification au gros oeuvre, percement de murs ou autres sans les autorisations administratives éventuellement nécessaires et sans le consentement exprès du bailleur. (...)

14) de ne pouvoir sous louer, totalement ou partiellement ces locaux sans le consentement exprès et par écrit du bailleur,

15) toute sous-location autorisée devra avoir lieu par acte authentique ou sous seing privé si le bailleur y consent, acte auquel le bailleur sera appelé. Le preneur devra s'obliger solidairement avec les sous locataires au paiement des loyers et à l'exécution des conditions du bail. Le preneur ne pourra en outre céder son droit au présent bail si ce n'est à son successeur dans son commerce mais en totalité seulement.'

L'acte de cession de vente du fonds de commerce intervenu entre la société AMW services et M. [V] [R] mentionne que le vendeur est propriétaire d'un fonds de commerce de restauration rapide à l'exclusion de tout commerce de boissons alcoolisées, cybercafé, salon de coiffure homme femme exploité [Adresse 4], sous l'enseigne Food avenue. (...) Le loyer annuel a été fixé à l'origine à la somme de 12 131,52 euros (...) Le local loué aura comme destination téléboutique et cybercafé étendue lors de la cession du 20 février 2006 aux activités de boucherie, alimentation générale, restaurant, salon de coiffure mixte.

Cet acte rappelle expressément les conditions du bail précitées.

Or, le 12 juillet 2018, la SCI Amazzough a fait procéder à un procès verbal de constat dont il ressort que les locaux loués sont désormais divisés en deux locaux commerciaux distincts avec d'un côté un salon de coiffure mixte et de l'autre une sandwicherie.

A ce constat est jointe une attestation de M. [T] [C], qui atteste sur l'honneur 'être en sous-location depuis le 1er avril 2018 jusqu'à ce jour pour un loyer de 1 100 euros avec un droit d'entrée de 12 000 euros.'

Il y expose également les faits suivants: 'j'ai récupéré le salon le 4 novembre 2017 au 30 mars 2018 pour un loyer de 1 000 euros avec un droit d'entrée de 6 000 euros avec l'ancien gérant. Tous les loyers sont payés ainsi que mes droits d'entrée dans le local sont payés en espèces (car j'attends toujours mon bail de sous-location pour régulariser ma situation professionnelle). Auparavant il y avait un sous locataire au salon de coiffure, M. [O] [B] rentré du mois de septembre 2016 à septembre 2017. Et juste avant septembre 2017, il y avait Flora cosmétic.'

Cette attestation permet de constater d'une part que la destination du bail n'a pas été toujours respectée, la vente de cosmétique ne faisant pas partie des activités autorisées par le bail, et d'autre part que le cessionnaire du fonds a donné en sous-location non déclarée une partie du fonds moyennant un prix qui excède le prix du bail portant sur la totalité des lieux loués.

Ainsi que l'a relevé le premier juge, il ne ressort pas des éléments versés aux débats, avec l'évidence requise en référé, que le locataire actuel soit l'auteur de la séparation des locaux en plusieurs boutiques, et que celle-ci, bien que non autorisée expressément, n'ait pas en réalité été tolérée par le bailleur compte tenu de la destination énoncée dans le bail, en revanche, il est certain que le bailleur n'a autorisé aucune sous-location et que celle-ci est consentie moyennant un loyer supérieur au loyer au loyer payé par le locataire principal.

Le fait que cette sous-location ait été conclue avant la cession du fonds à M. [R] ne retire rien à sa réalité, et n'est susceptible que d'entraîner un appel en garantie. M. [R] était en outre parfaitement informé des conditions du bail à cet égard, celles-ci étant rappelées dans l'acte.

A défaut de preuve de l'accord express de la SCI Amazzough pour cette sous-location, démenti par cette dernière et que n'atteste aucune des pièces versées aux débats, il y a lieu de constater que la preuve des manquements aux clauses du bail liant les parties est suffisamment établie et qu'ils constituent un trouble manifestement illicite qu'il incombe au juge des référés de faire cesser.

Dès lors, le bailleur est bien fondé à se prévaloir de la clause résolutoire insérée au bail qui a pris effet un mois après sa délivrance soit le 24 novembre 2018, les manquements n'ayant toujours pas cessé.

L'ordonnance sera donc infirmée en ce qu'elle a débouté la SCI Amazzough de sa demande en constatation de l'acquisition de la clause résolutoire et l'expulsion des occupants sera ordonnée.

L'indemnité d'occupation sera fixée à titre provisionnel au montant du loyer payé par le sous-locataire soit la somme de 1 100 euros par mois, le bailleur étant bien fondé à se prévaloir des dispositions de l'article L 145-31 du code de commerce aux termes duquel 'Lorsque le loyer de la sous-location est supérieur au prix de la location principale, le propriétaire a la faculté d'exiger une augmentation correspondante du loyer de la location principale, augmentation qui, à défaut d'accord entre les parties, est déterminée selon une procédure fixée par décret en Conseil d'Etat, en application des dispositions de l'article L. 145-56".

Sur les autres demandes:

Selon les articles 809 et 835 précités le président du tribunal de grande instance statuant en référé peut accorder une provision au créancier lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable.

L'octroi d'une provision est donc subordonné à la condition de l'existence d'une obligation non sérieusement contestable tant dans son principe que dans son montant.

En l'espèce il a été rappelé que le bail prévoit expressément que ' le dépôt de garantie mentionné ci-avant demeurera acquis au bailleur à titre de premiers dommages-intérêts sans préjudice de tous les autres'. Le locataire a versé la somme de 3 032,88 euros à ce titre.

La demande présentée en ce sens par la société Amazzough ne se heurte donc à aucune contestation sérieuse.

Les dépens et frais irrépétibles seront accordés comme il est dit au présent dispositif.

PAR CES MOTIFS

Infirme l'ordonnance du 22 mai 2019 en toutes ses dispositions,

et, statuant à nouveau,

Constate l'acquisition de la clause résolutoire insérée au bail liant la SCI Amazzough à M. [R] portant sur des locaux sis [Adresse 4], à la date du 24 novembre 2018,

Ordonne, à défaut de restitution volontaire des lieux dans les deux mois de la signification du commandement d'avoir à libérer les lieux, l'expulsion de M. [V] [R] et de tous occupants de son chef et notamment la société Resto food avenue et M. [C] [T], dans le délai d'un mois à compter de la signification de la décision, avec l'assistance de la force publique et d'un serrurier si besoin est, en application des dispositions des articles L. 411-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution,

Dit, en cas de besoin, que les meubles se trouvant sur les lieux seront remis aux frais de la personne expulsée dans un lieu désigné par elle et qu'à défaut, ils seront laissés sur place ou entreposés en un autre lieu approprié et décrits avec précision par l'huissier chargé de l'exécution, avec sommation à la personne expulsée d'avoir à les retirer dans un délai de quatre semaines à l'expiration duquel il sera procédé à leur mise en vente aux enchères publiques, sur autorisation du juge de l'exécution, ce conformément à ce que prévoient les dispositions du code des procédures civiles d'exécution sur ce point,

Condamne in solidum M. [R] et la société Food resto avenue et M. [C] [T] à payer à la SCI Amazzough à titre provisionnel une indemnité d'occupation mensuelle de 1 100 euros à compter de la résiliation du bail jusqu'à la libération complète des lieux,

Dit que la somme de 3 032,88 euros versée à titre de dépôt de garantie restera acquise au bailleur à titre de dommages-intérêts provisionnels,

Condamne in solidum M. [R] et la société Food resto avenue et M. [C] [T] à payer à la SCI Amazzough la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne in solidum M. [R] et la société Food resto avenue et M. [C] [T] aux dépens de première instance et d'appel lesquels comprendront notamment le coût du commandement de payer du 17 octobre 2018.

La Greffière, Pour la Présidente empêchée,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 2
Numéro d'arrêt : 19/13704
Date de la décision : 04/06/2020

Références :

Cour d'appel de Paris A2, arrêt n°19/13704 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-06-04;19.13704 ?
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